[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. \t avril UM.) nature du commerce de llnde, des mœurs, du caractère, du gouvernement des Indiens, de l’exemple des Anglais et de leur état comparé au nôtre, deux grandes vérités : l’une, que le commerce des Indes Orientales devait se faire par une compagnie souveraine armée et jouissant dans l'Inde d’une puissance territoriale. C’était le principe de M. Dupleix, c'est celui que les Anglais n’ont pas cessé de suivre, instruits par les leçons de ce grand homme qu’ils ont fait rappeler; l’autre, que ce principe, cet établissement d’une compagnie française, souveraine, armée, territoriale, était devenu impraticable dans les circonstances intérieures et politiques où se trouvait la nation. Humiliant aveu ! C’est malgré moi que je l’ai fait. Mais de ce qu’un principe ne peut pas être mis en pratique , s’ensuit-il qu’on doive l’effacer de la liste des maximes nationales ? non, sans doute . Que fait alors un peuple sage'7 II attend un moment plus heureux, ajourne la question et garde le principe. Telle fut ma conclusion à l’égard de la ques * tion générale. Question particulière ; le privilège de la compagnie actuelle. Il importait de placer la question sous son vrai point de vue. Le commerce particulier est condamné par le principe ; la compagnie actuelle est condamnée par le principe ; les juger par le principe, ce serait donc, en d’autres termes, proscrire le commerce de l'Inde. Cependant on ne veut pas, on ne doit pas l’abandonner. Qu’est-ce donc que l’on doit faire? la réponse vient d’elle-même. On doit comparer l’établissement du privilège et l’établissement de la liberté, non pas au vrai principe, mais bien entre eux relativement à ce principe. Celui des deux établissements qui se rapproche le plus duvrai principe est le meilleur. Et c’est alors que rapprochant, en peu de mots, du principe général le titre constitutif de la compagnie actuelle, ses opérations, ses profits, son influence politique dans l’Inde, ses moyens, ses justes espérances, ses engagements remplis, ses marchandises accumulées sur la foi pubiique en improuvant quelques abus attachés à son organisation, mais étrangers à son commerce, en m’élevant contre l’affreux principe qui d’une loi de liberté ferait un titre rétroactif contre la propriété, j’ai conclu qu’en justice, aussi bien qu’en politique, le privilège de cette compagnie était encore préférable au commerce particulier. L'Europe, ai-je ajouté, l'Europe commerçante est attentive à notre délibération et l’Angleterre est à la porte qui nous écoute. M. le Président lève la séance à dix heures du soir, après avoir indiqué celle du lendemain pour quatre heures après-midi. m ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE U. LE BARON MENOU. Séance du samedi 3 avril 1790 (1). La séance est ouverte à quatre heures après midi. Un de MM. les secrétaires donne la lectürè de plusieurs adresses ainsi qu’il suit : Adresse de félicitation, adhésion et dévouement de la garde nationale de la ville de Cette. Adresse de la ville de Josselin eu Bretagne ; elle supplie l’Assemblée d’établir un siège royal dans chaque district. Huit communautés circon-voisines demandent l’établissement de ce siège dans la ville de Josselin. Adresse de la municipalité de Montigny-le-Roi ; elle annonce que la contribution patriotique de tous les citoyens, sans nulle exception» pas même des mendiants, s’élève à la somme de 3,362 livres 17 sols 6 deniers ; elle réclame, à l’occasion de la déclaration publiée par le séminaire de Langres, de biens dépendants du prieuré de Montigny, réuni à leur maison, dans laquelle on a passé sous sileace le droit de préférence qu’ont les entants de la paroisse d’étre reçus et nourris gratuitement audit séminaire, pour y faire leur cours de théologie. Adresses des nouvelles municipalités des communautés de Neuilly-sur-Marne, de Baron, de Dracé en Beaujolois, ae Fortans, de Bergnicourt, de Semur en Briotmois, de Recey-sur-Ourcq, de de Cléon-d’Eudelard, de Chaussin en Franche-Comté, delà Taguière, près d’Autun, de Villars-d’A-rène, de Thezau prèsdeBéziers, de Villers-le-Bois, de Chamaret, de Hadonvilles, de Lisi-sur-Ourcq, de Saint-Romain-de-Colboc, de Saint-Thaurin-d’Hectomarre, de Vincelles en Champagne, de Ja ville de Millau. De la communauté d’ Aigues-Vives en Languedoc ; elle demande des armes pour sa milice nationale. De la communauté de Saint-Vincent-d’Antogny-le-Tillac ; elle demande d’être comprise dans le district de Chatelleraut. De la communauté de Pacy, district de Tonnerre; elle demande la suppression d’un droit féodal, connu sous le nom de troupeau à part. De la communauté de Clion près de Ghàtillon-sur-Indre ; elle demande d’être un chef-lieu de canton. Des communautés de Saint-Christ et de Miseri près de Péronne ; elles font le don patriotique du produit de la contribution sur les ci-devant privilégiés. Du conseil général de la commune du Hâvre-de-Gràce, lequel, en renouvelant son adhésion exprimée dans sou itérative adresse du 2 mars, témoigne à l’Assemblée nationale sa respectueuse reconnaissance de son décret du 8 mars, concernant les colonies. Enfin, de la communauté de Paray-le-Fresy, département de l’Ailier. L’Assemblée nationale ordonne l’impression de cette dernière, ainsi qu’il suit : « Nosseigneurs, Vous vous êtes trop montrés les pères dü peuple ■' » ...... ......... .. . * - , ...» .-.Y AM*»*» - ■ ■■■ ■ (1) Otte séanco esl incomplète aa Moniteur . 528 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 13 avril 1790. pour que. les officiers municipaux d’une pauvre communauté de campagne puissent craindre que vous dédaigniez leurs hommages. Oui, Nosseigneurs, c’est dans nos déserts rendus stériles par un gouvernement dévastateur, que l’on est plus vivement touché de l’influence Favorable d’un pouvoir bienfaisant, et que l’on conçoit de plus douces espérances d’un avenir rendu heureux par vos travaux. Vous nous savez délivrés des horreurs delamainmorte et de la gabelle. Vous ouvrez à la paisible industrie du laboureur tous lesmpyens de prospérer, et vous nous rendez les droits de citoyens, et nommément celui de voter par nos représentants les contributions nécessaires à ta chose publique, d’en surveiller l’emploi et d’en prévenir la déprédation. Nous n’avons que des actions de grâces à vous rendre. Nous ne nous vanterons point de dons fastueux: c’est aux riclies à les faire, aux riches de la chute desquels nous souffrons dans ce moment ; car leur détresse passagère rejaillit sur le pauvre qu'ils ne font pas travailler. Mais nous vous offrons l’hommage des vertus simples que vous faites naître parmi nos concitoyens, de l’amour du bien, du patriotisme, de l’obéissance et de la reconnaissance pour nos bienfaiteurs. - « Nous avons, Nosseigneurs, exécuté avec scrupule tous vos décrets. « Nous payons nos impôts avec zèle ; nous avons ménagé dans la répartition les ci-devant privilégiés, afin de les disposer à goûter notre bonheur. Nous vous supplions, Nosseigneurs, de ménager aussi tous ceux dont l’intérêt particulier pourrait souffrir du bien général, atin que tous les Français vous bénissent comme nous, et que vous jouissiez bientôt, dans le calme et la paix, du bonheur d’avoir rendu tous les Français heureux et vertueux. « Signé : Saint-Aubin, curé de Paray-le-Frely au Bousset,BERTHiER-EMERY, secrétaire-commis ». M. Gossin, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d’hier. Il ne se produit aucune réclamation. M. Brillat-Savarin, député duBugey, présente une supplique de la municipalité de Belley, par laquelle elle demande l’adjudication des biens écclésiastiques qui seront désignés pour être vendus en Bugey, et un mémoire des religieux de Saint-Sulpice, dans la même province, par lequel ils font abandon de leurs biens à la nation. L’un et l’autre sont renvoyés au comité chargé de surveiller la vente des biens écclésiastiques et domaniaux. M. JLlbignac de Castelnau, évêque d’An-goulême, demande un congé par raison de santé. M. le vicomte de Miremont, député de Ver-mandois , demande la permission de s’absenter pour affaires. M. l’abbé Cliabaut, député de Blois , fait une demande semblable et pour les mêmes motifs. M. Lambert de Frondevllle sollicite de l’Assemblée un congé pour cause de santé. M. La Claverie de La Chapelle, député d’ Armagnac, prie l’Assemblée de l’autoriser à se rendre dans sa province, où il est appelé pour des intérêts en souffrance. M. Besecoutes, député de Meaux, demande à s’absenter pour un temps très court. M.Haurissart, député de Limoges, dit qu’il aurait besoin de se rendre dans cette ville, et demande l’agrément de l’Assemblée. M. le marquis de Mortemart, député de Rouen, sollicite également la permission de s’absenter. Ces congés sont accordés sans opposition. M. itloiigins de Roquefort demande qu’il soit dressé une liste de tous les députés absents, de ceux qui sont en congé, de ceux qui demandent à s’absenter, de ceux qui donnent leur démission et de ceux qui reprennent leur place à l’Assemblée à l’expiration de leur congé. Cette motion est adoptée. M. le Président fait la lecture d’une lettre de M. le garde des sceaux, par laquelle il annonce que M. d’Augeard, président de la chambre des vacations du Parlement de Bordeaux, s’est rendu à Paris en conséquence des ordres que lui a fait donner le roi pour l’exécution du décret de l’Assemblée nationale, en date du 4 mars, et qu’il est prêt à paraîttre devant l’Assemblée au jour et à l’heure qu’elle voudra lui indiquer. L'Assemblée décide qu’elle recevra le président de la chambre des vacations du Parlement de Bordeaux à la plus prochaine séance du soir, et elle autorise son président à en donner avis à M. le garde des sceaux. M. le Président fait lire une lettre de M. Mons-sinat, député de Toulouse, par laquelle ce membre donne sa démission, et remet sa place à M. Hé-brard, son suppléant; l’Assemblée reçoit la démission, et renvoie le suppléant par devers le comité chargé de la vérification des pouvoirs. M. travailliez, dont les pouvoirs ont été vérifiés, est admis en remplacement de M. de lloyère, évêque de Castres, démissionnaire; il prête le serment civique. M. le Président annonce l’ordre du jour qui est la suite de la discussion sur le privilège de la Compagnie des bides. M. le duc de Prasliu. Je demande à faire une observation relative à la discussion qui va se continuer. Un orateur, M. Duval d’Ëprémesuil, s’est permis d’avancer dans cette tribune qui ne devrait être que l’écho de la vérité, que lu destruction de l’ancienne compagnie des Indes était le produit des intrigues ministérielles ; la vérité est gu'à la tin de la guerre de 1763, il fut impossible à la France épuisée, de continuer à la compagnie les secours qu’elle n’avait cessé de lui donner ; que, depuis 1764, la compagnie ne cessa de présenter des requêtes au gouvernement pour en obtenir de nouveaux, et que ce n’est qu’après cinq ans de négociations que l’Etat s’est chargé de ses dettes. Les malheurs de cette guerre sont donc la seule cause de la ruine de la compagnie. Toutes les preuves de ce que j’avance existent dans les dépôts de la marine,’ et sont aisées à vérifier. (Voyez aux annexes de la séance, p. 536, la réponse faite par M. Duval d’Eprémesnil, à la déclaration de M. le duc de Praslin.) M. Dupré, dépu lé de Carcassonne. Il n’est pas