[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [11 septembre 1790.] être obligés de puiser, pour satisfaire à des besoins plus ou moins impérieux. Il suit de là une inquiétude vague sur la valeur des fonds, sur la somme de vos besoins, sur la réduction possible de vos moyens : les inquiétudes s’accroissent par l’état convulsif de la chose publique. Vous ne pouvez trop vous hâter de calmer toutes ces inquiétudes ; car toutes vos espérances, tous vos moyens reposent sur la confiance qu’il faut rétablir. La confiance ne peut renaître que par le retour de l’ordre public, par rétablissement, la perception des impôts, l’exécution des lois, l’autorité du gouvernement et une sage combinaison du papier-monnaie avec le numéraire effectif. Si vous violez la proportion qui doit exister entre l’un et l’autre, vous violerez tous vos engagements ; vous exposerez la partie laborieuse et indigente du peuple à des maux effroyables. J’ai réuni, ou plutôt j’ai tâché de réunir toutes ces vues, dans le projet de décret que j’ose vous présenter. Je ne vous propose de payer qu’un quart an plus de la dette exigible, en assignats-monnaie, le reste en quittances de finance : je n'imagine pas que vous puissiez supporter plus de 7 à 800 millions de papier-monnaie dans la circulation ; je modifie pour l’avenir les conditions de, votre décret du 14 mai, qui accordent de longs termes aux acheteurs des biens nationaux ; car les porteurs d’assignats et de quittances de finance, qui voudraient les placer en biens nationaux, se trouveraient évincés par les spéculateurs à long terme ; et tandis que vous vendriez à crédit à ceux auxquels vous ne devez rien, vos créanciers ne pourraient faire emploi des billets de crédit qu’ils auraient reçus de vous. Mais de toutes les dispositions que vous jugerez à propos d’accueillir, celles que je recommande le plus à votre sagesse, ce sont les mesures tendant au rétablissement de l’ordre. Vous êtes la puissance publique; tout homme qui la brave est coupable : mais pour la faire respecter, vous n’avez plus qu’un moyen, c’est de mettre fin aux désordres et de montrer à la nation la [liberté, la justice dans toute leur splendeur. Projet de décret pour la liquidation et le payement de la dette exigible. L’Assemblée nationale s’étant fait rendre compte delà dette publique, et voulant assurer le remboursement effectif de toutes les créances exigibles ; considérant que le rétablissement de l’ordre dans les finances ne peut être permanent s’il ne s’étend sur toutes les parties du gouvernement et de l’empire; que de la tranquillité générale et de la sécurité personnelle de chaque citoyen dépend celle de l’Etat; que des mesures partielles, des plans de liquidation ne pourraient remplir les vues et les devoirs du Corps législatif, s’il n’embrassait dans sa sollicitude tout ce qui peut en assurer Je succès, a décrété et décrète : « Art. 1er. Le comité des impositions présentera, dans la prochaine séance, et successivement dans toutes les autres, son travail sur la quotité, la fixation et la répartition des impôts. « Art. 2. Il sera imposé, outre la somme nécessaire pour satisfaire à toutes les dépenses publiques de l'Etat, un excédant de 20 millions, destinés à former un fonds d’amortissement. « Art. 3. Il sera adressé de nouveaux ordres à n tous les corps adminbtratifs pour assurer et accélérer la perception de toutes les impositions directes ou indirectes actuellement subsistantes, eUes municipalités feront dresser, au mois de décembre prochain, un tableau de 1ms les contribuables en retard, lesquels ne pourront avoir entrée et voix délibérative dans les assemblées primaires et électorales de 1791, jusqu’à ce qu’ils représentent la quittance de leurs impositions de l’année courante. « Art. 4. Aussitôt ap ès la publication du présent décret, les directoires de département feront faire l’estimation de tous les biens nationaux situés dans l’étendue de leur n�s >rt, et eu adresseront l’état à l’Assemblée nation de. « Art. 5. Toutes les ventes des b eus ecc’ésias-tiques et domaniaux aciue lement terminées, conformément aux conditions é mucées da is le décret du 14 mai, seront maintenues; mais dans celles qui auront lieu à l’avenir les porteurs d’assignats ou de quittances de finance, qui offriraient la totalité du prix des ventes, seront admis de préférence à ceux qui réclameraient le bénéfice des termes accordes par le decret du 14 mai. La même préférence sera accordée à ceux qui offriraient moitié comptant, sur ceux qui n’en donneraient que le quart. «Art 6. Usera procédé sans délai à la li î nidation de toutes les parties de la dette exigible. On adjoindra, à cet effet, douze membres au comité de liquidation, chargé-? d>* vérifier les titres de créances exigibles en office-? supprimés, cautionnements, anticipations, fournitures, arrérages de rentes, gages, appointements et autres dettes remboursables, sous quelque dénomination qu’elles soient connues. « Art. 7. Le comité de liquidation se subdivisera en autant de sections ou bureaux qu’il y aura de titres de créances, et on appellera dans chaque section ou bureau un commis des finances et un du trésor royal, choisis parmi les plus capables. « Art. 8. Les titres de créances seront échangés en quittances de finance, porta >t intérêt à 3 0/0, subdivisées eu sommes de 1,000 livres et admises aux enchères en payement des biens nationaux. 11 sera libre aux créanciers d’obtenir le quart de leur remboursement en assignats-monnaie, sans -intérêt. «i Art. 9. Les propriétaires de contrats sur le clergé, les corps et les co nmunautes, recevront à volonté leur remboursement, mi continueront à être payés parla caisse de l’extf aordmairedesix en six mois, des intérèis stipulés dans leur contrat. « Art. 10. A la présentation des quittances de finance, pour achat et payement des biens nationaux, il sera tenu compte au porteur de 2 0/0 en sus de l’intérêt fixé à 3. « Art. 11. Les 3 0/0 d’intérêt, attribués aux quittances de finance , ces-er ml après trois ans révolus, s’il n’en a été lait emploi dans l’achat des biens na ionaux : mais à celte* époque les porteurs desdites quitta c s seront admis à les échanger contre des assignats-Monnaie, sans intérêt, lesquels leur seront délivrés à lu caisse de l’extraoruinaire. « Art. 12. Les quittances de finance seront transmissibles pour les proprietaires à 1 urs créanciers, bailleurs de fonds, avec dénia ratio i d’emploi, et ne pourront être, iar tous auu-es, données et reçues en payement qu • degre à gré. « Art. 13. Il sera incessamment fabriqué et livré au Trésor public 12 millions de monnaie de billon en pièces de 5 et de 2 sous. 32 « Art. 14. Le roi sera prié de proposer à l’Assemblée les mesures qui lui paraissent nécessaires pour assurer l’exécution des lois et le rétablissement de l’ordre dans le royaume, l’intention de l’Assemblée nationale étant de revêtir le gouvernement constitutionnel de l’Etat de toute la force qu’il doit avoir pour le maintien de la liberté et de la tranquillité publique. » On lit uneletlre de M. Necker, en date du 8 septembre, par laquelle il annonce l’envoi de nouvelles observations sur la liquidation de la dette publique. Un de MM. les secrétaires fait lecture de ce mémoire intitulé : Dernier rapport de M. Necker a l’Assemblée NATIONALE. En voici le texte : Messieurs, c’est dans un moment de grande peine et de cœur et d’esprit, c’est à la suite d’une attaque de mes maux habituels, que je vais entreprendre de satisfaire à une décision de l’Assemblée nationale, décrétée sur la motion d’un membre du comité des finances. Il a proposé qu’on me demandât mes idées sur la liquidation de la dette publique; cet intérêt de sa part à mesopinions eût été encore plus naturel au milieu du comité des finances, et avant que ce comité eût fait le rapport qui a été lu à l’Assemblée le 27 du mois dernier; mais je ne dois pas m’arrêter à des circonstances particulières. Il me semble qu’avant d’examiner de quelle manière on doit procéder à la liquidation d’une dette à laquelle le comité seul a donné le nom d'exigible, il faudrait être convenu de la nécessité de cette même liquidation , de cette liquidation du moins considérée d’une manière générale et uniforme, ainsi que l’a fait dans son rapport le comité des finances. Je vais, pour répandre du jour sur cette question, parcourir avec vous, Messieurs, les articles qui composent le tableau de la dette à laquelle le rapporteur du comité des finances a donné le nom d'exigible;, on verra que cette désignation n’est applicable qu’à une partie des objets compris dans ce tableau. Et d’abord le comité convient lui-même qu’une partie de cette dette n’est remboursable qu’à des époques éloignées; tels sont ; 1° L’emprunt de 1789, remboursable en dix ans. aux termes du décret de création ..... 2° Les emprunts faits en Hollande et à Gênes, remboursables annuellement jusqu’en 1797... 3° Les avances des fermiers de Sceaux et de Poissy, dont le dernier terme échoit en 1791.. 4° Les emprunts désignés sous le nom d’emprunts à terme à échoir, ci . ................... Ge sont les remboursements à faire sur les emprunts de 125 millions, de 100 millions, de 80 millions, des loteries d’avril et d’octobre 1783, etc. etc., remboursements qui devraient avoir lieu, selon les édits et les arrêts (1) Ce document est incomplet au Moniteur . [17 septembre 1790.J de création, à des époques annuelles prolongées jusqu’en l’année 1809.. . . . ................ 5° Les annuilés délivrées aux noiaireset àlacaissed’escompte, et dont les payements s’étendent jusqu’en l’année 1825.... 77,000,000 Ces différents articles se montent à 538 millions ; aucun ne représente un capital exigible actuellement; Le surplus de cette somme de 1878 millions, désignée sous le nom d 'exigible par le comité des finances, présente encore des sujets de remarque ; 1° L’article 1er de 149,431,000 livres, est composé de la dette du cierge ; cette dette n’a jamais été soumise qu’à un remboursement libre. La somme variable qdony destinait annuellement n’excédait pas communément 3 à 4 millions, et tous les cinq ans le clergé empruntait une somme à peu près égale à celle qu’il avait remboursée pendant cet intervalle. Oi ne peut donc considérer la dette du clergé comme remboursable en ce moment, à moins d’appliquer avec rigueur, aux affaires publiques, cette partit! de la jurisprudence civile qui oblige les particuliers à rembourser une ciéance hypothécaire, lorsqu’ils ne gardent plus en leurs mains le gage de leurs créanciers; 2° On voit encore compris dans la dette prétendue exigible, unn somme de 100 millions applicable au rachat des dîmes inféodées appartenant à des particuliers; mais cette opération n’est pas commencée, l’on peut l’exécuter graduellement et selon la convenance de l’Etat; 3° On aperçoit encore dans la classe des dettes exigibles dès à présent, 118 millions applicables aux charges de finance. Ces ( barges ne peuvent être rem boursées qu’a près la reddition des comptes, et une grande partie des receveurs n’auront pas fini Iturs recouvrements avantlafin dejuindel’an-uée prochaine; il leur sera doncdilficiled’avoir des comptes opérés avant le commencement de 1792, et il est vraisemblable qu’une partie de leurs charges sera balancée par des débets; 4° On a compris dans la même classe des dettes exigibles dès à présent une somme de 203 millions sous le tiire de cautionnements-, ce sont des dépôts fournis et par les fermiers et régisseurs, et par L-urs employés; Tous ces agents de la chuse publique sont encore en fonction; caries employés même des gabelles, les principaux du moins, n’oni pu être supprimés, parce qu’ils sont nécessaires au débit du sel dont la ferme générale reste encore chargée. Enfin, après la cessation des fonctions de ces employés, et en supposant la suppre.-sion de tous ceux qui sont i hargés du recouvrement des impôts indirects, disposition qui n’est pas vraisemblable, il y aura des comptes à rendre par chacun d’eux, et il y aura peut-être des débets à balancer avec la finance de leurs cautionnements. Ainsi l’on ne peut, sous aucun rapport, mettre ces cautionnements en ligne de compie dans le tableau de la dette exigible dès à présent. Il n’v a rien de déterminé non plus à l’égard des fermiers et des régisseurs par une fonction quelconque jusqu’en 1792, terme des traités passés avec eux, et des engagements qu’ils ont pris en conséquence avec leurs prêteurs; ils se contenteraient, je crois, du plus petit bénéfice au delà de l’intérêt de leurs fonds à 5 0/0 l’an. Il résulte de ces diverses remarques sur la dette exigible, qu’à part l’arriéré des départements, [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 51,939,768 fr. 18,330,970 902,675 390,101,508