[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 septembre 1791.] 393 TROISIÈME ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU VENDREDI 9 SEPTEMBRE 1791, AU MATIN. Nouveau projet de décret 'présenté à l’Assemblée nationale par le comité central de liquidation Sur L’ORGANISATION DE LA COMPTABILITÉ GÉNÉRALE DES FINANCES DE L’ÉTAT. L’Assemblée nationale a décrété, le 4 juillet 1791 : 1° Que le Corps législatif verrait et apurerait par lui-même, définitivement, les comptes de la nation ; 2° Qu’il lui serait présenté le plan de l’organisation d’un bureau de comptabilité, chargé de la préparation des comptes qui doivent être vus et apurés définitivement par le Corps législatif. Hier, 8 septembre, l’Assemblée nationale a décrété qu’il ne serait pas établi un tribunal unique pour juger les contestations qui peuvent s’élever sur les comptes. D’après ces bases, voici le projet de décret qui est proposé à l’Assemblée : Art. 1er. « Il sera établi un bureau de comptabilité, composé de 15 personnes, qui seront nommées par le roi, sans néanmoins qu’elles puissent être destituées, si ce n’est sur la demande des législatures, et après avoir été préalablement entendues. Ces 15 commissaires seront divisés en 5 sections, composées de 3 membres chacune, lesquelles alterneront tous les ans ; sauf à augmenter leur nombre, si l’accélération des travaux et l’utilité publique l’exigent. Art. 2. « Lesdits commissaires recevront tous les comptes dont il va être fait mention ci-après, les apureront, et en dresseront le rapport. Art. 3. « Chaque rapport sera signé par 3 commissaires, qui demeureront responsables des faits qu’ils auront attestés. Art. 4. « Chaque commissaire fournira un cautionnement en immeubles de la somme de... Art. 5. « Les receveurs des districts, et tous trésoriers et payeurs particuliers, compteront des sommes qu’ils auront reçues, et de l’emploi qu’ils en auront fait, aux commissaires de la Trésorerie nationale pour tous les objets de recette ordinaire qui doivent y être versés ; ils compteront au trésorier de la caisse de l’extraordinaire, sous les veux du commissaire du roi, administrateur de ladite caisse, pour tous les objets de cette recette extraordinaire qui doivent y être versés. Art. 6. « Dans le cas où il s’élèverait des contestations sur quelques-uns des articles des comptes présentés par les receveurs de district et autres trésoriers et payeurs particuliers, soit aux commissaires de la Trésorerie nationale, soit au trésorier de l’extraordinaire, lesdites contestations seront suivies à la requête des commissaires de la trésorerie et du trésorier de l’extraordinaire, devant les tribunaux de district dans le territoire desquels les comptables seront domiciliés. Art. 7. « Les commissaires de la Trésorerie nationale, le trésorier de l’extraordinaire, les administrateurs des domaines, ceux des douanes et ceux delà régie, des droits d’enregistrement et du timbre, présenteront les comptes de l’universalité des recettes qu’ils auront faites où dû faire, et de l’emploi qu’ils en auront fait, au bureau de comptabilité, pour être lesdits comptes, aprè3 l’examen qui en aura été fait au bureau de comptabilité, vus et apurés définitivement par le Corps législatif, aux termes du décret du 4 juillet dernier. Art. 8. « Si, en procédant à l’apurement desdits comptes, l'Assemblée nationale législative reconnaît que quelques articles sont sujets à contestations, elle ordonnera Ja communication des comptes à l’agent du Trésor public, à l’effet, par lui, de poursuivre la contestation devant le tribunal du district dans le territoire duquel la Trésorerie nationale ou la caisse de l’extraordinaire seront établies. Art. 9. « Le recouvrement des débets résultant des arrêtés de comptes sera poursuivi contre les receveurs de district et les receveurs particuliers, à la requête des commissaires de la Trésorerie nationale pour ce qui doit rentrer à ladite trésorerie ; à la requête du trésorier de l’extraordinaire, sous la surveillance de l’administrateur de ladite caisse, pour ce qui doit rentrer à la caisse de l’extraordinaire. Le recouvrement des débets résultant des arrêtés de comptes rendus par les commissaires de la Trésorerie nationale, et par le trésorier de l’extraordinaire, sera poursuivi à la requête de l’agent du Trésor public. Art. 10. « Tous receveurs particuliers comptables à la Trésorerie nationale ou à la Trésorerie de l’extraordinaire, seront tenus, sous les peines portées par l’article 6 du titre 3 du décret du 4 juillet dernier, de remettre les comptes auxdits trésoriers, au premier juin de chaque année au plus tard, pour l’année qui aura fini au 31 décembre précédent. Art. 11. « Avant d’adresser leurs comptes aux trésoriers, soit de la caisse nationale, soit de la caisse de l’extraordinaire, les receveurs de district les feront passer au directoire de district pour qu’il propose les observations dont le compte lui paraîtra susceptible. Les directoires de district ne pourront retenir le compte plus de 15 jours pour en faire l’examen. Le receveur le remettra au directoire au plus tard le premier mai ; de manière que sous aucun prétexte la remise du compte entre les mains des commissaires de la Trésorerie nationale, ou du trésorier de l’extraordinaire, ne puisse être différée au delà du premier juin. Art. 12. « Les commissaires de la Trésorerie et le trésorier de l’extraordinaire seront tenus, sous les 394 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 septembre 1791. mêmes peines, de remeltre au bureau de comptabilité le compte de chaque année, le premier août au plus tard de l’année suivante. Art. 13. « Les comptes annuels de la Trésorerie nationale et de la caisse de l’extraordinaire seront rendus publics parla voie de l’impression, et envoyés à tous les départements et à tous les districts du même département. Art. 14. « Dans le cas où, lors de l’examen des comptes, il paraîtrait qu’il y a lieu à exercer l’action résultant de la responsabilité contre quelques-uns des ministres ou autres agents du pouvoir exécutif, le bureau de comptabilité pourra requérir, d’abord desdits ministres ou autres agents du pouvoir exécutif, les éclaircissements qui lui paraîtront nécessaires. Sur le compte qui en sera rendu à l’Assemblée nationale législative, elle décidera s’il y a lieu à l’action de responsabilité ; alors cette action sera intentée à la requête de l’agent du Trésor public, devant le tribunal dans le territoire duquel le ministre ou agent du pouvoir exécutif sera domicilié. Art. 15. « L’agent du Trésor public sera tenu de mettre tous les mois, sous les yeux de l’Assemblée nationale législative, l'état de la poursuite des différentes actions qui lui seront confiées et de rendre tous les 3 mois cet état public par la voie de l’impression. En cas de négligence de sa part, il deviendra personnellement responsable des sommes dont il aurait négligé de poursuivre la rentrée. » ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. VERNIER. Séance du vendredi 9 septembre 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures du soir. M. le Président donne lecture d’une lettre de M. Peyruchaud, député du département de la Gironde qui le prie d’annoncer à l’Assemblée son retour après une absence qu’il a faite par congé pour cause de maladie. M. le Président fait donner lecture, par un de MM. les secrétaires, d’une lettre de M. Navier , membre du tribunal de cassation , et député à la prochaine législature , dans laquelle il annonce qu’ayant déposé sur l’autel de la patrie, le 27 mars et le 12 mai dernier, 3,418 1. 8 s., au nom des gardes nationales et de plusieurs communes du département de la Côte-d’Or, pour secourir les veuves et orphelins des gardes nationales qui sont morts pour la défense de la patrie à l’affaire de Nancy, il prie l’Assemblée d’accepter 75 1. 4 s., pour être consacrés au même usage, au nom de diverses autres communes. (L’Assemblée accepte cette somme et applaudit à cet hommage patriotique.) (i) Cette séance est incomplète an Moniteur. M. le Président fait .donner lecture : 1° D’une lettre écrite aux grenadiers du 72e régiment d'infanterie , ci-devant Vexin, par M. Desgranges , ci-devant lieutenant et commandant la lre compagnie. Cette lettre est ainsi conçue : « Nice, le 27 août 1791. « Mon devoir et l’attachement qui me reste encore pour vous, grenadiers, m’engagent à vous montrer ce que vous devez faire, ce que vous eussiez fait si vous n’eussiez suivi que vos cœurs ; j’ose m’en flatter. C’est donc dans cet espoir, grenadiers, que je vous écris pour vous rappeler ce que vous devez à notre roi, à ce roi qui n’est dans les fers qu’à cause de sa trop grande bonté et de son désir de faire le bonheur de son peuple. Mais, n’en doutez pas, s’il eût pu prévoir qu’au lieu de ce bonheur qu’il désirait tant, l’anarchie la plus affreuse et des malheurs sans nombre eussent été le résultat de sa condescendance aux vœux d’une bande de factieux qui se disaient son peuple, n’en doutez pas, dis-je, il eût déployé l’énergie et le grand cœur dont il est l’héritier. « Rappelez-vous, grenadiers, ce qu’ont fait les princes du sang des Bourbons. Il en est parmi vous qui ont coopéré, sous leurs ordres, à illustrer les armes de France ; qu’ils vous disent ce dont sont capables les Français commandés par de tels princes. Venez donc, grenadiers, venez vous ranger sous les drapeaux de nos illustres princes, et concourir avec eux à délivrer le meilleur des rois des fers honteux qui le chargent. « 11 est inutile de vous parler de récompense; l’honneur seul doit guider des grenadiers français. Cependant je dois détruire et démentir des propos que des factieux, aussi imbéciles que scélérats, font courir parmi vous. Notre sort, celui du régiment du Vexin, est assuré; le peu de braves soldats qui nous ont suivis en jouissent et en sont parfaitement conteDts. Ils ont eu un louis en masse, un sac complet et double paye en route. J’entre dans ces détails, à cause de la persévérance que l’on met à vous empêcher de vous couvrir de gloire, en suivant l’exemple que nous vous avons donné. Venez, mes amis; accourez à des officiers qui ont mérité votre estime, que vous avez aimés. Croyez que, si tout n'annonçait pas que le règne des scélérats qui vous ont égarés est sur sa tin, je ne vous solliciterais pas ainsi. Je vous le répète, l’attachement que j’ai toujours eu pour vous me fait trembler sur le sort qui vous attend, si vous n’abandonnez le 72® régiment pour joindre celui de Vexin. Quittez tout. Laissez vos effets; vous en aurez de tout neufs. Sans adieu. J’espère que ma lettre, vous faisant connaître la vérité que l’on a tant de soin de vous cacher, me mettra à même de vous dire de vive voix combien je vous suis attaché. « Signé : Desgranges, « officier des grenadiers au régiment de Vexin. » 2° De la réponse des grenadiers à la lettre de M. Desgranges. Cette réponse est ainsi conçue : Monaco, le 30 août 1791. « Votre lettre a été lue à la tête des grenadiers. L’indignation qu’ils avaient pour vous a redoublé de moitié en voyant l’acharnement que vous ne ne cessez de montrer pour séduire des gens incorruptibles, et que tous vos faux sophismes ne sont pas dans le cas d’ébranler. Ces braves gens