128 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [il juin 1791.] pelier et de Pusy veuillent interpréter une opinion qu’on ne m’a pas donné le temps de développer. Cette marché d’oppression n’est pas digne de l’Assemblée nationale. Pour la seconde fois, je demande qu’il me soit permis d’expliquer ma pensée tout entière. A gauche : Non 1 non ! La discussion est fermée. M. de Montlosler. Eh bien, M. de Pusy ne doit pas parler. M. Bureaux de Pnsy, rapporteur. Si l’on m’eût permis d’acliever le ueu de mois que j’avais à dire, on aurait vu que je ne voulais pas rouvrir la discussion. M. de Cazalès Je demande, dis-je, pour la seconde fois, qu’il me soit permis de développer ma pensée tout entière avant que personne ne veuille l’interpréter (Non! non!) ; et je demande que M. de Pusy ne combatte pas ma pensée puisqu’il ne la connaît pas et que j’ai le droit de la développer moi-même. M. Bureaux de Pusy, rapporteur. Je ne combats point M. de Cazalès. Je demande au nom des comités à expliquer les motifs de leur conduite. Quel était l’état des choses? Il s’élevait de grandes réclamations contre l’armée, des plaintes nombreuses contre les officiers dont on accusait le civisme. M. Foucault-Lardimalie. Je demande à rétablir un fait.. ( Murmures d'impatience à gauche.) D’où viennent les troubles dans les troupes? Le voici, Messieurs; il y a 6 semaines que la société des prétendus amis de la Constitution de Strasbourg a écrit à toutes les autres sociétés des amis de la Constitution de toutes les villes du royaume, d’envoyer à l’Assemblée nationale des adresses pour demander le licenciement des officiers de l’armée, et un député de l’Assemblée a porté lui-même au ministre cet écrit infâme d’invitation. Ainsi, Messieurs, ne cherchez pas la cause de tous les désordres, de tous les troubles, ailleurs que dans le club des Jacobins. ( Applaudissements à droite ; rires ironiques à gauche.) M. de montlosler. Je fais la motion qu’on licencie tous les clubs de France. (Rires ironiques à gauche.) (La partie droite se lève en applaudissant.) M. Bureaux de Pusy, rapporteur. La veille du 28 février, M. de Foucault a fait la même confidence à l’Assemblée. C’est bien gratuitement et bien inutilement qu’il vient de m’interrompre, car il ne s’agit pas de savoir comment ont été provoquées, comment sont arrivées les pétitions que vous avez reçues... (Violentes interruptions à droite.) M. Cigongne. Je fais la motion qu’on mette dehors ceux qui interrompront davantage. M. Bureaux de Pusy, rapporteur. Il s’agit d’examiner si le décret que la majorité a cru très utile, est un outrage ou une mesure obligeante pour l’armée : c’est là ce que je demande à éclaircir. Je disais donc, Messieurs, que par quelques moyens, que par quelques voies qu’aient été répandues dans le public et adressées à l’Assemblée, les pétitions qui inculpent les officiers, le fait est que ces pétitions existent ; qu’elles avaient répandu l’alarme, qu’elles inquiétaient les citoyens. Et quel était le reproche que l’on faisait aux officiers? De se jouer par un subterfuge du serment qu’ils avaient fait. J’ai déclaré hier, au nom des comités, combien ils avaient regardé cette inculpation comme futile ; mais j’ai fait sentir en même temps qu’il était nécessaire au bien public, qu’il était indispensable que les officiers détruisissent ces bruits outrageants. Et quelle était la manière la plus décente dont ils pussent les détruire, et dont l’Assemblée pût leur en offrir les moyens ? N’était-ce pas de s’adresser à eux-mêmes et de leur dire : on vous taxe d’échapper à votre serment par subterfuge; on vous taxe d’infamie. Eh bien ! l’Assemblée a pour vous la considération qu’elle doit à des hommes libres et honnêtes. Elle vous demande de démentir et de signer vous-mêmes, individuellement, le démenti que l’on vous présente (Bravo) : démentez l’outrage que l’on a fait à votre honneur : c’est de cette manière que l’on s’honore de se disculper comme militaire. Et c’est cette mesure qu’on attaque! C’est à cette mesure qu’on se fait honte d’avoir participé ! Moi je me fais gloire d’avoir eu à vous la proposer et je déclare au nom du comité militaire, qu’il croit avoir mérité l’estime de tous les officiers de l’armée, en vous la présentant. ( Applaudissemen ts.) M. de Cazalès. Et moi, je soutiens que c’est un outrage insultant pour les officiers de l’armée. M. de Montlosler. On doit moins compter sur l’honneur des clubs que sur celui des officiers. M. de Tracy. Pour enlever tout soupçon, je fais la motion que M. le Président soit chargé d’écrire aux officiers de l’armée, le peu de mots que M. de Pusy vient de dire; nous le signerons tous. (Applaudissements.) Je vous prie, Monsieur le Président, de mettre cette motion aux voix. Voix diverses : Oui I oui I L’ordre du jour ! M. de Cnstine. Il me paraît plus convenable d’envoyer les paroles de M. de Pusy au ministre de la guerre, qui en donnera connaissance à l’armée. M. de Tracy. J’adopte cet amendement à ma proposition. M. Perdrix. Ce serait trop humilier l’Assemblée. Je demande l’ordre du jour ou la question préalable ! M. Bureaux de Pusy, rapporteur , donne lecture de l’article 3 du projet de décret ainsi conçu : Art. 3. « Une déclaration pareille sera rémise par les maréchaux de camp employés sous les généraux commandants de division, auxdits généraux; par les colonels des corps, aux maréchaux de camp aux ordres desquels ils se trouvent; par les officiers de chaque corps, à leurs colonels ou commandants respectifs; et toutes ces déclara- 129 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [11 juin 1791.] tions, repassant de grade en grade, parviendront aux généraux commandants de division, qui les adresseront au ministre de la guerre. » M. Eiucas. Je demande que tous les officiers qui sont présents dans cette Assemblée prêtent sur-le-champ le serment. (Murmures.) Plusieurs membres : Aux voix, l’article! A droite : Point de voix ! (L’article 3 est mis aux voix et adopté.) M. Bureaux de Pu»y, rapporteur, donne ensuite lecture des articles suivants, qui sont successivement mis aux voix : Art. 4. « Faute, de la part d’un officier, de quelque grade qu’il soit, de se conformer aux dispositions des articles précédents dans le délai qui lui sera fixé par le roi, il sera censé réformé par le fait même de son refus, et, en conséquence, il lui sera attribué, pour traitement de réforme, le quart du traitement dont il jouit actuellement, à moinsque,conformémentaudécretdu 3 aoûtl790, il n’ait droit, par son ancienneté, à un traitement plus considérable qui, dans ce cas, lui serait accordé. Art. 5. « L’Assemblée nationale, prenant en considération le malheur d’hommes libres qu’abuseraient des préjugés invétérés ou des suggestions coupables, défend qu’il soit fait aucune insulte ou mauvais traitement à ceux qui pourraient refuser de se conformer aux dispositions des articles 2 et 3 du présent décret, enjoignant aux dépositaires des lois et de la force publique de leur accorder la protection due à tout citoyen qui ne trouble point l’ordre de la société. Art. 6. « Chaque colonel ou commandant de régiment, après avoir reçu la déclaration signée des officiers, et après avoir fait, conformément à la loi, les remplacements qui pourraient être nécessités par la forme de ceux desdits officiers qui ne se seraient point conformés au présent décret, assemblera le régiment et lui donnera connaissance de l’engagement d’honneur contracté par les officiers présents ; après quoi les sous-officiers et soldats, levant la main en signe d’acquiescement et d’adhésion, s’associeront au même engagement. Art. 7. « Le ministre de la guerre rendra public, par la voie de l’impression, le tableau de tous les officiers de l’armée qui auront rempli l’obligation prescrite par les articles ci-dessus ; nul individu, de ceux qui ont droit à remplacement dans l’armée, ne sera remplacé qu’auparavant il n’ait rempli la même formalité. Art. 8. « Les officiers actuellement au service, qui auront satisfait au présent décret, recevront du roi une lettre de confirmation ainsi conçue : « Louis, etc. Sur le compte qui nous a été rendu que N..., officier du grade de... dans le régiment. . . ou dans le corps de. . ., avait rempli la formalité prescrite par les articles 3 et 4 du décret de l’Assemblée nationale du..., le... con-lre Série. T. XXVII. firmons, au nom de la nation et au nôtre, comme chef suprême de l’armée, dans son grade et emploi, pour en exercer les fonctions conformément aux lois de l’Etat et aux règlements militaires. « Mandons aux officiers, etc. Art. 9. « Le roi sera prié d’ordonner à toutes les troupes de ligne qu’elles aient à se tenir prêtes à se rendre dans des camps d’instruction, où elles s’occuperont d’évolutions et de tous autres exercices relatifs à l’art de la guerre. Art. 10. « Les ministres de la guerre et de la marine rendront compte à l’Assemblée nationale de l’exécution du présent décret. » (Ges divers articles sont successivement adoptés.) M. F rétean-Sal nt-Jnst , l'un des rapporteurs , monte à la tribune pour donner lecture des articles du second projet de décret des comités. Une partie des membres de la droite sort de la salle. M. de Cazalès. Les articles que M. Fréteau a à nous proposer sont assez importants pour être ajournés. M. BoattevIIIe-Dnmetz. Je demande que ces articles soient décrétés sans désemparer. M. Fréteau-Saint-Just, rapporteur, donne lecture des articles suivants : Art. 1er. « Le roi sera prié de faire porter sur-le-champ au pied de guerre tous les régiments destinés à couvrir la frontière du royaume, et de faire approvisionner les arsenaux de munitions suffisantes pour en fournir, même aux gardes nationales, en proportion du besoin. Art. 2. « Il sera fait incessamment, dans chaque département, une conscription libre de gardes nationales de bonne volonté, et dans la proportion de 1 sur 20; à l’effet de quoi les directoires de chaque district inscriront tous ceux qui se présenteront, et enverront les différents états, avec leurs observations, aux directoires de département, qui, en cas de concurrence, feront un choix parmi ceux qui se seront fait inscrire. Art. 3. « Les volontaires ne pourront se rassembler ni nommer leurs officiers, que lorsque les besoins de l’Etat l’exigeront, et d’après les ordres du roi envoyés aux directoires en vertu d’un décret du Corps législatif; les volontaires seront payés par l’Etat lorsqu’ils seront employés au service de la patrie. Art. 4. « L’Assemblée nationale décrète que son président se retirera, dans le jour, par devers le roi, pour le prier de faire notifier, dans le plus court délai possible, à Louis-Joseph de Bourbon-Condé, que sa résidence près des frontières, entouré de personnes dont les intentions sont notoirement suspectes, annonce des projets coupables. 9