[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 octobre 1789.] 240 pourvu à la formation d'un code complet sur cette partie essentielle de l’ordre judiciaire. « Nous sommes chargés de ne rien négliger pour prévenir le danger imminent dont la capitale est menacée, si les coupables et les malintentionnés peuvent, quelque temps encore, se flatter de l’impunité. « Nous devons supplier l’Assemblée nationale d’autoriser son comité de Constituticm à nous donner tous les renseignements qui pourront faire connaître aux représentants de la commune de Paris les intentions de l’Assemblée nationale sur la formation des assemblées provinciales et des municipalités, afin que leur travail sur le plan de la municipalité dont ils s’occupent soit sans cesse guidé par celui de l’Assemblée nationale, et soumis à ses principes. « Nous sommes chargés de supplier l’Assemblée nationale et le Roi d’assurer l’exécution des décrets de l’Assemblée nationale sur la libre circulation des grains; en conséquence, de procurer sûreté et protection au commerce, dans les marchés et sur les routes, et de faire soutenir à cet effet les gardes nationales et les maréchaussées par des détachements suffisants pour opérer le bon ordre. « Enfin, il nous est imposé de représenter à l’Assemblée nationale que la garde actuelle de M. de Bezenval est tellement coûteuse et incommode, que l’Assemblée nationale, qui seule peut prononcer sur cet objet, croira sans doute instant et indispensable d’indiquer des moyens nouveaux de garder à l’avenir ce prisonnier de la nation, avec des précautions aussi sûres et moins dispendieuses. « L’importance des deux premiers objets de la mission qui nous est confiée est tellement pressante, que nous croyons devoir, en finissant, supplier de nouveau l’Assemblée de les prendre, le plus tôt possible, en considération. « A Versailles, le 2 octobre 1789. « Signé : Duveyrier, de Condorcet, Benoit, Vermeil, Bourdon de la Grosniére et Desmousseaux, représentants et députés de la commune de Paris. » M. le Président répond que l’Assemblée nationale avait nommé un comité pour s’occuper d’une nouvelle législation concernant la procédure criminelle; que ce comité avait déjà fait le rapport de son travail ; qu’il serait incessamment soumis à la discussion et à la délibération de l’Assemblée ; qu’au surplus, elle prendrait en considération les autres articles de demandes de la commune de Paris. Il s’est élevé quelques légers murmures sur ce que l’orateur de la députation de Paris donnait quelques fois à l’Assemblée le titre de Messieurs au lieu de Messeigneurs. M. ï,anjmnais a observé'que le titre de Nosseigneurs tenait encore à l’ancienne servitude. Tout titre extraordinaire devrait être effacé du vocabulaire d’une nation libre, celui surtout de Seigneur, de Monseigneur , devrait disparaître chez un peuple qui vient d’abolir le gouvernement féodal. Plus un peuple est libre, a dit un célèbre écrivain, moins il y a de cérémonies, moins de titres fastueux, moins de démonstrations d’anéantissement devant son supérieur. Un membre du comité�des; finances dit que depuis dix jours le travail du comité sur les dé-1 penses de la guerre est terminé. Il ajoute que ce rapport, ne contenant que des faits et ne proposant aucun projet d’arrêté à la délibération de l’Assemblée, n’était pas de nature à être lu en séance et à faire perdre un temps précieux. L’Assemblée décide que le rapport sera imprimé et distribué dans les bureaux. ( Voy. le texte de ce rapport, annexé à la séance de jour.) M. le Président consulte l’Assemblée sur :1a priorité à donner aux questions qui sont à l’ordre du jour. La priorité est accordée à l 'échange du comté de Sancerre. MM. les députés de Blois, Valenciennes et Bar-le-Duc font la mention suivante sur l'échange de Sancerre (1) •• Messieurs les députés des bailliages de Blois, Valenciennes et Bar-le-Duc ont l’honneur de solliciter la parole, qu’ils ont vainement réclamée pendant près de trois semaines; et si l’ordre du jour pouvait s’opposer encore à leur demande, ils vous supplient de leur accorder la priorité en faveur de l’objet �important qu’ils sont pressés de mettre sous vos yeux. Nous venons vous dénoncer, Messieurs, un délit vraiment national, un échange monstrueux, qui depuis plusieurs années fait le scandale delà France, et qui subsiste toujours au milieu de nous comme un monument effrayant de tout ce qu’un ministre pouvait oser, de tout ce que l’intrigue pouvait tenter, sous un régime arbitraire et corrompu. , A ces traits vous reconnaissez l'échange de Sancerre, conclu avec le comte d’Espagnac par M. de Calonne, cet administrateur prodigue et fugitif, dont les mains dissipatrices ont creusé l’abîme profond que vous êtes appelés à combler. 11 est clans la nature des échanges domaniaux de provoquer le soupçon : la chaleur avec laquelle le crédit les sollicite, les avantages immodérés qui les assurent à ceux qui les obtiennent, ont * flétri dans tous les temps ces dangereux contrats, qui, sous le voile perfide d’une égalité illusoire, abandonnaient, en quelque sorte, les domaines à l’avidité, toujours renaissante, toujours insatiable, des courtisans. Si le grand ouvrage de la Constitution, auquel vous avez voulu vous livrer sans réserve et sans partage, n’eût pas absorbé toute votre attention, > vos regards se seraient déjà arrêtés sur cet antique patrimoine de la couronne; déjà vous � vous seriez occupés des moyens de réunir à ce tronc dépouillé toutes les branches qui en ont été successivement détachées : les échanges , surtout, n’eussent pas échappé à la sévérité de vos recherches ; mais dans la liste, malheureusement trop grossie, de ces attentats contre la plus sacrée et la plus inviolable des propriétés, nul ne vous eût paru plus audacieux, plus révoltant, et nous oserons le dire, Messieurs, plus punissable que " Yéchange de Sancerre. Cette assertion n’est point exagérée; et nous n’avons pas besoin de la justifier aux yeux de l’Assemblée nationale :qui de vous, Messieurs, ne connaît pas un échange devenu si célèbre par l’indignation et par l’effroi qu’il a semés dans plusieurs provinces du royaume? Qui de vous ignorerait encore que M. de Calonne, trahissant « la confiance du meilleur des Rois, avait lui-même un intérêt personnel et clandestin, dans un contrat dont il disposait le plan à son gré ; que le mar-(1) Cette motion n’a pas été insérée au Moniteur. A