SÉANCE DU 6 VENDÉMIAIRE AN III (27 SEPTEMBRE 1794) - Nos 18-19 95 une lettre des représentans du peuple en mission dans les départemens du Mont-Blanc et de l’Isère, et près les armées des Alpes et d’Italie (27). Louchet avait commencé la lecture d’une lettre des représentants du peuple, envoyés dans le département du Mont-Blanc, annonçant qu’ils venoient de licencier six bataillons dont leur devancier Albitte avoit ordonné la levée dans les départements du Mont-Blanc, de l’Isère, de l’Ain, de la Drôme et de Rhône-et-Loire, pour protéger les frontières; mais Gou-pilleau de Fontenay a cru qu’on ne devoit pas en lire davantage et renvoyer plutôt ces sortes de pièces au comité de Salut public. Louchet ne s’y est pas opposé ; mais il a cru devoir déclarer, pour empêcher la malveillance de calomnier cinq bataillons, que ses collègues demandent la mention honorable de la conduite de ces braves défenseurs de la patrie (28). 18 Un membre fait un rapport, au nom du comité de Législation, sur le citoyen Mar-vielle, en arrestation à Cambrai ; il propose un projet de décret qui est adopté en ces termes. La Convention nationale, sur le rapport de son comité de Législation, Décrète que le citoyen Marvielle, ci-devant chef de brigade, commandant le dix-neuvième régiment de cavalerie, en arrestation à Cambrai, sera sur-le-champ mis en liberté, et les scellés apposés sur ses effets et papiers, seront levés. Le présent décret ne sera point impri mé ; il sera envoyé manuscrit au représentant du peuple, en mission dans le département du Pas-de-Calais, pour en assurer l’exécution (29). 19 On fait lecture d’une lettre de Charles Delacroix, représentant du peuple dans les départemens des Ardennes et de la Meuse. Il transmet à la Convention une pièce juridique, contenant le détail des crimes du nommé Boucher, et copie d’une lettre du nommé Mogue, qui traite d’amis de Pitt et de Cobourg ceux qui le tiennent au secret. La Convention ordonne l’insertion de cette lettre au bulletin et le renvoi au comité de Sûreté générale (30). (27) P.-V., XLVI, 116. (28) Gazette Fr., n° 1000. (29) P.-V., XLVI, 116. C 320, pl. 1328, p. 24, minute de la main de Bar, rapporteur. Gazette Fr., n° 1000. (30) P.-V., XLVI, 116-117. Débats, n" 736, 76; Gazette Fr., n" 1000. [Charles Delacroix, représentant du peuple dans les départemens des Ardennes et de la Meuse, à la Convention nationale, de Sedan, le 2ème jour s.-c.] (31) Citoyens collègues, Je vous transmets une pièce juridique qui constate les crimes d’un des petits tyrans qui opprimoient les Ardennes, de ce boucher qui a osé souiller votre barre, et que l’on n’a pas craint de présenter comme un patriote opprimé. Que le comité de Sûreté générale vous en rende compte, et vous verrez ce Séjan, digne des nouveaux Tibères qu’il servoit, exerçant sur les détenus, dans les maisons d’arrêt, la barbarie la plus atroce, les vexations les plus révoltantes; voulant singer la conspiration des prisons pour préparer des listes de proscription, digne du régime de terreur qui nous opprimoit alors, pillant, rançonnant sans distinction tous les détenus, ou riches, ou sans-culottes; détruisant les monumens des arts et vandalisant à plaisir à l’âge, aux infirmités, à la foiblesse; commandant la volupté tout en menaçant du dernier supplice. Que la calomnie, que la cruauté froide, que l’immoralité profonde et dégoûtante se liguent et s’agitent dans tous les sens, elles ne changeront pas l’avidité de l’or et de toutes les jouissances en désintéressement, la débauche crapuleuse en vertu ; elles ne réussiront pas à replâtrer le masque du patriotisme sur la figure atroce de cet homme convaincu par la pièce jointe à cette lettre, d’avoir été l’un des plus effrénés partisans de Robespierre : et cet homme est fibre encore! et il intrigue autour de vous avec ses vils complices, pour ramener la tyrannie sur ce malheureux département : je vous transmets également copie certifiée d’une lettre écrite par Mogue, dans laquelle il traite d'amis de Pitt et Cobourg (c’est l’expression favorite de ces messieurs), ceux ou celui qui le tiennent au secret, c’est-à-dire, le comité de Salut public qui l’a fait arrêter, et qui m’avoit désigné d’avance les vrais oppresseurs de ce pays et les seuls que j’aie fait arrêter, en ordonnant l’apposition des scellés sur leurs papiers. Votre comité de Sûreté générale vous rendra compte des mesures que j’ai prises pour faire rentrer dans les maisons d’arrêt les ennemis nés de la révolution, que les anciens comités avoient cru pouvoir élargir. Pour empêcher le fanatisme de remontrer sa tête hideuse, pour me procurer les connoissances locales, sur lesquelles je pusse compter au moment où je rendois à la liberté ceux qui étoient détenus contre le texte des lois, je n’ai jamais perdu de vue une justice sévère, mais impartiale ; et j’ai cru devoir laisser au comité qui jouit de la plénitude de votre confiance, plus d’une occasion d’exercer l’indulgence nationale. La Convention nationale a décrété la mention honorable et l’insertion en entier de cette adresse au bulletin. (31) Bull., 6 vend.