ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs. J 290 [États gén. 1789. Cahiers.] 3o Qu’il faut épiner, ou faute de le faire, l’on nous assigne au Louvre, auquel nous sommes obligés de payer l’amende, sans pouvoir s’expliquer, et si l’on voulait faire voir clair et prouver les raisons, on double l’amende, jusqu'au point que l’on ruine ces personnes par ces moyens; 4° L’on ne peut échardonner ni ôter les mauvaises herbes qui nuisent aux grains, chose bien dure pour les cultivateurs, et que, par ce moyen, il se trouve que la subsistance des hommes est consommée par préférence à ces animaux ; 5° Que l’on ne peut aller cultiver des pois, ni les cueillir qu’apres avoir reçu des ordres de l’inspecteur des chasses, que l’on n’accorde souvent qu’avec beaucoup de difficultés ; 6° Que l’on ne peut encore faucher ses foins qu’après souvent qu’ils sont consommés. Il faut, autant qu’il y a de nids de perdrix ou de faisans, lisser une forte touffe de luzerne, delà grandeur d’environ 9 pieds carrés. De plus, les gardes ne se font point de scrupules d’aller avec leurs' chiens et montés sur leurs chevaux au travers des grains et vignes, et même lorsque les grains sont bons à récolter, sous prétexte de dire qu’ils vont de la part de leur capitaine ou de l’inspecteur pour y prendre connaissance de la production de leur gibier. Et, par ce moyen, ils nous mettent dans l’impossibilité de pouvoir satisfaire aux impositions royales et de payer les propriétaires, domestiques, etc. C’est ce qui nous oblige à demander que les capitaineries soient supprimées entièrement pour toute la nation. Art. 4. La suppression des 11 arpents de remises, qui font l’objet du refuge de la quantité de gibier qui fait la ruine des terres voisines, et le terrain occupé par lesdites remises, qui ne fait que le produit des gardes chasses, au détriment du cultivateur ; et qu’il soit permis audit cultivateur d’arracher, en tout temps, les mauvaises herbes qui nuisent à ses grains, et de récolter ses foins dès qu’ils sont parvenus à leur maturité. Art. 5. Pour conserver l’apparence de récolte qui se présente, dont on a si grand besoin, la destruction, dès à présent, de tout le gibier, qui commence à dévorer cette récolte ; et que les propriétaires, en tous temps, soient autorisés à détruire, en son enclos, le gibier qui vient en manger les fruits. Art. 6. La suppression de tous les impôts distincts ou d’ordre, et conversion en un seul, qui sera supporté par tous les propriétaires indistinctement, sans aucun égard au privilège du clergé et de la noblesse. Art. 7. Il sera fait une nouvelle assiette des impôts pour la paroisse, attendu qu’elle est surchargée. Art. 8. L’exécution de l’ordonnance concernant les colombiers, à l’égard de ceux qui n’ont pas le droit d’en avoir ; et que les colombiers autorisés soient fermés pendant les semences et les récoltes. Art. 9. La suppression des aides : les commis de cette partie ont tellement vexé les habitants de cette paroisse, qu’ils les ont forcés d’abandonner une partie de leurs vignes ; et que toutes ces personnes-là, par les abus qui s’y exercent par une nombreuse quantité des susdits commis qui portent un état hors de leur rang, au préjudice du pauvre cultivateur, et l’Etat n’en profite aucunement. Art. 10. La suppression des gabelles, impôt ruineux et contraire au droit naturel. Art. 1 1 . L’augmentation de la dotation des curé et vicaires sera prise sur les abbayes, prieurés et autres bénéfices simples ; après laquelle augmentation, le droit casuel des curés et vicaires sera supprimé. Quant aux reconstructions et réparations des églises, elles seroot prises sur une caisse qui sera établie à cet effet; en sorte que les habitants ne soient tenus que de l’entretien des églises, ainsi que les locataires y sont obligés. Art. 12. Que, pour le maintien du bon ordre, les seigneurs soient tenus d’avoir un juge domicilié dans l’étendue de leur justice, ou qu’il soit établi en chaque paroisse de campagne un juge de paix, lequel sera choisi par la commune, et sera amovible tous les trois ans, avec faculté de les continuer, dont les pouvoirs seront fixés par les Etats généraux, et dont les fonctions seront purement gratuites. Art. 13. L’on devrait encore s’occuper aux Etats généraux pour les banqueroutes frauduleuses, et autres autorisées sans aucun examen mûr et sage. il faut une loi pour cette sorte de facilité qui fait la ruine des gens de bonne foi. Art. 14. La suppression des corvées, dont on fait payer par un rôle particulier, pendant que l’Etat emploie des sommes immenses pour cette partie. Et cependant les chemins n’en sont pas mieux tenus dans certains endroits où il n’y a que les habitants qui y sont sujets pour leurs besoins. Art. 15. Les habitants demandent aussi que l’entretien des berges, le long de la rivière, soit fait avec plus d’exactitude qu’il n’a été jusqu’à ce jour. Lesdites berges se trouvent dégradées par la navigation et les grandes eaux : ce qui cause un tort notable auxdits habitants. Art. 16. Suppression de la milice, comme aussi préjudiciable à l’agriculture et à la population, qu’à la tranquillité des familles. Art. 17. Solliciter un règlement qui fixe les droits des meuniers et leurs obligations. Art. 18. Suppression de tout impôt sur l’industrie. Art. 19. Nous avons, dans cette paroisse, des habitants sous le titre de bourgeois de Paris, qui font le plus gros commerce, qui ne payent aucuns droits ni industrie, et même pour leurs maisons et jardins. Signé Grangé; Mathias; Joigny; Jairelle; Louis-Vincent Boutroux ; Bancelin; Claris; Leblanc, vitrier, et Bria. CAHIER Des doléances de la paroisse d Achèves (1). Les habitants du village d’Achères, convoqués par les ordres de Sa Majesté pour choisir des députés à l’assemblée générale de la prévôté de Paris, et concourir, par eux, à l’élection de ceux qui seront nommés aux Etats généraux, portent humblement aux pieds du trône leur reconnaissance et leur amour. Ce n’est pas du fond de leurs chaumières, qui ne sont habitées que par le patriotisme le plus ignorant, qu’ils osent élever leurs voix pour dicter aux représentants de la nation une constitution nouvelle. Nés Français, nés dans le sein d’une monarchie, habitués à la sagesse et à la douceur de ce gouvernement, ils n’en veulent point d’autre. S’il y a des abus, ils seront réformés, car le Roi, père de son peuple, ne s’entoure de ses enfants que pour les rendre heureux. (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de V Empire. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] 291 [États gén. 1789. Cahiers.] Plus sûrement guidés par le sentiment de leur amour pour le meilleur des monarques, que par des lumières acquises sur le meilleur des gouvernements, ils se livrent, avec abandon, aux bontés paternelles du père commun de la patrie. Exposés par la situation de leur village au ravage des bêtes fauves qui détruisent leurs récoltes, ils n’avaient qu’un vœu à former, celui d’élever un mur entre leurs héritages et la forêt de Saint-Germain; et ce vœu, à peine manifesté, a été exaucé ; et Sa Majesté a bien voulu promettre de concourir aux frais de cette construction qui va doubler leur existence, en leur assurant le prix de leurs travaux et de leurs peines. Instruits par des citoyens amis du bien et de la vérité, que les nobles de presque tout le royaume, animés par des sentiments dignes des vertus de leurs ancêtres, et qui, à jamais, honoreront leurs descendants, avaient renoncé, par amour pour la justice, à tous privilèges pécuniaires, ils bénissent ces jours heureux qui leur assurent du soulagement dans leurs charges publiques, et font des vœux ardents pour qu’avec de tels sujets, le meilleur des rois soit aussi le plus heureux. Signé P.Rothais ; Etienne Dumont; Blet; Jacques Léonard ; Morizet; Jean-François Dumont; P. Mo-rizet; Pourlier; Nicolas Damour; Pourne; H. Le Maistre; Letrop ; G.-E. Dumont; L. Dumont, F. Décrié ; P. Senabet ; F. Morizet ; L. Dumont l’aîné ; E. Guyaneux; J. -H. Perot; J.-G. Dumont le fils; Frédéric Perot; G. Dumont; A. Bertrand fils; Damonr; P. -G. Morizet; N. -P. Pourlier; J. -B. Barbier; P. -F. Léonard; J. Morizet; J. Bourdon; Michel Dumont, et Pierre Dumont. CAHIER Des doléances , plaintes et remontrances par les habitants de la paroisse des Alleux-le-Roi (1). L’an 1789, le mercredi 15 avril, avant midi, après l’assemblée convoquée au son de la cloche, en la manière accoutumée, nous, habitants de la paroisse des Alieux-le-Roi, dépendant du Châtelet de Paris, tous nés Français, compris au rôle des impositions de ladite paroisse, étant tous assemblés dans 1a chambre à ce destinée, pour obéir aux ordres de Sa Majesté, portés en ses lettres données à Versailles, le 24 janvier dernier, pour la convocation et tenue des Etats généraux du royaume, et satisfaire aux dispositions du règlement y annexé, ainsi qu’à l’ordonnance de M. le lieutenant civil au Châtelet de Paris, dont du tout nous avons une pleine et entière connaissance par les lectures et publications qui en ont été faites le lundi 13 du présent mois, tant au prône de la messe paroissiale, qu’issue de ladite messe au devant de la principale porte de l’église des Alleux-le-Roi . Ladite assemblée convoquée en exécution desdils ordres , règlement et ordonnance, à l’effet de rédiger le cahier des doléances, plaintes et remontrances de cette paroisse, ainsi que pour délibérer sur le choix des députés que nous sommes tenus de nommer entre nous, nous étant occupés delà rédaction dudit cahier, avons arrêté nos doléances, plaintes et remontrances ainsi qu’il suit : Art. 1er. Les tailles, capitation, industrie, vingtièmes et autres impositions de la paroisse des Alleux-le-Roi, sont portées à un taux considérable, (1) Nous publions cette pièce d’après un manuscrit des Archives de l'Empire . eu égard à la valeur du terrain dont est composé son territoire : ce qui absorbe une grande partie du produit du cultivateur, et lui ôte la faculté de pouvoir cultiver avec soin les biens qu’il fait valoir, et y donner les engrais nécessaires. Ces biens sont classés dans le rôle des tailles de cette paroisse, confusément l’un dans l’autre, à 15 livres l’arpent. Dans la totalité du territoire, vers le village, il peut y en avoir un quart à ce prix; un quart, eu égard au sol, à raison de 12 livres; un autre quart de terrain plat et très-souvent inondé, qu’on ne peut évaluer, tout au plus, qu’à 8 livres; et un autre quart autour des bois, et à cause du gibier, presque inestimable , puisque dans des années, il ne rapporte à peine que le prix de la culture et semence. Cependant, il sera porté à 5 livres l’arpent. En sorte que le terrain de la paroisse des Alleux-le-Roi ne devrait être classé confusément qu’à raison de 10 livres l’arpent, et les impositions réparties au prorata sur les habitants qui possèdent et cultivent lesdits biens, à raison des classes ci-dessus. Art. 2. Le gibier de toute espèce dans les plaines et bois est un fléau considérable pour le cultivateur, qui a le désagrément de fumer, cultiver et ensemencer son terrain sans production : ce qui lui ôte tout secours, non-seulement pour lui et sa famille, mais encore pour payer ses fermages, et acquitter les impositions dont il est chargé à raison des biens qu’il cultive. Le lapin, gibier désastreux, doit être entièrement détruit. Les lois faites jusqu’à présent à cette occasion n’ont point eu d’exécution par les entraves que les officiers de capitainerie ont introduites dans les règlements qu’ils ont faits à cet égard. . Art. 3. La capitainerie de Saint-Germain, dans laquellela paroissedes Alleux-le-Roi est comprise, devrait être réduite à ses premières limites pour les plaisirs de Sa Majesté seulement. Le surplus est actuellement occupé en partie par des particuliers, la plupart sans fief ni terrain, qui achètent des cantons de chasse sur les terres de différents seigneurs, et qui en abusent par la grande quantité de gibier qu’ils ont: ce qui ruine absolument le cultivateur. Pour parvenir à la destruction du lapin, il faudrait que les habitants eussent la permission de les fureter et pannauter pendant le temps qui leur serait prescrit : cela éviterait beaucoup de plaintes et d’abus. Art. 4. Les corneilles sont encore des oiseaux désastreux qui font un tort considérable aux cultivateurs ; lesquelles , après les semences des blés , lorsqu’ils commencent à lever dans la dernière saison, les arrachent et les mettent sur terre. Les habitants des Alleux-le-Roi demandent qu’il leur soit permis de les détruire par les moyens qu’ils trouveront les plus convenables. Art. 5. Lesdits habitants demandent, en outre, qu’il leur soit permis d’éplucher leurs blés, lorsqu’ils en auront besoin, et de faucher les prairies artificielles, lorsqu’ils le jugeront nécessaire, afin d’en éviter le dépérissement. Art. 6. Les droits decontrôle, centième denier, francs-fiefs, et autres établis et tarifés par l’arrêt du conseil de 1722, sont si considérablement augmentés depuis leur établissement, qu’il n’y a plus de règle pour leur perception, qui devient arbitraire par chaque employé, au point que les sujets sont souvent tourmentés pour doublement ou forcement des droits qui n’ont jamais été perçus dans leur principe : ce qui ôte leur tranquillité, et les empêche de finir leurs affaires qui, faute d’être terminées, leur occasionnent des procès dispendieux, que l’Etat peut éviter par un nou-