580 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 128 juin 1791.] « Nos villes étaient hors d’état de défense, et le départ du roi menait le comble aux inquiétudes publiques; il fallait les faire cesser et armer nos forts : les chefs de l’artillerie et du génie, consultés, ne donnaient pour motif du retard des travaux que le défaut de fonds. « Que ne le disiez-vous plus tôt? s’écrie unanimement toute la garnison réunie. Nous avons un louis en masse : nous l’avancerons; notre prêt, nous le donnerons ; nous mangerons du pain (Vifs applaudissements)-, disposez de nos bras pour toute sorte de travaux. Au titre glorieux de défemeurs de la patrie, nous voulons encore joindre celui d’ouvriers de la nation. « Sans donner le temps aux citoyens de leur témoigner leur juste reconnaissance, ni de répondre à leur offre généreuse, ils la mettent à exécution. Déjà le régiment d’Alsace a remis 6,000 francs à la municipalité. La juste méfiance qu’inspiraient aux soldats du régiment de Foix la conduite et les projets inciviques de leur colonel, fondés d’ailleurs sur un bruit public qui leur annonçait qu’il devait pendant la nuit emporter la caisse pour suivre le roi, les a déterminés à déposer le Trésor entre les mains de la municipalité, après en avoir extrait pareille somme en présence de leurs chefs, et leurs drapeaux chez M. de Ghampelou, premier capitaine, à qui ses vertus et son patriotisme avaient depuis longtemps mérité l’estime et la confiance de tout le régiment; et c’est à ces braves soldats que nos concitoyens sont redevables de leur sûreté, et peut-être la France entière de son salut. Législateurs, sont-ce là des traits d’insubordination? « D’après les motifs sur lesquels sont appuyés les mémoires que nous avons l’honneur de vous présenter, nous nous reposons entièrement sur votre tendre sollicitude, pour tout ce qui peut assurer le bien public, du soin et des moyens de mettre notre Irontière dans un entier état de défense. « Il ne nous reste plus qu’à vous demander, de la part de tous nos concitoyens, de vouloir nous admettre à prêter entre vos mains, et en leur nom, le serment de notre inviolable fidélité. ( Vifs applaudissements.) M. le Président répond: « Messieurs, « Vos foyers pouvaient être exposés, si l’événement par lequel on voulait attaquer notre Constitution n’avait pas eu une fin si heureuse : vous avez oublié les dangers que vous couriez, ou plutôt vous avez bien compté que dans vos murs, les soldats, à l’école de vos vertus civiques, sauraient rester fidèles à la nation, sacrifier leur vie et donner le temps à des millions de citoyens armés de voler à votre secours. « L’annonce que vous nous faites excite notre admiration et ne nous étonne point; depuis que les soldats n’ont plus à obéir à des ordres du despotisme, n’ont plus à soutenir des privilèges ; depuis qu’ils défendent une Constitution libre, leurs vertus se sont multipliées; l’amour de la patrie leur a donné plus d’énergie, et dans leurs sentiments généreux, ils ont tout ramené à l’amour de la gloire. « Portez à ces braves soldats les témoignages d’estime qu’ils nous inspirent et partagez avec eux les marques flatteuses de l’approbation des représentants du peuple. L’Assemblée nationale vous invite à assister à sa séance. » (Applaudissements.) M. le Président lit la formule du serment. Les membres de la députation répondent : Nous le jurons pour nous et pour tous nos concitoyens ! (. Applaudissements .) (L’Assemblée ordonne l’impression du discours de la députation et de la réponse du président et leur insertion dans le procès-verbal.) M. marchand, orateur de la députation, remet sur le bureau : 1° Une lettre de la société des amis de la Constitution de Givet, avec un état des approvisionnements et munitions nécessaires à la défense de cette ville; 2° Une lettre des sous-officiers et soldais du 83e régiment d'infanterie , qui exposent à l’Assemblée nationale les motifs qui les ont engagés à déposer entre les mains de la municipalité la caisse du régiment, et les drapeaux du premier bataillon entre les mains du premier capitaine. Ils se plaignent de la conduite de M. La Roche-Aymon, leur colonel, qui s’est constamment opposé à l’exécution des offres qu’ils ont faites d’employer leurs bras, et la masse destinée à leur entretien, aux travaux nécessaires pour mettre les places des deux Givets et de Charlemont en sûreté. (L’Assemblée ordonne que ces pièces seront renvoyées au comité militaire, pour en rendre compte.) M. de Broglie. Pendant mon séjour à Strasbourg, j’ai vu une pétition que le régiment d’Alsace avait présenté à la municipalité de cette ville pour lui exprimer son vœu de porter l’uni-forme français. Je crois qu’il est juste de récompenser la conduite patriotique de ce régiment en prenant sa demande en considération, et je ne vois pas de circonstance plus favorable que celle-ci pour accueillir la pétition digne de ce régiment si digne du nom qu’il veut porter. J’en demande le renvoi au comité militaire pour être rapporté incessamment. (Ce renvoi est décrété.) M. Périsse-Duluc fait lecture d’une adresse des citoyens de la section de Sainte-Foy-lès-Lyon , ainsi conçue : « Messieurs, « Les citoyens habitants de la paroisse de Sainte-Foy-lès-Lyon ne se sont pas contentés d’admirer les travaux de leurs augustes représentants à l’Assemblée nationale; ils ont pensé que, pour témoigner à ces chers régénérateurs leur sincère reconnaissance des bienfaits qu’ils leur ont procurés, ils devaient se rendre dignes du titre précieux (d’hommes libres) qu’ils ont acquis par leur respectueuse obéissance aux lois, par l’acquhtement de leurs impositions. « Oubliant combien leur communauté avait été ci-devant injustement opprimée par des impôts insupportables et si mal proportionnés à l’étendue de leur territoire, qui consiste en 6,100 bi-cherées de terrain, pour ne s’occuper que du secours qu’ils devaient acquitter et offrir à leur patrie, iis attendaient avec impatience que le nouveau mode de perception foncière fût déterminé pour satisfaire à leur nouvelle contribu-