638 [Convention nationale.] ARCHIVES soire et révolutionnaire dont elle s’est déjà occu¬ pée, je suis chargé par les comités de sûreté générale et de Salut public de lui faire un autre rapport. Ces comités réunis ont vu avec peine un réqui¬ sitoire du procureur de la commune de Paris, qui a été suivi d’un arrêté du conseil général. Ce réquisitoire a été dénoncé au comité de sûreté générale par les comités révolutionnaires des sections. Sans doute, il a été l’effet de l’er¬ reur; mais il est d’une trop grande conséquence dans les circonstances où nous nous trouvons, pour qu’on puisse le passer sous silence. Je con¬ çois que l’officier public, revêtu d’une grande autorité, peut céder à des réclamations nom¬ breuses et aux sollicitations dont il est obsédé; mais le législateur qui ne voit que l’homme cou¬ pable, qui par sa mission ne doit avoir d’autre but que le salut de la patrie et n’en doit jamais détourner ses regards, doit être inflexible comme la loi. Ici je dois rendre justice à la commune de Paris. Tout le monde sait qu’elle est composée de citoyens pleins d’énergie et de patriotisme; mais l’éloquence du procureur de la commune les a trompés, et leur erreur a été celle d’hommes sensibles. Vous ne pouvez laisser subsister l’arrêté qui vous a été dénoncé. Il est absolument contraire à votre loi du 17 septembre dernier, qui met les comités révo¬ lutionnaires sous l’inspection immédiate du co¬ mité de sûreté générale. Le procureur de la com¬ mune de Paris disait qu’il fallait être sensible à la voix du père, du fils, de l’épouse. Lorsque Brutus sauva la liberté, il trouva ses fils parmi les conspirateurs, et ne les en sépara point. Si le nombre de ceux qui la loi de sûreté atteint est considérable, c’est que les contre-révolution¬ naires ont dû être tous atteints. Personne ne dira, sans doute, qu’il ne faille pas retenir dans les fers tous ceux qui travaillaient sans cesse à la contre-révolution. Le législateur doit être in¬ flexible comme Brutus. Vous ne devez pas laisser subsister un arrêté qui est contraire à la loi. Les comités de Salut public et de sûreté géné¬ rale, en rendant hommage aux intentions du conseil général de la commune de Paris, en reconnaissant que le réquisitoire du procureur de la commune et l’arrêté qui l’a suivi sont un effet de l’erreur et d’une sensibilité déplacée, vous proposent d’annuler l’arrêté. Plusieurs membres demandent la lecture du réquisitoire et de l’arrêté. Billaud-Varenne la fait. C’est le procureur de la commune (Chau-mette) qui parle : « Vous n’ignorez pas sans doute qu’il existe un nouveau plan de conspiration, c’est celui de diviser le peuple, de diviser les sans -culottes; et pour y parvenir, on voudrait les ranger en deux classes, parce que nos ennemis savent que c’est de l’union des sans-culottes que dépend le triomphe de la liberté. Le système de diffa¬ mation qu’ont imaginé nos ennemis, vous le n° 442, p. 177). D’autre part, voy. ci-après Annexe p. 650, le compte rendu, d’après les divers journaux de l’époque, de la discussion à laquelle donna lieu la proposition de Billaud-Varenne. PARLEMENTAIRES, j If frimaire an I I ( 4 décembre 1/03 voyez tous les jours se promener alternative¬ ment sur la tête des représentants du peuple, et sur celle des membres de la commune de Paris. On s’adresse aux membres de la Convention, et on leur dit : « Voyez-vous cette commune usur-« patrice, cette commune dictatoriale, qui « cherche à vous spolier en empiétant sur vos « pouvoirs, et qui voudrait, s’il était possible, « faire passer dans ses mains le pouvoir su¬ ie prême? » On nous dit à nous que la Conven¬ tion se dispose à opprimer la commune de Paris. Les membres de la Montagne opprimer la com¬ mune de Paris ! Les sauveurs de la liberté et de la Bépublique, devenir les oppresseurs de leurs émules et de leurs coopérateurs ! « Citoyens, rappelez-vous ces moments de crise où les membres de la Montagne et ceux de la commune de Paris, en défendant la même cause, ont eu simultanément un pied sur l’écha¬ faud et l’autre lancé au hasard pour la liberté en danger; rappelez-vous que nous avons tous couru les mêmes périls; et aujourd’hui que la victoire nous est commune, celle d’avoir fait le bien, on cherche à jeter la pomme de discorde parmi nous et à semer la défiance. Tantôt c’est le fanatisme abattu que l’on cherche à relever en l’attaquant, tantôt ce sont des actes arbi¬ traires de toute espèce que l’on semble ne diri¬ ger d’abord contre les aristocrates que pour se ménager le droit d’attaquer les patriotes les plus accrédités; et ce sont les comités révolution¬ naires qui sont exécuteurs de toutes ces machi¬ nations. Ils ont oublié sans doute que la com¬ mune est leur point de ralliement, leur centre d’unité, comme la Convention l’est elle-même pour toutes les sections de la Bépublique; ils ont oublié que c’est à la commune qu’ils doivent leur institution première, que c’est la commune qui a sollicité et obtenu pour eux de la Conven¬ tion les salaires qui leur sont payés. « Et cependant ce sont ces mêmes comités qui cherchent à avilir la commune de Paris, qui font tous leurs efforts pour coaliser les sec¬ tions de Paris; que dis-je? pour faire autant de communes qu’il y a de sections. « Le plan d’attaque de nos ennemis est déjà fait; déjà même il a eu une partie de son exécu¬ tion. Déjà le peuple, agité en tous sens, trompé, fatigué, harcelé, cherchait autour de lui les nou¬ veaux auteurs de ses maux : eh bien ! on les lui a désignés parmi les plus zélés défenseurs de ses droits; et comme ils ne pouvaient attaquer ni la Convention entière, ni la commune de Paris collectivement, nos ennemis communs ont imaginé de faire une attaque partielle. Ils ont crié contre le comité de Salut public de la Con¬ vention; contre ces hommes qui ont pris le timon des affaires, se sont fait anathème et ont juré, s’ils ne peuvent amener à bon port le vaisseau de la Bépublique, de périr avec lui ; voilà les hommes que l’on déchire : et quels moyens emploie-t-on? les journaux? Non; mais des lettres perfides. Ballions-nous donc autour d’eux. Le conseil doit seconder leurs efforts; il doit marcher en seconde ligne pour découvrir les complots, déjouer les intrigues et les trahi¬ sons. Obéissons surtout à la Convention; quel serait l’homme qui oserait dire qu’il est au-dessus du peuple? « Citoyens, ce tableau ne doit être affligeant que pour le faible; vous n’avez rien à craindre : l’âme pure'du magistrat peut éprouver l’atteinte de la calomnie ; elle n’en est point abattue. Mais on veut nous effrayer, parce que l’on sait que