[Convention nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. I 29 brumaire an il 47-4 ( 19 novembre 1793 et avec qui je crus devoir alors me tenir sur la négative pour ne pas perdre les moyens de suivre cette affaire. Les confidences deviennent dès lors moins fréquentes, moins étendues, on ne m’en parlait plus de la même manière. Cependant Julien m’annonçait quelquefois que les opérations se continuaient, que cela n’allait point mal; que le moment du partage n’était même pas éloigné, et enfin il me dit un jour que je pouvais compter sur une somme de 100,000 livres pour ma por¬ tion, résultant d’une consignation de 500,000 li¬ vres en fonds fournis par des banquiers pour obtenir quelques modifications aux décrets concernant la compagnie des Indes. Je me rappelle qu’à cette époque, il était question du rhum de Robert, à quoi Delau-nay prenait quelque intérêt; il m’arrêta dans la cour du comité de sûreté générale et, après m’en avoir parlé quelques instants, il se plaignit à moi de ce que Danton les abandonnait, ainsi que Thuriot, qui s’étaient, disait-il, évidemment arrangés particulièrement avec les banquiers, mais que cela ne l’empêcherait pas de conduire l’affaire 4 bien et que je pouvais être tran¬ quille. Quelque temps après le 2 juin, lorsque l’on commençait à vouloir diviser les patriotes de la Montagne, Hérault, membre du comité de-Salut public, me tira un jour à l’écart dans la salle des pétitionnaires. Il me demanda si je con¬ naissais quelque chose à ces plans de division. J’entrai avec lui en grande conversation sur cette matière; je lui dis tout ce que je viens de consigner dans cette déclaration, sur les agio¬ teurs de la Convention et sur les propositions qui m’avaient été faites. Il en parut surpris, me dit que je l’avais fort éclairé, qu’on lui avait proposé de se charger de présenter un projet de décret sur les finances, qu’il voyait bien que cela tenait à des tripotages aussi criminels que méprisables et qu’il ne le ferait point, il m’engagea à entrer avec lui en confé¬ rence avec L’Huilier du département de Paris, mais comme je ne connaissais point L’Huilier assez particulièrement, je m’y refusai (1). Il y a plus de deux mois, étant à dîner chez le citoyen Laligant Morillon, où se trouvaient les citoyens Guinguené, Aumont, secrétaire du ministre de la justice, et Martinière, de Granville et déplorant nos funestes divisions, je m’ouvris avec eux dans les épanchements de l’amitié de toutes ces honteuses combinaisons : ils peu¬ vent s’en rappeler. Depuis quelque temps, on me parle d’un dîner chez Delaunay, qui a pour objet le partage des 500,000 livres. Julien m’a souvent engagé à y aller. Delaunay m’a donné son adresse par écrit pour m’y rendre : je m’y suis toujours refusé sous divers prétextes qui ont pu faire penser, en les rapprochant, du propos tenu à Benoît par Duroy : que je ne partageais pas les principes des associés dont au surplus je ne connais pas tous les noms (2). Du reste, je n’ai fait aucun acte qui pût servir l’association; je ne me rappelle pas avoir signé un seul mandat d’arrêt contre un banquier pour cet objet. (1) Cet alinéa, dans l’original, est encadré de crayon rouge et porte en marge, au crayon rouge, le mot ! Hérault. (2) Cet alinéa, dans l’original, est souligné au crayon jrouge. Je fus très surpris un jour de ce que Julien de Toulouse en avait signé un, lui seul, en mon absence, contre le nommé Grenu, banquier, que l’on ne voulait qu’effrayer. C. Basire, député à la Convention nationale. CONVENTION NATIONALE Séance du 29 brumaire, l’an II de la République française, une et indivisible. Mardi 19 Novembre 1793. La séance s’ouvre à 10 heures (1). Un secrétaire fait lecture du procès-verbal de la séance du 19 de ce mois, dont la rédaction est adoptée (2). Un autre secrétaire fait lecture du procès-verbal de la séance du 25 de ce mois, dont la rédaction est également adoptée (3). Les administrateurs du département de police font passer à la Convention nationale le total journalier des détenus dans les maisons de jus¬ tice, d’arrêt et de détention du département de Paris, à l’époque du 27 de ce mois, montant à 3,315. Insertion au « Bulletin » (4). Suit la lettre des administrateurs du départe - msnt de police (5). « Commune de Paris, le 28 brumaire, l’an II de la République une et indi¬ visible. « Citoyen Président, « Les administrateurs du département de police te font passer le total journalier des déte¬ nus dans les maisons de justice, d’arrêt et de détention, du département de Paris, à l’époque du 27 dudit. Parmi les individus qui y sont renfermés, il y en a qui sont prévenus de fabri¬ cation ou distribution de faux assignats, assas¬ sinats, contre-révolution, délits de police mu¬ nicipale, correctionnelle, militaire, et d’autres pour délits légers. « Conciergerie .................. • • 507 « Grande-Force (y compris 14 mili¬ taires) .............................. 568 « Petite-Force .................... 244 (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 313. (2) Ibid. (3) Ibid. (4) Ibid. (5) Archives nationales, carton C 285, dossier 826. 472 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. J® novembro� « Sainte-Pélagie .................. . 164 « Madelonnettes ............... . . . 253 « Abbaye (y compris 22 militaires et 5 otages) ........................... 130 « Bicêtre ......................... 753 « A la Salpêtrière ................. 366 « Chambres d’arrêt, à la mairie ...... 52 ' « Luxembourg .................. . . 278 « Total ............. 3,315 « Certifié conforme aux feuilles journalières à nous remises par les concierges des maisons de justice et d’arrêt du département de Paris. « Baudrais ; Cordas. » La Société populaire de Castillon, district de Saint-Girons, département de l’Ariège, félicite la Convention nationale sur ses travaux, et l’invite à rester à son poste jusqu’au moment où les des¬ potes seront écrasés. Insertion au « Bulletin » (1). Suit l’adresse de la Société 'populaire de Cas¬ tillon (2). La Société populaire de Castillon, district de Saint-Cirons, département de l’Ariège, à la Convention nationale. « Citoyens représentants, « Notre bonheur avait commencé avec l’aurore de la Révolution; retardé par le colosse de la royauté et par la perfidie, il était pour ainsi dire demeuré dans les ombres jusqu’au moment que la nation indignée vous appela dans son temple sacré. Votre premier soin fut d’attaquer la cause; vous frappâtes le tyran, le rideau fut levé, et le jour du peuple brilla dans son éclat. Dès lors, vos travaux, vos actions, vos mouve¬ ments, toutes vos facultés se dirigèrent vers la prospérité publique. Nous vîmes avec atten¬ drissement que le peuple, cette classe d’hommes si respectable et jadis si méprisée, devint l’unique objet de vos méditations : des lois justes et populaires en ont été le fruit, et celle que vous venez de rendre relativement à la taxe de toutes les productions de première nécessité, c’est une nouvelle preuve de votre zèle. « Votre coeur a entendu les gémissements du pauvre, et s’est brisé à la vue de sa misère; vous en avez cherché la cause et vous l’avez trouvée, d’abord dans le discrédit scandaleux des assi¬ gnats occasionné par les agioteurs et dans la sordide avarice des accapareurs ; votre bras foit a frappé les uns et les autres, ils ont disparu devant le glaive de la loi, et la société, purgée de ces vautours anthropophages, jouit déjà d’une portion de la félicité que lui préparent votre popularité et votre bienfaisance. Encore quelques jours et cette félicité atteindra sa der¬ nière mesure : votre attention à purger le sanc¬ tuaire des lois, des monstres qui le déshonorent, est pour nous le présage le plus heureux. « Vigilante Montagne, vous venez de donner ce spectacle frappant, vous avez chassé les lâches (1) Procès-verbaux de la Convenlion, t. 25, p. 313. (2) Archives nationales, carton G 286, dossier 842. et les traîtres et, quoique habilement combinées, leurs perfides machinations n’ont pu échapper à vos regards. La France odieuse (sic) de ces mandataires infidèles, vient d’être mise au grand : vous les avez séparés de vous, ces mons¬ tres infernaux, dont la présence dégradait votre asile. Le tribunal révolutionnaire devant lequel vous les avez traduits va en faire un grand exemple, et la terre de la liberté ainsi que le temple de la Révolution ne seront plus souillés par ces hommes suspects et pervers qui, sous le voile du patriotisme cachaient les plus liber - ticides projets. Ils ne seront donc plus parmi vous, ces infâmes fédéralistes qui minaient sourdement votre nouvel édifice. Incarcérés et proscrits, ils n’entraveront plus vos honorables travaux; ils ne noirciront plus votre gloire, et la France, délivrée de ces conspirateurs, jouira de la prospérité que lui assurent votre zèle et vos talents. « Citoyens législateurs, nous Vous offrons pour tout ce que vous faites le tribut de notre amour et de notre reconnaissance; achevez, consolidez l’œuvre de la liberté et vous aurez mérité la plus douce comme la plus précieuse des récompenses : les hommages du genre humain. « Baron, président; Séguin, secrétaire. » Le citoyen Lannau (Lanneau), procureur syn¬ dic du district, à Autun, a quitté depuis plus d’un an le sacerdoce pour une femme, mais il ne veut pas que les titres que la superstition lui dé¬ cerna subsistent : l’enfant qui lui va naître, s’il surprenait un jour ces titres de prêtre, titres à l’indignation des sages, rougirait d’avoir à attri¬ buer le délai de son existence à un préjugé qui tyrannisait jusqu’à la nature. Même profession de foi de la part du citoyen Masson, président du même district, avec la rai¬ son duquel les idées fanatiques et superstitieuses ne se sont jamais accordées, et qui depuis long¬ temps avait abjuré dans son cœur les figures étranges qu’une fatalité inévitable lui avait im¬ posées. Ces exemples sont imités par le citoyen Mar¬ tin, ci-devant vicaire épiscopal. Les lettres de ces trois citoyens ont été solen¬ nellement livrées aux flammes à l’ouverture des études du collège; et le conseil général de la commune d’ Autun, qui a éprouvé leur carac¬ tère républicain, demande pour eux la mention honorable et l’insertion au « Bulletin ». Décrété (1). Extrait du registre des délibérations du conseil général de la commune d’ Autun, en séance publique et permanente (2). Du 21 brumaire de l’an II de la République une et indivisible. « Le conseil général de la commune d’ Autun étant assemblé et réuni aux autorités consti¬ tuées pour l’ouverture des études du collège, et dans le moment où la séance allait être levée, (1) Procès-verbaux de la Convenlion, t. 25, p. 313* (2) Archives nationales, carton C 285, dossier 826