76 Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. notre juste tribut de reconnaissance, de respect et de dévouement. « Les citoyens français de nie de France, jadis victimes déplorables ü’un despotisme d’autant plus affreux, que sa force vnxatoire semblait croître en raison de son éhignemeut du centre, auraient pu tenter de briser leurs fers ; mais leur position était d’autant plus triste, que les tyrans trompaient la religion du meilleur des rois, et que l’amour pour leur prince, qui fait l’essence de tout Français, s’opposait à leur juste vengeance. Tout à coup la nouvelle heureu-e de la régénération française frappe nos oreilles; dès lors il n’v a qu’un cri, qu’un sentiment, et tout respirera liberté. La cocarde patriotique devient le signe du ralliement, et ne forme à l’instant, de tous les Français de cette co’onie, qu’un peuple de frères et de héros de la liberté. « Le despotisme en pâlit; bientôt il se rassure, et les cabales les plus sourdes et les plus infernales deviennent son unique occupation. L’on abuse de l’knorance et de la bonne foi, et l’on sème dans toute la colonie des divisions intestines avec une rapidûé et une scélératesse incroyables. Les moteurs criminels de ces complots pervers, vils agents subalternes de l’ancien despotisme ministériel, se fout connaître par la joie impie que leur inspirent leurs coupables succès; l’insurrection est subite; le créole s’élève contre l’Européen, le frère contre son frère, le fils contre son père. Les horreurs d’une guerre civile menacent nos têtes, et les tyrans sourient avec complaisance. Us avaient convoqué la colonie ; ils donnent conirc-ordre et attendent, dans un coupable sil. nce, l'affreux résultat de leurs noirceurs infernales. Heureusement l’illusion est de cour'e durée; les citoyens séduits et abusés reviennent de leur erreur, le masque tombe; l’amour de la liberté, l’horreur de la tyrannie réunissent tous les cœurs, et la consternation rentre dans l’âme des despotes, qui seuls devaient éprouver ce sentiment, au cri de la liberté et de la régénération française. « Terrassez une seconde fois les ennemis de la chose publique; tramant encore contre la liberté, ils cherchent à intimider les bons citoyens par des bruits criminels adroitement semés fils alarment les espri!s timides par des réflexions coupables. C’est une masse de 50,000 esclaves à contenir; ce sont des troupes réglées, presque égales en nombre au reste des citoyens. « Vains efforts d’un despotisme effrayant! les Français ont toujours rejeté avec horreur un soupçon si coupable; ils n’ont vu dans les soldats que des frères, des citoyens et des soldats patriotes; ils n’ont jamais pu penser que les braves défenseurs du Cap et de Pondichéry, que les terribles et fameux héros du 13 juillet, dans l’Inde, pussent jamais songer à combattre contre la liberté de leur patrie, qu’ils avaient su défendre si glorieusement. Notre espoir n’a pas été trompé : les braves guerriers qui s’étaient tous montrés des héros contre les ennemis de l’Etat, se sont tous montrés citoyens au milieu de leurs frères. C’est avec uoe douce satisfaction que nous rendons ici un hommage pur et sim ère à leur héroïsme et à leur dévouement à la patrie. « Les citoyens se forment en gardes nationales; et ne faisant qu’un corps et qu’une âme avec les bons militaires qui les entourent, ils dissipent les nouveaux complots du despotisme, dont le foyer était toujours le même. Leur fermeté et leur courage, secondés par l’heureuse arrivée de votre sage décret du 8 mars, leur 19 février 1791.] obtiennent un triomphe complet, et d’autant plus flatteur, qu’il n’a été accompagné d’aucune effusion de sang. « Les gardes nationales de File de France se flattent que leur conduite ferme et sage, qui leur permet de vous offrir les palmes non sanglantes de la liberté, sera applaudie dans le sanctuaire auguste des représentants de la nation et do l’humanité. « L’amour des Français pour la liberté ne tient ni aux climats, ni aux lieux qu’ils habitent, mais au sang qui coule dans leurs veines. Rien ne peut altérer en nous uu sentiment si précieux. Que cette terre soit plutôt la proie de l’Océan, si telle devait être son iniluence éternelle! « Les gardes nationales, pénétrées de reconnaissance et de vénération pour vos sages décrets, ne cesseront jamais de vous bénir p ur le bienfait inestimable qu’elles doivent à vus lumières, à votre sagesse, à votre courage, et à votre dévouement héroïque à la patrie; elles adhèrent avec transport à vos aogusies decisions, et font entre vos mains le serment d’être fidèles à la nation, à la loi et au roi; de maintenir de tout leur pouvoir, sur la réquisition des corps municipaux et administratifs, la Constitution du royaume; de prêter main-forte pour l’exécution de leurs règlements, ainsi que pour celle des décrets de F Assemblée nationale acceptés ou sanctionnés par le roi. « Tels sont les sentiments purs et sacrés des gardes nationales de cette colonie. Elles vous supplient, pères de la patrie, de prendre sous votre protection immédiate des Français transplantés au milieu de l’océan Indien, dont la reconnaissance et le dévouement patriotique ne peuvent être égalés que par le profond respect avec lequel nous sommes, etc. » (L’Assemblée ordonne l’impression de cette lettre et sou insertion dans le procès-verbal.) M. Merlin, au nom du comité de féodalité. Messieurs, vous avez commencé le 30 janvier et le 3 de ce mois, un décret relatif aux droits féodaux; il n’est encore composé que de cinq articles (\). Votre comité féodal vient vous proposer d’en ajouter six autres; ils ont trait au droit seigneurial des troupeaux à part, supprimé comme les autres droits seigneuriaux. M. Merlin, rapporteur , donne lecture des articles présentés par le comité. Plusieurs membres présentent sur le même objet des projets de décret particuliers, dont ils donnent lecture. Une discussion s’engage sur ces divers projets. Un membre demande la priorité pour le projet du comité. (Cette motion est décrétée.) Plusieurs membres proposent divers amendements qui sout écartés parla question préalable. Après quelques modifications de texte, le projet du comité est décrété comme suit, : (1) Voir Archives parlementaires, tome XXII, séance du 30 janvier 1791, page 582, et séance du 3 février 1791, page 721. |Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 février 1791.] 77 Droits de troupeau à part. Art. 6. Le droit seigneurial connu dans la ci-devant province de Lorraine, sous le nom de droit de troupeau à part, est aboli, à compter du jour de la publication des lettres patentes du 3 novembre 1789, intervenues sur les décrets des 4, 6, 7, 8 et 11 août précédent; sauf aux ci-deyant seigneurs à user du pâturage dans les territoires où iis ont des habitations ou des propriétés foncières, en se conformant aux mêmes règles que les autres habitants et propriétaires, et sans rien innover quant à présent aux règlements et usages des différents lieux, relativement à la faculté laissée ou à la défense faite à ceux-ci, de faire garder leurs troupeaux par un berger ou pâtre particulier. Art. 7. En conséquence, les particuliers qui, dans la ci-devant province de Lorraine, ont été, par le décret du 9 mai 1790, maintenus provisoirement dans la jouissance des baux du droit de troupeau à part, à eux accordés par des ci-devant seigneurs, ne pourront payer qu’entre les mains des trésoriers des municipalités, dont les droits ont été réservés par ce décret, les portions de leurs fermages qui sont échues depuis sa publication. Art. 8. Quant aux portions desdits fermages qui étaient échues dans l’intervalle de la publication des lettres patentes du 3 novembre 1789, à celle du décret du 9 mai 1790, les fermiers qui les doivent encore, les payeront pareillement aux-dites municipalités; mars ils ne pourront être inquiétés pour celles qu’ils auront payées entre les mains des ci-devant seigneurs, sauf aux municipalités à en poursuivre la restitution contre ceux-ci ; sans néanmoins que, sous prét-xte, soit du du présent article, soit du précédent, il puisse être formé aucune répétition contre ceux des ci-devant seigneurs qui ont joui en nature du droit de troupeau à part, depuis la publication des letlres patentes du 3 novembre 1789. * Art. 9. « Dans le cas où les ci-devant seigneurs auraient affermé le droit de troupeau à part, conjointement avec d’autres biens ou d’autres droits non abolis par les décrets de l’Assemblée nationale, sans distinction de prix, il sera procédé à une ventilation à l’amiable ou par experts, pour déterminer les sommes que les fermiers auront à payer aux communautés pour le droit de troupeau à part, et celles qu’ils auront à payer aux ci-devant seigneurs pour les autres biens ou droits; toutes poursuites contre lesdits fermiers demeurant en état, jusqu’à ce que ladite ventilation soit faite et arrêtée définitivement. Art. 10. « Les dispositions des quatre articles ci-dessus sont communes à la ci-devant province du Bar-rois, au pays Messiu et à tous autres pays et lieux, où, jusqu’à l’époque de la suppression du régime féodal, le droit de troupeau à part, et tous autres droits de même nature, sous quelque dénomination qu’ils soient connus, ont été considérés comme seigneuriaux. Art. 11. « Sont néanmoins exceptés desdites dispositions, tant dans la ci-devant province de Lorraine, que partout ailleurs, les territoires où il sera prouvé, dans la forme déterminée par l’article 19 du titre II du décret du 15 mars 1790, que le droit de troupeau à part a eu pour cause une concession de fonds en propriété ou à titre d’u-age, faite, par le ci-devant seigneur àla communauté dns habitants, ce qui aura pareillement lieu lorsqu’il sera prouvé, dans ladite forme, qu’il a eu pour cause une remise de droits de la nature de ceux que les décrets de l’Assemblée nationale ont maintenus jusqu’au rachat, et dans ce dernier cas il sera rachelable aux taux et selon le mode réglés par le décret du 3 mai 1790..’ M. Dupont. Je demande que le gouvernement s’occupe des moyens démultiplier les troupeaux et d’en perfectionner les races. M. Rabaud-Saint-Étienne, au nom des comités de Constitution et militaire. Messieurs, je viens vous proposer quelques changements et additions au décret sur V organisation de la gendarmerie nationale : ce décret est sanctionné; il importe que les changements que nous vous pros osons u’adopter soient incessamment décrétés avant l’impression, afin qu’ils puissent être insérés dans le corps même du décret. Nous vous demandons tout d’abord de décréter les additions suivantes qui s’expliquent suffisamment dans le décret que voici : « L’Assemblée nationale décrète que dans l’article 3 du titre premier du décret sur la gendarmerie nationale, après ces mots : sera portée jusqu'au nombre de..., il sera ajouté ceux-ci, 7,455 hommes, y compris les compagnies de la ci-devant robe courte ; qu’à la place de ces mots : V augmentation qui va être décrétée pour les trois départements de Paris , Seine-et-Oise et Seine-et-Marne, il sera substitué ceux-ci: l'augmentation énoncée ci-après, pour les 3 départements de Paris, Sein e-et-Oise et Seine-et-Marne , et les greffiers. » (Adopté.) M. Rabaud-Saint-Etienne , rapporteur. Vous avez, d’autre part, .ajourné l’article concernant la suppression de la compagnie des chasses et voyages du roi jusqu’à ce que l’on ait pu connaître les désirs du roi à ce sujet. Le roi ayant répondu qu’il laissait à l’Assemblée nationale le soin de disposer de cette compagnie, les comités proposent de supprimer cette compagnie de manière qu’elle continue de faire partie de la gendarmerie nationale. En conséquence, on pourrait ajouter dans l’article 1er du titre VI, après ces mots : celle de la connétablie, ces mots : et celle des voyages et chasses du roi ; et après ces mots : sont également supprimés, ces mots : et elles continueront à faire partie de la gendarmerie nationale, dans laquelle elles restent et demeurent incorporées , pour, les officiers, sous-officiers et cavaliers, être placés chacun dans son grade et selon son rang , en remplissant d'ailleurs les conditions exigées par le présent décret. Un membre propose, par amendement, de retrancher les mots : « en remplissant d'ailleurs les conditions exigées par le présent décret. » (Cet amendement est adopté.)