492 {Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j ® f‘riraaire an n 1 (lo décembre 1793 des bataillons, qui leur donne de l’audace et qui double le courage. C’est toi, citoyen collègue, que nous avons cru pouvoir choisir pour rem¬ plir cette importante et pressante fonction; nous t’engageons à partir pour Cherbourg sur-le-champ, et tu sauveras la République dans cette partie, qui communique d’une manière si dangereuse avec nos plus cruels ennemis. « Les mesures fermes que tu as prises à Brest te permettent cette petite absence, et sont la caution de tes succès dans le département de la Manche. « Le comité de Salut public est fortement décidé à ne rien négliger pour déblayer le terri¬ toire de la République de cette race de brigands, et à prendre les mesures les plus fortes pour que la mer ou les départements maritimes devien¬ nent leur tombeau. Nous donnons dans le mo¬ ment des ordres pour qu’il arrive dans le dépar¬ tement de la Manche et aux environs, de nombreux secours et des troupes bien discipli¬ nées. Tu dois y compter, et par ce moyen hardi, nous sommes convaincus qu’il n’y aura plus ni guerre civile, ni brigands dans quelques jours; tu peux assurer les grands et les prompts secours aux départements que tu vas parcourir ; c’est par ce puissant effort que nous aurons pacifié enfin l’intérieur de la France. (f Dès cette lettre reçue, écris -noue, que tu pars. Dès ton arrivée, envoie-nous un autre courrier; en séjour à Cherbourg ou ailleurs, donne -nous très fréquemment de tes nouvelles ; ce n’est que par une correction active que le co¬ mité peut répondre à la Convention des me¬ sures qu’il prend et des moyens d’exécution qui sont employés. » Ce n’était pas assez pour l’énergie nationale et les besoins de la République, de disposer froidement des ressources qui étaient le plus à proximité, il fallait enfin terrasser les rebelles, sans courir le hasard des combats à armes trop égales. Le comité ordonn \ que 20,000 hommes seraient tirés de l'armée du Nord. Ce n’était pas compromettre la frontière, puisqu’il restait un nombre plus que suffisant pour la garantir des artificieuses expéditions de Cobourg, vu l’état avancé de la saison. Voici l’article isolé de l’arrêté qui concerne cette mesure. Nous ne lisons pas tout l’arrêté, parce qu’il contient des vues plus vastes, et dont la prudence veut que l’on diffère encore la publication : « Le comité de Salut public a arrêté que 20,000 hommes seront détachés sans délai de l’armée du Nord pour so joindre à l’armée de l’Ouest, et à celle des côtes de Cherbourg, pour combattre et détruire les brigands qui infestent les départements de la Mayenne, de l’Ille et-Vi-laine et de la Manche, et qui menacent les ports de Granville et de Cherbourg; qu’il y aura dans ce nombre de 20,000 hommes 1,500 hommes de troupes à cheval. » En attendant ce secours nouveau et puissant, les différents corps militaires devaient effectuer leur réunion. Et qu’on prenne garde qu’une réunion de corps militaires ne s’effectue pas en un instant comme la volonté ou la pensée. C’est déjà une opération qui fait honneur aux talents d’un général; il compte cela pour ud succès. Pour faciliter ces moyens, le comité leur prescri¬ vit un système de correspondance. Il est con¬ tenu dans l’arrêté suivant, en date du 20 bru¬ maire. « Le comité de Salut public, considérant que les circonstances exigent impérieusement qu’il soit informé chaque jour de la position des rebelles échappés de la Vendée, et des mesures prises et exécutées par les généraux, arrête ce qui suit : « 1° Il sera établi des courriers pour assurer une communication journalière entre les géné¬ raux commandant les différents corps d’armée de la République qui doivent agir contre les rebelles, afin de mettre dans les opérations l’en¬ semble et la subordination nécessaires, ainsi que pour instrume chaque jour le comité de Salut public de tout ce qui se passe ; « 2° En conséquence il y aura auprès de chacun des généraux Sepher, Rossignol et du commandant en chef de l’armée de l’Ouest, au moins deux courriers, constamment employés au service indiqué par l’article 1er, de manière que les comptes rendus ou les ordres soient transmis de proche en proche dans toute la ligne circulaire qui enveloppe les rebelles; ainsi, par exemple, la liaison sera établie entre Falaise, Mortain, Fougères, Vitré ou Rennes, Laval, Alençon et avec réciprocité de l’une à l’autre; « 3° Les généraux et les généraux de divi¬ sion feront reconnaître chaque jour la position des rebelles et en dresseront un bulletin qui sera remis aux courriers les plus à portée pour le faire parvenir à Alençon ; « 4° Deux courriers seront placés à Alençon, deux à Verneuil, et deux enfin à Houdan. Ils se relaieront dans le port des dépêches, qui seront recueillies à Alençon, pour être envoyées au comité de Salut public et au ministre de la guerre et pour rapporter leurs ordres ; 5° Le ministre de la guerre est chargé de toutes les mesures nécessaires à l’exécution du présent arrêté et lui en rendra compte. » Mais une réunion de corps militaires man¬ querait son principal avantage, si l’unité du commandement et la subordination graduelle n’était pas clairement déterminée. N’a-t-on pas vu tant de fois combien de petites jalousies et les misérables prétentions de l’orgueil nui¬ saient à la défense de la République? Le comité a dû calculer les passions et leur donner une diversion utile en écrivant en même temps aux généraux et aux représentants, et ne leur dissimulant pas leurs propres défauts. Lettre du comité de Salut 'public , au citoyen Laplanche, représentant du peuple. « Paris, le 24 brumaire, etc... « Citoyen collègue, « Nous ne pouvons te dissimuler que c’est le défaut d’ensemble dans les opérations mili¬ taires qui produit les plus grands maux et qui aggrave notre situation dans la nouvelle Ven¬ dée. Les représentants du peuple ne sont pas des généraux. Les plans de détail et les mesures partielles nous ont perdus sur quelques fron¬ tières, et peuvent amener de nouveaux désastres. C’est à ton patriotisme à les éviter. a Le comité a envoyé aux généraux en chef un plan général pour attaquer les brigands. C’est à l’exécution de ce plan que vous devez tous concourir. Vous serez toujours battus avec des moyens divisés : la victoire n’a jus- [Convention nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. | 2o frimaire an U 493 1 * la decmmhre 17G3 qu’à présent accompagné que les grandes masses; ainsi accorde-toi avec Sepher, et qu’il y ait l’unité dans tes mesures. Que chaque repré¬ sentant du peuple ne se charge pas de comman¬ der une armée particulière. Du courage et de l’ensemble. Le comité compte sur l’exécution de son arrêté et sur ton énergie républicaine. « Ne perds pas de vue que Rossignol étant chargé, par un arrêté du comité do Salut pu¬ blic, du commandement en chef de toutes les troupes qui doivent attaquer les rebelles, c’est un devoir pour chaque général, de quelque grade qu’il soit, de rendre compte à Rossignol de toutes scs opérations, de l’informer de tous ses mouvements. Faute de remplir cette obli-gtaion, ils se rendraient responsables des mau¬ vais événements, et le comité est bien décidé à mettre à cet égard une sévérité inflexible. « Sepher a l’arrêté dont nous te parlons, il te le communiquera. « Salut et fraternité. » Autre lettre du comité au général Chalbos, commandant V armée de l'Ouest. « Paris, le 24 brumaire, etc. « Nous apprenons, général, que les rebelles occupent Avranches; le général Sepher, com¬ mandant en chef do l’armée des côtes de Cher¬ bourg, a pris poste à Saint -Lô et à Carentan avec les 40,000 hommes qu’il a tirés de Caen, pour s’opposer aux rebelles qui s’avancent dans le département de la Manche. Hâtez-vous, général, de réorganiser l’armée que vous com¬ mandez : poursuivez les brigands; faites en sorte de les atteindre avant qu’ils pénètrent plus avant dans un département où il est si important qu’ils ne prennent pas des postes d’où il serait difficile de les chasser. Le général Sepher défendra la presqu’île, il arrêtera les rebelles en avant d’ Avranches, tandis que vous irez les combattre dans leur dernier asile. « Le général Rossignol va s’avancer; vous vous trouverez bientôt réunis, ou assez rap¬ prochés, pour envelopper les rebelles : il est impossible qu’ils se rassemblent tous à Avran¬ ches ; ils occuperont nécessairement des bourgs et des villages : vous pourrez, en les envelop¬ pant et mettant le plus parfait ensemble dans les opérations militaires, les combattre avec avantage et les détruire entièrement. « Les circonstances exigent de la rapidité dans les marches et du concert entre les géné¬ raux qui commandent les divisions de l’armée. Le général Rossignol commandera en chef les armées de l’Ouest. Vous vous adresserez à lui, vous prendrez ses ordres. Terminez prompte¬ ment et glorieusement cette guerre, qui n’a été malheureuse et n’a été si longtemps prolongée, que parce que l’on ne s’est jamais concerté, et qu’il n’y a jamais eu d’ensemble dans les opé¬ rations et dans les plans. A utre lettre du comité au citoyen Rossignol, géné¬ ral en chef de l'armée des côtes de Brest, à Bennes. « Paris, le 24 brumaire, l’an II de la République française, une et indi¬ visible. Le comité t’a envoyé son arrêté, citoyen général, et il compte fortement sur son exé¬ cution; il a écrit en conséquence aux autres généraux et aux représentants envoyés dans la Manche, le Calvados et Maine-et-Loire pour qu’ils se concertent avec toi. Tout dépend de cet ensemble. Les brigands n’auraient pas obtenu des succès incroyables dont on nous afflige, s’il y avait eu quelque activité dans l’exécution, soit de ta part, soit de celle des autres divisions de l’armée qui sont à tes ordres. Rallie tous les généraux de division, ayez de l’audace, réunis toutes tes forces, et qu’avant huit jours les rebelles soient exterminés ou noyés dans la mer. Ne souffre pas qu’avec les républicains que tu commandes il se forme une nouvelle Vendée, ou que l’étranger commu¬ nique avec les brigands. La mesure par laquelle tu devrais te rallier sans cesse à nous, n’est pas exécutée; c’est de communiquer très fré¬ quemment avec le comité de Salut public par des courriers extraordinaires. Activité, ensemble, énergie et audace dans l’exécution d’un plan arrêté au centre : voilà tout ce qu’il faut pour la victoire. « Salut et fraternité. » Autre lettre du comité de Salut public, au citoyen Prieur de la Marne. « Paris, 25 brumaire, l’an II de la Répu¬ blique française, une et indivisible. « Citoyen collègue et ami, « Rien n’est plus urgent que ton départ vers les départements où les brigands fugitifs de la Vendée portent la terreur et obtiennent des succès. C’est à l’armée de Rennes que tu dois te porter, tandis que Jean Bon Saint André se portera vers l’armée de Cherbourg : nous lui avons écrit à ce sujet le 16 de ce mois. « Nous nous plaignons de ce qu’on ne pour¬ suit pas les rebelles avec assez d’activité, et surtout de ce qu’il n’y a point d’ensemble dans les mesures militaires, ni dans la réunion des forces. Rossignol n’agit point ;JVitré et Fou¬ gères n’ont pas été défendus, ou l’ont été fort mal. « Nous nous plaignons de ce que les autres représentants ne montrent pas assez d’énergie; qu’ils sont toujours tremblants sur les mesures, doutexirs sur les succès, disséminés dans les forces, et ne harcelant pas assez fort les offi¬ ciers et les chefs militaires. « Nous nous plaignons de ce que les trois colonnes de nos républicains sont �conduites par des officiers destitués ou suspendus, tels que Vergnes et Nouvion. Cependant le ministre de la guerre leur a écrit en leur envoyant leur destitution. « Nous nous plaignons de ce que les repré¬ sentants n’opposent à cette horde de brigands qui cherche à attaquer des places maritimes, que des troupes disséminées, des forces incom¬ plètes et des bataillons isolés, qu’ils exposent à être massacrés par la disproportion énorme de nos forces opposées à celle des brigands. « Nous espérons qu’avec ton âme de feu, ton éloquence militaire et ton patriotisme pro¬ noncé, tu vas réparer tant de fautes. Nous avons donné, il y a quelques jours, des ordres pour¬ quoi arrive incessamment des forces consi¬ dérables de l’armée du Nord, avec 1î général Duquesnoy, qui les commandera. Nous avons