588 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j u, fluctuation momentanée, mais la masse du peuple est restée inébranlable, immobile, et sa fermeté constante a fait trembler les téméraires et vils enfants du marais : ils ont cherché leur salut dans la fuite, ils se sont cachés dans les roseaux et dans la fange dont ils étaient sortis. Déjà plusieurs ont été découverts, arrachés de leurs immondes retraites et soumis au glaive vengeur de la loi; le reste aura le même sort, nous osons l’espérer, aucun d’eux ne peut échapper à nos actives et diligentes recherches. Nous avons consacré notre temps et nos veilles à purger cette partie de la République de toute la gent infecte et malfaisante qui la souillait. Mais, citoyens représentants, ce n’est que sous vos auspices que notre zèle peut obtenir un succès complet. « C’est vous qui avez établi dans tous les postes importants de la République ces senti¬ nelles nécessaires qui ne cessent de veiller pour le salut de la patrie, et qui font la terreur et le désespoir des parricides jusque dans leurs plus sombres repaires ; c’est à vous, citoyens créateurs de la surveillance, c’est à vous à entretenir ce flambeau salutaire; c’est à vous à protéger votre ouvrage, à le porter à la perfection, à l’affermir et à consolider pour l’éternité la Constitution républicaine que vous avez donnée au peuple français. Nous avons juré de vous seconder et de vous défendre au péril de nos jours et même au prix de tout notre sang. « Demeurez donc, citoyens représentants, de¬ meurez à votre poste jusqu’au triomphe parfait de la République. Nous vous avions déjà fait cette invitation comme membres de la Société populaire de cette ville : nous vous la réitérons comme membres composant le comité de sur¬ veillance, et c’est au nom de tout le peuple français dont la voix s’élève de toutes parts pour vous marquer sa confiance, c’est au nom de la patrie, nom si cher, si sensible à vos cœurs et qu’il suffit de prononcer pour vous déterminer aux plus grands sacrifices. « Nous vous envoyons en même temps un calice enlevé à la superstition pour en faire l’usage que vous dictera votre sagesse; il sera beaucoup plus utilement employé à récompenser les défenseurs de la vérité et des grands principes que vous avez consacrés dans l’Acte constitu¬ tionnel. Un de nos membres, le citoyen Martin, vous le portera. Recevez le témoignage unanime du dévoue¬ ment absolu avec lequel nous serons jusqu’à la mort, citoyens représentants, les membres com¬ posant le comité de surveillance, à Bayeux, sex-tidi de la 2e décade de brumaire l’an II de la République une et indivisible. » (Suivent 11 signatures.) Les administrateurs du district de Belley an¬ noncent à. la Convention que la première vente qui a été faite des biens d’émigrés a presque doublé l’estimation. Insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre des administrateurs et 'procureur syndic du district de Belley (1). A la Convention nationale. « Belley, ce 5 frimaire an II de la Répu¬ blique française, une et indivisible. « Citoyen Président, « Nous croyons devoir annoncer à la Conven¬ tion que la première vente de biens d’émigrés s’est effectuée aujourd’hui dans ce district; quelques héritages qui avaient été estimés 23,000 livres ont été vendus 52,320 livres. Nous espérons continuer tous les jours avec le même succès : on ne croit point aux revenants. « Salut et fraternité. « Les administrateurs et procureur syndic du district de Belley, « Dumolin; Garnier; Perrez. » Le procureur syndic du district de Mortagne fait part à la Convention que le citoyen Bouvoust, jadis doyen de la collégiale de Toussaint-de-Mor-tagne, a renoncé à son traitement. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (2). Suit la lettre du procureur syndic du district de Mortagne (3). Le procureur syndic du district de Mortagne, au Président de la Convention nationale. « Mortagne, le 24 brumaire de l’an II de la République française. « Citoyen Président, « Je t’adresse ci-inclus copie de la lettre que Bouvoust, jadis doyen de la ci-devant collé¬ giale de Toussaint de cette ville a fait passer à l’administration du directoire du district, por¬ tant offre et remise de la pension que la nation lui avait accordée à titre d’indemnité. Si tous les ci-devant prêtres pensionnaires en faisaient autant, quelle pourrait être la meilleure preuve de patriotisme? Mais il faudra, pour obtenir un pareil abandon de leur part, un bon décret qui les y force et qui leur apprenne que des fai¬ néants ne doivent pas jouir des traitements qui ne doivent être accordés qu’à des sans-culottes et à des citoyens qui sacrifient leur temps pour le salut et pour le plus grand intérêt de la patrie. « Vive la République ! « Le procureur syndic du district de Mortagne, « Delestangle. » (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 339. (1) Archives nationales, carton C 284, dossier 822. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p* 339. (3) Archives nationales, carton G 283, dossier 810* [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j 4 J Sfiïfre'ÎTM 589 Lettre du citoyen Bouvoust (1). « 23 brumaire, l’an II de la République une et indivisible. « Citoyens administrateurs, « Dans les besoins de la République, tout citoyen sincèrement patriote lui doit des offrandes et des sacrifices. « C’est pour remplir cette obligation que je vous offre et vous fais remise pour tout le temps de ma vie, du traitement que la nation m’avait accordé à titre d’indemnité. Daignez, citoyens administrateurs, agréer au nom de la patrie cette remise. La présente, déposée entre vos mains et transcrite sur vos registres, sera pour la nation un titre de libération vis-à-vis de moi, et de ma part une renonciation solennelle et authentique à toute indemnité pour raison de mon ci-devant état; état dont, depuis plus de trois ans, j’ai cessé, avec la ferme résolutionde ne plus reprendre, toutes fonctions publique et particulière. « Salut et fraternité. « Signé : Bouvoust. « Pour copie certifiée conforme à l'original dé¬ posé aux archives du district de Mortagne, « Mangin, secrétaire. » Le conseil général de la commune de Rouen fait passer à la Convention nationale le procès-verbal de la fête civique qui a eu lieu dans cette commune en mémoire de Bordier et Jourdain, morts pour la défense de la cause du peuple. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (2). Suit la lettre du conseil général de la commune de Bouen (3) : Le conseil général de la commune de Bouen, au Président de la Convention nationale. « Rouen, 6 frimaire, l’an II de la Répu¬ blique française. « Citoyen, « Nous te faisons passer six exemplaires du procès-verbal de la fête civique qui a eu lieu en cette ville le 3 de ce mois en mémoire de Bordier et Jourda/in, morts pour avoir défendu la cause du peuple en 1789. Nous t’invitons à en faire donner lecture à la Convention nationale. « Defontenay, maire. » (1) Archives nationales, carton C 283, dossier 810. (2) Procès-verbaux de, la Convention, t. 26, p. 339. (3) Archives nationales, carton C 284, doS'sieV 822. Fête civique en mémoire de Bordier et Jourdain (1). Délibération du conseil général de la commune de Bouen. Séance du duodi de frimaire, an deuxième de la République une et indivisible. Le conseil général provisoire de la commune de Rouen, ouï et ce requérant le procureur de la commune, Lecture faite des derniers interrogatoires de Jourdain et Bordier et du jugement de mort contre eux rendu le 21 août 1789; Considérant que Jourdain et Bordier étaient de vrais défenseurs de la cause du peuple, et sont morts victimes de leur ardent amour pour la liberté; Considérant que dans une Révolution il est nécessaire d’imprimer de grands mouvements à la masse du peuple, et que si ceux qui dirigent ces mouvements se laissent quelquefois égarer par l’enthousiasme de leur patriotisme, ils méritent plutôt l’indulgence que la sévérité des lois; Considérant que l’esprit public et les prin¬ cipes du gouvernement populaire sont outragés par la mort desdits Jourdain et Bordier, et que des magistrats révolutionnaires doivent s’em¬ presser de les proclamer solennellement les amis du peuple, et d’élever à leur mémoire un monu¬ ment de la reconnaissance publique. Arrête que la mémoire de Jourdain et Bor¬ dier sera solennellement réhabilitée, et qu’ils seront proclamés martyrs de la liberté. La commune de Rouen se charge de l’éduca¬ tion des enfants de Bordier et de Jourdain, et de faire une pension à la femme de ce dernier. La présente sera imprimée, affichée et en¬ voyée à la Convention nationale, à la Commune de Paris, à la Société des Jacobins et aux autres Sociétés populaires. i� La fête en mémoire de Jourdain et de Bor¬ dier, morts martyrs de la liberté, sera célébrée le tridi de frimaire, deuxième année de la Répu¬ blique. Les corps administratifs et judiciaires, les juges de paix et assesseurs, les commissaires de police et les 26 députés des assemblées pri¬ maires, la Société populaire, les instituteurs de la jeunesse et leurs élèves, les directeurs des spectacles et les personnes qui y sont attachées, les citoyens des deux sexes, sont invités d’y assister. Ordre. La moitié de la force armée, la gendarmerie et la légion de Rouen, ouvriront la marche ; les tambours auront un crêpe sur leur caisse. Le cortège partira de la Maison commune à midi. Les instituteurs de la jeunesse et quelques élèves en groupe. La musique militaire et celles des spectacles feront entendre sur la route les sons les plus lugubres. (1) Archivés nationales, carton C 284, dossier 822