359 SÉANCE DU 17 PRAIRIAL AN II (5 JUIN 1794) - N° 64 64 Un membre [LECOINTRE, de Versailles] demande la parole pour une motion d’ordre : après quelques observations, il fait différentes propositions relatives à la vente des bestiaux gras; il en demande le renvoi au comité de salut public (1) . LECOINTRE (de Versailles) : Citoyens collègues, les herbages des départements qui composaient la ci-devant Normandie, et tous ceux destinés ordinairement à l’engrais des bœufs et autres bestiaux qui font partie de la nourriture de l’espèce humaine, ont été changés complètement cette année. Déjà une partie de ces bestiaux sont gras, et devraient, à fur et mesure, sortir des herbages pour être remplacés par d’autres bestiaux maigres, en proportion de la crue de ces mêmes herbages. Les herbagers ne s’empressent pas d’amener ces bestiaux gras aux marchés de Neuf-Bourg, Poissy et Sceaux, parce que : 1° la loi qui les autorisait à vendre de gré à gré ayant été rapportée, il n’y a point de décret qui fixe le mode à observer dans les marchés pour vente des bestiaux vivants, et empêcher l’arbitraire entre le vendeur et l’acheteur; 2° Parce que ces herbagers vendent partiellement leurs bœufs sur les lieux à des rembiniers, qui ensuite les envoient à destination aux bouchers de campagne, où la loi du maximum étant mal exécutée, ils en tirent un prix bien au dessus de celui que peuvent mettre les bouchers des grandes communes, où la loi est respectée; ce qui prive Ise bouchers de Versailles et autres lieux de la faculté d’acheter concurremment avec les bouchers des petites communes. D’où il est résulté que presque tous les bouchers de ces grandes commîmes ont cessé leur commerce, tandis que celui des bouchers des campagnes est en pleine activité. Il est de fait que beaucoup de ces derniers, qui ne livraient que 7 à 8 veaux avec un bœuf ou une vache, ou 6 ou 8 moutons par décade, en débitent aujourd’hui dix fois plus. Ces mêmes bouchers vendent bien aux habitants de leur commune au prix du maximum la quantité fixée par la municipalité, mais l’excédant, qui est bien plus considérable, ils l’exportent ou vendent aux passants à un prix arbitraire, beaucoup au-dessus de celui fixé par la loi. De là il résulte un double abus : la ruine des bouchers des grandes communes qui sont aujourd’hui sans état, et la privation qu’éprouvent les citoyens qui n’ont pas la faculté de tirer la viande de la campagne. L’arbitrage dans la vente et l’achat des bestiaux, soit en gros soit en détail, ôtant toutes espèces de concurrence pour les bouchers des grandes communes, ceux de la campagne feraient avant trois mois le commerce exclusif de la boucherie, seraient arbitres du prix, et (1) P.V., XXXIX, 55. anéantiraient la ressource des marchés de Neuf-Bourg, Poissy et autres. Cet anéantissement s’opérerait en faisant acheter par leur allidés les bœufs et autres bestiaux dans les herbages, et au sein même de l’abondance nous éprouvrions encore la disette. Pour remédier à ces désordres, et remettre les choses dans leur état naturel, je vous proposerai de renvoyer au comité de salut public et à la commission de commerce et subsistances l’objet de cette motion, et de les charger de vous présenter, dans le courant de la décade prochaine, un projet de décret d’après les bases suivantes, ou autres qu’ils croiront plus sage. 1°) Les municipalités où sont situés les herbages destinés aux engrais seront tenues d’en faire sortir et conduire dans les marchés de Bourg-Neuf, Poissy, Sceaux et autres de la République, les bœufs, vaches, et autres bestiaux, au fur et à mesure qu’ils seront gras, et empêcheront qu’il n’en soit vendu aucun sur les lieux, excepté dans les cas ci-après. 2°) Les herbagers seront tenus de déclarer à leurs municipalités le nombre, la quantité de bestiaux qui sont dans leurs herbages, et au fur et à mesure qu’ils en sortiront, les propriétaires déclareront pour quel marché ils sont destinés. 3°) Les municipalités enverront copie de ces déclarations, chaque décade, à la commission de commerce et subsistances de la République. 4°) Aucun citoyen ne pourra acheter de bestiaux destinés à la boucherie dans les herbages ou chez les fermiers, cultivateurs, propriétaires, sans être muni d’une commission en bonne forme de la commission des subsistances de la République; ceux qui en seront pourvus, seront tenus de la faire viser par la municipalité du lieu. 5°) Tout citoyen qui viendra acheter des bestiaux sans y être autorisé par la commission des subsistances, et avant de remplir les formalités prescrites à l’article ci-dessus, sera condamné à une amende qui ne pourra être moindre de 300 liv. ni excéder 3.000 liv. Cette amende sera commune et solidaire entre le vendeur et l’acheteur. 6°) Les citoyens munis d’une commission pour les armées ou service extraordinaire pour la République seront tenus de prendre un acquit-à-caution dans les municipalités du lieu, contenant le nombre de bestiaux achetés, leur destination, et soumission de rapporter cet acquit-à-caution dans les trois mois, visé par la municipalité du lieu de destination, à peine de 3.000 liv. d’amende pour chaque contravention. 7°) Les municipalités des villes et campagnes tiendront la main à ce que la loi du maximum sur le prix de la viande ne puisse en aucun cas être enfreinte, même à l’égard des citoyens qui ne seraient pas habitants de la commune, et ce sous les peines portées par la loi du maximum (1). Le renvoi est décrété en ces ternies : « La Convention nationale renvoie au comité de salut public la motion d’un de ses membres, tendante à ce qu’aucun des bestiaux gras ne (1) Mon., XX, 659; C. Eg., n° 657; Audit, nat., n° 621. 359 SÉANCE DU 17 PRAIRIAL AN II (5 JUIN 1794) - N° 64 64 Un membre [LECOINTRE, de Versailles] demande la parole pour une motion d’ordre : après quelques observations, il fait différentes propositions relatives à la vente des bestiaux gras; il en demande le renvoi au comité de salut public (1) . LECOINTRE (de Versailles) : Citoyens collègues, les herbages des départements qui composaient la ci-devant Normandie, et tous ceux destinés ordinairement à l’engrais des bœufs et autres bestiaux qui font partie de la nourriture de l’espèce humaine, ont été changés complètement cette année. Déjà une partie de ces bestiaux sont gras, et devraient, à fur et mesure, sortir des herbages pour être remplacés par d’autres bestiaux maigres, en proportion de la crue de ces mêmes herbages. Les herbagers ne s’empressent pas d’amener ces bestiaux gras aux marchés de Neuf-Bourg, Poissy et Sceaux, parce que : 1° la loi qui les autorisait à vendre de gré à gré ayant été rapportée, il n’y a point de décret qui fixe le mode à observer dans les marchés pour vente des bestiaux vivants, et empêcher l’arbitraire entre le vendeur et l’acheteur; 2° Parce que ces herbagers vendent partiellement leurs bœufs sur les lieux à des rembiniers, qui ensuite les envoient à destination aux bouchers de campagne, où la loi du maximum étant mal exécutée, ils en tirent un prix bien au dessus de celui que peuvent mettre les bouchers des grandes communes, où la loi est respectée; ce qui prive Ise bouchers de Versailles et autres lieux de la faculté d’acheter concurremment avec les bouchers des petites communes. D’où il est résulté que presque tous les bouchers de ces grandes commîmes ont cessé leur commerce, tandis que celui des bouchers des campagnes est en pleine activité. Il est de fait que beaucoup de ces derniers, qui ne livraient que 7 à 8 veaux avec un bœuf ou une vache, ou 6 ou 8 moutons par décade, en débitent aujourd’hui dix fois plus. Ces mêmes bouchers vendent bien aux habitants de leur commune au prix du maximum la quantité fixée par la municipalité, mais l’excédant, qui est bien plus considérable, ils l’exportent ou vendent aux passants à un prix arbitraire, beaucoup au-dessus de celui fixé par la loi. De là il résulte un double abus : la ruine des bouchers des grandes communes qui sont aujourd’hui sans état, et la privation qu’éprouvent les citoyens qui n’ont pas la faculté de tirer la viande de la campagne. L’arbitrage dans la vente et l’achat des bestiaux, soit en gros soit en détail, ôtant toutes espèces de concurrence pour les bouchers des grandes communes, ceux de la campagne feraient avant trois mois le commerce exclusif de la boucherie, seraient arbitres du prix, et (1) P.V., XXXIX, 55. anéantiraient la ressource des marchés de Neuf-Bourg, Poissy et autres. Cet anéantissement s’opérerait en faisant acheter par leur allidés les bœufs et autres bestiaux dans les herbages, et au sein même de l’abondance nous éprouvrions encore la disette. Pour remédier à ces désordres, et remettre les choses dans leur état naturel, je vous proposerai de renvoyer au comité de salut public et à la commission de commerce et subsistances l’objet de cette motion, et de les charger de vous présenter, dans le courant de la décade prochaine, un projet de décret d’après les bases suivantes, ou autres qu’ils croiront plus sage. 1°) Les municipalités où sont situés les herbages destinés aux engrais seront tenues d’en faire sortir et conduire dans les marchés de Bourg-Neuf, Poissy, Sceaux et autres de la République, les bœufs, vaches, et autres bestiaux, au fur et à mesure qu’ils seront gras, et empêcheront qu’il n’en soit vendu aucun sur les lieux, excepté dans les cas ci-après. 2°) Les herbagers seront tenus de déclarer à leurs municipalités le nombre, la quantité de bestiaux qui sont dans leurs herbages, et au fur et à mesure qu’ils en sortiront, les propriétaires déclareront pour quel marché ils sont destinés. 3°) Les municipalités enverront copie de ces déclarations, chaque décade, à la commission de commerce et subsistances de la République. 4°) Aucun citoyen ne pourra acheter de bestiaux destinés à la boucherie dans les herbages ou chez les fermiers, cultivateurs, propriétaires, sans être muni d’une commission en bonne forme de la commission des subsistances de la République; ceux qui en seront pourvus, seront tenus de la faire viser par la municipalité du lieu. 5°) Tout citoyen qui viendra acheter des bestiaux sans y être autorisé par la commission des subsistances, et avant de remplir les formalités prescrites à l’article ci-dessus, sera condamné à une amende qui ne pourra être moindre de 300 liv. ni excéder 3.000 liv. Cette amende sera commune et solidaire entre le vendeur et l’acheteur. 6°) Les citoyens munis d’une commission pour les armées ou service extraordinaire pour la République seront tenus de prendre un acquit-à-caution dans les municipalités du lieu, contenant le nombre de bestiaux achetés, leur destination, et soumission de rapporter cet acquit-à-caution dans les trois mois, visé par la municipalité du lieu de destination, à peine de 3.000 liv. d’amende pour chaque contravention. 7°) Les municipalités des villes et campagnes tiendront la main à ce que la loi du maximum sur le prix de la viande ne puisse en aucun cas être enfreinte, même à l’égard des citoyens qui ne seraient pas habitants de la commune, et ce sous les peines portées par la loi du maximum (1). Le renvoi est décrété en ces ternies : « La Convention nationale renvoie au comité de salut public la motion d’un de ses membres, tendante à ce qu’aucun des bestiaux gras ne (1) Mon., XX, 659; C. Eg., n° 657; Audit, nat., n° 621. 360 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE puisse être vendu qu’aux différens marchés de Neuf-bourg, Poissy, Sceaux et autres lieux où la vente avoit coutume de s’en faire, et que la loi qui ordonnoit la vente des bestiaux vivans de gré à gré ayant été raportée, il soit prescrit un mode déterminé pour la vente de ces bestiaux au marché, sans qu’en aucun cas nul citoyen puisse acheter ailleurs qu’au marché, des bestiaux gras destinés à la boucherie, excepté ceux pourvus de pouvoirs donnés par la commission de commerce et subsistances de la République, en remplissant par eux les formalités qui seront prescrites par le décret à intervenir » (1). 65 Un membre [GOULY], au nom des comités de marine, des colonies et des finances, fait un rapport et propose un projet de décret sur la pétition du citoyen Gauché, réfugié de Tabago, persécuté et ruiné par les Anglais (2). GOULY, au nom du comité de la marine : Citoyens, c’est d’une nouvelle victime de la fureur et de la barbarie britanniques que je viens vous entretenir : c’est d’un Français jeté et laissé à fond de cale d’une corvette pendant 5 mois, à qui on ne donnait que la moitié d’une ration ordinaire de matelot, pour avoir combattu vigoureusement dans le fort de l’ile de Tabago, où il s’était retiré, lorsque cette île s’est vendue et livrée, par les aristocrates et les royalistes qui y dominaient, aux esclaves de l’imbécile George. Le citoyen Gauché est la victime dont je parle : il a été dépouillé de tout ce qu’il possédait, inhumainement maltraité, enfin déporté comme prisonnier d’Etat en Angleterre, pour avoir constamment résisté aux perfides insinuations des partisans de l’exécrable Pitt, pour s’être déclaré l’un de leurs plus cruels ennemis, et s’être montré, avant et après l’invasion de Tabago, par ces lâches insulaires, digne du nom français. Echangé à Jersey, et de retour dans sa patrie, il s’y trouve dans le plus pressant besoin, et réclame de votre justice et de votre bienfaisance des secours qui puissent le mettre à même d’y subvenir et d’attendre qu’il ait été statué sur les indemnités auxquelles il a droit, en vertu du décret du 11 ventôse, qui en assure aux patriotes dont les propriétés ont souffert par l’invasion des ennemis. Le citoyen Gauché est dans cette catégorie, puisqu’il a été absolument spolié par les An-(1) P.V., XXXIX, 55. Minute de la main de Lecointre (C 304, pl. 1124, p. 24). Décret n° 9402. J. Fr., n° 620 (selon ce journal, c’est Legendre qui a demandé le renvoi au C. de S.P., l’article se terminant ainsi : « Legendre demande le renvoi des observations de Lecointre au Comité de Salut public, et l’invite à se concerter avec Robert Lindet, qui a des renseignements sur la situation des herbages de la ci-devant Normandie »; J. Sablier, n° 1362; Débats, nos 624, p. 262 et 625, p. 297; M.U., XL, 285; Ann. R.F., n° 189; J. Mont., n° 41; Mes s. soir, n° 657; C. Univ., n° 888; Audit, nat., n° 621. (2) P.V., XXXIX, 56. glais, arraché de son domicile et conduit prisonnier dans cette terre souillée de tous les crimes, parce qu’il est patriote. Notre collègue Crassous, en mission dans le département de Seine et Oise, le connaît parfaitement et atteste, par sa lettre au comité des secours publics, du 25 ventôse, tout ce que je viens de vous en dire. La Convention nationale a déjà secouru deux de ses compagnons d’infortune, les citoyens Peyre et Gamaud; elle ne rejettera pas la demande qui lui est faite par ses comités de marine, des colonies et des finances, d’un secours provisoire pour ce patriote malheureux. Voici le projet de décret que je suis chargé de vous présenter : La Convention nationale, après avoir entendu le rapport des comités de marine, des colonies et des finances, sur la pétition du citoyen Gauché, habitant de l’ile de Tabago, spolié par les Anglais, arraché de son domicile et déporté en Angleterre comme prisonnier d’Etat, décrète : Art. I. - Il sera payé par la trésorerie nationale, à vue du présent décret, au citoyen Gauché, la somme de 600 liv. à titre de secours provisoire. «II. - Ce secours sera imputé sur l’indemnité à laquelle il a droit pour avoir été dépouillé de ses propriétés à l’ile de Tabago, par l’invasion des ennemis. « III. - Le comité des finances demeure chargé de déterminer cette indemnité. Le présent décret ne sera imprimé que dans le bulletin de correspondance (1). On observe que le comité des secours publics doit faire un rapport général sur tous les réfugiés de Tabago; en conséquence, on demande et la Convention décrète le renvoi du projet de décret au comité des secours publics (2) . 66 Le même membre [GOULY], au nom du comité de marine et des colonies, propose le projet de décret suivant. « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de marine et des colonies, décrète : « Art. I. - A compter du 1er messidor prochain, les parens des ouvriers non-navigans, requis dans des ports qui nécessitent leur habitation hors de leur domicile ordinaire, jouiront également, dans le même cas et dans les mêmes proportions, des secours accordés aux familles des défenseurs de la patrie, par les lois des 21 pluviôse, 14 prairial derniers, et par les lois antérieures. «II. - Les secours seront supprimés aux familles de ceux qui demanderoient ou des congés ou à se retirer du service. » Le présent décret sera inséré au bulletin de correspondance. » (1) Mon., XX, 658. (2) P.V., XXXIX, 56. Minute de la main de Gouly. J. Sablier, n° 1352; voir ci-après, séance du 18 prair., n° 35. 360 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE puisse être vendu qu’aux différens marchés de Neuf-bourg, Poissy, Sceaux et autres lieux où la vente avoit coutume de s’en faire, et que la loi qui ordonnoit la vente des bestiaux vivans de gré à gré ayant été raportée, il soit prescrit un mode déterminé pour la vente de ces bestiaux au marché, sans qu’en aucun cas nul citoyen puisse acheter ailleurs qu’au marché, des bestiaux gras destinés à la boucherie, excepté ceux pourvus de pouvoirs donnés par la commission de commerce et subsistances de la République, en remplissant par eux les formalités qui seront prescrites par le décret à intervenir » (1). 65 Un membre [GOULY], au nom des comités de marine, des colonies et des finances, fait un rapport et propose un projet de décret sur la pétition du citoyen Gauché, réfugié de Tabago, persécuté et ruiné par les Anglais (2). GOULY, au nom du comité de la marine : Citoyens, c’est d’une nouvelle victime de la fureur et de la barbarie britanniques que je viens vous entretenir : c’est d’un Français jeté et laissé à fond de cale d’une corvette pendant 5 mois, à qui on ne donnait que la moitié d’une ration ordinaire de matelot, pour avoir combattu vigoureusement dans le fort de l’ile de Tabago, où il s’était retiré, lorsque cette île s’est vendue et livrée, par les aristocrates et les royalistes qui y dominaient, aux esclaves de l’imbécile George. Le citoyen Gauché est la victime dont je parle : il a été dépouillé de tout ce qu’il possédait, inhumainement maltraité, enfin déporté comme prisonnier d’Etat en Angleterre, pour avoir constamment résisté aux perfides insinuations des partisans de l’exécrable Pitt, pour s’être déclaré l’un de leurs plus cruels ennemis, et s’être montré, avant et après l’invasion de Tabago, par ces lâches insulaires, digne du nom français. Echangé à Jersey, et de retour dans sa patrie, il s’y trouve dans le plus pressant besoin, et réclame de votre justice et de votre bienfaisance des secours qui puissent le mettre à même d’y subvenir et d’attendre qu’il ait été statué sur les indemnités auxquelles il a droit, en vertu du décret du 11 ventôse, qui en assure aux patriotes dont les propriétés ont souffert par l’invasion des ennemis. Le citoyen Gauché est dans cette catégorie, puisqu’il a été absolument spolié par les An-(1) P.V., XXXIX, 55. Minute de la main de Lecointre (C 304, pl. 1124, p. 24). Décret n° 9402. J. Fr., n° 620 (selon ce journal, c’est Legendre qui a demandé le renvoi au C. de S.P., l’article se terminant ainsi : « Legendre demande le renvoi des observations de Lecointre au Comité de Salut public, et l’invite à se concerter avec Robert Lindet, qui a des renseignements sur la situation des herbages de la ci-devant Normandie »; J. Sablier, n° 1362; Débats, nos 624, p. 262 et 625, p. 297; M.U., XL, 285; Ann. R.F., n° 189; J. Mont., n° 41; Mes s. soir, n° 657; C. Univ., n° 888; Audit, nat., n° 621. (2) P.V., XXXIX, 56. glais, arraché de son domicile et conduit prisonnier dans cette terre souillée de tous les crimes, parce qu’il est patriote. Notre collègue Crassous, en mission dans le département de Seine et Oise, le connaît parfaitement et atteste, par sa lettre au comité des secours publics, du 25 ventôse, tout ce que je viens de vous en dire. La Convention nationale a déjà secouru deux de ses compagnons d’infortune, les citoyens Peyre et Gamaud; elle ne rejettera pas la demande qui lui est faite par ses comités de marine, des colonies et des finances, d’un secours provisoire pour ce patriote malheureux. Voici le projet de décret que je suis chargé de vous présenter : La Convention nationale, après avoir entendu le rapport des comités de marine, des colonies et des finances, sur la pétition du citoyen Gauché, habitant de l’ile de Tabago, spolié par les Anglais, arraché de son domicile et déporté en Angleterre comme prisonnier d’Etat, décrète : Art. I. - Il sera payé par la trésorerie nationale, à vue du présent décret, au citoyen Gauché, la somme de 600 liv. à titre de secours provisoire. «II. - Ce secours sera imputé sur l’indemnité à laquelle il a droit pour avoir été dépouillé de ses propriétés à l’ile de Tabago, par l’invasion des ennemis. « III. - Le comité des finances demeure chargé de déterminer cette indemnité. Le présent décret ne sera imprimé que dans le bulletin de correspondance (1). On observe que le comité des secours publics doit faire un rapport général sur tous les réfugiés de Tabago; en conséquence, on demande et la Convention décrète le renvoi du projet de décret au comité des secours publics (2) . 66 Le même membre [GOULY], au nom du comité de marine et des colonies, propose le projet de décret suivant. « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de marine et des colonies, décrète : « Art. I. - A compter du 1er messidor prochain, les parens des ouvriers non-navigans, requis dans des ports qui nécessitent leur habitation hors de leur domicile ordinaire, jouiront également, dans le même cas et dans les mêmes proportions, des secours accordés aux familles des défenseurs de la patrie, par les lois des 21 pluviôse, 14 prairial derniers, et par les lois antérieures. «II. - Les secours seront supprimés aux familles de ceux qui demanderoient ou des congés ou à se retirer du service. » Le présent décret sera inséré au bulletin de correspondance. » (1) Mon., XX, 658. (2) P.V., XXXIX, 56. Minute de la main de Gouly. J. Sablier, n° 1352; voir ci-après, séance du 18 prair., n° 35.