[As»emblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [11 mars 1790.] \\*1 provinces du royaume ; qu’il est inutile eu lui-même et dangereux, parce qu’il compromet les intentions de l’Assemblée. Il est temps, enfin, d’abolir cette ancienne maxime : nulle terre sans seigneur. M. Trenchet dit que le droit d’enclave ne dérive pas de la maxime nulle terre sans seigneur, puisque pour pouvoir l’exercer, il faut nécessairement rapporter un titre qui donne au seignenr un droit universel sur un terrain circonscrit et limité dans le titre rapporté. M. Merlin convient que l’article tel qu’il Ta proposé a besoin d’être amendé. En conséquence, il propose une nouvelle rédaction qui est décrétée dans les termes suivants : TITRE 111. « Art. 3. Les contestations sur l’existence ou la quotité des droits énoncés dans l’article précédent, seront décidées d'après les preuves autorisées par les statuts, coutumes et règles observées jusqu’à présent, sans néanmoins que, hors des coutumes qui en disposent autrement, l’enclave puisse servir de prétexte pour assujettir un héritage à des prestations qui ne sont point énoncées dans les titres directement applicables à cet héritage, quoiqu’elles le soient dans les titres relatifs aux héritages dont il est environné et circonscrit. » M. Goupil dePréfeln observe que si l’article 4 était adopté, il s’ensuivrait que les débiteurs, par leur propre fait, auraient la faculté d’anéantir une partie de leur dette : il propose d’amender l’article et de le terminer par ces mots : « Sauf l’action en blâme et réformation des ci-devant seigneurs, contre les reconnaissances qui ne seraient pas encore garanties par la prescription et dans lesquelles ils n’auraient été parties, ni en personne, ni par un fondé de procuration. » M. Fréteau propose un autre amendement qui tend à faire excepter du mode de preuves établi par cet article, la corvée réelle énoncée dans l’article 3 du titre III qui vient d’être voté, attendu que par un article du titre II, l’Assemblée a précédemment adopté pour les preuves requises relativement aux corvées réelles, un mode tout différent de celui qu’autorisents les coutume et règles observées jusqu’à présent. M. Merlin, rapporteur, approuve cette observation et propose, pour éviter toute difficulté sur ce point, de retrancher de l’article précédemment voté les mots corvées réelles. Cette suppression est adoptée ( Nous avons inséré l'article avec la suppression ). L’article 4, modifié dans sa rédaction, par le rapporteur, est ensuite mis aux voix et adopté en ces termes : TITRE III. « Art. 4. Lorsqu’il y aura pour raison d’un même héritage plusieurs titres ou reconnaissances, le moins onéreux au tenancier sera préféré sans avoir égard au plus ou moins d’ancienneté de leurs dates, sauf l’action en blâme ou réformation de la part du ci-devant seigneur contre celles desdites reconnaissances, qui n’en seront pas encore garanties par la prescription, lorsqu’il n’y aura été partie ni en personne, ni par un fondé de procuration. » M. Merlin annonce que, pour le moment, il n’a pas d’autre article à proposer. — Le comité s’occupe sans relâche d’un projet de décret sur le prix et le mode de rachat des droits féodaux ; le travail est fort avancé et ne tardera pas à être mis en discussion. M. Dupont (de Nemours ) fait, au nom du comité des finances, un rapport sur les moyens de remplacer la gabelle et de rétablir le niveau entre les recettes et les dépenses ordinaires de Vannée 1790 (1). Le rapporteur s’exprime en ces termes: Messieurs, vous allez commencer la partie de vos travaux qui doit consolider votre Constitution. Le succès définitif de votre étonnante entreprise dépend de ce que vous ferez pour les finances de l’Etat. Les vues les plus grandes et les plus hardies, les pensées les plus profondes, les résolutions les plus sages, les efforts les plus pénibles, les sacrifices les plus généreux, dont les exemples ont été si mul tipliés dans cette salle, ne paraîtraient aux yeux de l’histoire, et né seraient trop réellement que des rêves philosophiques, si l’équilibre entre les revenus et les dépenses ordinaires, si l’établissement d’un excédant propre à satisfaire aux dépenses extraordinaires, si la formation d’un fonds progressif, applicable à l’amortissement des dettes pendant la paix, et aux premiers frais d’une guerre imprévue, ne replaçaient la nation française au rang qu’elle doit tenir en Europe, au premier rang entre les nations. Les nations ne subsistent que comme les particuliers, à la charge de payer les dépenses de leur entretien. Le peuple français est digne de sentir cette vérité, et vous êtes dignes de la lui rappeler avec fermeté, avec sagesse, comme dépositaires vertueux de son pouvoir législatif et constituant, comme organes de sa véritable volonté. Une nation qui dirait : <« Je ne veux pas subvenir à mes dépenses publiques ; je ne veux pas solder mon armée; je ne veux pas entretenir ma marine; je ne veux pas faire de chemins ; je ne veux pas acquitter les dettes de mes pères, ni les miennes; je ne veux pas payer l’instruction de la jeunesse; je ne veux pas encourager les sciences et les arts ; je ne veux pas établir de juges; je ne veux pas de force pour réprimer les crimes ; je veux des préjugés et des brigands. » Cette nation serait déshonorée et perdue ; elle n’aurait ni crédit, ni puissance ; et, fût-elle armée depuis le premier homme jusqu’au dernier, elle pourrait devenir la proie de l’ennemi, parce que le désordre de ses affaires publiques s’étendrait inévitablement sur toutes ses conventions privées, suspendrait tous les travaux utiles, détruirait son agriculture, son industrie, son commerce, mettrait ses nombreuses légions dans un état de pauvreté et de souffrance, même au sein de leurs foyers, et ne laisserait à aucune partie d’entre elles les moyens de subsister plusieurs mois de suite en rase campagne et en corps d’armée. La plus salutaire des institutions sociales, c’est le revenu public : car il faudra désormais (1) Le Moniteur ne donne qu’une analyse du rapport de M. Dupont (de Nemours.'