[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. SéSSreiiW 581 La municipalité provisoire du Havre annonce quelle a planté ces jours derniers l'arbre de la liberté, aux acclamations des citoyens, aux cris de : Vive la République ; Vive la Montagne : Haine implacable aux tyrans et aux fanatiques ! Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre de la municipalité provisoire du Havre (2). La municipalité provisoire du Havre, à la Convention nationale. « Havre-Marat, le 7 frimaire, l’an II de la République française une et indi¬ visible. « Citoyens représentants, « Nous avons planté ces jours derniers l’arbre de la liberté aux acclamations des citoyens; cette fête a été brillante, les airs ont retenti de chants joyeux, d’hymnes patriotiques; on n’en¬ tendait que ces exclamations si consolantes et si douces pour le cœur d’un homme libre : Vive la République ! vive la Montagne ! Haine impla¬ cable aux tyrans et aux fanatiques ! « Nous vous transmettons copie du procès-verbal qui consacre cette fête civique. « Salut et fraternité. « Belot, maire; Liard, officier municipal; Pouchet, officier municipal. » La municipalité provisoire du Havre, aux repré¬ sentants du peuple formant la Convention na¬ tionale (3). « Havre-Marat, le 7 frimaire, l’an II de la République française, une et indi¬ visible. « Citoyens, « Vous avez demandé des soldats ; ils marchent vers Bayeux. Notre jeune bataillon est parti ce matin plein de l’ardeur qu’inspire une bonne cause à de braves gens et chantant des airs patriotiques sur l’air chéri des enfants de Mar¬ seille, et aux acclamations des citoyens : Vive la République! vive le bataillon de Marat! H a juré de mourir plutôt que de ne pas fixer la vic¬ toire sous le drapeau de la liberté. Ce bataillon porte le nom de l’ami du peuple, de Marat; la mémoire de ce député célèbre lui est chère, ce nom seul fera reculer d’effroi les satellites du despotisme. Si, comme nos frères de Paris, les jeunes gens de la première réquisition du can¬ ton du Havre avaient eu l’avantage de défiler dans (le sanctuaire des lois, à leur tournure, à leurs équipement et armement parfaits dans tous les genres, vous eussiez vu combien la patrie doit compter sur les envoyés des assemblées pri¬ maires, des officiers municipaux et des citoyens du Havre-Marat. « Salut et fraternité. « Belot, maire; Pouchet, officier municipal; Liard, officier municipal. » Procès-verbal de la fête civique qui a eu lieu au Havre-Marat, pour la plantation d'un nouvel arbre de la liberté, le dernier jour de la 3e dé¬ cade du 2e mois de la 2e année de la Répu¬ blique française, une et indivisible (1). Le deuxième jour de la 3e décade de brumaire, deuxième année de la République française, une et indivisible, au Havre-Marat. Le conseil général de la commune ayant déli¬ béré, dans la séance du cinq de ce mois, qu’il serait planté solennellement ce jour un nouvel arbre de la liberté, il s’est, à cet effet, assemblé dans la grande salle du palais de justice, lieu ordinaire de ses séances, où se sont réunis les membres de la Société populaire, ceux des dif¬ férentes autorités constituées, civiles et mili¬ taires et autres citoyens et citoyennes de cette commune, invités à cette fête donnée en l’hon¬ neur de la liberté. A midi, le cortège, précédé de tambours et accompagné d’un détachement de la garde na¬ tionale en armes, a dirigé sa marche vers la place de la liberté. En tête marchait la Société populaire réunie en masse et précédée de sa bannière, sur laquelle on lisait cette inscription : Société républicaine du Havre de Marat; suivait immédiatement le conseil général; deux de ses membres portaient les chênes destinés à être plantés. Ces symboles de la liberté et de la régé¬ nération française, ornés de rubans tricolores, étaient accompagnés de différents attributs, tels que le bonnet de la liberté, le drapeau national, la pique et la couronne civique et de quatre médaillons sur chacun desquels était une des inscriptions suivantes : Le triomphe de la raison; V enfer a vomi les rois; l’enfer a vomi les prêtres; guerre éternelle aux tyrans; le peuple seul est sou¬ verain. Le second groupe était formé par les vieillards et les enfants, espoir de la patrie. Le troisième groupe était composé par toute la masse respectable des citoyens et citoyennes; tous les individus utiles de la société étaient in¬ distinctement confondus, quoique caractérisés par leurs marques distinctives; ainsi on voyait le juge dans son costume et son chapeau à plumes marcher auprès du tisserand et du cor¬ donnier; le noir Africain, qui ne diffère que par la couleur, marchait à côté du blanc Européen; dans ce dernier groupe flottaient le pavillon national et celui des Etats-Unis, portés par les marins des deux nations, fraternellement réunis pour célébrer cette fête civique. Le cortège étant arrivé dans cet ordre sur la place de la Liberté, l’arbre y a été planté. Des chants d’allégresse, des salves d’artillerie, des cris réitérés de : Vive la République! vive la (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 337. (2) Archives nationales, carton C 284, dossier 822. (3} Archives nationales , carton C 284, dossier 822. (1) Archives nationales , carton G 284, dossier 822* 582 [Convention nationale,] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j ” JéSretm Montagne ! vive la mémoire de Marat ! ont porté an loin l’effroi dans l’âme des despotes; des restes impurs de la féodalité et de la royauté ont été livrés aux flammes; des danses et des baisers fraternels ont terminé cëtte scène tou¬ chante. lie oortège, après avoir fait le tour de la place, s’est rendu, en chantant l’hymne marseillaise, dans le temple de la Raison : ce vaste édifice pou¬ vait à peine contenir tous les artisans. Le procu¬ reur de la commune à prononcé à la tribune* au hom du conseil général, le discours suivant : « Les trésors de la Liberté sont donc débar¬ rassés des voiles impurs de l’hypocrisie qui les ont altérés par une rouille de tant de siècles. O Raison, nous t’en rendons grâce, c’est une de tes conquêtes. Ce que nos frères appelaient églises oü assemblées des fidèles, et qui n’étaient plus que des sépulcres blanchis, Vont devenir enfin ce qu’elles étaient dans l’origine : des assemblées de frères. « On y lira l’ordre du jour, le Bulletin, ce qu’ils appelaient l’évangile; désormais la statue de la Liberté sera placée dans ce temple national. Son existence impérissable donne des jouis¬ sances infimes. Elle faisait les délices des pre¬ miers sages. « N’écoutons dorénavant, citoyens, que cette voix fraternelle qui nous crie que tous les partis, qu’une ambition puérile et des préjugés ont jus¬ qu’ici divisés, se coalisent; marchez tous en¬ semble au but de la plus sainte politique, qui est la vérité, la propriété, l’égalité et le bonheur commun de tous les hommes. « Fidèles aux lois de la nature, arrivons Comme elle à la régénération de l’univers; ren-dons-lui la parole, et la parole qui, au commen¬ cement, a créé des hommes, va récréer ces mêmes hommes, et pofir eux un autre riionde ; ils y 'naîtront tous égaux en droits, et par cette éga¬ lité originelle seront pour toujours effacées les tâches d’une servile naissance. « Mais, après Vous avoir entretenu du triomphe de la raison Sur le fanatisme, prome¬ nons un instant nos regards sur les dangers de la patrie. « Une fraction liberticide enchaînait par Ses intrigues criminelles le génie bienfaisant de la Montagne; par sa fermeté et soii eivisme, ce¬ lui-ci l’a terrassé. Aüssitôt s’est élévé le colosse majestueux d’une Constitution sublime qui comblera les vœux de toute âme républicaine : nous l’avons accepté, ce chef-d’œuvre de la raison humaine, il nous faut le défendre pour jouir des bienfaits inestimables de cette Cons¬ titution, nous avons encore des difficultés à vaincre, des dangers à braver; une grande me¬ sure est ordonnée pour terminer le grand procès que le vieux despotisme de l’Europe a suscité à la liberté nationale de la France. Nos ressources sont immenses; elles sont dans notre constance et dans notre couragè; le combat que les Fran¬ çais vont livrer aux despotes coalisés va déci¬ der de leur sort. Des hommes libres qui ont juré de mourir plutôt que de retomber dans la ser� vitude, ont de grands avantages sur leurs enne¬ mis. Allons, citoyens, courons aux armes et ne les quittons qu’après que les plaines qui cou¬ vrent nos frontières seront engraissées des corps des satellites des tyrans. Citoyens qui êtes appe¬ lés à défendre votre patrie, c’est à vous qu’est réservée la gloire de faire mordre la poussière à nos ennemis; c’est à vous que la France devra leur expulsion du territoire de la République; élancez-vous donc sur nos frontières, prouvez aux tyrans coalisés ce que peut la volonté Su¬ prême d’une grande nation qui, pour le main¬ tien de la liberté, abdique la paix et brave là mort. « Jurons de conserver a notre patrie son tef-ritoire, ses lois, son gouvernement et sa gloire. « Ostriades, Lacédémonien, resté seul sut le champ de bataille, mais blessé à mort, se relève, et de ses mains défaillantes ayant dressé un tro¬ phée, écrit de sofl sang ; Sparte a Vainéu. Qhel Français, s’il est digne de la liberté, ne mour¬ rait pas avec joie pour une si belle cause, et, percé de coups, n’écrirait aussi de son sang : mon pays est libre î Ce discours a été couvert d’ applaudissements ; on en a voté l’impression; le serment qu’il con¬ tient a été répété par tous les assistants et suivi de nouveau! cris de ; Vive la République ! : Alors plusieurs hymnes patriotiques ont été \ chantés, la plupart sur l’air chéri des enfants de �Marseille, et une musique militaire a fait re¬ tentir les airs de ses sons belliqueux. Cette fête, à laquelle ont présidé la joie, l’al¬ légresse, la concorde et la fraternité, a été ter¬ minée par des banquets et un bal patriotiques. Fait et arrêté les an et jour susdits, et ont les membres du conseil général provisoire de la Commune, signé au registre. Collationné conforme aü registre, par moi secré¬ taire-greffier de la commune du Havre de Marat, ce 7 frimaire, Vafa II de la République française i une et indivisible. Ta veau, secrétaire. La Société populaire de Sorgues, district d’A¬ vignon, département de Vaucluse, remercie la Convention nationale d’avoir délivré leur canton du fer assassin de prétendus Marseillais, mons¬ tres soudoyés pour égorger leurs femhiès et leurs enfants. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit l’adresse de la Société populaire de Sorgues (2). La Société populaire dé Sorgues, à la Convention nationale. « Sorgues, district d’Avignon, département de Vaucluse, ce 9e jour de la lre décade de brumaire, l’an II de la République française. « Législateurs, « Qui nous aurait dit qu’après avoir secoué, â travers tant d’orages, le joug ultramontain, vic¬ torieux des sourdes menées de l’infâme Mulot, nous aurions été un jour obligés d’abandonner nos foyers, nos femmes et nos enfants pour nOtiS soustraire au fer des assassins. Oui, législateurs, de prétendus Marseillais, des monstres soudoyés, (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 2G, p. 337. (2) Arehives nationales , carton G 285, dossier 832.