616 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [12 septembre 1789.] la ville de Puttelange en Lorraine, de Châlons-sur-Marne, des officiers du bailliage et du corps municipal de la ville d’Yerville en Beauce, portant félicitation et reconnaissance; d’un décret du comité général d’Avranches, qui ordonne que les droits et impôts de lout genre, sous quelque dénomination qu’ils soient perçus, continueront de l’être, et qui invite toutes les municipalités des villes et des campagnes, et toutes les milices nationales, leur enjoint même, au nom de la nation, du Roi et de la loi, de prêter main-forte aux commis et préposés pour la perception des droits ; d’une adresse des communes de Labour, dans les Pyrénées, qui expriment tous les sentiments dont ils sont pénétrés pour l’Assemblée. A cet instant, un député de cette province a observé que cette adresse n’était faite que par les communes, attendu que la noblesse avait précédemment fait présenter par lui une adresse particulière, portant renonciation à ses privilèges, et adhésion à tous les arrêtés de l’Assemblée. Après la lecture des procès-verbaux et adresses, M. le cardinal de Rohan, prince évêque de Strasbourg, député des bailliages de Hagueneau et Wissembourg, s’est présenté pour prendre séance à l’Assemblée. M. le cardinal de Rohan dit : Messieurs, je n’oserais pas suspendre, même pour un moment, le cours de vos délibérations, si mon cœur n'était vivement pressé de satisfaire au plus juste et au plus vrai des sentiments. Je dois à l’Assemblée nationale des actions de grâce respectueuses; je lui dois le témoignage des regrets les plus sincères, d’avoir été contraint, par le mauvais état de ma santé, de différer jusqu’à ce moment à me rendre dans cette auguste Assemblée, dont les soins continuels, pour assurer le bonheur de tous, rendent le zèle si cher à la nation. Je vous supplie donc, Messieurs, de recevoir favorablement l’hommage que j’ai actuellement la satisfaction et l’honneur de pouvoir vous offrir en personne. Ce discours est couvert d’applaudissements. M. Verdet, curé de Wintrangee, député du bailliage de Sarreguetnines, remet sur le bureau une souscription patriotique de 264 livres, dont 96 livres ont été fournies par le curé d’Hélimer, un de ses commettants, faisant l’équivalent de sa quote-part de don gratuit. M. Bouche offre, de la part de deux jeunes demoiselles, des diamants, une paire de bracelets en or, un cœur avec une émeraude, un louis en or. M. le chevalier de la Guiche, gentilhomme du Charolais, fait offrir une somme de 12,000 livres. M. Aubry du Bochet demande, avant de reprendre l’ordre du jour, que l’on s’occupe immédiatement après le jugement des questions soumises actuellement à la décision de l’Assemblée, de la formation des Assemblées provinciales. Cette proposition est rejetée. On reprend la discussion sur la durée du veto suspensif . M. Le Pelletier de Saint-Fargeau obtient la parole. Je ne me présente pas pour interrompre l’ordre du jour ; je ne viens seulement que vous présenter une question secondaire à celle que vous agitez; vous allez examiner pendant combien de législatures le veto du roi aura lieu. Il est très-essentiel de décider préalablement combien de temps durera chaque législature. Cette décision influera beaucoup sur la durée du veto ; cette dernière question y est même subordonnée ; car si vous faites durer une législature pendant trois ans, c’est suspendre le veto pendant trois ans ; et si on décidait que le veto durerait pendant deux législatures, ce serait le prolonger pendant six ans. L’Assemblée sent la nécessité de fixer, avant tout, la durée de la législature. M. de Blchier. J’observe que l’Assemblée pourrait aussi juger préalablement si les membres de l’Assemblée nationale seront élus à la fois ou partiellement. M. Le Pelletier de Saint-Fargeau. On peut discuter cette question connexement avec la mienne, parce qu’elles ont beaucoup d’influence ; mais on les divisera quand il faudra les décider. L’Assemblée décrète que les deux questions seront discutées conjointement, mais divisées lors de la décision. M. Le Pelletier de Saint-Fargeau reprend la parole sur sa motion. M. Le Pelletier de Saint-Fargeau. Je viens fixer votre attention pendant quelques instants sur une question très-importante dans l’ensemble de la Constitution. Il s’agit de fixer les pouvoirs des députés. Seront-ils restreints à un an ou à plusieurs? Je pense que ces pouvoirs ne doivent durer que pendant une seule année. Il me semble cependant aussi que l’on doit accorder aux provinces la faculté de conserver les mêmes députés, c’est-à-dire de les proroger. J’ose solliciter votre indulgencesur les réflexions que j’ai à vous présenter pour déterminer la durée des pouvoirs des députés formant le corps politique, et la fixer à un an. Il faut ici faire une grande différence entre le corps législateur et le corps administrateur. Dans les Assemblées provinciales, il serait nuisible de rendre trop fréquents les changements ; les objets que l’on y traite tiennent à l’expérience; ils exigent des connaissances des localités. Si les Assemblées provinciales ne doivent pas être renouvelées si souvent, il n’en faut pas conclure que les Assemblées nationales ne doivent pas l’être. IL en est tout autrement du Corps législatif. Quelles sont en effet ses fonctions? C’est de prononcer des lois. Mais chaque loi est isolée ; elle ne tient à aucun objet : dès qu’elle est prononcée, l’œuvre du législateur est complète ; il n’est pas tenu de suivre l’exécution des lois ; ses fonctions consistent à examiner les charges publiques ; mais cet examen sera toujours le même tous les ans. Ses fonctions consistent à asseoir l'impôt ; celte opération ne présente pas plus de difficultés, n’exige pas plus de temps que les opérations de finance. Ses fonctions consistent enfin à juger les ministres ; dans une Assemblée annuelle on a le temps de juger leur conduite. Dira-t-on que le législateur deviendra plus expérimenté, si la législation est prolongée au-delà d’un an ? Mais ce serait alors reconnaître deux âges dans l’Assemblée nationale, celui de son en-