[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 juin 1791.] niques, à se faire provoquer pour ensuite tirer parti de ces provocations. Or, je demande si la liberté existe dans une assemblée, lorsqu’un homme, en se faisant insulter à dessein, peut en traduire tous les membres devant les tribunaux? Pour moi, je ne pense pas que la liberté existe dans un pays où l’on donne à la malveillance un si terrible droit. Une police trop rigoureuse est plus nuisible qu’utile à la liberté. Si, dans une assemblée primaire, les moindres mouvements d’un patriotisme ardent étaient punis comme des crimes, il n’y aurait plus de liberté : il faudrait y apporter une telle discrétion, une telle modération dans les discours, qu’une certaine classe d’hommes seulement pourrait s’y rendre. Un homme de la campagne, zélé partisan de laRévo-lution, comme ils le sont tous, se trouvant assis à côté d’un de ceux qu’il croit être ses anciens ennemis, ne pourrait lui reprocher son obstination et sa résistance, sans s’exposer à être poursuivi devant les tribunaux, il se retirerait ou garderait un silence forcé, lorsqu’à côté de lui un ci-devant homme puissant déclamerait contre la Révolution ; or, je dis que dans un pays libre tout homme doit savoir soutenir la vérité, et en a le droit, quelque austère, quelque dur que soit son langage. Vous avez vous-mêmes donné l’exemple de la conduite qu’il faut tenir dans les assemblées primaires. Lorsqu’on a porté le trouble dans vos séances, le président a interposé son autorité, que'qnefois même l’Assemblée a pris des mesures plus sévèivs, et toujours le calme s’est rétabli. Si au lieu de cela vous aviez intenté des procédures criminelles contre tous ceux qui avaient troublé vos séances, peut-être l’eussent-elles été plus fréquemment, et l’on eût pu ajuste titre vous accuser de ne pas maintenir la liberté des opinions. 3e pense donc qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur l’amendement de M. Malouet. M. Garai aîné. Lorsque les violences qui enchaîneront la liberté dans les assemblées primaires ne seront que des violences de paroles, sans doute tout cela est remis à la police de l’assemblée ; mais M. d’André n’a pas parlé de ces choses-là. Il a parlé de délits qui, dans une assemblée primaire, attaqueraient la liberté, des délits comme des coups de bâton. . . . Un membre à gauche : Allez donc avec vos coups de bâton. M. Garat ahié... comme des coups d’épée, des menaces même, qui auraient forcé un citoyen actif à s’en éloigner; ces délits ne tombent sur la police d’une assemblée primaire. Il faut des peines pour les réprimer. M. Duport nous dit : niais on a pourvu à ces crimes. C’est éluder la difficulté, il s’agit ici des délits qui ont essentiellement compromis la Constitution, qui l’ont compromise dans la plus essentielle de ses bases : c’est donc un tel délit qui doit être prévu, et auquel on doit infliger une peine. Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée. (L’Assemblée ferme la discussion.) M. Malouet. Monsieur le Président, je convertis ma motion en article additionnel et j’en demande le renvoi aux comités. 61 Plusieurs membres : Aux voix ! aux voix I l’article du comité. M. Malouet. Monsieur le Président, je vous prie de vouloir bien mettre aux voix le renvoi de mon article aux comités. Plusieurs membres : La question préalable sur l’article de M. Maluuet. M. Fe Pelletier de Saiot-Fargean, rapporteur. Il me S; mble qu’ou ne peut pas prononcer la question préalable sur l’article additionnel de M. Malouet, parce qu’il est certain qu’il y aura une peine, non pas une peine portée dans le Gode pénal actuel qui ne renferme que les délits susceptibles de la procédure par jurés, mais il y aura certainement une peine dans le Code pénal de la police correctionnelle contre ceux qui exerceront des violences contre les citoyens. Aussi je ne demande pas la question préalable, mais je demande qu’on passe purement et simplement à l’ordre du jour. M. Rewbelï. J’appuie la demande de renvoi aux comités de l’article de M. Malouet. (L’Assemblée décrète le renvoi aux comités de l’article additionnel de M. Malouet.) M. Le Pelletier de Saint-Fargeau, rapporteur. Je donne une nouvelle lecture de l’article du comité : Art. 1er. « Tous complots ou attentats pour empêcher la réunion ou pour opérer la dissolution d'une assemblée primaire ou d’une assemblée électorale seront punis de la peine de la gêne pendant 15 ans. » {Adopté.) Les articles 2, 3 et 4 sont, après une légère discussion, mis aux voix dans les termes suivants ; Art. 2. « Si des troupes de ligne investissent le lieu des séances desdites assemblées, ou pénètrent dans son enceinte sans l’autorisation ou la réquisition desdites assemblées, le ministre ou commandant qui en aura donné ou contresigné l’ordre, les chefs ou soldats qui i’auront exécuté, seront punis de la peine de la gêne pendant 15 années. » {Adopté.) Art. 3. « Toutes conspirations ou attentats pour empêcher la réunion ou pour opérer iadissolution du Corps législatif; « Tous" attentats contre la liberté individuelle d’un de ses membres seront punis de mort. « Tous ceux qui auront participé auxdites conspirations ou attentats, par les ordres qu’ils auront donnés ou exécutés, subiront aussi la peine portée au présent article. » {Adopté.) Art. 4. « Si des troupes de ligne approchent ou séjournent plus près de 30,0J0 toises de l’endroit où le Corps législatif tiendra ses séances, sans que le Corps législatif en ait autorisé ou requis l'approche ou le séjour, le ministre qui en a aura donné ou contresigné l’ordre, le commandant en chef et le commandant particulier de chaque corps desdites troupes seront punis de la peine de 10 années de gêne. » {Adopté.) M. Fe Pelletier de Saint-Fargeau, rapporteur. Voici l’article 5 :