620 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE la France dans un chaos de malheurs et dans l’état le plus abject, pour élever sur les débris fumants de notre liberté ensanglantée, le trône odieux de la tyrannie, sur ceux de la vertu, le trône du crime. Mais le voile est tombé, les traîtres sont saisis, grâces à vos veilles continuelles, infatigables Législateurs. S’il nous manque de roche tar-péienne, il ne nous manque pas d’échafauds. Lancez sans miséricorde la foudre vengeresse sur ces têtes coupables; n’épargnez ni auteurs ni complices, faites couler le sang impur de ces antropophages infâmes, instruments des cours étrangères. Extirper à jamais de notre sol tout ce qu’il y a d’ennemis de l’égalité, et qu’ils cessent bientôt d’être comptés parmi les vivants. Poursuivez, dignes législateurs, votre carrière honorable. Ne descendez du sommet de la Montagne sacrée qu’après avoir écrasé tous les monstres qui ont la conspiration dans l’âme; qu’après avoir soumis et terrassé et le fier anglais et le présomptueux espagnol, et tous les despotes ligués contre la liberté humaine. Et tandis que votre mâle inflexibilité, que votre sagesse profonde et votre résolution vigoureuse et ferme s’occuperont des moyens de sauver la patrie et de nous assurer le gouvernement démocratique, le seul qui plaise au peuple français. Nous jurons de vous défendre par notre fortune et notre sang de surveiller ceux qu’il peut y avoir de chancelant au milieu de nous, et de vous seconder de tout notre pouvoir. Tels sont, Législateurs, les sentimens qui animèrent et animeront à jamais les habitans de Roc-Marat, qui ne cessent de louer votre courage, d’admirer votre vigilance, et de vous combler de bénédictions. » Nau St Omer (maire), Mounino, Testard, San-bourche, Boissaunau, Mondon, Dupoy, Voisin la Forge, Dénoyé, Delage, Tessary, Grégoire, Louhard (secrét.). 31 Les juges et commissaire national du district de Saint-Fargeau (1) rendent grâces à la Convention d’avoir ramené sur la terre le règne des mœurs, des vertus, des lois et de l’égalité. Mention honorable, insertion au bulletin (2). [ Saint-Fargeau , 8 jlor. II ] (3). « Représentans du peuple, S’il était un spectacle déplorable, c’était 'certes de voir sous la tyrannie, le crime jouer dans la République tous ses rôles perfides, triompher de la vertu, séduire les hommes, et persécuter la liberté. C’est ainsi que lorsque l’amour de la patrie, enflammant le courage, on voyait l’aristocratie chercher à éteindre ce feu sacré à glacer l’âme des patriotes par le modérantisme, à conspirer avec l’audace du crime, et à trahir, à la tête des bataillons les plus braves. La vertu se manifesta au milieu du peuple. Que fit le crime ? il intrigua, il s’empara des (1) Yonne. (2) P.V., XXXVm, 112. Bln, 13 prair (2e suppl1). (3) C 305, pl. 1143, p. 13. places du gouvernement, sous des apparences trompeuses, il emprunta un zèle patriotique. La vertu s’éleva sur un roc indestructible; de là elle faisait luire sur la liberté des rayons bienfaisans. Le crime ne put atteindre. Il descendit dans un marais fangeux en agitant ses ondes fetides, il en fit sortir des vapeurs empoisonnées, elles obscurcirent, elles corrompirent les différens rayons de l’atmosphère. A la faveur des fausses lueurs, les royalistes s’introduisirent dans tous les sanctuaires; les uns préparaient un poison subtil dans la coupe amère du fédéralisme; le sublimé préparé eut été capable de dissoudre la représentation nationale, et l’unité de la République si les vases fragiles n’en eussent été brisés. Les autres royalistes cherchaient à infuser le crime dans nos mœurs, et c’en était fait de la liberté s’ils eussent réussi. O ciel ! que de conjurations ! que de forfaits contre la nature, contre Dieu, contre les hommes ! il était tems que la République s’appuyât sur les vertus ! elle était renversée de fond en comble; l’ouvrage de cinq années serait détruit; on cherchait où furent les autels dressés à la liberté, à la Raison, à l’Eternel; on ferait le tour de l’Europe pour trouver un patriote. Grâces vous soient rendues, ô dignes représentans, de nous avoir délivrés de ces maux innombrables en ramenant sur la terre le règne des mœurs, celui des vertus, celui des saintes institutions, celui des loix, et l’égalité. Désormais la justice sera donc la seule balance dans la République. Désormais la probité, cette vertu par excellence, deviendra l’égide de la liberté. Désormais une police sévère sans rigueur, douce sans faiblesse, maintiendra l’ordre établi pour le bonheur commun. Désormais les loix ne pourront plus être enfreintes impunément. Citoyens représentans, achevez l’œuvre de la régénération publique. Sans le gouvernement révolutionnaire vous n’eussiez pu l’opérer. R est juste qu’il frappe les coupables. il est sage puisqu’il fait disparaître les conspirateurs et le crime. Il est vertueux; jamais autant de vertus n’éclatèrent sur la terre que depuis qu’il existe. Montagne terrible à nos ennemis, prolonge son existence et la tienne jusqu’à ce que la liberté ait obtenu tous ses troimphes. » Rubigni, Morisset, Louis Paultre, Pautrat, Bourgoin, Baillif. 32 Le représentant du peuple, près de l’armée du Nord, adresse à la Convention une note détaillée des actes de vertu et d’héroïsme de plusieurs citoyens de cette armée. Mention honorable, insertion au bulletin (1). (1) P.V., XXXVIII, 112. J. Mont., n° 30; J. Paris, n° 514;J. Fr., nos 609 et 610; J. Sablier, n° 1340; Ann. R.F., n° 178; M.U., XL, 103; J. Perlet, n° 611; S.- Culottes, n° 465; C. Eg., n° 646; Feuille Rép., n° 327. 620 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE la France dans un chaos de malheurs et dans l’état le plus abject, pour élever sur les débris fumants de notre liberté ensanglantée, le trône odieux de la tyrannie, sur ceux de la vertu, le trône du crime. Mais le voile est tombé, les traîtres sont saisis, grâces à vos veilles continuelles, infatigables Législateurs. S’il nous manque de roche tar-péienne, il ne nous manque pas d’échafauds. Lancez sans miséricorde la foudre vengeresse sur ces têtes coupables; n’épargnez ni auteurs ni complices, faites couler le sang impur de ces antropophages infâmes, instruments des cours étrangères. Extirper à jamais de notre sol tout ce qu’il y a d’ennemis de l’égalité, et qu’ils cessent bientôt d’être comptés parmi les vivants. Poursuivez, dignes législateurs, votre carrière honorable. Ne descendez du sommet de la Montagne sacrée qu’après avoir écrasé tous les monstres qui ont la conspiration dans l’âme; qu’après avoir soumis et terrassé et le fier anglais et le présomptueux espagnol, et tous les despotes ligués contre la liberté humaine. Et tandis que votre mâle inflexibilité, que votre sagesse profonde et votre résolution vigoureuse et ferme s’occuperont des moyens de sauver la patrie et de nous assurer le gouvernement démocratique, le seul qui plaise au peuple français. Nous jurons de vous défendre par notre fortune et notre sang de surveiller ceux qu’il peut y avoir de chancelant au milieu de nous, et de vous seconder de tout notre pouvoir. Tels sont, Législateurs, les sentimens qui animèrent et animeront à jamais les habitans de Roc-Marat, qui ne cessent de louer votre courage, d’admirer votre vigilance, et de vous combler de bénédictions. » Nau St Omer (maire), Mounino, Testard, San-bourche, Boissaunau, Mondon, Dupoy, Voisin la Forge, Dénoyé, Delage, Tessary, Grégoire, Louhard (secrét.). 31 Les juges et commissaire national du district de Saint-Fargeau (1) rendent grâces à la Convention d’avoir ramené sur la terre le règne des mœurs, des vertus, des lois et de l’égalité. Mention honorable, insertion au bulletin (2). [ Saint-Fargeau , 8 jlor. II ] (3). « Représentans du peuple, S’il était un spectacle déplorable, c’était 'certes de voir sous la tyrannie, le crime jouer dans la République tous ses rôles perfides, triompher de la vertu, séduire les hommes, et persécuter la liberté. C’est ainsi que lorsque l’amour de la patrie, enflammant le courage, on voyait l’aristocratie chercher à éteindre ce feu sacré à glacer l’âme des patriotes par le modérantisme, à conspirer avec l’audace du crime, et à trahir, à la tête des bataillons les plus braves. La vertu se manifesta au milieu du peuple. Que fit le crime ? il intrigua, il s’empara des (1) Yonne. (2) P.V., XXXVm, 112. Bln, 13 prair (2e suppl1). (3) C 305, pl. 1143, p. 13. places du gouvernement, sous des apparences trompeuses, il emprunta un zèle patriotique. La vertu s’éleva sur un roc indestructible; de là elle faisait luire sur la liberté des rayons bienfaisans. Le crime ne put atteindre. Il descendit dans un marais fangeux en agitant ses ondes fetides, il en fit sortir des vapeurs empoisonnées, elles obscurcirent, elles corrompirent les différens rayons de l’atmosphère. A la faveur des fausses lueurs, les royalistes s’introduisirent dans tous les sanctuaires; les uns préparaient un poison subtil dans la coupe amère du fédéralisme; le sublimé préparé eut été capable de dissoudre la représentation nationale, et l’unité de la République si les vases fragiles n’en eussent été brisés. Les autres royalistes cherchaient à infuser le crime dans nos mœurs, et c’en était fait de la liberté s’ils eussent réussi. O ciel ! que de conjurations ! que de forfaits contre la nature, contre Dieu, contre les hommes ! il était tems que la République s’appuyât sur les vertus ! elle était renversée de fond en comble; l’ouvrage de cinq années serait détruit; on cherchait où furent les autels dressés à la liberté, à la Raison, à l’Eternel; on ferait le tour de l’Europe pour trouver un patriote. Grâces vous soient rendues, ô dignes représentans, de nous avoir délivrés de ces maux innombrables en ramenant sur la terre le règne des mœurs, celui des vertus, celui des saintes institutions, celui des loix, et l’égalité. Désormais la justice sera donc la seule balance dans la République. Désormais la probité, cette vertu par excellence, deviendra l’égide de la liberté. Désormais une police sévère sans rigueur, douce sans faiblesse, maintiendra l’ordre établi pour le bonheur commun. Désormais les loix ne pourront plus être enfreintes impunément. Citoyens représentans, achevez l’œuvre de la régénération publique. Sans le gouvernement révolutionnaire vous n’eussiez pu l’opérer. R est juste qu’il frappe les coupables. il est sage puisqu’il fait disparaître les conspirateurs et le crime. Il est vertueux; jamais autant de vertus n’éclatèrent sur la terre que depuis qu’il existe. Montagne terrible à nos ennemis, prolonge son existence et la tienne jusqu’à ce que la liberté ait obtenu tous ses troimphes. » Rubigni, Morisset, Louis Paultre, Pautrat, Bourgoin, Baillif. 32 Le représentant du peuple, près de l’armée du Nord, adresse à la Convention une note détaillée des actes de vertu et d’héroïsme de plusieurs citoyens de cette armée. Mention honorable, insertion au bulletin (1). (1) P.V., XXXVIII, 112. J. Mont., n° 30; J. Paris, n° 514;J. Fr., nos 609 et 610; J. Sablier, n° 1340; Ann. R.F., n° 178; M.U., XL, 103; J. Perlet, n° 611; S.- Culottes, n° 465; C. Eg., n° 646; Feuille Rép., n° 327. SÉANCE Dü 6 PRAIRIAL AN II (25 MAI 1794) - N° 33 621 [. Maubeuge , 28 flor. Il] (1). « Citoyens collègues Les belles actions, tant civiles que militaires, ne peuvent rester ignorées, c’est une justice de vous les faire connaître parce que la Convention récompense la vertu, le courage et le patriotisme. Persuadé que c’est remplir ses vues que de l’instruire du zèle, de l’humanité et de la bienfaisance des défenseurs de la patrie, je m’empresse de lui transmettre quelques actions héroïques et civiques, bien faites pour augmenter l’émulation républicaine; mais c’est à vous, c’est à la Convention de payer à leurs auteurs le tribut de félicitations qui leur est dû, récompense la plus flatteuse pour des âmes pures et désintéressées. Jean-François Brocsole, natif de Coulommiers, tambour au premier bataillon de Seine-et-Marne, âgé de 19 ans, trouve dans une des cours de l’abbaye de Maroilles un enfant de 7 à 8 ans, qui lui parait abandonné et portant la livrée respectable de la misère; il l’interroge, il apprend de lui qu’il se nomme Joseph Deschamps, que son père avait été sergent au régiment de Vintimille-infanterie, qu’ayant été blessé au siège de Valencienne, il était venu à l’hôpital du Quesnoy, heu de naissance de son épouse; que dans l’intervalle de la maladie de ce dernier, elle vint à mourir; que son père commençant à se mieux porter, avait été tué par le feu de l’ennemi; que n’ayant plus aucun parent ni la moindre ressource au Quesnoy, il avait quitté la ville et avait erré dans différents corps jusqu’à ce moment, et avait vécu du superflu des soldats. La manière ingénue dont s’expliquait cet enfant, la misère dans laquelle il était plongé, et surtout la qualité d’enfant militaire, firent la plus vive impression sur l’âme sensible de Brocsoles; il propose au jeune Deschamps de lui servir de père; l’enfant verse des larmes et se jette dans les bras de son père adoptif. Broc-sole lui fait quitter ses haillons et lui achète des habits. Depuis ce temps, il ne cesse de lui procurer les secours et les soins d’un père. Il le nourrit de sa solde et de sa portion, il l’entretient proprement et le conduit lui-même à l’école en s’assurant qu’il n’y manque jamais. Le tambour qui n’a que sa paye a cependant refusé les secours qui lui ont été offerts, notamment par son capitaine qui avait offert d’habiller le jeune Deschamps. On a pris des rensei-nemens sur le récit de l’enfant et on a acquis la certitude qu’il n’avait dit que la vérité. Margey, volontaire au 5e bataillon des Vosges, de la brigade du général Duhem, lors de l’affaire qui eut lieu les 2 et 3 floréal près la forêt de Nouvion, était posté en tirailleur près la redoute située au bord de cette forêt. Il est frappé d’un boulet qui lui emporte la cuise droite et lui casse la jambe gauche. J’ai payé, dit-il au milieu des plus vives douleurs, le tribut que je devais à ma patrie; je mourrai satisfait... mais je plains ma pauvre mère si j’en reviens; mes deux bras me resteront pour la nourrir... Et il expire aussitôt. A cette même affaire, malgré 17 pièces de position de différens calibres et 3,000 hommes, (1) Bin, 7 prair. (suppl4) ; Débats, n° 613, p. 77; Mon., XX, 563. 600 républicains tinrent l’ennemi en échec pendant six heures, avec 4 pièces de 8 , 2 obusiers d’artillerie légère, quelques petites pièces de campagne, et prirent un caisson rempli de cartouches dont ils se servirent sur le champ de bataille. La proposition est faite à la garde nationale d’Avesnes qui fait le service intérieur et extérieur de la place, de recevoir la solde, la viande et le pain. Elle la rejette en s’écriant qu’elle n’ambitionnait que l’honneur de servir la patrie. Pour laisser la cavalerie à la disposition des généraux, des citoyens habitués à l’exercice du cheval, font le service des ordonnances. Des citoyennes de tout âge et les enfans, se portent aux hôpitaux; les unes font des bandes, des compresses, les autres font de la charpie. Je ne dois pas passer sous silence d’autres traits de bravoure et de républicanisme qui font l’éloge des défenseurs de la patrie composant l’armée du Nord. Le 23, au passage de la Sambre, les grenadiers du 49e régiment, ci-devant Vintimille, se sont élancés à l’eau pour aller au secours des tirailleurs qui étaient aux prises avec l’ennemi qui s’avançait dans la forêt sur l’autre rive, méprisant de passer sur les pontons qui retardaient leur marche. Le 24, ce même régiment a résisté à la cavalerie ennemie, et a mis la légion du nom proscrit de Bourbon en déroute, devant laquelle légion le 22e de cavalerie a eu la lâcheté de fouir. Le 27, le 68e régiment, ci-devant Beauce, a seul, sur un pont, soutenu l’attaque des Autrichiens qui étaient en nombre supérieur, et l’a conservé à la République, quoique les boulets sillonnassent les rangs de ces braves défenseurs. En général, l’armée de Desjardin a donné, dans l’affaire qui vient d’avoir lieu ces jours derniers, les preuves du plus grand courage. Elle répondait et criait à l’ennemi, en allant au pas de charge sous le fer de ses batteries : Vive la République ! Un trait d’un autre genre doit aussi avoir sa place dans ma lettre. C’est le désintéressement républicain des quatre premiers capitaines du 2e bataillon du 56e régiment. J’avais promu le citoyen Gelly, leur camarade, au grade de général de brigade, officier d’un patriotisme et d’une bravoure reconnus. Ces quatre braves se défiant de leurs talens pour commander à une place qui revenait de droit au premier d’entre’eux, refusèrent généreusement, afin de mettre à leur tête le citoyen Mi-quet, que ses talens militaires appelaient à ce poste. S. et F. » Laurent. 33 La municipalité de Tours (1), organe de tous les citoyens, exprime sa reconnaissance pour le mémorable décret du 18 floréal. Mention honorable, insertion au bulletin (2). (1) Indre-et-Loire. (2) P.V., XXXVIII, 112. Bin, 10 prair (1er suppl‘) ; J. Sablier, n° 1340; J. Fr., n° 608. SÉANCE Dü 6 PRAIRIAL AN II (25 MAI 1794) - N° 33 621 [. Maubeuge , 28 flor. Il] (1). « Citoyens collègues Les belles actions, tant civiles que militaires, ne peuvent rester ignorées, c’est une justice de vous les faire connaître parce que la Convention récompense la vertu, le courage et le patriotisme. Persuadé que c’est remplir ses vues que de l’instruire du zèle, de l’humanité et de la bienfaisance des défenseurs de la patrie, je m’empresse de lui transmettre quelques actions héroïques et civiques, bien faites pour augmenter l’émulation républicaine; mais c’est à vous, c’est à la Convention de payer à leurs auteurs le tribut de félicitations qui leur est dû, récompense la plus flatteuse pour des âmes pures et désintéressées. Jean-François Brocsole, natif de Coulommiers, tambour au premier bataillon de Seine-et-Marne, âgé de 19 ans, trouve dans une des cours de l’abbaye de Maroilles un enfant de 7 à 8 ans, qui lui parait abandonné et portant la livrée respectable de la misère; il l’interroge, il apprend de lui qu’il se nomme Joseph Deschamps, que son père avait été sergent au régiment de Vintimille-infanterie, qu’ayant été blessé au siège de Valencienne, il était venu à l’hôpital du Quesnoy, heu de naissance de son épouse; que dans l’intervalle de la maladie de ce dernier, elle vint à mourir; que son père commençant à se mieux porter, avait été tué par le feu de l’ennemi; que n’ayant plus aucun parent ni la moindre ressource au Quesnoy, il avait quitté la ville et avait erré dans différents corps jusqu’à ce moment, et avait vécu du superflu des soldats. La manière ingénue dont s’expliquait cet enfant, la misère dans laquelle il était plongé, et surtout la qualité d’enfant militaire, firent la plus vive impression sur l’âme sensible de Brocsoles; il propose au jeune Deschamps de lui servir de père; l’enfant verse des larmes et se jette dans les bras de son père adoptif. Broc-sole lui fait quitter ses haillons et lui achète des habits. Depuis ce temps, il ne cesse de lui procurer les secours et les soins d’un père. Il le nourrit de sa solde et de sa portion, il l’entretient proprement et le conduit lui-même à l’école en s’assurant qu’il n’y manque jamais. Le tambour qui n’a que sa paye a cependant refusé les secours qui lui ont été offerts, notamment par son capitaine qui avait offert d’habiller le jeune Deschamps. On a pris des rensei-nemens sur le récit de l’enfant et on a acquis la certitude qu’il n’avait dit que la vérité. Margey, volontaire au 5e bataillon des Vosges, de la brigade du général Duhem, lors de l’affaire qui eut lieu les 2 et 3 floréal près la forêt de Nouvion, était posté en tirailleur près la redoute située au bord de cette forêt. Il est frappé d’un boulet qui lui emporte la cuise droite et lui casse la jambe gauche. J’ai payé, dit-il au milieu des plus vives douleurs, le tribut que je devais à ma patrie; je mourrai satisfait... mais je plains ma pauvre mère si j’en reviens; mes deux bras me resteront pour la nourrir... Et il expire aussitôt. A cette même affaire, malgré 17 pièces de position de différens calibres et 3,000 hommes, (1) Bin, 7 prair. (suppl4) ; Débats, n° 613, p. 77; Mon., XX, 563. 600 républicains tinrent l’ennemi en échec pendant six heures, avec 4 pièces de 8 , 2 obusiers d’artillerie légère, quelques petites pièces de campagne, et prirent un caisson rempli de cartouches dont ils se servirent sur le champ de bataille. La proposition est faite à la garde nationale d’Avesnes qui fait le service intérieur et extérieur de la place, de recevoir la solde, la viande et le pain. Elle la rejette en s’écriant qu’elle n’ambitionnait que l’honneur de servir la patrie. Pour laisser la cavalerie à la disposition des généraux, des citoyens habitués à l’exercice du cheval, font le service des ordonnances. Des citoyennes de tout âge et les enfans, se portent aux hôpitaux; les unes font des bandes, des compresses, les autres font de la charpie. Je ne dois pas passer sous silence d’autres traits de bravoure et de républicanisme qui font l’éloge des défenseurs de la patrie composant l’armée du Nord. Le 23, au passage de la Sambre, les grenadiers du 49e régiment, ci-devant Vintimille, se sont élancés à l’eau pour aller au secours des tirailleurs qui étaient aux prises avec l’ennemi qui s’avançait dans la forêt sur l’autre rive, méprisant de passer sur les pontons qui retardaient leur marche. Le 24, ce même régiment a résisté à la cavalerie ennemie, et a mis la légion du nom proscrit de Bourbon en déroute, devant laquelle légion le 22e de cavalerie a eu la lâcheté de fouir. Le 27, le 68e régiment, ci-devant Beauce, a seul, sur un pont, soutenu l’attaque des Autrichiens qui étaient en nombre supérieur, et l’a conservé à la République, quoique les boulets sillonnassent les rangs de ces braves défenseurs. En général, l’armée de Desjardin a donné, dans l’affaire qui vient d’avoir lieu ces jours derniers, les preuves du plus grand courage. Elle répondait et criait à l’ennemi, en allant au pas de charge sous le fer de ses batteries : Vive la République ! Un trait d’un autre genre doit aussi avoir sa place dans ma lettre. C’est le désintéressement républicain des quatre premiers capitaines du 2e bataillon du 56e régiment. J’avais promu le citoyen Gelly, leur camarade, au grade de général de brigade, officier d’un patriotisme et d’une bravoure reconnus. Ces quatre braves se défiant de leurs talens pour commander à une place qui revenait de droit au premier d’entre’eux, refusèrent généreusement, afin de mettre à leur tête le citoyen Mi-quet, que ses talens militaires appelaient à ce poste. S. et F. » Laurent. 33 La municipalité de Tours (1), organe de tous les citoyens, exprime sa reconnaissance pour le mémorable décret du 18 floréal. Mention honorable, insertion au bulletin (2). (1) Indre-et-Loire. (2) P.V., XXXVIII, 112. Bin, 10 prair (1er suppl‘) ; J. Sablier, n° 1340; J. Fr., n° 608.