37 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] somme nos moissons, ce qui contribue, ainsi que le lièvre et le lapin, à la destruction, dans certains cantons, de la totalité des récoltes. Qu’en conséquence tous les seigneurs qui voudront se donner le plaisir de la chasse soient obligés d’avoir des parcs enclos de murs, en sorte que leur gibier ne puisse en sortir et, par ce moyen, ne soit pas dans le cas de manger les grains des pauvres cultivateurs, auxquels il serait permis de les détruire, s’il s’en trouvait dans les champs. D’obliger tous ceux qui ont des colombiers de tenir leurs pigeons renfermés depuis le 15 juillet jusqu’au 1er septembre, afin d’empêcher les délits que causent les pigeons aux moissons, principalement quand les blés sont versés. 1 Que les droits de péage, tel que celui qui se perçoit pour le pont de Lagny-sur-Marne, soient supprimés, attendu qu’ils forment une seconde taille pour les habitants qui sont obligés de passer souvent dessus, tels que les habitants de notre paroisse et des circonvoisines, en étant de même des autres villes ou pays où les droits de péage sont établis. Que tous les poids et mesures soient de même égalité dans toute l’étendue du royaume, afin d’éviter les fraudes qui se commettent par cette inégalité. Que tous les impôts compris sous la dénomination de droits d’aides soient supprimés, et, par ce moyen, tous les employés dans les aides, ainsi que ceux dans les gabelles, et tous les privilèges soient abolis. Qu’en conséquence, il soit établi la subvention territoriale sur tous les biens du royaume, pour tenir lieu de vingtième auquel tout sujet du Roi, sans distinction de rang, d’ordre ni d’état, sera imposé à proportion des différentes natures de biens dont il sera possesseur, le tout suivant le taux qui en sera décidé par les Etats généraux. Que, pour parvenir au recouvrement des deniers de ladite subvention territoriale, et afin d’éviter les frais, il soit rendu une ordonnance par Sa Majesté qui ordonnerait à chaque ville, bourg et paroisse de convoquer une assemblée en la manière accoutumée, afin de procéder à la nomination d’un receveur desdites impositions, des plus notables qu’il se pourra trouver, et qui serait obligé de porter le montant de sa recette dans la caisse du trésor royal, aux termes qui lui seraient indiqués et dont les villes, bourgs et paroisses seraient responsables, jusqu’au jour qu’il en serait fait au caissier la remise et qu’il en aurait donné quittance audit receveur, auquel il serait accordé une gratification proportionnée au montant du recouvrement qu’il aurait à faire, semblable à celle accordée au collecteur. Fait et arrêté au banc de l’œuvre de la paroisse de Pomponne, où se tiennent ordinairement les assemblées, le mardi 14 avril 1789, et ont signé : Benoist; Blondel; Forestier, syndic municipal; Bourgeois ; Nicolo.t ; Noël ; Pottier ; Souffé ; Sergent ; Guilleret ; Duroché ; Pierre-Charles Bourgeois. CAHIER Des plaintes , doléances et remontrances des habitants composant le tiers-état de la, paroisse de Pontault en Brie{ 1). Art. 1er Dans le cas où l’unité d’impôts n’aurait (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit de Archives de l’Empire. pas lieu, supplier sa Majesté et MM. les députés des Etats de considérer la multitude et l’énormité des impositions établies sur les campagnes; que non-seulement elles payent taille et capitation relatives à la possession de chacun à titre de propriétaire et de fermier, mais que chacun est encore imposé à plus de moitié du principal par addition, sous le titre de second brevet, et qu’ après avoir épuisé tout ce que permet l’impôt de la taille et l’avoir tiercé par le second brevet, on le redouble encore sous des dénominations différentes. On fait payer sur les colombiers, sur les habitations et sur les prétendus profits de ferme et d’industrie., tous objets estimés arbitrairement, et après avoir épuisé tout sur ce rôle, un autre rôle paraît sous le titre de corvée, dont la charge redouble presque la totalité de tous les autres impôts; enfin, ne pouvant payer exactement par l’excès de misère ou l’excès de l’impôt, on achève d’écraser le cultivateur par les frais de brigades. On demande quelle est la cause de la pauvreté des campagnes, et pourquoi il ne se trouve chez les cultivateurs aucune ressource contre le malheur d’une mauvaise récolte? La cause est l’excès de l’impôt et des dîmes dont on va parler. Ruinés par ces deux charges, ils sont forcés de tout vendre aussitôt après leur récolte et ne peuvent rien réserver; dans ce cruel état, les exposants supplieront sa Majesté et les représentants de la nation de remédier à un aussi grand mal; Je remède est de supprimer entièrement l’impôt territorial sur les habitations des cultivateurs qui sont un double emploi, étant la portion essentielle de la ferme qui paye l’impôt; sur leur industrie qui est un impôt qui détruit toute industrie et s’oppose aux avancements du commerce et de l’agriculture ; sur les colombiers et autres parties qui se reprennent en particulier et sont comprises dans la ferme ; et de diminuer les autres impôts à un taux fixe et de les réunir en un seul article. Art. 2. Que le sel étant de toute nécessité pour l’homme, surtout dans les campagnes, où de tout temps il a été regardé non-seulement comme un puissant préservatif des maladies épizootiques, mais encore comme une saveur, un moyen efficace pour entretenir l’appétit et par conséquent l’embonpoint de tous les bestiaux, dont il est impossible sans cela d’en multiplier l’espèce et de faire assez d’élèves pour obvier entièrement à cette cherté des viandes qui réduit, pour ainsi dire, tout le peuple à la dure extrémité de n’en pouvoir user dans ses repas ; pour quoi ils supplient de modérer le prix de cette précieuse denrée, rendre le sel marchand, s’il est possible, et surtout éteindre l’exaction qui subsiste vis-à-vis des habitants des campagnes, qui, manquant la plupart de pain, sont contraints de lever du sel qu’ils sont obligés de revendre à perte. Art. 3. Que le droit d’aides sur le vin, sur le gros manquant, connu sous le nom de trop bu, soit anéanti, et que, pour y suppléer, chaque arpent de vignes soit compris dans la limite de l’impôt ou imposé à un prix relatif à son cru et à son sol, et que tout individu quelconque soit à l’abri de toutes vexations, soit qu’il vende son vin en gros, soit qu’il le vende au détail. Art. 4. Que le casuel ou honoraires qu’exigent arbitrairement les curés de campagne pour les baptêmes, mariages et sépultures, leur soient interdits, et qu’ils soient obligés à chaque enterrement de se transporter, eux ou leurs vicaires, 38 Etats gén. 1789. Cahiers.] ■ ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] jusqu’au domicile du défunt pour y recevoir eux-mêmes des mains des parents, voisins, ou amis, le cadavre et l’accompagner ainsi jusque dans leurs églises, soit que celui qui viendra de mourir soit riche ou pauvre, sans aucune exception. En effet, c’est un double emploi, un double payement ; s.’ils prennent des droits comme les curés de ville, pourquoi ne pas leur interdire comme à ceux-là la perception des dîmes? La dîme et le payement du casuel ou droits d’Eglise ont un seul e"t même objet, qui est de fournir la subsistance aux curés ; la subsistance des curés de campagne est non-seulement assurée, mais encore payée bien cher par les dîmes. Il est injuste que le cultivateur, qui paye la dîme de tout ce qu’il récolte à son curé, soit encore forcé de lui payer, par détail, chacune de ses fonctions ; et si la piété et le respect pour les morts ont toujours été et sont encore de toutes les nations, combien n’est-il pas révoltant de voir porter en terre le cadavre d’un père, d’une mère de famille, d’un fils chéri, d’un citoyen vertueux avec aussi peu de décence et de piété, que celui d’un vil animal, et ce, par la seule raison qu’ils sont morts pauvres, et qu’il n’y a aucune reprise à faire par les curés sur leur succession ! Art. 5. Qu’après tout le détriment et le scandale que la nation française a reçus de l’ascension des ecclésiastiques au timon de l’Etat et aux affaires du ministère, il soit fait une loi qui les exclue pour jamais; la plaie qui saigne encore en prouve la nécessité, et le bon ordre qui exige que chacun se tienne dans les bornes de son état, inspire] la plus grande confiance: Nemo militante Deo implicat se negotiis secularibus (S. Paul , IIe Ep. ad Thim., IL, 4.) Qu’ils nous prêchent, qu’ils portent nos vœux aux pieds de l’Eternel et surtout qu’ils nous édifient, c’est tout ce que nous leur demandons. Art. 6. Que les dîmes insolites soient toutes supprimées, comme n’ayant pour origine que l’ignorance et la timidité" des gens de campagne, dont les curés ont abusé et abusent journellement pour faire ces sortes d’usurpations. Qu’il leur soit expressément défendu de les réclamer jusque dans les jardins, les basses-cours et les enclos de tous les cultivateurs et propriétaires; que la nation, en consentant au payement des dîmes solites, a pourvu d’abord abondamment à la subsistance des curés ; que les autres dîmes ne sont que des usurpations, ainsi que l’annonce leur dénomination d’insolites. Si sa Majesté et MM. les députés veulentse donner la peine de vérifier l'ordonnance de 1302, celle rendue aux Etats de Blois, en 1579, et celle de Melun, ils reconnaîtront que jamais la nation n’a entendu ajoutera la libéralité des dîmes solites, et qu’elle a toujours constamment défendu aux curés de les étendre, Si la totalité des dîmes insolites n’est pas supprimée, qu’on en affranchisse au moins les foins artificiels qui ne font que remplacer les naturels exempts de dîmes, et qui ne peuvent également servir qu’à la nourriture des bœufs et des chevaux qui labourent la terre et fournissent des engrais, d’où proviennent toutes les productions qui payent la dîme. G’est un principe établi par toutes les lois de la nation et les ordonnances des rois, que la nourriture des animaux qui servent à la culture de la terre ne peut être asservie à la dîme, parce que la dîme est prise sur leur travail, et leur travail procure les productions qui la payent: elle se trouve payée deux fois ; il en est de même des aliments destinés à nourrir le laboureur lui-même, et il est aussi injuste qu’odieux que les curés élèvent leurs prétentions de droits jusque sur les légumes, les herbages des jardins et les basses-cours des cultivateurs et des propriétaires, dont ils ne rougissent pas de venir troubler la paix et la tranquillité, sans aucun égard pour le respect que l’on doit à l’homme et au citoyen cultivateur. Mais il ne suffirait pas de rétablir la justice sur les dîmes; les curés s’en dédommageraient en se rendant, comme ils le font, fermiers des terres de leurs fabriques de la charité et de celles à louer dans l’étendue de leurs paroisses; il faut encore leur interdire toute espèce de commerce, de prendre des terres en ferme et d’entreprendre aucuns travaux. Il est scandaleux et contre les lois civiles et canoniques qu’un prêtre, un curé devienne marchand et taillable. Art. 7. Que les justices des seigneurs soient supprimées comme inutiles et tortionnaires, ne servant qu’à établir le despotisme des seigneurs sur leurs vassaux, n’agissant que suivant leurs désirs et leur intérêt , ne produisant d’autres biens aux justiciables que de les ruiner tous. En effet, les juges étant révocables, choisis par les seigneurs, se trouvent dans une servitude et se prêtent à tout pour leur plaire, et les gardes, qui sont malheureusement crus sur leurs rapports, imputent des délits à qui il plaît au seigneur et à eux d’exercer les vengeances. Avec ces deux moyens, le seigneur se rend maître des champs, maître d’avoir autant de gibier qu’il veut, maître de ravager les récoltes et maître de faire punir encore celui qui a la hardiesse de se plaindre. D’ailleurs la plupart des juges n’étant pas appointés, ils n’ont d’autre profit que ceux qu’ils se procurent injustement par la chicane, et comme fort peu sont domiciliés sur les terres dont ils ont la judicature, il (faut qu’ils se dédommagent de leurs voyages, et de là il résulte que les procès sont éternels dans les justices seigneuriales, que les jugements qui se rendent ne font qu’augmenter les difficultés, et que le malheureux plaideur, après avoir plaidé pendant des années et obtenu un dernier jugement, n’en retire d’autres fruits que d’être ruiné et forcé de recourir au tribunal supérieur et, avec d’autant plus de raison, que la plupart de ces juges, n’étant pas gradués ni instruits, prononcent presque toujours sans aucune connaissance des principes, des lois, des ordonnances, des usages et coutumes. Art. 8. Que les huissiers-priseurs vendeurs qui, pour une modique finance, ont fait revivre des offices qui étaient restés en oubli aux parties casuelles, se sont emparés du droit de faire toutes les ventes de meubles dans les campagnes, soient supprimés. G’est une nouvelle charge aussi gênante que ruineuse pour le peuple; l’huissier du lieu faisait ces fonctions, et il en coûtait peu, le pauvre se soumettait comme le riche; aujourd’hui il faut appeler ces officiers, il faut payer des exprès pour les aller avertir, il faut multiplier des voyages, attendre leur temps, obtenir leur jour, parce que, seuls dans le bailliage, ils ne peuvent vaquer que difficilement dans tous les villages de leur arrondissement; les affaires languissent et le malheureux paysan, dont le mobilier est toujours très-modique, se trouve devoir de frais plus que la vente de son mobilier n’a produit, et ces frais sont d’autant plus considérables que ces officiers résidant en ville, se taxent, outre leurs droits, les frais de voyage d’aller et venir. 39 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] Art. 9. Que la chasse, si elle n’est pas absolument supprimée, ne sera permise qu’aux termes des ordonnances et conformément à l’intérêt public. Que le droit de chasse ne pourra être exercé qu’après les récoltes et au temps où, n’y ayant plus rien sur la terre, on ne puisse en souffrir les dégâts et les dommages. C’est une chose bien criante que de voir les seigneurs chasser en tout temps, et leurs gardes se répandre dans les grains, les parcourir, tant pour chasser que pour découvrir les nids qu’ils mettent sous la garde du cultivateur, en l’en rendant responsable. Il est plus criant encore de voir que tous les seigneurs, pour la conservation de leur gibier, devenus despotiques et singeant les exemples des princes, font détruire tous les chiens qui sont les gardiens des habitations et tous les chats qui sont les conservateurs des grains. Mais ce qui met le comble à la désolation du cultivateur, c’est qu’il est de notoriété que la chasse, par une suite des abus et par l’abandon où on a laissé les cultivateurs, est devenu, un objet de spéculation pour les seigneurs, et qu’elle est de fait un second revenu souvent plus considérable que celui des fermages de la terre, par le gibier qu’ils vendent; les gardes, à l’exemple de leurs maîtres, s’en enrichissent, il en est qui se font à part 3-à 4,000 livres par an, qui achètent journellement des possessions et qui deviennent des particuliers aisés par le trafic qu’ils font avec leur gibier. On pense bien que les lièvres et les perdrix ne sont pas les seuls qui produisent de si grands profits aux seigneurs et aux gardes ; ce sont des lapins, ces bêtes si pernicieuses et si défendues par les ordonnances ; aussi sont-ils si cultivés, si multipliés que les terres en sont couvertes, et que les abatis que les seigneurs en font dans les temps marqués, oùles peaux sont chères, ne se comptent que par milliers, tandis que le cultivateur voit ses moissons détruites, et sa ruine tourner au profit des seigneurs et des gardes. Les suppliants demandent donc que les seigneurs et les gardes ne puissent entrer dans les grains, depuis le mois de mars jusqu’après la récolte ; c’est la disposition des ordonnances. Ils demanderont, en outre, que les lapins soient entièrement détruits dans tous les champs et qu’il soit permis de détruire tous ceux qui s’y trouveront. Cette demande est également fondée sur les ordonnances ; le lapin n’est permis qu’aux seigneurs de fiefs qui, par leurs titres, ont droit de garenne, et il ne leur est permis d’en avoir que dans leurs garennes. Que Sa Majesté et MM. les députés aient la bonté de jeter les yeux sur l’ordonnance du roi Jean, de 1355 ; ils y verront que ce roi, connaissant l’abus des concessions de garenne, le mal affreux que les lapins font à l’agriculture, a défendu aux seigneurs d’agrandir leurs garennes, leur a pareillement défendu d’user de ce droit aucunement, s’ils ne sont propriétaires de 50 arpents de terre autour de la garenne, et permet à tout le monde de tirer les lapins hors l’enceinte, sans encourir amende. Et aujourd’hui, sans avoir droit de garenne, tous les seigneurs couvrent les terres de lapins, les multiplient en multipliant les remises, qui sont autant de repaires pour les faire pulluler. Il en est de même de la chasse de la grande bête; cette chasse fait le plaisir de nos princes que nous chérissons, on ne doit en parler qu’avec circonspection; mais comment taire une vérité que les princes ignorent peut-être et qui intéresse l’agriculture, d’où dépend la richesse, la vie, le soutien de tous les citoyens? peut-on la taire au meilleur des rois qui commande à ses sujets de la lui faire connaître? Oui ! ces cerfs, ces biches, ces daims, détruisent les campagnes par un malheur qu’on ne doit attribuer qu’à la division que les princes font de leur temps pour les plaisirs ; cette chasse ne se fait dans la Brie que dans les temps où elle cause les plus grands dégâts aux moissons ; cette chasse s’ouvre pour l’ordinaire vers le 15 avril, époque où la tige des grains commence à monter, et ferme vers le 15 ou le 20 août, époque où la moisson est sur sa fin ; ainsi cette chasse entraîne nécessairement la destruction de l’agriculture ; les cerfs chassés parcourent souvent huit à dix lieues de terrain en traversant les champs; les hommes, les chevaux et les chiens les suivent, souvent même jusqu’aux voitures, sans que, pour le dégât de ses moissons, le cultivateur puisse employer d’autres voies que celle des gémissements et des larmes; il dit seulement : G’est la chasse du prince qui cause ma ruine, mais encore faut-il que je me taise. • Les suppliants ne demandent point que ces bêtes fauves soient détruites, hors les plaisirs de Sa Majesté; mais ils croient qu’il est de la justice du Roi, puisqu’il est de l’intérêt de l’Etat, que ces bêtes soient renfermées dans des parcs enclos de murs et que, hors les parcs et les plaisirs de Sa Majesté, il soit permis aux cultivateurs de les tuer. Art. 10. Que les privilèges dont jouissent les propriétaires des terres et domaines qui avoisinent la capitale, pour la franchise des entrées aux barrières, sur les provisions et les denrées qu’ils en tirent, soient entièrement supprimés, attendu que le poids de ces exemptions est une surcharge pour le cultivateur et pour le peuple, n’y ayant que lui et le pauvre habitant des villes qui le supportent. Les suppliants demandent que les droits d’entrées sur toutes les denrées qui entrent à Paris, et singulièrement sur le vin, le beurre, les œufs, le fromage et la volaille, qui sont devenus exorbitants, soient diminués s’ils ne sont pas détruits, et que les fermiers des droits du Roi soient tenus de mettre un tableau à chaque barrière, placé en dehors, contenant le tarif précis et exact de tous les droits sur chaque objet, afin que celui qui entre des marchandises et provisions pour Paris, puisse lui-même savoir ce qu’il doit au juste, et afin que les commis soient liés par la publicité du droit qu’ils peuvent exiger et qu’ils ne soient plus, comme ils sont, les maîtres de vexer les habitants de la campagne et d’exiger d’eux des droits arbitrairement. Enfin ils demandent que la faculté établie par la coutume, en faveur de tout propriétaire de 50 arpents de terre, de pouvoir jouir du droit de colombier, soit expliquée et limitée, que les pigeons ne soient mis en liberté que dans les temps où ils ne peuvent porter de dommages aux grains, qu’ils soient renfermés depuis le 1er octobre jusqu’au 15 novembre, temps des semences, et depuis le Ie*1 juillet jusqu’au 15 août, temps des récoltes. Le mal que font les pigeons, pendant ces deux temps, est incalculable ; sur la semence seule ils causent un grand quart de dépense, le laboureur étant obligé de mettre un quart de plus, à cause du tort que font les pigeons qui enlèvent tous 40 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] les grains que la herse n’a pas assez couverts, et lorsque les grains sont mûrs; ils abattent les gerbes, secouent les épis, les égrènent et ruinent des pièces entières en un moment. Signe Haeu Denis; Bourgeois, député; Berge-ron, député „; Chatenay, député ; Buissonneàu, collecteur; Claude Forby; Vincent Crampaut; Denis Delacourt; Dominique Leris ; Chalumeau ère; Baptiste Delacourt; Etienne Viviers; Gaudet; artier; Martin, greffier; Bergeron, procureur fiscal, CAHIER Des plaintes, doléances et remontrances des habitants de la paroisse de Pontcarrë{ 1). Art. 1er. Nous souffrons, et voici pourquoi et comment ; Courbés sous le joug des impositions, nous ne cultivons pas nos petites possessions pour nous, nous sommes même souvent obligés d’ajouter à nos récoltes une partie de nos semences étrangères à elles, pour satisfaire les collecteurs des tailles, vingtièmes, capitations, corvées, milices et autres ; et c’est dans le centre des immunités et exemptions qui nous environnent de toutes parts, que nous portons ce pénible fardeau, comme si nos travaux étaient moins utiles à l’Etat que les repas et les plaisirs de .ceux qui en jouissent ! Nous désirerions, en conséquence, qu’on abolît toutes espèces d’impôts royaux actuellement subsistants, sous les différentes dénominations sus-énoncées, et qu’on leur substituât un seul impôt territorial, auquel serait assujetti tout propriétaire des trois ordres de l’Etat, sans exception quelconque des bois, parcs, étangs, jardins et autres, lequel serait versé directement dans le trésor royal par les collecteurs de la paroisse, aux pou-suites et diligences du procureur du Roi, sans qu’il fut nécessaire d’intendant, subdélégué ou autre commis en cette partie. Qu’on établisse, de plus, un autre impôt sous une dénomination quelconque de dixièmes ou vingtièmes sur les rentes perçues sur le Roi, la ville ou autres ; par ce moyen, en doublant la perception royale, on nous déchargerait de plus de moitié. Art. 2. Réduits aujourd’hui à la plus affreuse indigence, nous n’entendons que des cris languissants d’une famille affamée, à laquelle nous regrettons presque d’avoir donné le jour. Tristes victimes d’un barbare intérêt, nous supplions au moins pour ceux qui nous succéderont, si nous n’avons pas le bonheur d’échapper à la famine qui nous exténue, de statuer sur les moyens assurés de prévenir la disette des grains, objet de première nécessité, et fixer le pain à un prix raisonnable et invariable dans tous les temps et en toute circonstance, de favoriser la liberté du commerce pour toute denrée, en abolissant toute espèce d’impôt sur le comestible, comme sel, boissons et autres denrées que l’étranger nous fournit ou que nous récoltons dans le royaume. Le moyen de prévenir la disette du blé pourrait se trouver, en construisant dans l’étendue du royaume, à distance proportionnée à la population, des greniers que le gouvernement aurait soin de remplir, dans les années d’abondance, pour l’approvisionnement de deux ans. (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l'Empire. Art. 3. Nous sommes vexés encore et cruellement dévorés par une nuée de vils animaux de toute espèce, et plus particulièrement de lapins presque aussi multipliés que les épis dans un champ, biches, cerfs et autres animaux réservés pour l’agrément du prince et seigneur. Les dégâts sont au point qu’il n’est d’année qu’on ne soit forcé de couper à la faux une partie très-considérable de nos terres, engraissées, cultivées et ensemencées, de perdre par conséquent le produit, nature et semence. Cet hiver dernier, les ravages ont été si considérables, que dans les jardins presque tous nos arbres fruitiers sont tous ravagés par la dent meurtrière, et pour récompense nous n’entendons que des menaces des gardes. D’après ce, n’aurons-nous pas à espérer que, faisant droit sur nos remontrances, on ordonne incessamment la destruction de ces animaux avides de nos dépouilles, et qu’on supprimera à l’avenir le' droit de chasse pour la conservation de ce gibier, en permettant à tout propriétaire ou fermier de détruire respectivement sur l’étendue de leurs propriétés par des moyens raisonnables qu’ils aviseront, laissant au seigneur, si l’on le juge à propos, la liberté de chasser dans toute l’étçndue de sa terre comme véritable propriété dont on ne peut se dessaisir; nous n’entendons pas pour cela que le port d’armes soit plus permis que par le pqssé. Art. 4. La justice elle-même est une source de peines et de vexations pour nous; ce tribunal, établi pour nousrendre heureux et maintenir nos possessions et nos droits respectifs, les envahit sans retenue; vu l’impossibilité de réunir les officiers sur les lieux, nous éprouvons des délais ruineux; nous observons que, plusieurs fois, lesdits officiers sont quatre mois sans paraître à l’audience, et que cinq à six personnes assignées depuis ce temps ont perdu plus de dix journées à les attendre ; nous estimons qu’il serait fort avantageux pour nous qu’on réunisse notre bailliage seigneurial au bailliage royal le plus prochain que l’on jugera à propos, et que l’on change les formes onéreuses dans l’administration de toute justice actuellement subsistante, qu’on ne peut réclamer qu’à force d’argent, à laquelle la plupart de nous ne peuvent prétendre, faute de moyens pour nous faire entendre. Art. 5. La milice devient pour nous un impôt aussi onéreux que tous ies’autres ensemble, par les dépenses qu’elle nous occasionne, et la perte de temps qui en est la suite ordinaire, impôt même encore plus désastreux que les craintes légitimes qu’il nous inspire. De là les divisions et batteries qui en sont la suite ; par des loteries bizarres, nejvoyons-nous pas enlever inhumainement à une famille nombreuse, et pour ainsi dire au berceau, un frère devenu absolument nécessaire à sa mère par la perte d’un père qui vient de mourir? Si l’on veut en conserver les vestiges et s’assurer des bras pour le service de la patrie, on peut obliger les cinq ou même six paroisses qui tirent bien souvent ensemble, à fournir au gouvernement une somme convenable pour avoir un homme; par ce moyen, ce qui coûte 100 écus à une paroisse ne paraîtrait pas lui coûter 6 livres ; elle aurait en outre la paix et la tranquillité. Art. 6. Depuis longtemps nous désirons un maître d’école pour l’instruction d’une jeunesse qui croupit dans l’ignorance et dans l’oubli presque de ses devoirs; on pourrait, comme ne possédant aucun bien des communautés ni autre ressource, on pourrait, pour cet établissement, y