(Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 février 179 l.J 401 cret du 18 de ce mois, j’ai fait annoncer, par de nouvelles affiches, que l’adjudication définitive du bail des messageries serait faite aujourd'hui 21. « Deux compagnies se sont trouvées en présence : celle de M. Lequeux, et celle de M. Ma-card, qui s’est présentée avec un cautionnement en règle, en prenant la place de la compagnie Choiseau qui s’était retirée. « Les enchères sur celle de 300,000 livres, faite à la dernière séance par la compagnie de M. Lequeux, ont été successivement couvertes et portées par cette dernière compagnie jusqu’à la somme de 600,500 livres. ( Applaudissements .) La com agnie de M-Macard n’ayant pas couvert celle enchère, j’ai prononcé l’adjudication en faveur de la compagnie de M. Lequeux, pour ladite somme de 600,500 livres. « J’ai l’honneur d’envoyer à l’Assemblée copie du procès-verbal de cette adjudication; j’attends qu’elle veuille bien la ratifier, ainsi qu’elle s’est réservé de le faire par son décret ou 20 décembre dernier. Aussitôt que cette ratification me sera connue, je ferai passer le bail à la compagnie adjudicataire. « Je suis, etc.... « Signé : DE Lessart. » (L'Assemblée charge son comité des finances de lui présenter demain matin un projet de décret à ce sujet,) M. le Président. Les maîtres de poste m’ont fait parvenir à l'occasion du bail des messageries l’adresse suivante : « Messieurs, vous venez de rendre la vie à 600 familles utiles, à 600 familles répandues dans le royaume, sur la surface de la France. Pénétrées de respect pour vos décrets, pénétrées d’amour pour la Constitution, elles jurent par mon organe d’être les sentinelles toujours actives de cette Constitution ; elles ajoutent à leur serment civique qu’elles renouvellent en ce moment l’engagement sacré de veiller, dans toutes les localités, sur les mouvements qui pourraient vous être contraires et de servir avec un zèle égal et le public et la patrie. « Nous vous demandons protection, nous vous jurons fidélité. ( Applaudissements prolongés .) * Signé : DüBUC-LONCHAMP. » M. le Président donne lecture d’une lettre des administrateurs du directoire du district de Bayeux, ainsi conçue : « Monsieur le Président, M. l’abbé de Launay, vicaire de la paroisse de Saint-Sauveur de Bayeux depuis le 1er janvier dernier, ne s’est pas contenté de prêter avec son curé le serment qui le lie à la patrie, il vient encore de déposer sur son autel le don d’un assignat de 200 livres qu’il a reçu d’elle pour le dernier quartier de sa pension. Nous le joignons ici. « C’est une tendre mère qui m’ouvre son sein, « disait-il avec enthousiasme, et je n’ai rien en-« core fait pour elle ! Je lui dois au moins les « prémices de ses bienfaits. » « Avec quelle sensibilité n’avons-nous pas recueilli ces vertueuses paroles et combien nous en éprouvons encore à vous les transmettre ! « N’oublions pas de vous dire que cet estimable ecclésiastique avait un frère, jeune peintre de la plus grande espérance, et qui a péri à la suite des affaires des 13 et 14 juillet. « Il est doux pour nous a’avoir de pareils 1" Série. T. XXIII. traits à vous annoncer.» ( Applaudissements à gauche; murmures à droite.) M. Duval d’Eprémesnil. Il faut le faire évêque. Un membre à gauche : Ce trait de générosité ne montre pas qu’il soit indigne de l’être. (L’Assemblée ordonne qu’il soit fait mention de cette lettre dans le procès-verbal.) M. Fe Pelletier de Saint-Fargeau. J’ai reçu des administrateurs du district de Saint-Far-geau la lettre suivante: « Nous vous prions d’annoncer le plus tôt possible à l’Assemblée nationale que tous les fonctionnaires publics ecclésiastiques du district de Saint-Fargeau ont prêté le serment prescrit sur la constitution civile du clergé et d’en demander une mention honorable dans le procès-verbal. « Cet hommage est dû à tous nos ecclésiastiques, et nous ne le sollicitons que comme une justice que nous leur croyons due. Nous nous félicitons de cette heureuse harmonie et de leur soumission aux lois nationales ». (L’Assemblée ordonne qu’il en sera fait mention honorable dans le procès-verbal.) M. Dubois-Oancé. Je dois vous faire part, Messieurs, d’un fait qui ne vous sera pas indifférent. Un curé, voisin de Paris, dont je connais le nom et la demeure, mais qui ne veut pas être nommé, avait refusé son serment ; le lendemain il reçut un assignat de 300 livres, que lui envoyait une dame, sans doute très respectable, en lui disant qu’elle croyait devoir le dédommager du sacrifice glorieux de sa fortune. Au même instant le curé a été prêter son serment, et a fait don de son assignat aux pauvres. (Applaudissements.) M. de Saint-Martin. L’évêque de Viviers dans le département de l’Ardèche, ce prélat qui a toujours suivi la loi de la résidence,... M. Duval d’Eprémesnil. Il a perdu la tête. M. de Saint-Martin... ce prélat bienfaisant et charitable, dont les mœurs et la piété rappelaient les mœurs des premiers évêques, a prêté solennellement, et aux acclamations du peuple, le serment exigé des fonctionnaires ecclesiastiques; il l’a fait précéder d’un discours où il a prouvé que la religion lui faisait un devoir de se conformer à cette loi. ( Violents murmures à droite.) Il a développé de la manière la plus énergique la sagesse des dispositions du décret sur la constitution civile du clergé. Cet exemple a été imité par ta très grande majorité des ecclésiastiques de son diocèse : il n’y a eu que quelques réfractaires, séduits par les écrits incendiaires, que les émissaires des fanatiques de Nîmes et d’Uzès ont répandus dans ce département. ( Vifs applaudissements.) La suite des articles sur les droits féodaux est reprise. M. Merlin, rapporteur, donne lecture des articles suivants : Art. 31 (art. 33 du projet). Tout ci-devant seigneur qui, tout à la fois, 26 122 février 1791.] 402 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. justifiera qu’à une époque remontant au delà de 40 ans, il a planté ou fait planter, et que depuis il a possédé des arbres dans des marais, prés et autres biens appartenant à une communauté d’habitants, conserve la propriété et libre disposition de ces arbres ; sauf à cette communauté à les racheter sur le pied de leur valeur actuelle, à la forme du décret du 26 juillet 1790; ce qui aura pareillement lieu à l’égard des arbres plantés et possédés par le ci-devant seigneur, depuis un espace de temps au-dessous de 40 ans, par remplacement d’arbres qu'il justifiera avoir été antérieurement à 40 ans, plantés et tout à la fois possédés par lui ou ses auteurs. » (Adopté.) Art. 32 (art. 34 du projet). « Quant aux arbres plantés par un ci-devant seigneur sur des tbiens communaux, depuis un espace de temps au-dessous de 40 ans, sans qu’ils l’aient été par remplacement, ainsi qu’il vient d’être dit, ils appartiennent à la communauté, en remboursant par elle les frais de plantation, et à la charge de se conformer à l’article 10 du décret du 26 juillet 1790. (Adopté.) Art. 33 (art. 35 du projet). « Sont abolis sans indemnité, les droits de rupt du bâton, de course sur les bestiaux dans les terres vagues, de canal, de vétée, de vif herbage, de mort herbage, ainsi que les redevances et servitudes qui en seraient représentatives, et généralement tous les droits ci-devant dépendant de la justice et police seigneuriale. (Adopté.) » Art. 34 (art. 36 du projet). « Ceux qui ont acquis du roi des justices seigneuriales, soit par engagement, soit par vente pure et simple, sans mélange d’autres biens ni d’autres droits encore existants, seront remboursés par la caisse de l’extraordinaire, des sommes versées par eux ou par leurs auteurs, au Trésor public ; à l’effet de quoi, ils remettront leurs mémoires, titres et pièces justificatives, à l’administration des domaines, qui, après les avoir vérifiés, les fera passer avec son avis, préalablement examiné, et, s’il y a lieu, approuvé par les directoires de district et de département des chefs lieux desdites justices, au bureau de la direction générale de liquidation », (Adopté.) M-de ’Vismes demande le renvoi des articles 37 et 38 du projet à l’examen du comité des domaines réuni au comité féodal. Ces articles sont ainsi conçus : « Art. 37. Ceux qui ont acquis du roi des justices seigneuriales, sans mélangé d’autres biens ni d’autres droits existants, par la voie d’échange, seront admis à rentrer dans les domaines qu’ils ont donnés en contre-échange; et ceux qui les ont acquises par bail à rente, sont déchargés envers le Trésor public, à compter de la publication des décrets du 4 août 1789, de toutes rentes et redevances ci-devant dues par eux pour raison desdites acquisitions. « Art. 38. IL ne sera fait aucune restitution, soit de deniers verses au Trésor public, soit de domaines donnés en contre-échange, ni aucune diminution sur les rentes et redevances, pour raison de droits de justice seigneuriale, ou auires compris dans le titre second du décret du 15 mars 1790, qui ont été engagés, vendus, échangés ou arrentés par le roi, conjointement avec d’autres biens ou droits encore existants; et pourront seu lement, s’ils l’aiment mieux, les engagistes, acheteurs, échangistes ou arrentaires, résilier leurs engagements, achats, échanges ou baux à renie. » (Le renvoi est ordonné.) M. "Voulland. Messieurs, un courrier extraordinaire envoyé par les administrateurs du département du Gard, le 19 de ce mois, vient de remettre à l’mstant les lettres suivantes, adressées à l’Assemblée nationale, et qui concernent les troubles de la ville d’Uzès : lre LETTRE. « Messieurs, « Le département du Gard est dans une crise qui exige les plus prompts secours. Les troubles d’Uzés, que le zèle de nos commissaires avait apaisés, ont donné lieu à une explosion effrayante. Les gardes nationales de Perias, de Ja-lès, de Banne et autres lieux du dépariement de l’Ardèche, se soDt réunis, et déjà notre territoire est violé. Deux citoyens envoyés en Vivarais pour y éclairer le peuple sur les désordres et la situation d’Uzès, MM. Ghalmeton, procureur syndic du district, et le respectable abbé d’Autun, sont détenus prisonniers à Périas. 11 a été fait une incursion dans la ville de Saint-Ambroise, qui n’a pu résister et qui est occupée par 1,700 hommes qui ont désarmé les citoyens. 30,000 hommes menacent le departement. Nous avons ordonné le rassemblement de nos gardes nationales; nous allons déployer nos forces et requérir les troupes de ligne qui sont près de nous. Nous vous prions de donner des ordres pour que l’on fasse passer des forces dans le département. Nous demandons des groupes, des armes et des munitious pour nous mettre en état d’arrêter une guerre civile déjà commencée, et à laquelle tous les ennemis de la Révolution travaillent depuis si longtemps. Nous avons surtout besoin d’une brigade d’artillerie. M. d’Albignac est à Uzès, au milieu des besoins et des dangers et pour nous sauver, il faut tout son patriotisme, sa tête et son courage. « La religion, le catholicisme, le protestantisme sont les armes des malveillants, les prétextes par lesquels ils cherchent à rendre les amis de la Constitution odieux. Les troupes de ligne, les citoyens, les gardes nationales résisteront avec vigueur, et l’ordre pourra être établi, si les secours que nous vous demandons sont promptement accordés. « Nous sommes avec respect, etc.. . » 2e LETTRE. « Messieurs, « Nous avons l’honneur de vous envoyer copie de la lettre du directoire d’Uzès, qui vous rend compte des troubles excités dans cette ville par les ennemis de la Révolution. Quoique les craintes que nous ont causées les premiers avis des mouvements qui ont eu lieu à Uzès, soient beaucoup diminuées, nous ne laissons pas d’avoir quelques inquiétudes sur les suites. « Les premières nouvelles des troubles d’Uzès sont parvenues la nuit dernière au directoire. Il a sur-le-champ requis M. d’Albignac d’y envoyer des troupes ; 230 hommes du régiment de Dauphiné, et 30 dragons de Lorraine sont aussitôt partis, et la nouvelle que nous avons ultérieurement reçue de leur arrivée à Uzès nous a beaucoup tranquillisés. La garde nationale de Nîmes,