711 [Assemblée nationale.] AR€ïHYES PARLEMENTAIRES. [26 février 179Q.J Dée sur le nom quelle donnera au département de Versailles. Quelques personms réclament sur ce que le tra-vail du comité est iocomplet. M. le marquis de Foucault. Je demande la question préalable sur cet objet, et je désire qu’on passe à l’ordre du jour. M. Bureaux de Pusy. La division du royaume-est à l’ordre du jour, la dénomination des départements fait partie de la division du royaume; votre comité vous présente ses vues, et je crois qu’il est instant de s’en occuper. Votre comité pense que vous devez cesser d’accorder une suprématie à une ville sur une autre, et je pense avec lui que le moyen de détruire cette suprématie, est de ne pas donner aux départements le nom du chef-lieu. M. le baron de Cernon. Ce qui a surtout déterminé votre comité à ne pas donner aux départements le nom du chef-lieu, c’est que l’Assemblée a autorisé les alternats, et qu’il devient alors impossible de donner plusieurs noms à un département dont les assemblées seront tenues dans plusieurs villes. Quelques personnes s’obstinent encore à demander la question préalable. M. Target. Les anciennes dénominations ne peuvent pas absolument subsister ; il n’est pas moins important de détruire l’aristocratie des villes qu’il ne l’était de détruire celle des ordres ; je pense que �Assemblée doit rejeter la question préalable. M. l’abbé Manry. Je ne saurais apercevoir l’importance que le préopinant attache à la dénomination des départements. J'observe que cette dénomination ne pourra jamais être bien faite. Il faut conserver servilement les noms de l’ancien esclavage, et conserver aussi, par exemple, le nom du royaume de France. J’ai dit que la dénomination ne pourra jamais être bien faite-, parce que nommer un département du nom de la Seine, ce n’est pas Sxer clairement .le nom du chef-lieu, puisque la Seine baigne plusieurs chefs-lieux. jusqu’à présent lés marins ont constamment appelé la rivière de Rouen la Seine, celle de Bordeaux la Garonne . Peut-être un jour pourrez-vous donner aux chefs-lieux le nom des grands hommes qui y auront pris naissance. Mais rien ne s’oppose, selon moi, à ce que nous conservions aux départements les noms des villes des chefs-lieux ; lorsque le chef-lieu changera de ville, il: changera de nom : voilà mon dernier avis. M. le eosnte de Mirabeau. Il me semble que le préopmant ne s’est pas fait une idée nette de ce que le comité se propose en donnant une nouvelle dénomination aux départements : Rome fut toujours; Rome, depuis César jusqu’à Claude, et cependant César avait l'empire du génie et l’autre celui de l’extrême imbécillité. On vous a proposé d’indiquer les chefs-lieux des départements par des numéros; je m’élève contre cet avis ; car l’amour-propre humain qui se replie en tout sens, sans nous abandonner, pourrait bien persuader un jour que le n° 24 ne vaut pas les nos 1 et 2. Il faut donner une dénomination nouvelle aux départements ; une dénomination Fixe la raison, et nos principes, d’accord avecla raison, nous en font un devoir; je. ne pense pas qu’il puisse exister une opération plus grande, plus importante et moins digne de persiflage, malgré l’esprit du préopiaaot. Il serait cependant très fâcheux que le travail des dénominations fît perdre encore beaucoup de temps à l’Assemblée. Je crois qu’il serait raisonnable de charger deux personnes de terminer ce travail. M. te marquis de Foucault. Je demande que la question soit ajournée à la prochaine législature. L’avis de M. de Foucault est mis aux voix et rejeté. M. l’abbé Satnary. Puisqu’on veut baptiser les départements, je propose de baptiser aussi les districts et les cantons. M. Garat Vaine. Il faut parler du baptême avec plus de respect. M. Target. Je demande que votre comité de constitution soit chargé de continuer et de perfectionner son travail sur eet objet. M. Fos de Taborde. Je demande la question préalable sur tous les amendements. Un grand nombre de voix. Appuyé! La question préalable sur les amendements est mise aux voix et adoptée. L’Assemblée porte ensuite le décret suivant : « L’Assemblée nationale décrète que le comité de constitution est chargé de donner des dénominations aux 83 départements. I. Camus. Je propose d’insérer au procès-verbal de la séance d’aujourd’hui, les divers décrets relatifs à la division du royaume. Cette proposition est adoptée ( Voyez plus loin le texte des divers décrets). M. iabbé Gouttes, au nom du comité des finances, propose le projet de décret suivant relatif aux impositions du Dauphiné : « L’Assemblée nationale, instruite que son décret du 27 janvier est mal interprété dans quelques provinces, a décrété et décrète ce qui suit : « L’article 2 du décret du 27 janvier ne peut s’appliquer ni en Dauphiné, ni dans les provinces sujettes au même régime, à la portion de la-taille que Les contribuables aux décimes payent pour les fonds roturiers qu’ils possèdent, ni* aux ac-! cessoires de cette taille, ni à la prestation représentative de la corvée, ni aux dons gratuits qui se perçoivent dans les villes et dans les communautés qui y sont sujettes, par voie d’imposition directe ; en conséquence, les quittances de la* ! moitié des décimes de 1789 ne serontreçues qu'en compensation de la capitation personnelle et de la; portion de la taille que lesdits coitribuables aux décimes payeront pour las fonds nobles dont \ ils jouissent. » \ 1 M. le Président le inet aux voix : il est adopté. M. le marquis de Montesquieu, au nom du comité des finances, fait à l’Assemblée le rapport suivant , concernant une réduction provisoire de soixante millions sur les dépenses publiques (1). (1) Le Moniteur ne donne qu’un sommaire du rapport de M. le marquis de Montesquiou. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 126 février 1790.] 712 [Assemblée nationale.] Messieurs, le comité a eu l’honneur de vous présenter, dans son premier rapport, le résultat des différentes vérifications dont vous l’aviez chargé. C’est après avoir comparé les états de vos revenus et ceux de la dette publique avec les pièces originales qui les constatent, que votre comité vous a répondu de l’exactitude du compte que le ministre des finances lui avait fait remettre, et que, depuis, il a fait imprimer. Le comité joignit à ce rapport un aperçu des réductions dont la dépense des différents départements lui avait paru susceptible. Il résultait de ce premier travail deux choses importantes : 1° Qu’il ne serait pas nécessaire d’augmenter la masse générale des impôts peur subvenir aux besoins de l’Etat ; 2° Que la masse des impôts n’étant pas augmentée, et la matière imposable étant accrue de tous les biens possédés par les ci-devant privilégiés, le peuple serait à l’avenir soulagé, dans ses impositions, de toute la contribution des susdits ci-devant privilégiés. Votre comité, portant ses vues plus loin, a cru apercevoir deux causes principales du désordre des finances, dans l’usage ancien de consommer d’avance le revenu d’une ou de plusieurs années, par des anticipations, et dans celui de prélever de gros cautionnements qui rendent l’administration dépendante, et en quelque sorte tributaire des compagnies nombreuses de financiers. Votre comité vous a invités à rassembler toutes vos ressources , même à en créer de nouvelles, s’il était nécessaire, pour anéantir ces deux genres d’abus. Après vons avoir indiqué une partie de ces ressources, il vous a présenté le tableau de la position où se trouveraient les affaires publiques , lorsque vous auriez mis ce nouvel ordre de choses à la place de l’ancien. Il vous a prouvé que, par cette disposition , vous rendriez possible une réduction de 30 à 35 millions par an sur les impositions, et. qu’elle pourrait être l’effet immédiat de la suppression consommée des anticipations , des cautionnements et des fonds d’avance. Ce serait donc un des plus sûrs et des plus importants moyens de procurer un grand soulagement aux peuples , ou de hâter la libération de 1 Etat : mais lorsque nous vous présentions cet espoir et les moyens de le réaliser, nous ne pensions pas que le moment fût arrivé de décréter cette amélioration , puisqu’elle tenait à plusieurs arrangements antérieurs. Il n’en est pas ainsi de la partie de notre travail destinée à préparer vos opérations sur les dépenses publiques, et à rétablir la proportion entre la recette et la dépense ordinaire. Ce travail, dont le plan nous a déjà été soumis, dont le résultat sommaire a passé sous vos yeux, dont les rapports détaillés ont été commencés, ce travail est fait , et n’attend plus que vos décrets ; mais vous sentez, Messieurs, qu’en faisant la comparaison des dépenses avec les recettes, votre comité a pris pour base de ses calculs un état ordinaire et habituel d’ordre et de calme, et pour terme de comparaison, la somme des recettes portée au compte du premier ministre des finances. Nous sommes partis de l’hypothèse que nous pouvions compter sur le revenu dont le gouvernement était en possession , au moment où l’un de vos plus importants décrets a transformé la dette royale en dette nationale, et a ordonné la perception de tous les anciens impôts. Nos résultats ne pourront, par conséquent , être rigoureusement vrais qu’au moment où, après avoir réduit les dépenses publiques au terme de nos propositions, vous aurez établi une recette effective. Vous êtes fort loin de cette position, Messieurs , il ne faut pas vous le dissimuler. Aucune réduction n’est encore opérée sur les dépenses; et, soit par des événements inévitables , soit par des décrets que les circonstances ont nécessités, une grande partie des revenus, dont la conservation avait été décrétée le 17 juin, n’existe plus. Vous n’avez pas oublié, Messieurs, qu’à cette époque du 17 juin, le revenu entier de l’Etat était inférieur de près de 60 millions, à la dépense ordinaire. 11 est constant que, depuis cette époque, les événements ont accru les dépenses et diminué les recettes; que rien n’est plus pressant que de faire cesser un état de choses qui anéantit le crédit public, qui alarme les citoyens sur le sort de toutes leurs fortunes, et qui nourrit des inquiétudes dangereuses pour la liberté et pour la Constitution. D’après ces considérations, votre comité pense qu’il est d’une haute importance que vous commenciez par faire disparaître, plus tôt que plus tard , le déficit qui existait au moment de votre convocation , en décrétant , sans attendre l’examen de tous les détails que vous ferez ensuite, une réduction provisoire de 60 millons sur les dépenses, telle que vous la savez possible, et que nous avons eu l’honneur de vous la présenter. Nous estimons qu’il est également important de faire disparaître un second déficit, provenu, depuis le 17 juin, de la cessation d’une partie de nos recettes, en déclarant votre intention formelle de pourvoir, dès cette année, au remplacement des revenus publics, dont la perception aurait cessé ou aurait été diminuée depuis votre décret du 17 juin dernier. Ce n’est pas tout encore, Messieurs ; tandis que vos différents comités travaillent avec un grand zèle, que celui des finances, après avoir rassemblé une foule de matériaux, est prêt à vous rendre compte des travaux les plus étendus ; tandis que nous attendons les nouveaux secours que nous fourniront indubitablement les assemblées administratives, qui bientôt seront en activité; les besoins publics, les besoins les plus urgents, s’accumulent tous les jours. L’année 1790, Messieurs, mérite de vous la plus sérieuse attention. Cette année critique est placée entre l’ancienne administration qui anticipait sur toutes les recettes et la nouvelle qui repoussera toute anticipation ; ainsi elle doit à la fois faire face à ses propres besoins, et à ceux qui naissent des abus antérieurs. Il lui faudrait la réunion de tous les moyens extraordinaires possibles ; et elle aura à peine ceux qui se rencontrent dans les années les plus communes, jusqu’à ce que vous ayez fixé la véritable étendue et constaté la solidité des ressources que vous avez résolu d’y appliquer. Voilà, Messieurs , la cause du discrédit général dont on se plaint, de cette terreur qui fait disparaître l’argent de la circulation, et qui, fut-elle imaginaire, n’en serait pas moins un malheur réel. La France est hors de péril, si vous pouvez assurer le service de cette année. Personne ne peut, raisonnablement, être inquiet de l’année 1791. Il faudrait admettre l’absurde proposition de la dissolution entière du corps politique , [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [26 février 1790.] 713 pour douter , à cette époque, du rétablissement de l’ordre dans le royaume , et de l’action qu’aura la force pnblique , soutenue de la réunion de toutes les volontés. Alors, sans doute, des revenus bien liquides suffiront à toutes nos dépenses ; mais il n’en est que plus instant de sortir d’une crise qu’il est encore aisé de prévenir, etqueles ennemis de la patrie verraient avec tant de plaisir mettre obstacle au succès de vos travaux. Votre comité ne fait ici que vous rappeler des vérités, qui ne vous auraient pas échappé, mais sur lesquelles il n’est plus permis de rester sans détermination. 11 aurait regardé comme le premier devoir de vous présenter, à cetégard ses idées et ses moyens; mais le ministre des finances, que vous honorez d’une juste confiance, n’a pu. ni ignorer le mal, ni en négliger le remède. C’est lui qui doit rassurer l’Assemblée nationale en lui présentant le tableau de ses moyens. C’est l’Assemhlée qui doit l’aider de sa force, en atténuant les dépenses et en soutenant la perception des revenus. En conséquence, votre comité a l’honneur de vousproposer le projet de décret suivant. PROJET DE DÉCRET. « L’Assemblée nationale a décrété et décrète ce qui suit : » 1° Il sera fait une réduction provisoire de 60 millions sur le montant des dépenses du Trésor public, dont l’état est annexé au présent décret; laquelle réduction aura lieu, à compter du 1er avril prochain, sans préjudice du décret relatif aux Haras. « 2° L’Assemblée nationale se réserve de statuer définitivement et en détail sur chacun des articles contenus dans ledit état annexé au présent décret, d’après le compte détaillé qui lui en sera rendu par le comité des finances et ses autres comités, mais de manière que la masse ordinaire des dépenses de l’administration générale ne puisse excéder les bornes prescrites par l’article précédent, et qu’il ne puisse être proposé ni adopté à cet égard que des réductions nouvelles. « 3° L'Assemblée ordonne que le tableau des besoins de tout genre de l’année 1790, et des fonds destinés au service de ladite année, soit mis incessamment sous les yeux du premier ministre des finances. La discussion est immédiatement ouverte sur le projet de décret proposé par le comité des finances. M. l’abbé Maury. Dans le dernier rapport du comité des finances. M. Anson vous a annoncé et certifié que les économies sur lesquelles nous pouvions compter s’élevaient à 100 millions. On ne nous propose aujourd’hui que 60 millions de réduction. Je pense que la première espérance qu’on nous avait donnée était trop importante pour que nousne devions pas nous en occuper en ce moment. M. le marquis de Montesquiou. Le préopi-naut n’a pas porté son attention ordinaire sur les objets dont il vient de nous parler. Le comité des finances a eu l’honneur de vous dire que, par la snitede l’organisation des départements, une partie de dépenses de 35 à 40 millions, qui se faisit autrefois pour les provinces, serait administrée par les départemnets eux-mêmes, et qu’ainsi les fonds ne devraient plus en être faits au trésor public. Avec 60 millions d’économies effectives, il sortira du trésor public 100 millions de moins par année. M. d’Epresmenil demande lecture de l’état de réduction indiqué dans le décret. On observe que depuis longtemps cet état a été imprimé et distribué à tous les membres de l’As-semblé. Cependant un de MM. les secrétaires en fait lecture, ainsi qu’il suit : État des dépenses publiques, sur lesquelles V Assemblée nationale déerète provisoirement une réduction de 60 millions. 1 . Dépenses générales de la Maison du roi, de celle de la reine et de la famille royale. 2. Les Maisons des princes frères de Sa Majeslé, y compris les enfants de M. le comte d’Artois. 3. Les affaires étrangères et les lignes suisses. 4. Départements de la guerre. 5. Marine et colonies. 6. Ponts et chaussées. 7. Haras. 8. Pensions. 9. Gages du conseil et traitement particulier de la magistrature. 10. Gages, traitements et gratifications à diverses personnes. 11. Intendants des provinces et leurs bureaux. 12. Police de Paris. 13. Quais et Garde de Paris. 14. Maréchaussée de lTle de France. 15. Pavé de Paris. 16. Travaux dans les carrières sous Paris. 17. Remise en moins imposé, décharges et modérations sur les impositions. 18. Traitements aux receveurs, fermiers et régisseurs-généraux et autres frais de recouvrement. 19. Administrateur du Trésor royal, payeurs des rentes. 20. Bureau de l’Administration générale. 21. Traitement et dépense de la caisse du commerce, de celle des Monnaies et de la liquidation de la Compagnie des Indes. 22. Fonds réservés pour des actes de bienfaisance. 23. Secours aux Hollandais réfugiés en France. 24. Communautés, maisons religieuses et entretien d’édifices sacrés. 23. Dons, aumônes, secours, hôpitaux et enfants trouvés. 26. Travaux de charité. 27. Destruction du vagabondage et de la mendicité. 28. Primes et encouragements pour le commerce. 29. Jardin royal des plantes et cabinet d’histoire naturelle. 30. Bibliothèque du Roi. 31. Universités, académies, collèges, sciences et arts. 32. Passe-ports et exemptions de droits. 33. Entretien, réparation et construction des bâtiments pour la chose publique. 34. Diverses dépenses de plantations dans les forêts. 33. Dépenses de procédures criminelles et de prisonniers. 36. Dépenses locales et variables dans les provinces. 37. Dépenses imprévues. M. Duport propose cet amendement au projet de décret : « Que le comité soit tenu de présenter incessamment un projet de remplacement pour l’année de la gabelle, de la partie des aides qui se perçoit par l’exercice et des droits réunis. M. le comte de Mirabeau. On ne peut certainement qu’applaudir au comité pour avoir déterminé 60 millions de réductions ; mais on peut espérer qu’el es s’élèveront encore plus haut. Qu’il f me soit permis de faire une observation générale.