[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 décembre 1789.] 665 200 millions ; et après les aliénations que je propose, il restera plus de trois milliards de Mens ecclésiastiques pour en répondre ; la nation ne peut d’ailleurs reprendre l’administration des biens ecclésiastiques, sans se charger aussi des dettes légitimes dont ils sont grevés : la sûreté des créanciers du clergé sera donc augmentée, et je leur rends trop de justice pour oser croire qu’il en existe un seul qui ait même la pensée de calomnier une opération qui ne lui fait rien perdre, et à laquelle le salut de l’Etat est peut-être attaché. Je crois avoir rempli la tâche que je m’étais imposée, et vous avoir démontré qu’il faut soulager les ecclésiastiques de l’administration de leurs biens, que vous pouvez ainsi trouver un secours de 400 millions, sans diminuer en aucune manière les revenus affectés au culte et au soutien des pauvres, et sans faire le moindre tort aux créanciers du clergé. Vous ferez donc (en adoptant ma proposition) pour Je bien de l’Eglise et pour l’intérêt de l’Etat, tout ce que la piété la plus solide et le patriotisme le plus pur sont en droit d’exiger de vous. Je demande en conséquence : 1° Qu’il soit défendu à tous titulaires de bénéfices, supérieurs de maisons et établissements ecclésiastiques, à toute personne enfin sans distinction, de faire ni recevoir à l’avenir aucuns baux de possessions dites ecclésiastiques, à peine de nullité; 2° Que lesdites possessions actuellement en régie soient dès à présent données à ferme, à la chaleur des enchères, devant les assemblées de district, et sur la poursuite des procureurs-syndics, après trois affiches et publications de quinzaine en quinzaine ; 3° Que toutes les autres possessions de la même nature soient pareillement données à ferme dans la même forme, à mesure de l’expiration des baux actuels ; 4° Que les baux de toutes ces possessions, à l’exception seulement des biens de ville, soient faits pour dix-huit ans, par petites mesures, autant que faire se pourra, sous la charge de deniers d’entrée équivalents à une année du prix du bail, lesquels deniers d’entrée seront payés dans les trois mois, du jour de l’adjudication, et versés dans la caisse nationale pour être employés aux besoins de l’Etat. 5° Les adjudicataires seront tenus de fournir bonne et solvable caution, laquelle ne sera reçue qu’après une vérification suffisante. 6° Le prix de tous les baux sera payé aux termes stipulés, à une caisse qui sera établie à cet effet dans chaque district. 7° Il sera incessamment fixé un salaire annuel pour chaque personne pourvue à l’avenir d’un titre de bénéfice, lequel salaire sera proportionné au service, et payé de trois en trois mois et d’avance, sur les produits des revenus des possessions dites ecclésiastiques. A l’égard des titulaires actuels, l’Assemblée nationale se réserve de régler leur sort d’une manière convenable. 8° L’Assemblée nationale se réserve pareillement de décréter incessamment, pour chaque district, au moins un établissement destiné à procurer du travail à tous ceux qui peuvent en manquer, et à pourvoir au soulagement des pauvres infirmes ou malades; seront lesdits établissements dotés, d’abord avec les fonds des hôpitaux du lieu, subsidiairement des deniers pro-yenant des possessions dites ecclésiastiques. 9° Se réserve aussi l’Assemblée nationale de décréter sur les mêmes deniers des pensions de retraite pour les anciens curés et vicaires, et les honoraires d’un maître et d’une maîtresse d’école dans chaque paroisse de campagne. 10° Les emplacements des maisons religieuses, sises dans les capitales et grandes villes, seront incessamment vendus, excepté toutefois ceux des maisons qui seraient destinées à l’éducation publique et au soulagement des malades dans les lieux où on manque de pareils établissements, et des maisons qui pourraient être destinées à des établissements utiles au progrès des sciences : le prix de tous les emplacements vendus sera versé dans la caisse nationale, pour être employé aux besoins publics. Plusieurs membres demandent l’impression de la motion de M. Treilhard. L’impression est ordonnée. (Voy. aux Annexes, le rapport de M. Lanjui-nais, sur la motion de M. Treilhard.) M. le duc de La Rochefoucauld. Je me renfermerai dans l’examen du plan proposé par le comité. Je ne parlerai pas du décret qui vous a été lu au nom de la minorité de ses membres ; il renferme le vice essentiel de déclarer une chose fausse, comme en disant que le clergé n’est plus un ordre, et de rendre ensuite le clergé un ordre en lui laissant une administration commune. Je ne crois pas que vous deviez décréter sur-le-champ rétablissement d’une caisse d’extraordinaire ; il tient à l’ordre général , et cet objet me paraît pouvoir être ajourné à un temps très-limité. On vous propose de vendre des fonds du domaine et des biens du clergé pour 400 millions, et de créer des assignations pour pareille somme. En adoptant cette disposition, je crois qu’il est bon de faire deux amendements. Premièrement, au lieu de décréter, dès aujourd’hui, la vente pour 400 millions, on pourrait, en commençant, la restreindre à 300. Elle se ferait également en deux ans ; il serait plus avantageux de donner une hypothèque spéciale qu’une hypothèque générale. Les effets seraient plus aisément négociés, parce que les porteurs pourraient suivre la vente et l’exiger ; il faudrait en conséquence charger des commissaires de faire la désignation de ces biens, dans le courant de mars prochain, avec le concours des assemblées de département, et en prenant préférablement dans les fonds des bénéfices actuellement aux économats. Secondement, on pourrait comprendre dans les domaines à vendre les parties de bois éparses, et dont la contenance est au-dessous de trois à quatre cents arpents. La dépense des gardes, etc.. est plus considérable que le produit. (Voy. aux Annexes de la séance V opinion de M. le duc de La Rochefoucauld sur les banques publiques .) M. Ricard deSéalt(l). Messieurs, dix volumes in-folio ne suffiraient pas pour coutenir les détails de la dépense de tous les départements. Il est donc impossible à la législature actuelle de sonder la profondeur du gouffre dans lequel voudraient nous ensevelir quelques bons (1) Le Moniteur ne reproduit ce discours qu’incom-plétement.