SÉANCE DU 4 VENDÉMIAIRE AN III (25 SEPTEMBRE 1794) - Nos 29-30 51 29 Le représentant du peuple Mallarmé, en mission dans les départements du Gers et de la Haute-Garonne, fait passer à la Convention nationale une somme de 1 250 L offerte par l’instituteur et les artistes de l’école dramatique de Toulouse; elle est le produit d’une représentation donnée au profit des frères d’armes de Paris, incendiés ou estropiés par l’accident de la poudrerie de Grenelle. Mention honorable, insertion au bulletin (47). [Le représentant Mallarmé au président de la Convention nationale, le 30 fructidor an II] (48) Citoyen Président et collègue. L’instituteur de l’école dramatique de la République et les artistes composant cette société à Toulouse animés des sentimens fraternels qui doivent lier tous les François, ont donné une représentation dont ils ont destiné le produit au soulagement de leurs frères d’armes de Paris incendiés et estropiés par l’accident de la poudrerie de Grenelle ; ils m’ont chargés d’être leur organe auprès de la Convention nationale et de lui faire passer les fonds montant à douze cents cinquante livres, afin qu’elle veuille bien en disposer suivant leur intention. Je joins icy cette somme, citoyen collègue, en t’invitant à faire insérer dans le bulletin de la Convention nationale cet acte de désintéressement et de générosité, pour que cet exemple soit suivi par les autres écoles dramatiques de la République. Je te prie également de faire ordonner que l’extrait du procès verbal sera envoyé auxdits instituteur et artistes composant la société de l’école dramatique de la République à Toulouse. Salut et fraternité. Mallarmé. 30 Le citoyen Lasalle, agent salpêtrier près le district de Bellac [Haute-Vienne], adresse à la Convention nationale copie d’une circulaire, par laquelle il invite les communes de son arrondissement à employer tous les moyens qui sont en leur pouvoir, pour donner la plus grande activité à l’extraction du salpêtre; il joint une somme de 300 L qu’il destine à trois veuves de ceux qui ont péri par la foudre que leurs bras avaient préparé pour assurer la souveraineté des peuples et la destruction des tyrans. Mention honorable, insertion au bulletin (49). (47) P.-V., XLVI, 84. (48) C 321, pl. 1339, p. 18., [Le citoyen Lasalle au président de la Convention nationale, le 30 fructidor an II] (50) Citoyen A la nouvelle de l’incendie qui a embrasé l’attelier de Grenelle, consultant plus mon zèle que mes moyens, j’ai fait une circulaire aux communes de mon arrondissement pour inviter leur patriotisme à employer tous les leviers qui peuvent donner et conserver le mouvement et la vie à la fabrication du salpêtre. J’en fais passer une copie à la Convention ainsi que la somme de 300 L pour la distribuer à trois veuves de ceux qui ont péri par la foudre que leurs bras avoient préparée pour assurer la souveraineté des peuples, et dompter leurs tyrans. Salut et fraternité. Lasalle, agent salpêtrier. LIBERTÉ ÉGALITÉ Respect à la Loi L’agent national du district de Bellac pour la fabrication révolutionnaire du salpêtre Aux municipalités et aux sociétés populaires du district. Citoyens, Au moment où la Révolution française prend une attitude menaçante devant les tyrans de l’Europe, qui, sans calculer la portée de leurs armes, ont voulu la replonger dans le cahos d’où tant d’efforts généreux l’ont fait naître : au moment où l’oriflamme de la Liberté s’élève par les conquêtes multipliées à ses hautes destinées avec une rapidité incalculable ; la fabrication du salpêtre est paralisée dans votre commune : sans doute on a oublié que ce sel est le ressort le plus actif de la victoire ; peut-être même ne s’en est-on pas douté ! Mais, vous qui devez porter à sa plus grande hauteur le sentiment de la Liberté ; vous qui êtes plus spécialement préposés à son culte : fonctionnaires publics? Donnez l’impulsion avec la rapidité du fluide électrique. C’est en marchant d’un pas ferme, c’est en déployant une émulation proportionnée aux difficultés, que vous poserez, que vous consoliderez les bases de la félicité publique; c’est en allant dans les sociétés populaires, animer de cette mâle énergie qui ne peut sommeiller un instant, ces âmes froides et viles que n’échauffa jamais l’amour de la patrie ; cet égoïsme cencentré qui végète dans une coupable nullité, s’isole de la chose publique, lorsque la chose publique réclame ses secours; cette aristocratie qui, nourrissant encore de folles espérances, se tient derrière le rideau; et lorsque le Génie révolutionnaire prend son essort, évite de se mêler au mouvement général, pour en ral-lentir l’impétuosité : elle ignore donc sans doute (49) P.-V., XLVI, 84. (50) C 321, pl. 1339, p. 20. 52 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE cette aristocratie qui cherche, dans les trahisons, dans les revers que nous éprouvons, la séduction d’un songe; que lorsque la Liberté commence à marcher, elle fait toujours quelques faux pas, mais que chaque chûte est une leçon, et que chaque pas la fortifie; elle ignore donc, que lorsque la contre-révolution qui n’exista que sous les rapports d’une hypothèse, opéreroit un déchirement universel ; les bouillons de la fièvre du Républicanisme qui ont provoqué notre régénération la précipiteroient sous ses ruines, et que la mort seroit sur toutes les têtes dans les convulsions de la Liberté agonisante. Enflammez le zèle de vos concitoyens, dirigez le vers l’extraction du salpêtre, qu’elle soit sans cesse à l’ordre du jour. Armez-vous de faulx, de pioches et de pelles ; fouillez la terre, coupez impitoyablement les végétaux inutiles : sachez que dans les Etats-Unis d’Amérique, la loi punissoit de mort tout particulier qui ne fournissoit pas au gouvernement 3 livres de salpêtre. La nation s’est adressée avec confiance à votre patriotisme ; n’auriez-vous pas à rougir, si votre indifférence nécessitoit des mesures violentes, pour vous forcer à vous rallier à l’intérêt commun, de sauver la Patrie. Salut et fraternité. Las allé. 31 Les commissaires de la comptabilité nationale annoncent à la Convention, qu’ils ont fait passer au comité de l’Examen des comptes l’état de ceux remis à leur bureau pendant la seconde quinzaine du mois de fructidor. Renvoyé au comité de l’Examen des comptes (51). 32 LEQUINIO : Je dois faire connaître à la Convention le trait suivant : Les brigands s’étaient portés chez le citoyen Lefloch, sabotier dans les bois dits de Trédion, à quelques lieues de Vannes; voulant savoir si leurs camarades s’étaient emparés de la ville de Ma-lestroit, distante de trois lieues, ils chargèrent de ce message la femme du sabotier, lui donnèrent un de leurs chevaux, et la sommèrent de rapporter la réponse sous six heures ; ils gardèrent en otage son mari et son enfant encore à la mamelle. Cette femme se met en route; mais n’écoutant que la voix de la patrie, au lieu de se rendre à Malestroit, elle tourne vers une bourgade peu distante, avertit un patriote sûr. Des forces sont réunies, les brigands sont mis en fuite, et la ville de Malestroit est préservée (51) P.-V., XLVI, 85. de leur fureur. Mais deux jours après ils reviennent à la chaumière du sabotier, brisent tous ses meubles et réduisent cette famille vertueuse à la misère la plus absolue. Je demande l’insertion de ce trait de vertu au Bulletin, et le renvoi au comité d’instruction publique, pour le faire insérer dans le recueil des faits héroïques ; et le renvoi au comité de Secours, pour faire incessamment un rapport sur l’indemnité à accorder à cette femme vertueuse (52). La société républicaine de Vannes [Morbihan] demande des secours qui sont dus au citoyen Lefloch et son épouse, dont le domicile a été envahi et saccagé par les brigands. Elle rend compte de la conduite républicaine tenue par la citoyenne Floch, lorsque son mari et un enfant qu’elle allaitait étaient au pouvoir des brigands. La Convention ordonne l’insertion au bulletin, et renvoie à son comité d’instruction publique pour consigner ce trait parmi les faits héroïques auxquels la révolution a donné lieu, et au comité des Secours pour faire un prompt rapport sur l’indemnité qu’il sera juste d’accorder au citoyen Lefloch et à son épouse (53). La société populaire de Vannes instruit la Convention nationale que les brigands se sont portés dans la forêt de Trédion, dans la maison de Lefloch, et qu’après avoir consumé toutes les subsistances qu’ils y trouvèrent, ils forcèrent l’épouse de Lefloch de monter un de leurs chevaux, et d’aller à Malestroit s’informer si leurs camarades s’étoient emparés de cette ville, lui déclarant qu’ils retenoient en otage son mari et un enfant qu’elle allaitoit, pour la sûreté de ce voyage, qui devoit être fait en six heures. Cette tendre mère arrose de larmes son mari et son enfant, les laisse au pouvoir des brigands, et se met en route ; mais, au lieu d’aller à Malestroit, elle se porte furtivemant chez un bon citoyen du voisinage, qui avertit de suite les chefs de la force armée, et les brigands sont obligés de fuir (54). 33 Les administrateurs du district de Por-rentruy, département du Mont-Terrible, se plaignent de ce que les intrigants compromettent la tranquilité du district; ils demandent qu’un représentant du peuple soit envoyé sur les lieux. Renvoyé au comité de Salut public (55). (52) Moniteur, XXII, 67. (53) P.-V., XLVI, 85. Débats, n 734; J. Fr., n° 734; J. Mont., n° 150. (54) Bull., 6 vend, (suppl.). (55) P.-V., XLVI, 85.