(Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 septembre 1790.] 683 en leur accordant des provisions sur leurs contrats d’acquisition, a évidemment ratifié cette même acquisition, qui, en consacrant la vente qui ieur avait été faite, a, en quelque sorte, dérogé à la loi qui défendait de vendre au delà de la fixation. Ils n’ont pas dû soupçonner qu’un piège fût caché sous le sceau de l’approbation du monarque; ils ne doivent donc pas être victimes de leur bonne foi. Au surplus, si des considérations d’un autre genre portaient à ne point grever le Trésor national de l’indemnité qui leur est due, n’est-il pas de l’exacte justice qu’ils aient un recours assuré sur leurs vendeurs? N’est-il pas de la sagesse de l’Assemblée nationale d’autoriser ce recours par un décret? Il est de l'exacte justice que les titulaires et ‘propriétaires d'offices acquis depuis l'évaluation faite en exécution de l'éait de 1771, aient un recours assuré sur leurs vendeurs. Rien n’est plus facile à établir que cette proposition. D’abord il est de principe qu’on ne doit pas impunément violer une loi positive, que la transgression de la loi ne doit pas profiter à celui qui s’en est rendu coupable. Or, si les soussignés n’avaient pas le droit d’exercer un recours sur leurs vendeurs pour la portion du prix payé en sus de celui de Dévaluation, les titulaires évaluateurs auraient impunément violé la loi, qui leur défendait de vendre leurs offices au delà de la fixation. Si la perte résultant du mode de remboursement décrété devait tomber, sans aucun espoir de récompense, sur les acquéreurs postérieurs à l’édit de 1771, ceux qui, après avoir évalué leurs offices, les ont vendus beaucoup au-dessus de l’évaluation, tireraient un bénéfice illégitime de leur mépris pour la loi, et la cupidité frauduleuse triompherait de la droiture trop confiante. En second lieu, la loi même que les vendeurs des titulaires soussignés ont transgressée, leur faisait défense de vendre leurs offices au delà de la fixation, sous telles peines qu’il appartiendrait, suivant l'exigence des cas. Le souverain a donc voulu que la peine suivît l’infraction de la loi. Cette peine, il est vrai, il ne l’a pas déterminée. Il a laissé aux ministres de la justice le soin de Détendre ou de la restreindre, de l’aggraver ou de la modérer selon les circonstances. Mais, quelque doive être cette peine, toujours est-il constant que le premier objet d’une loi pénale est la réparation du tort fait à autrui. Ainsi l’obligation de restituer à l’acquéreur l’excédent du prix de son acquisition est une conséquence palpable delà loi, qui, sous une peine indéterminée, défendait de vendre au delà de la fixation. Ainsi le recours dont les soussignés réclament l’exercice ne sera, à proprement parler, que l’article 16 de Dédit de 1771. Si, au contraire, ce recours leur était interdit, les dispositions de cet article deviendraient absolument illusoires, puisque la défense violée ne serait point punie, puisque la peine prononcée ne serait point appliquée, puisque enfin les vendeurs jouiraient sans trouble du fruit de la loi enfreinte, tandis que les acquéreurs supporteraient seuls la perte résultant de cette infraction. C’est donc avec raison qu’on a dit plus haut qu’il était de l’exacte justice que les titulaires et propriétaires d’offices acquis depuis Dévaluation faite en exécution de Dédit de 1771 eussent un recours assuré sur leurs vendeurs. Mais les soussignés ajoutent, qu’il est de la sagesse de l'Assemblée nationale d'autoriser ce recours par un décret. En effet, le but de lout législateur doit être de prévenir, par une loi générale, les contestations particulières. Le but que l’Assemblée nationale paraît s’être proposé d’atteindre est de tarir, par des lois positives, la source des questions problématiques. Or, quoique le recours des titulaires acquéreurs sur les titulaires évaluateurs, ne puisse pas être raisonnablement contesté, il suffit de connaître le caractère des hommes pour être convaincu que, sans un décret formel, chaque réclamation d’un acquéreur deviendrait la matière d’un procès avec son vendeur. Ce sera donc à la fois, Messieurs, protéger la cause de la justice et réprimer les efforts de la chicane, que de consacrer par une loi précise le vœu constant de l’équité. Signé : Demante, ci-devant président en l’élection de Rouen, reçu en 1785. Yvelin de tieville, ci-devant avocat et procureur du roi en la vicomté de l’Eau, reçu en 1789. Delamare, ci-devant procureur du roi au grenier à sel de Rouen, reçu en août 1786. Mariage, ci-devant greffier au grenier à sel de Rouen, reçu en 1780. Dulac de Montereau, procureur du roi de l’ancien bailliage et siège présidial de Rouen. Moulin, ci-devant lieutenant-général criminel du bailliage de Rouen. Ballicorne, ci-devant général provincial des monnaies, au département de Rouen, reçu en 1786. Coquin, ci-devant président au grenier à sel de Rouen, reçu en 1782. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DE JESSÉ. Séance du mardi 7 septembre 1790, au matin (1). La séance est ouverte à neuf heures du matin. M. Castellanet. Je viens faire remarquer à l’Assemblée que M.Roussier, député de Marseille, adonnésa démission par lettre en date du 5 septembre 1789; que cette démission a été acceptée, que M. Peloux, suppléant de M. Roussier, a été admis après vérification préalable de ses pouvoirs ; que par suite de cette admission le suppléant siège dans cette Assemblée depuis cette époque et que cependant, il n’a été fait aucune mention ni de de la démission ni de l’admission dans le procès-verbal du 5 septembre. Je conclus à ce que l'Assemblée veuille bien réparer cette erreur en ordonnant que les faits que je viens de rappeler seront consignés dans le procès-verbal de ce jour. (Cette proposition est adoptée.) M. Vernier, rapporteur du comité des finances , propose de rectifier une erreur qui s’est glissée dans le décret concernant les impositions d’A-mance, par un nouveau décret qui est adopté en ces termes : « L’Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, instruite de l’erreur inter-(1) Cette séance est incomplète au Moniteur. 634 1 Awemblée n&tionale.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |7 septembre 1790.] venue, soit dans l’impression, soit dans la transcription du décret du 24 août dernier concernant les impositions du ban ou territoire d’Amance, par lequel il est ordonné que, dans le cas où des communautés auraient indûment imposé des fonds non situés sur. leur territoire, il serait incessamment procédé sur l’avis des districts et départements, à la radiation des cotes, etc. « Le mot non se trouvant oublié, change totalement le sens dudit décret; pourquoi il est ordonné que ce mot sera rétabli, en sorte que l’on lise : des fonds non situés sur leur territoire.» M* Regnand (de Saint-Jean-d' Angély). Les procès-verbaux contiennent quelques inexactitudes auxquelles on pourrait obvier facilement si l’on prolongeait de deux jours seulement le terme qui a été fixé à l’imprimeur pour en faire la remise; de la sorte, les secrétaires-rédacteurs auraient le temps de corriger les épreuves. M. Rouclie. Un pareil délai pourrait ramener les retards de publication contre lesquels l'Assemblée a voulu remédier; mais, pour parer à tous les inconvénients, je propose de charger nominativement de la correction des épreuves, le sieur Du Groissy, secrétaire-commis au bureau des procès-verbaux. (Cette proposition est adoptée.) M. Rlnocheau, secrétaire , donne lecture du procès-verbal . de la séance d’hier, IL est adopté sans réclamation* M. Merlin fait lecture de quelques articles additionnels au titre XIV du décret sur l’ordre judiciaire, ajournés dans la séance d’hier. Après quelques courtes observations, ces articles sont décrétés en ces termes : Art. 19. Les chancelleries établies près les cours supérieures et les présidiaux, ensemble l’usage des lettres-rüÿàttx qui s’y expédient, demeureront supprimées aux époques respectives, fixées par les aitidlés 15 et 17 ci-dessus. t Art. 20. En conséquence, et à compter des mêmes époques, il suffira dans tous les cas où les-dites lettres étaient ci-devant nécessaires, de se pourvoir par-devant les juges compétents pour la connaissance immédiate du fond; et l’on se conformera, pour le bénéfice d’inventaire, aux lois ;de chaque lieu, autres que celles qui requièrent à cet effet des lettres-royaux, « Art. 21. Quant aux chancelleries créées par l’éditdu moisde juin 177 1 , près les sièges royaux, il en sera provisoirement établi une près chacun des tribunaux de districts» a l’effet de sceller les lettres de ratification pour tout son ressort. « Art* 22. Eu conséquence, lorsque dans le ressort d'un tribunal de district, il ne se trouvera qu’une desdites chancelleries, elle sera transférée près ce tribunal. « S’il s’en trouve plusieurs, les plus anciens des conservateurs des hypothèques et le plus ancien desdits greffiers expéditionnaires seront de préférence admis à l’exercice de la chancellerie qui sera établie près le tribunal de district. « Dans l’un et l’autre cas, l’office de garde des sceaux, sera, en vertu du présent décret, et sans qu’il soit besoin de provision ni de commissions particulières, exeicé gratuitement à tour de rôle, et suivant l’ordre üu tableau, par les juges du tribunal de district. « Le tout, sauf à statuer par la suite ce qu’il appartiendra pour le département de Paris, et sans ripn innover à l’égard des anciens ressorts des cours supérieures qui n’ont pas enregistré l’édit du mois de juin 1771. » M. II uot propose un article additionnel qui est décrété en ces termes : « Art. 23. Les contrats assujettis à l’insinuation, au sceau ou à la publication, seront aussi provisoirement insinués, scellés et publiés près le tribu -al de district, dans l’arrondissement duquel les immeubles qu’ils auront pour objet, seront situés, sans avoir égard aux anciens ressorts. » M. Ramel-üogaret proposé un autre article additionnel portant : « A compter de la présente année, lés registres des actes de baptême, dé mariage et de sépnltiifë seront déposés dans les greffes des tribunaux de district, cota nié ils Pétaient précédemment aux greffes des sièges rôvaux, suivant la déclaration de 1736. » Plusieurs mertïbres demandent le renvoi de Cet article au Comité de jüdiCàtürë, pour ÿ être examiné. Le renvoi est ordonné. M. Ife Président informe l'Assemblée que les greffiers du parlement et les huissiers-priseurs demandent à être admis à là barre pour présenter à l’Assemblée Un projet de liquidatibn de leurs offices. L’Assemblée arrêté qü’ils seront entendus aü comité dé judicature* M le Président. M. Dupont» député de Nemours, demande à faire une motion sur les scènei scandaleuses qui ont eu liéii suf lu terrasse de§ Tuileries, pendant la séance du jeudi soir, 2 dé èë mois. (Un grand silence s'établit.) M. Dupont, député de Nemours . J’ai à vous exposer des faits auxquels votre amour pour la Constitution et votre zélé» pour achever prompte-* ment et utilement vos travaux, vous obligent de donner une atiention sérieuse. Je les aurais déférés à votre justice et à votre prudence, dès l’instant même où quelqües-üns d’entre eux vous ont frappés, si je n’avais regarde comme un de* voir d’examiner leurs rapports et de pouvoir vous parler avec plus de certitude des manœuvres qui les ont accompagnés. Vous ne pouvez pas vous dissimuler que les ennemis de la Constitution décrétée par vous et acceptée par le roi, soit ceux qui regrettent l’ancien ordre de choses, soit ceux à qui l’anarchie procure une autorité coupable, soit les agents des puissances étrangères qui, dans l’état politique de l’Europe, peuvent désirer de distraire votre attention et de diminuer vos forces par des troubles intérieurs, Cherchent à les propager en France avec une cruelle activité. Dans le désespoir qui les a saisis, lorsqu'ils ont vu la valeur héroïque des gardes nationales rétablir l’ordre à Nancy, garantir à jamais la discipline dans l’ar* tnée, en imposer aux ennemis du dehors, assurer la gloire et la liberté de la nation, ils n’ont plus envisagé qu'un moyeu pour empêcher la paix de renaître généralement, et ce moyen a été de fo* monter des séditions dans Paris mê ne. Ii leur en fallait pour soutenir le courage abattu de leurs émissaires» pour montrer qu’ils ne sont pas altérés avec leurs alliés de Lorraiue, pour prolonger leur désastreux empire sur les brigands qu’ils