542 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [5 avril 179Q.) lecture de plusieurs adresses dont la teneur suit : Adresse de la municipalité de Saint-Quentin, qui, pénétrée de l’étendue de ses nouvelles fonctions, et d’après le serment solennel par elle prêté , a arrêté de soutenir de tout son pouvoir les décrets rendus par l’Assemblée nationale, acceptés ou sanctionnés par le roi. Adresse de la municipalité de la ville de Saint-Yrieix en Limousin, qui, en offrant à l’Assemblée nationale l’hommage de sa vénération et de sa reconnaissance, avec le sacrifice de la vie des membres qui la composent, pour l’intérêt de la nation et la gloire du monarque, sollicite l’établissement d’une cour souveraine dans la ville de Limoges. Adresse des officiers municipaux et notables de la ville de Metz, qui, en assurant l’Assemblée nationale de leur dévouement respectueux et de leur attachement inviolable aux principes de la Constitution, protestent de concourir de tout leur pouvoir à l’exécution des lois constitutionnelles du royaume, et à toutes les opérations propres à accélérer la prospérité publique , si ardemment désirée par le meilleur des rois, et si courageusement entreprise par les représentants de la nation. M. l’abbé de Narbonne fait le don patriotique d’une somme de 12,000 livres provenant d’une coupe de bois faite, depuis quelques années, dans son abbaye de Saint-Sernin près Toulouse. Il désire seulement que 3,000 livres soient distribuées aux pauvres des paroisses de cette abbaye. L’Assemblée, après avoir applaudi au patriotisme qui a dicté cette offre, décide qu’elle sera communiquée aux commissaires chargés de surveiller la rentrée des dons patriotiques, afin d’indiquer les moyens d’effectuer la remise de la somme offerte par M. l’abbé de Narbonne, la réserve de 3,000 livres en faveur des pauvres, tant de Toulouse que des paroisses dépendant de l’Abbaye de Saint-Cernin,et la décharge que le donateur est en droit d’exiger. M. Lubry-Du-Bochet. M. le comte de Bar-bançon, député du bailliage de Villers-Coterets, a été obligé de quitter ses fonctions à cause du mauvais état de sa santé : il n’est pas juste que le bailliage reste plus longtemps privé d’un de ses mandataires et je demande que M. le comte de Mazancourt, suppléant de M. le comte de Bar-banç.on soit admis à remplacer ce dernier. L’Assemblée décide que M. de Mazancourt sera admis si M. de Barbançon donne sa démission et après vérification des pouvoirs. Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une lettre, par laquelle M. Necker observe à l’Assemblée que c’est faute d’être parfaitement instruite des faits, qu’elle a décrété le 26 de ce mois que les pensions au-dessous de 600 livres, assignées sur la loterie, continueraient d’être payées; il n’y avait point de pensions sur la loterie, mais bien de simples gratifications annuelles montant à 150,000 livres, et qui ont été réduites à 70,000 livres. Cette lettre est renvoyée au comité des pensions, sur les observations de M. Camus. M. le Président fait lire ensuite une lettre de M. le comte de la Luzerne, par laquelle ce ministre réclame la prompte expédition des décrets et de l’instruction de l’Assemblée nationale, relativement aux Colonies; représente que l’envoi en est extrêmement pressé, que le moindre retard pourrait avoir des conséquences fâcheuses; rend compte qu’il y a à Brest deux bâtiments prêts, depuis trois semaines, à porter ees décrets à leur destination. M. Barnave ohserve que les détails qu’éutraine la correction de ces instructions aux différentes colonies, en a retardé jusqu’à ce moment l’impression, mais il espère que ce travail finira aujourd’hui et qu’elles pourront être portées gur-le-ctaamp à la sanction royale. M. Lie Chapelier observe que les décrets des 20 et 29 mars, relatifs aux fonctions des commissaires du roi chargés de l’établissement des assemblées administratives, ne sont pas encore sanctionnés : il demande que les commissaires de l’Assemblée, chargés de surveiller cette expédition, soient tenus de la presser vis-à-vis de M. le garde des sceaux. Cette proposition est adoptée. M. Hébrard, suppléant de la sénéchaussée de Toulouse, dont les pouvoirs ont été vérifiés est admis en remplacement de M. Monssinat, démissionnaire. M. Massicu, curé de Sergy, député de Sentis , demande à s’absenter pour raison de santé. M. Gouges-Cartou, député du Quercy , demande un congé de plusieurs semaines, pour affaires urgentes. M. Pélissier, député de la sénéchaussée d'Arles , fait une demande semblable et pour le même motif. L’Assemblée accorde ces permissions. Divers membres demandent à passer à l’ordre du jour. M. Dupont (de Nemours). Je n'ai point voulu interrompre votre délibération sur la compagnie des Indes, en insistant pour que M. l’abbé Maurv déposât les lettres que l’autre jour il a annoncé avoir entre ses mains ; mais aujourd’hui je vous supplie, avant de passer à l’ordre du jour, de lui ordonner de déposer aux archives ces pièces qu’il n’a pu avoir que par une infidélité, et qu’il n’a publiées que par un délit. M. l’abbé Maury. J’ai été au-devant des vœux de M. Dupont, et j’ai intention de donner la plus grande publicité à ses lettres et mémoires. J’ai même lieu d’espérer qu’elles sont imprimées dans ce moment; ainsi l’Assemblée les pourra connaître. Du reste, si quelque chose peut surprendre, c’est que M. Dupont se serve du prétexte de la communication que j’ai donnée d’un mémoire qu’il avait promis de démentir, et qu’il n’a cependant pas démenti, pour caractériser cette communication de délit. Je pourrais, avec bien plus de raison, me plaindre des expressions de M-Dupont et vous en demander justice; mais je ne la demande point, parce que je me la ferai moi-même. Je n’ai nul compte à rendre des moyens par lesquels je me suis procuré ces lettres ; du moment où M. Dupont en reconnaît l’authenticité, il n’a plus rien à me demander. Je n’ai fait, sur son mémoire, aucun commentaire; je n’ai tiré aucune induction des principes qu’il j a exposés ; je vous ai laissé la liberté de les apprécier. M. Dupont a gémi sur la publication d’un projet qui aurait pu faire passer le Bengale sous notre do- [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLE DENTAIRES. [5 avril 1790.) 543 mination.J’imagine que les vaisseaux flûtes, métamorphosés tout à coup en vaisseaux de ligue, ne doivent pas occasionner tant de regrets. J’ai encore entre mes mains environ quatre-vingts mémoires, qui proviennent de ses correspondances avec MM. l’ahhé Terray, Turgot, de Clugny, Necker et Galonné; j’ai été assez heureux pour me procurer ces marques du grand intérêt qu’il a pris dans tous les temps à la chose publique ; et, s’il le juge à propos, je déposerai successivement ces mémoires, avant de les faire imprimer, non pas à l’Assemblée, ceci n’en vaut pas la peine, mais chez un notaire ou telle autre personne publique qu’il lui plaira de choisir. (M. Dupont veut parler, la partie droite réclame l’ordre du jour. 11 parvient cependant à se faire entendre.) M. Dupont (de Nemours). L’Assemblée ayant la police de ses membres, doit accorder à celui qui est inculpé la faculté de se justifier. M. l’abbé Maury vous a dit, avec sa fidélité ordinaire, que j’ai eu des correspondances avec tous les ministres; celle que j’ai eue avec M. l’abbé Terray, c’est l’interdiction de la liberté d’écrire. M. de Clugny m’a également persécuté. Quant aux autres, j’y étais forcé par le devoir des places que j’occupais. Revenons à l’objet* principal qui m’a fait prendre la parole; je dis qu’une lettre écrite par un particulier, soit au ministre, soit à une autre personne quelconque, ne cesse pas d’être sa propriété. M. l’abbé Maury fera de mes mémoires l’usage qui peut convenir à sa délicatesse ; je ne démens point les papiers qu’il a cités, mais les inductions qu’il ea a voulu tirer : enfin je ne cesse de réclamer ma propriété, et je demande que M. l’abbé Maury soit tenu de déposer aux archives les lettres et mémoires qu’il dit avoir à moi. M. Rœderer. Je ne pense pas, comme M. Dupont, que les lettres écrites aux ministres ou à toute autre personne quelconque, soient la propriété de celui qui les a écrites; je crois au contraire qu’elles appartiennent à la partie quelconque du ministère à laquelle elles ont été adressées, et au dépôt public dans lequel elles ont été établies : mais je dis que ce serait violer la foi publique, la morale, les égards que nous devons à nos collègues, que de souffrir qu’un tiers, qu’un homme indifférent à une telle correspondance. . . (De grands murmures s’élèvent de la 'partie droite. MM. de Foucault, de Fumel, etc., veulent empêcher M. Rœderer de parler.) L’Assemblée, consultée, décide que M. Rœderer sera entendu. M. Rœderer. M. l’abbé Maury vous a déclaré qu’il se disposait, à faire imprimer quatre-vingts mémoires de M. Dupont; comme il est présumable qu’il ne fera pas de ceux-ci un usage plus nécessaire à la chose publique que celui dont il nous a donné connaissance, nous ne pouvons pas nous dispenser de censurer la divulgation des pièces qui n’appartenaient pas même au ministre, et je demande qu’il soit interdit à M. l’abbé Maury, comme à toute autre personne, de citer aucune lettre ou mémoire particulier d’un membre de cette Assemblée, sans son agrément. Il n’est pas inutile d’observer en finissant, que si entre les agents qui ont approché du ministère, il ne s’en était trouvé que de la trempe de M. Dupont, nous n’aurions jamais eu les édits du 8 mai 1788, et nous n’aurions pas les libelles infâmes qui se distribuent chaque jour. (M. Rœderer est applaudi par une partie de l’Assemblée). II n’est pas donné suite à la réclamation de M. Dupont. M. le Président. Dans sa séance du samedi 3 avril, l’Assemblée n’a décrété que le principe relatif à la liberté du commerce de l’Inde, en sorte qu’iJ reste à décider sur plusieurs des articles contenus dans le projet de décret qui vous a été soumis par votre comité d’agriculture et de commerce. Je vais consulter l’Assemblée pour savoir si elle entend passer maintenant à la discussion des articles. M. Defermon. Le travail du comité d’imposition sur les droits de traite, sera soumis incessamment à l’Assemblée ; je regarde donc comme nécessaire de renvoyer, après l’examen du tarif sur toutes les marchandises, la discussion des articles proposés par le comité d’agriculture et de commerce, afin que ce comité puisse se concerter avec celui d’imposition. M. le marquis de Foucault. Ceci ne nous empêche pas d’abolir sur-le-champ le privilège de Lorient. Je propose d’étendre la liberté des retours à tous les ports du royaume; j’ajoute que si l’on tarde à se prononcer sur cet article, on occasionnera des frais à toutes les villes maritimes, qui vont nous envoyer des députés extraordinaires pour réclamer cette liberté, qui est la conséquence de la suppression du privilège de la compagnie des Indes. M. lie Chapelier. Je commence par déclarer que je suis opposé à toute espèce de privilège et que le privilège d’un port est tout aussi condamnable que celui d’une compagnie ou d’un particulier. Donc, si le port de Lorient a un privilège, il faut le détruire ; mais, si c’est à cause de la commodité de ses entrepôts et de ses magasins qu’on y a fixé les retours, il faut y faire une attention particulière. D’ailleurs, la fraude sur les droits que nous allons établir sera plus difficile dans un seul port que dans vingt, il faudra moins d’employés pour la prévenir, et ces motifs me déterminent à conclure au renvoi aux deux comités réunis. M. Ce Couteulx de Canteieu. La décision de tous les objets relatifs aux droits de traite exige un temps trop long ; il faut fixer un terme qui ne puisse dépasser huit jours ; c’est dans ces conditions, et indépendamment de ce qui concerne les traites, que je demande le renvoi des articles proposés aux d'eux comités réunis d’agriculture et du commerce et d’imposition. (Cette proposition est mise aux voix et adoptée.) L’Assemblée décrète : Que les articles qui font partie du décret proposé par le comité d’agriculture et de commerce seront envoyés à l’examen de ce comité et à celui du comité des impositions, et que le rapport en serait fait à l’Assemblée dans la séance du vendredi 16 de ce mois. M. le Président rappelle que l’ordre du jour st la discussion sur la nouvelle organisation du pouvoir judiciaire, et pose la question de la manière suivante : Admettra-t-on des jurés en matière civile comme en matière criminelle ? M. le baron de Jessé. Si le droit est fondé