[États gén. 1789. Cahiers. des habitants et des charges du bénéfice, ladite augmentation en nature et non pas en argent, autant que faire se pourra. L’assemblée sollicite les mêmes soins de Sa Majesté sur le sort de MM. les vicaires, et une augmentation proportionnelle de leur sor.t à celui des curés, la suppliant de fixer l’honoraire des vicaires de manière que les gros décimateurs v contribuent en proportion des dîmes qu’ils ont dans la paroisse, et que toute loi à ce contraire soit révoquée. 10° Qu’il soit fait un fonds assez considérable pour que les curés qui ne peuvent plus exercer les fonctions du ministère, vicaires et autres prêtres leurs coopérateurs, dont les services n’ont obtenu aucune récompense, puissent y trouver un secours contre les infirmités, les besoins d’un âge avancé, ainsi qu’une augmentation graduelle de revenu à proportion de leurs travaux. 11° Que ce fonds soit administré par l’évêque diocésain et quelques curés de villes et de la campagne, dans un nombre qui sera fixé et proportionné, de manière que les uns et les autres aient une influence suffisante dans la répartition. 12° Que, pour détruire la mendicité, il soit établi au plus tôt dans toutes les paroisses un fonds de charité pour subvenir aux besoins des vieillards, des malades et des familles pauvres, en la manière qu’adoptera la sagesse et la prévoyance du gouvernement , et qu’à cette obligation de justice et d’humanité, les gros décimateurs seront tenus de contribuer en proportion du produit de leurs revenus’ dans chaque paroisse. 13° Que, selon les demandes faites aux assemblées provinciales et de département, la présidence dans les assemblées municipales des campagnes soit déférée, en l’absence du seigneur, aux curés, pour rendre à leur état spirituel et civil l’honneur qui leur est dû, et aussi pour ne pas les écarter de ces assemblées où leur présence est précieuse et nécessaire à tant de titres. 14° Que les fabriques jouissent de la liberté de remplacer à leur volonté les sommes provenantes de rentes remboursées , soit sur le Roi, soit sur le clergé et le pays d’Etats, soit sur les particuliers. 15° Que l’on mette à exécution l’édit de 1695, concernant la juridiction ecclésiastique, et que, conformément aux dispositions qu’il contient, les deniers des fabriques ne puissent être employés à la réédification des presbytères et des églises, à la décharge des propriétaires, mais qu’ils soient employés à l’entretien du culte public et aux décorations intérieures. 16° Que l’on exécute pareillement le règlement du clergé de 1770, en ce qui concerne la convocation et la nomination des députés aux assemblées ecclésiastiques, soit générales, soit diocésaines. 17» Que l’on rende une loi qui, après un mûr examen, fixe irrévocablement l’opinion sur la nature de l’usure et du prêt de commerce, pour diriger celle du peuple et des ministres de la religion. 18° Que Sa Majesté soit suppliée d’accorder l’enregistrement et l’exécution de sa déclaration du 29 mai 1786, qui annulle l’arrêt de règlement du parlement de Normandie de 1784, sur le fait des dîmes, et qui règle la manière de percevoir les dîmes insolites, en sorte que ceux qui en prétendront l’exemption soient tenus d’en faire la preuve par quarante ans ; l’assemblée recommande à ses députés de faire une attention particulière au mémoire des agents du clergé, article des dîmes. Quant aux autres objets non énoncés ci-dessus, [Bailliage de Câüx.J 575 qui pourront être proposés et discutés aux Etats généraux pour Raffermissement de la constitution, splendeur de l’Etat, et le bonheur des citoyens de tous les ordres, l’assemblée déclare qu’elle s’en rapporte aux lumières et au zèle de ses; députés, et qu’elle leur donne à cet effet tout pouvoir nécessaire. Arrêté île samedi 21 mars 1789, Signé Depradt, président; Osmont, député du clergé, etc... Collationné conforme à l’original par nous, secrétaire du tiers-état du bailliage de Caux, dépositaire d’icelui. A Caudebec le 27 mars 1789. Signé Jullien, MANDAT POUVOIRS ET INSTRUCTIONS Que la noblesse du bailliage de Caux , assemblée à Caudebec , donne à ses députés aux Et,at géné - roMoc, convoqués à Versailles le 27 avril 1789(1). Députés ; MM. le marquis de Quairon, le marquis de Thitoutot, le comte de Bonneville* MANDAT ET POUVOIRS. L assemblée de l’ordre de la noblesse du bailliage de Caux donne mandat et pouvoirs aux députés qui seront élus par scrutin de la représenter aux Etats généraux. En conséquence, pour procurer autant qu’il est en elle le rétablissement de la constitution de la province de Normandie dont elle fait partie, leur donne mandat : 1° De faire valoir auprès des Etats généraux le droit possédé par la Normandie de s’assembler en Etats provinciaux, droit incontestable, et dont il lui est bien important que l’exercice ne soit plus suspendu. 2° De représenter qu’en suivant ses droits dans toute leur étendue, elle pourrait réclamer que les Etats provinciaux fussent assemblés suivant leur ancienne constitution, ou que ieur organisation fût réformée d’après ieur propre délibération ; mais que, pour resserrer d’une manière plus particulière les liens qui l’unissent au royaume, et mettre plus sûrement la province à portée de participer aux avantages de la régénéral ion générale que .l’on a droit d’espérer, elle préfère de tenir l’exercice de ses droits delà nation toute entière. De déclarer en conséquence, au nom de l’assemblée, qu’elle consent à ce que Inorganisation des Etats de la province de Normandie soit réglée par les Etats généraux, comme elle le sera pour toute la France ; mais qu’elle réclame, de la manière la plus forte, pour qu’ils soient rassemblés dans le terme le plus rapproché, et chargés seuls de l’administration et de la répartition des impôts dans la province, parce que, dans le cas où cette faveur ne serait pas générale dans tout let royaume, alors les députés réclameront le droit qu’a la province d’organiser elle-même ses Etats provinciaux. 3° L’assemblée, persuadée que les Etats généraux s’occuperont avant tout du rétablissement de la constitution française, donne mandat à ses députés de se réunir aux autres représentants ae la nation pour statuer que les Etats généraux soient permanents, ou, au moins, assemblés périodiquement et à des époques fixes et très-rap-prochées ; que les formes de leurs assemblées, le (1) Nous publions ce cahier d’aprïs an imprimé de la Bibliothèque du Sénat ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 576 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES nombre des députés, la proportion des représentants de la province et bailliages, les formes de l’élection, soient invariablement réglées. 4° Que le droit qu’a la nation de consentir tous les impôts et tous les emprunts soit tellement assuré qu’aucun impôt ne puisse être levé ni aucun emprunt fait sans avoir été consenti dans les Etats généraux ; qu’il ne puisse même être jamais accordé ni consenti par les Etats provinciaux ni par aucune assemblée ou corporation quelconque; qu’en conséquence les gens de finances ou autres qui percevraient des impôts ou feraient des emprunts sans le consentement préalable, seront responsables devant les Etats généraux, et dénoncés par eux aux tribunaux reconnus par la nation. 5° De régler que nul changement ne pourra être fait dans la forme, dans la compétence et dans l’exercice des tribunaux sans le consentement des Etats généraux, pour tout ce qui sera relatif au droit commun du royaume, et pour les provinces qui, comme la Normandie, ont des privilèges particuliers, sans le consentement de rassemblée des Etats de la province. 6° De prononcer que les Etats généraux seuls statueront sur la régence du royaume, le cas arrivant, et seront alors convoqués de droit. 7° De régler que les tribunaux et les membres qui les composent ne pourront être gênés ou troublés dans l’exercice de leurs fonctions, soit relativement â l’exécution des lois qu’ils sont chargés de maintenir, soit relativement aux jugements par des ordres arbitraires, par des lettres closes ou des évocations, et qu’il leur soit défendu par la nation d’y avoir égard. 8° De régler que nul citoyen ne puisse être arrêté ou constitué prisonnier qu’en vertu d’un décret décerné par les juges ordinaires. 9° Que, dans le cas où les Etats généraux jugeraient que l’emprisonnement provisoire peut être quelquefois nécessaire, il soit ordonné que toute personne ainsi arrêtée soit remise, dans les vingt-quatre heures, entre les mains de ses juges naturels, et que ceux-ci soient tenus de statuer sur ledit emprisonnement dans le plus court délai; que de plus, l’élargissement provisoire soit toujours accordé, en fournissant caution, excepté dans le cas où le détenu serait convaincu d’un délit qui entraînerait une peine corporelle. 10° Que les propriétés soient de même assurées de manière que, sous aucun prétexte, on ne puisse inquiéter aucuns citoyens dans leurs pro priétes, autrement que d’après des lois fixes, ni les poursuivre que devant les tribunaux reconnus et'adoptés par la nation. Que l’état des citoyens soit rendu tellement sacré, qu’il ne soit possible d’enlever à aucun citoyen son état, soit civil, soit militaire, sans qu’il ait auparavant subi un jugement légal de ses juges naturels, civils ou militaires. De régler que ceux qui signeraient ou exécuteraient des ordres arbitraires et des jugements illégaux seront responsables devant ies Etats généraux, et dénoncés par eux aux tribunaux reconnus et adoptés par la nation. 11° Que les ministres seront comptables et responsables à la nation de leur administration. Tous les points ci-dessus étant essentiels pour que la constitution française soit fixée sur des bases solides, l’assemblée déclare qu’elle désavoue ses députés, et que les pouvoirs qu’elle leur donnera ci-dessous seront nuis, tant que les articles ci-dessus, tels qu’ils auront été délibérés et arrêtés par les Etats généraux, n’auront pas été lRLEMENT AIRES. [Bailliage de Caux.] consignés dans une charte formelle, qui servira à l’avenir de base à la constitution. INSTRUCTIONS. 1° Les députés feront tous leurs efforts pour que les objets suivants�soient délibérés et arrêtés dans les Etats généraux pour l’avantage particulier de la province. Ils demanderont que dorénavant les habitants de l’ancien bailliage de Gisors ne soient plus réunis pour leurs assemblées au bailliage de Rouen, mais que le territoire de ce bailliage forme le septième district de la province, comme il a tou-jours fait jusqu’à la suppression du bailliage royal. 2° Que le comté d’Eu, qui, contre son droit et celui de la province, a été réuni au bailliage de Ponthieu, soit, tant pour la juridiction que pour les assemblées de bailliage, réuni au bailliage de Normandie, dont il a été distrait. 3° Qu’à raison de la population générale de la province, comme à raison de la réunion ci-dessus, il soit dorénavant donné un plus grand nombre de députations dans les assemblées des Etats généraux. 4° Les députés seront spécialement chargés de maintenir de tout leur pouvoir la forme d’opiner par ordre dans les Etats généraux sur tous les objets de délibération. 5° Dans la discusion des objets relatifs à la constitution, ils se référeront au mandat qui leur est donné, et qu’ils appuieront de tout leur pouvoir; mais outre les articles qui y seront prévus, ils tâcheront que les articles suivants soient établis et reconnus comme constitutionnels et fondamentaux. 6° Que le Roi ne peut, par aucun traité, abandonner quelque partie que ce soit de son royanme, ni aucune branche de commerce sans le consentement des Etats généraux. 7° Qu’en cas de non permanence des Etats généraux, il ne puisse être établi de commission intermédiaire. 8° Que les Etats généraux, s’ils sont permanents, ne puissent consentir les impôts que pour un an ; que s’ils sont périodiques, ils ne puissent les consentir que jusqu’à l’époque de six mois après l’ouverture de l’assemblée. 9° Que, pour mettre le Roi à portée de subvenir aux premiers besoins d’une guerre imprévue, il lui soit accordé, pour le cas où elle aurait lieu, une augmentation d’impôt sous le nom de crue de guerre, mais dont la quotité sera d’avance fixée par les Etats généraux. 10° Que l’on établisse des Etats provinciaux dans toutes les provinces qui n’en ont point. Il» Que les Etats provinciaux soient chargés, dans tout le royaume, de l’administration et de la répartition des impôts. 12° Après que les points fondamentaux seront fixés, les députés tâcheront qu’il soit réglé, pour la meilleure administration des impôts, comme pour l’avantage des contribuables, que l’on anéantisse les impôts actuels, et jusqu’au nom des impôts distinctifs d’ordre; que l’on rétablisse sur-le-champ de nouveaux impôts, qui, sans grever aucune classe de citoyens, puissent les atteindre toutes, mais en insistant pour que l’on ne rétablisse pas les impôts et la gabelle, comme étant les impôts les plus onéreux ; que les droits de contrôle et de consignation soient considérablement modérés, et fixés d’une manière bien prét cise; que les droits de centième denier soien entièrement anéantis, ou, au moins, considérable’ [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Caux,] K77 ment diminués, mais que dans ce dernier cas la perception soit réglée par les juges naturels. Qu’après ce rétablissement des impôts, la répartition proportionnelle des impôts fonciers qui seront rétablis se fasse entre les provinces dans les Etats généraux, et que les impôts sur les consommations et autres impôts non fonciers soient abonnés aux provinces. Ils demanderont l’égalité et l’uniformité tant de répartition que de perception de tous les impôts entre tous les citoyens de tous les états et de tous les ordres , la noblesse ne prétendant se réserver, outre les droits sacrés de la propriété, que les distinctions nécessaires dans une monarchie, et sur lesquelles elle demande qu’il soit formellement prononcé par les Etats généraux. Que tous les impôts administrés et perçus par les Etats provinciaux soientversés directement par eux dans le trésor public, à l’exception des fonds destinés à être employés dans l’intérieur de la province, et dont l’emploi sera fait par la province elle-même. Que les dettes de l’Etat, quelles qu’elles soient, même les effets royaux en circulation et les pensions, soient réparties entre les provinces, suivant la proportion qui sera établie entre elles, pour être acquittées par les Etats provinciaux sur les deniers dont ils auront la perception. Qu’il soit réglé qu’à l’avenir on imprimera annuellement la liste de toutes les pensions, où seront expliqués les motifs qui les auront fait accorder, en réunissant sous un seul article toutes celles qui auront été accordées à un seul individu. Que tous les rôles et tarifs d’impositions soient imprimés et affichés. Ils demanderont que l’on vérifie tous les échanges des domaines faits depuis quarante ans. Qu’à l’exception des forêts, dont l’administration sera entièrement changée et confiée aux Etats provinciaux, tous les domaines soient aliénés, et les deniers qui résulteront de cette aliénation employés à l’acquit des dettes de l’Etat. Que’ cette aliénation des domaines, réglée par les Etats généraux, soit exécutée par les Etats provinciaux. Qu’à l’avenir on n’accorde plus d’apanage aux princes, mais que l’on fixe un traitement pécuniaire pour leurs maisons. Ils demanderont la réforme du Gode civil et criminel. Que les tribunaux d’exception soient supprimés. Les députés insisteront d’une manière plus particulière pour que la liberté de la presse soit prononcée, en établissant la responsabilité personnelle des auteurs, des imprimeurs et des marchands de livres calomnieux ou contraires aux mœurs et à la religion. Ils demanderont que le secret des lettres soit inviolablement gardé, et que ceux des employés qui les violeront soient sévèrement punis. Ils représenteront la nécessité d’établir une éducation nationale. Ils demanderont que l’on s’occupe des moyens d’abolir la mendicité. Ils demanderont la suppression des loteries, espèce d’impôt aussi onéreux aux fortunes que ruineux pour les mœurs. Que l’on donne des primes pour encourager l'exportation et l’importation, suivant que la nécessité en sera indiquée par le trop haut et trop bas prix des grains. Que les officiers municipaux né puissent plus lre Série, T. II. être-en charge, mais soient tous rendus à la libre élection des villes. Que les comptes de dépense des bureaux municipaux et communautés ne soient plus soumis qu’à la surveillance des Etats provinciaux. Que les barrières soient reculées aux frontières. Que l’on ne tire plus à la milice pour les matelots auxiliaires. Que nulle propriété ne puisse être enlevée pour des objets d’utilité publique sans une indemnité proportionnée à sa valeur. Que l’on statue plus complètement sur l’état des protestants. Qu’aucune lettre de noblesse ne puisse être accordée que sur la demande des Etats provinciaux. Qu’aucune charge ne puisse donner la noblesse. Qu’il soit permis à la noblesse de faire le commerce en gros sans déroger. Que l’on destine les revenus de quelques abbayes en commende à former des chapitres pour la noblesse de la province de Normandie. Que les abus onéreux aux familles, dans la gestion des économats, soit réformée. Que les dépôts soient supprimés, qu’il ne soit plus payé d’annates. Que M. de Calonne soit tenu de rendre compte' de son administration. Ils proposeront d’établir des barrières et des péages, dont le produit soit destiné à faciliter l’entretien des grandes routes. Tous les objets ci-dessus étant d’une utilité certaine pour le royaume et pour la province, les députés 11e négligeront rien pour qu’ils soient adoptés et qu’ils assurent la régénération désirée dans les différentes parties de l’administration. CAHIER De doléances du tiers-état du bailliage de Caux , présidé par M. Groult de Thouville , écuyer , lieutenant général dudit bailliage (1). Les députés du bailliage de Caudebec, Orques, Montivillier, Cany, Neufchâtel et le Havre, assemblés à Caudebec pour la-réduction en un seul, de leurs cahiers, pénétrés des sentiments du plus profond respect pour Sa Majesté, du plus inviolable attachement à sa personne sacrée, et de la plus vive reconnaissance de ses généreuses dispositions-pour le bonheur delà nation, proposent et demandent : CONSTITUTION. Art. 1er. Qu’aux prochains Etats généraux les représentants du tiers-état soient en nombre égal 'à celui des deux autres ordres réunis, que les. trois ordres y délibèrent en commun, et que les suffrages soient comptés par tête. Art. 2. L’abolition de tout privilège pécuniaire, de tout impôt et de tout régime distinctif d’ordre, et chargent expressément leurs députés d’insister sur cette réclamation. Art. 3. Qu’il soit déclaré que la France est une monarchie dont le Roi est le chef suprême ,; que dans sa personne réside sans partage la plénitude du pouvoir exécutif; qu’aucune loi, aucun impôt, aucun emprunt ne pourront avoir lieu que par (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. 37