SÉANCE DU 17 FLORÉAL AK H (6 MAI 1794) - Nos 32 A 34 99 32 Les cochers des ci-devant voitures de la cour, au nombre de 1,200, qui ont obtenu un jugement qui oblige les ci-devant fermiers de ces voitures à leur restituer les sommes qu’ils leur rete-noient, exposent qu’ils sont dans la plus extrême misère, et demandent que la Convention s’occupe incessamment de décréter le mode de restitution (1) . Sur la proposition d’un membre [LALOI] la Convention nationale décrète que, dans la séance du 19 floréal, Havin aura la parole pour faire un rapport, au nom du Comité de l’examen des comptes, sur la pétition des cochers de la ci-devant cour (2). 33 Un secrétaire fait lecture du procès-verbal de la séance du 14 floréal. La rédaction est approuvée (3). 34 Un membre [DUBARRAN] fait un rapport au nom du Comité de sûreté générale, sur la procédure intentée contre Lherbon, sa femme et Durand (4). DUBARRAN : Citoyens, dans le mois de pluviôse, votre Comité de sûreté générale eut à statuer sur l’arrestation du citoyen Lherbon de Soissons : les motifs qui l’avoient déterminée furent mûrement examinés; la discussion en fut éclairée par des renseignements émanés d’une députation de la Société populaire; on reconnut la frivolité de la dénonciation; et en conséquence, la mise en liberté pure et simple de Lherbon fut prononcée. Mais il lui étoit réservé de ne jouir qu’un instant de son triomphe : il s’en retournoit à Soissons, lorsqu’il se vit arrêté à Villers-Cotte-rets; là, on lui dit qu’il étoit dénoncé comme ayant commis des malversions lorsqu’il exerçoit les fonctions de juge-de-paix. Eprouvant des besoins, il chargea sa femme de lui apporter quelque peu d’argent; il la prévint qu’elle en trouveroit sous le scellé mis sur ses effets lors de sa première arrestation : elle n’avoit pour cela qu’à requérir du Comité de surveillance la levée de ce scellé; car, au moyen de la rélaxation accordée à Lherbon, cette levée de scellé étoit de droit. Il faut ajouter que son apposition avoit été précédée de l’examen des papiers de ce citoyen, et que sa correspondance n’avoit offert rien de suspect. (1) J. Fr., n° 590. (2) P.V., XXXVII, 33. J. Sablier, n° 1302. (3) P.V., XXXVII, 33. (4) P.V., XXXVII, 33. Dans cet état de choses, la femme de Lherbon ne se crut point obligée de recourir au Comité de surveillance : envisageant le scellé comme anéanti par la mise en liberté de son mari, elle l’ota elle -même et y puisa l’argent dont elle avoit besoin. Le croiriez-vous citoyens ? l’on saisit avec avidité une circonstance qui paroît propre à frapper une victime, sans considérer que la formalité omise par Lherbon étoit devenue sans objet, on lui intente avec éclat une accusation criminelle. Mais ce n’étoit pas encore assez, il falloit y englober sa femme et le gardien du scellé, on leur fait un crime de ce qui n’a été que l’effet de l’irréflexion et de l’urgence même du besoin; il semble que cette procédure n’ait été créée que pour renforcer celle dirigée contre Lherbon au sujet des malversions qu’on lui impute : vous n’aurez pas oublié d’ailleurs que celle-ci n’a commencé de voir le jour qu’après l’élargissement obtenu par Lherbon, comme si on l’eût voulu punir de n’avoir pas eu tort vis-à-�is de ses dénonciateurs. Nous avons à vous dire, sur ce citoyen, que, depuis 4 mois, il est en butte à la persécution : traîné d’une maison d’arrêt dans une autre, attaqué dans tous ses moyens d’existence, livré à tous les hasards de 2 procédures dont le but pourroit être que s’il échappe à l’une il soit écrasé par l’autre : telle est la situation pénible à laquelle il est réduit. Nous ne pouvons nous le dissimuler : d’après les instructions que nous avons reçues, c’est ici une victime que l’aristocratie veut immoler, vous ne le soufrirez pas, citoyens; si le peuple vous a donné les moyens de répression contre les malveillans, il vous a aussi chargé du soin de protéger la cause du patriote. Ce qui s’est passé jusqu’à présent envers Lherbon nous commande de vous proposer des mesures provisoires, susceptibles d’éclairer votre justice et de rassurer les patriotes. Le 22 de ce mois, Lherbon, sa femme et Durand vont être appelés au tribunal criminel de l’Aisne. La marche suivie à leur égard est telle qu’il devient intant de connoître si ses cris qui se font entendre, sont ceux de l’innocence opprimée. Il n’y a plus à balancer : les préventions ont exercé une influence trop décidée. L’omission d’une formalité, indifférente dans le cas présent, a été offerte comme un délit matériel, tandis que cependant il ne frapperoit que sur des objets, reconnus eux-mêmes, par le Comité de sûreté générale, ne pas donner lieu à inculpation. Mais telle que soit l’injustice de ces empreintes défavorables qu’on a données à la conduite de 3 citoyens, nous ne demandons pas dans le moment l’anéantissement des procédures. Il est essentiel qu’un examen préliminaire nous mette à portée de les apprécier et de vous en rendre compte. Si les prévenus viennent à vous paroître coupables, vous les enverrez devant leurs juges, la loi prononcera; mais s’il n’y a eu dans tout ceci qu’un système oppressif, vous aurez à vous applaudir d’y avoir mis un terme. En conséquence, je vous propose le projet de décret suivant (1). (Adopté comme suit) : « La Convention nationale, après avoir entendu son Comité de sûreté générale, (1) Débats, n° 594, p. 207; Mon., XX, 402. SÉANCE DU 17 FLORÉAL AK H (6 MAI 1794) - Nos 32 A 34 99 32 Les cochers des ci-devant voitures de la cour, au nombre de 1,200, qui ont obtenu un jugement qui oblige les ci-devant fermiers de ces voitures à leur restituer les sommes qu’ils leur rete-noient, exposent qu’ils sont dans la plus extrême misère, et demandent que la Convention s’occupe incessamment de décréter le mode de restitution (1) . Sur la proposition d’un membre [LALOI] la Convention nationale décrète que, dans la séance du 19 floréal, Havin aura la parole pour faire un rapport, au nom du Comité de l’examen des comptes, sur la pétition des cochers de la ci-devant cour (2). 33 Un secrétaire fait lecture du procès-verbal de la séance du 14 floréal. La rédaction est approuvée (3). 34 Un membre [DUBARRAN] fait un rapport au nom du Comité de sûreté générale, sur la procédure intentée contre Lherbon, sa femme et Durand (4). DUBARRAN : Citoyens, dans le mois de pluviôse, votre Comité de sûreté générale eut à statuer sur l’arrestation du citoyen Lherbon de Soissons : les motifs qui l’avoient déterminée furent mûrement examinés; la discussion en fut éclairée par des renseignements émanés d’une députation de la Société populaire; on reconnut la frivolité de la dénonciation; et en conséquence, la mise en liberté pure et simple de Lherbon fut prononcée. Mais il lui étoit réservé de ne jouir qu’un instant de son triomphe : il s’en retournoit à Soissons, lorsqu’il se vit arrêté à Villers-Cotte-rets; là, on lui dit qu’il étoit dénoncé comme ayant commis des malversions lorsqu’il exerçoit les fonctions de juge-de-paix. Eprouvant des besoins, il chargea sa femme de lui apporter quelque peu d’argent; il la prévint qu’elle en trouveroit sous le scellé mis sur ses effets lors de sa première arrestation : elle n’avoit pour cela qu’à requérir du Comité de surveillance la levée de ce scellé; car, au moyen de la rélaxation accordée à Lherbon, cette levée de scellé étoit de droit. Il faut ajouter que son apposition avoit été précédée de l’examen des papiers de ce citoyen, et que sa correspondance n’avoit offert rien de suspect. (1) J. Fr., n° 590. (2) P.V., XXXVII, 33. J. Sablier, n° 1302. (3) P.V., XXXVII, 33. (4) P.V., XXXVII, 33. Dans cet état de choses, la femme de Lherbon ne se crut point obligée de recourir au Comité de surveillance : envisageant le scellé comme anéanti par la mise en liberté de son mari, elle l’ota elle -même et y puisa l’argent dont elle avoit besoin. Le croiriez-vous citoyens ? l’on saisit avec avidité une circonstance qui paroît propre à frapper une victime, sans considérer que la formalité omise par Lherbon étoit devenue sans objet, on lui intente avec éclat une accusation criminelle. Mais ce n’étoit pas encore assez, il falloit y englober sa femme et le gardien du scellé, on leur fait un crime de ce qui n’a été que l’effet de l’irréflexion et de l’urgence même du besoin; il semble que cette procédure n’ait été créée que pour renforcer celle dirigée contre Lherbon au sujet des malversions qu’on lui impute : vous n’aurez pas oublié d’ailleurs que celle-ci n’a commencé de voir le jour qu’après l’élargissement obtenu par Lherbon, comme si on l’eût voulu punir de n’avoir pas eu tort vis-à-�is de ses dénonciateurs. Nous avons à vous dire, sur ce citoyen, que, depuis 4 mois, il est en butte à la persécution : traîné d’une maison d’arrêt dans une autre, attaqué dans tous ses moyens d’existence, livré à tous les hasards de 2 procédures dont le but pourroit être que s’il échappe à l’une il soit écrasé par l’autre : telle est la situation pénible à laquelle il est réduit. Nous ne pouvons nous le dissimuler : d’après les instructions que nous avons reçues, c’est ici une victime que l’aristocratie veut immoler, vous ne le soufrirez pas, citoyens; si le peuple vous a donné les moyens de répression contre les malveillans, il vous a aussi chargé du soin de protéger la cause du patriote. Ce qui s’est passé jusqu’à présent envers Lherbon nous commande de vous proposer des mesures provisoires, susceptibles d’éclairer votre justice et de rassurer les patriotes. Le 22 de ce mois, Lherbon, sa femme et Durand vont être appelés au tribunal criminel de l’Aisne. La marche suivie à leur égard est telle qu’il devient intant de connoître si ses cris qui se font entendre, sont ceux de l’innocence opprimée. Il n’y a plus à balancer : les préventions ont exercé une influence trop décidée. L’omission d’une formalité, indifférente dans le cas présent, a été offerte comme un délit matériel, tandis que cependant il ne frapperoit que sur des objets, reconnus eux-mêmes, par le Comité de sûreté générale, ne pas donner lieu à inculpation. Mais telle que soit l’injustice de ces empreintes défavorables qu’on a données à la conduite de 3 citoyens, nous ne demandons pas dans le moment l’anéantissement des procédures. Il est essentiel qu’un examen préliminaire nous mette à portée de les apprécier et de vous en rendre compte. Si les prévenus viennent à vous paroître coupables, vous les enverrez devant leurs juges, la loi prononcera; mais s’il n’y a eu dans tout ceci qu’un système oppressif, vous aurez à vous applaudir d’y avoir mis un terme. En conséquence, je vous propose le projet de décret suivant (1). (Adopté comme suit) : « La Convention nationale, après avoir entendu son Comité de sûreté générale, (1) Débats, n° 594, p. 207; Mon., XX, 402.