[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j 3 "à™ ter *1" 9" 611 il avait en dépôt des sucres bruts, mais qu’il ne pouvait les vendre, par la raison qu’il n’en con¬ naissait pas le propriétaire, deux maisons de commerce étant en contestation sur cet objet et l’aiïaire étant pendante à un tribunal. Voilà, reprend Villers, la ruse dont se servent les accapareurs. Ils s’entendent tacitement pour se disputer publiquement et juridique¬ ment leurs marchandises. Pendant ce temps-là le peuple souffre; ses besoins deviennent plus urgents, les approvisionnements manquent, et c’est où ces infâmes spéculateurs veulent en venir, pour réduire le peuple à la misère, pour faire hausser le prix de leurs marchan¬ dises et mettre à contribution les citoyens. Les marchands de Paris, trompés dans leur espoir, ont porté leurs plaintes aux comités dont je suis le rapporteur. C’est en leur nom que je vous propose de passer à l’ordre du jour, motivé sur ce que rien ne doit arrêter la libre circulation des marchandises et des denrées, et sur ce que les sucres en question doivent être vendus, sauf à en remettre le montant à celui qui en sera déclaré le véritable propriétaire. Cette proposition est adoptée. Un rapporteur [Voulland (1)1, au nom du comité de sûreté générale, dénonce le citoyen Ducray-Duménil, rédacteur d’un écrit pério¬ dique, comme s’étant permis dans sa feuille du 12 nivôse, c’est-àrdire le lendemain du jour où les assignats à face royale démonétisées ne pouvaient plus avoir cours, l’annonce d’un em¬ prunt en assignats démonétisés. H propose et la Convention adopte le décret suivant : « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport qui lui a été fait par son comité de sûreté générale, décrète que le nommé Ducray-Duménil, rédacteur d’un écrit périodique intitulé ; Affiches, annonces et avis divers, ou journal géné¬ ral de France, sera détenu dans une maison d’ar¬ rêt jusqu’à nouvel ordre. « La Convention nationale décrète que le rapport et le décret seront insérés dans le « Bul¬ letin » (2). » Compte kendu du Moniteur universel (3). Voulland, au nom du comité de sûreté générale. La Convention nationale, toujours occupée des moyens qui peuvent tendre plus efficace¬ ment à établir sur des bases immuables notre gouvernement républicain, trouve sans cesse, malgré tous ses efforts, des agents plus ou moins actifs de la coalition royale, qui cherchent à entraver ses mesures, et à persuader, s’il était possible, qu’elles n’ont pas été sérieusement adoptées, et qu’on peut sans danger se dispen¬ ser d’y déférer. Vous avez vu, citoyens, tout ce qu’on a fait pour discréditer nos assignats républicains, lorsque les fédéralistes, d’accord avec tous les contre-révolutionnaires de toutes les couleurs, (1) D’après la minute du décret qui existe aux Archives nationales, carton C 287, dossier 852. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 256. (3) Moniteur universel [n° 105 du 15 nivôse an II (samedi 4 janvier 1794), p. 424, col. 1]. Bulletin de la Convention nationale, séance du 4e jour de la 2e décade du 4° mois de l’an II de la République une et indivisible (vendredi 3 janvier 1794). semblaient menacer l’unité et l’indivisibilité de notre République; les agioteurs, qui sont à l’affût des moindres événements et qui spéculent sur tout, s’empressèrent à cette époque d’acca¬ parer tous les assignats à face royale. Oubliant, pour cette fois, leur intérêt devant cette effigie dont ils ne peuvent pas se détacher, ils ne fai¬ saient pas difficulté de les acheter à huit et même dix pour cent de bénéfice. Il fallut déjouer cette perfide manœuvre ; on vous en présenta le moyen facile dans le décret qui a, le 31 juillet dernier, démonétisé les assignats à face royale, et par une loi postérieure, devenue absolument indispensable pour assurer l’exécution de la première, vous avez été obligés de fixer un terme, après lequel les assignats démonétisés ne seront plus reçus dans les caisses nationales, même en paiement de l’emprunt forcé. Votre décret du 24 frimaire a fixé le terme fatal pour se défaire des assignats démonétisés au 11 ni¬ vôse (31 décembre 1793, vieux style.) L’article 16 de la loi que je viens de citer porte que tous les citoyens qui, après le 12 ni¬ vôse (1er janvier 1794, vieux style) auront conservé des assignats à face royale démoné¬ tisés, seront tenus de les porter sans délai aux municipalités, qui les feront annuler et brûler de suite aux séances publiques. L’article 17 veut que tous ceux qui ne se se¬ ront pas conformés à l’article précédent, et qui, Après le 1er ventôse (19 février 1794, vieux style) seraient trouvés possédant des assignats démonétisés, seront considérés comme suspects, à moins qu’ils ne rapportent des preuves cons¬ tantes de leur civisme. Telle est la loi que vous avez portée; pour en rendre l’exécution plus prompte, vous avez voulu que son insertion au Bulletin du lende¬ main du jour où elle a été rendue, tînt lieu de publication. Si une loi aussi instante devait être méconnue et violée, on ne devait pas s’attendre que ce serait à Paris, où mille et un journaux répètent dans toutes les rues de cette commune le résul¬ tat de vos séances, et les décrets qui y ont été rendus. Cependant le citoyen Ducray-Dumenü, rédacteur d’un écrit périodique intitulé • Affiches, annonces et avis divers, ou Journal général de France, s’est permis d’insérer dans sa feuille du duodi 12 nivôse, c’est-à-dire le lendemain du jour où les assignats à face royale démonétisés ne pouvaient plus avoir cours, l’avertissement suivant : « On désire emprunter en deux parties « 60,000 livres en assignats démonétisés; s’a-« dresser à Tiron, notaire, rue Saint-Denis, « n° 44. » Un de nos collègues qui a sans cesse les yeux ouverts sur tous les agioteurs, qui les pour¬ chasse et les découvre partout où ils se croient à l’abri de toute recherche, l’infatigable Cam-bon s’empressa hier de venir dénoncer à votre comité de sûreté générale le n° 366 des Petites affiches de Paris, où se trouve inséré l’avis dont je vous ai donné connaissance. Il fut sur-le-champ décerné un mandat d’amener contre le rédacteur des Affiches et contre le notaire qu’on désignait pour recevoir un papier-mon¬ naie démonétisé qui n’a pas plus de valeur qu’un faux assignat. Ces deux individus ont été entendus séparé¬ ment. Il est résulté de leur interrogatoire que le notaire a remis, le 6 nivôse, au rédacteur des Affiches, la note qui a justement réveillé tout