766 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 octobre 1790.] Adresse des marins et militaires de l’armée navale de Brest à l’Assemblée nationale. Messieurs, pénétrés de la plus vive reconnaissance, les marins et militaires de l’armée navale croient devoir manifester les sentiments dont ils ont toujours été animés : ils osenten offrir l’hommage à la nation entière. La renommée, rarement exacte, a pu exagérer au loin le désordre qui a été senti dans l’escadre: mais quoiqu’il en soit, les véritables marins, les véritables militaires n’ont pris aucune part à ces mouvements de trouble. S’ils ont eu des réclamations à présenter à l’auguste Assemblée nationale, ils savaient que le moyen de les faire accueillir, avec bonté, était de les joindre aux protestations du plus parfait respect pour tous ses décrets, et à l’assurance d’être capables de tous les sacrifices pour montrer l’obéissance aux lois et pour continuer de servir honorablement la patrie. Que des hommes, étrangers jusqu’à ce jour à la mer et au service, séduits par l’erreur, ou égarés par l’ignorance, aient méconnu les règles de la subordination, les vrais marins, les vrais militaires ont été les premiers à les condamner. Ils ont l’honneur de vous assurer qu’ils n’ont pu entendre les discours de MM. les commissaires du roi, et les conseils de leurs généreux concitoyens, de leurs frères, sans en être vivement pénétrés ; et que loin d’être sourds à la voix de la patrie, qui leur disait: « Notre commerce est « anéanti, nos colonies perdues, nos ports aban-« donnés : il ne nous reste plus qu’à gémir, si « nous ne pouvons en imposer par nos forces « maritimes aux puissances rivales de notre Gon-« stitution », ces motifs puissants sur des cœurs français ont entièrement déchiré le voile qui les enviionnait: et lorsque les lois, leurs devoirs et la subordination leur ont été présentés sous des couleurs vraies, nécessaires et belles, ils ont juré d’un accord unanime d’obéir à leurs chefs, de remplir leurs devoirs, et de se soumettre aux lois qui émanent de votre auguste Assemblée. Ges sentiments des marins et militaires sont ceux de la France entière : pourraient-ils en avoir d’autres sans briser tous les liens sociaux? Seraient-ils assez ingrats, assez dénaturés pour méconnaître vos bienfaits ? N’ont-ils pas, comme tous les Français, leur bonheur particulier attaché au bonheur général qui dirige toutes vos actions ? Croyez, Messieurs, que les braves et généreux marins et militaires, citoyens de l’armée, vouent au plus grand mépris, ceux qui, par l’esprit d’insubordination, ou tout autre motif que ce puisse être, tendraient à bouleverser l’ordre qui doit régner sur les vaisseaux; et nous demandons au nom de l’honneur qui nous anime, qu’ils soient déclarés indignes de naviguer sous le pavillon national que vous venez d’adopter pour la régénération de cet Kmpire. Nous jurons que pavillon, symbole de la Constitution et de nRiberté, ne sera pas souillé par la licence et le mépris des lois. Voilà, Messieurs, les véritables sentiments qui animent les marins et les militaires, et avec lesquels ils défendront la Constitution et la liberté jusqu’à la dernière goutte de leur sang, et ont l’honneur d’être avec le plus profond respect, Messieurs, vos très humbles et très obéissants serviteurs. fît ont signé : les membres de la commission et les députés des vaisseaux. MM. La Montagne, président. Coatlosquet, secrétaire, timonier de la Fauvette. Joseph Madelaine. Saint-Julien. Marin, canonnier. Jean-Baptiste Leneindre. Pierre Rinbaux, du Patriote. Jaquet, idem. huprat, dit Toulouse, de l’Apollon, J. Brochard. Simon Robert. Claude Allaire. Redeller, maître canonnier de l’ America. Leclerc capitaine d’armes. Jacou Sergent, premier, second canonnier. François Gui Morel, canonnier. Jean-Marie Thébault, timonier. Pierre-Louis Tourez, matelot. François-Nicolas Gréval, canonnier. Miehel-Allain Gubier. Yves Cotar. Pierre-Joseph Le Canu. Rancourt, dit Vive le Roi, appointé du régiment de Rouergue. Jean-Baptiste Godard. Pierre Aubert, chef de pièce. Jean-Antoine Launois. Elie Labbé. Jean-Claude Cloitre. Pierre Duhin, soldat. Etienne Canton. Baudry. Simon Millet. Nicolas Enguéhard. Charles Patin. Levêque, soldat de marine. J.-E. Fleury. Biget. Leblond, fusilier de Normandie. Etienne Endeline. Adresse de la Société des amis de la Constitution , établie à Brest , aux citoyens , composant les équipages de V armée navale. Frères et amis, l’amour de la patrie, ua dévouement sans bornes à la nouvelle Constitution, l’attachement le plus inviolable pour de braves marins, de braves militaires, qui ont tant de fois répandu leur sang pour la défense dé leur pays, nous engagent à vous ouvrir nos cœurs. Nous venons déposer dans votre sein nos douleurs et nos craintes. Ecoutez, amis, là voix de vos concitoyens, de vos frères; ils ne vous tromperont pas; leurs intérêts et les vôtres sont les mêmes. Comme vous, ils ont été esclaves et malheureux; comme vous, ils ont brisé leurs fers; comme vous, ils voient l’aurore de la liberté, et éprou-veot déjà les bienfaits de notre heureuse Constitution. Cette Constitution assure à l’homme les droits imprescriptibles qu’il tient de la nature. D’une foule d’esclaves, elle a fait des hommes, des citoyens. Elle ne sera pas seulement la Constitution des Français : objet de l’admiration de tous les peuples, elle deviendra un jour celle de l’Univers; et nous aurons la gloire d’être le modèle de toutes les nations, et d’avoir fixé sur la terre le bonheur et la liberté. ‘ Cette Constitution a proscrit à jamais toutes les vaines distinctions ; elle a déclaré tous les citoyens également admissibles aux dignités, places et emplois. Une action de' bravoure ne restera donc