2 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 octobre 1790.) ville de Marseille , qui ne sont plus en activité, s’était opposée au départ du régiment de Vexin, tandis que la vérité est que les sections ne se sont pas assemblées, qu’il n’y a eu de leur part aucune opposition, et que la municipalité, de concert avec le commandant des troupes dé ligne du département, s’est donné tous les soins possibles pour préparer ce départ que le ministre avait ordonné. (L’Assemblée ordonne le renvoi de cette adresse à son comité des rapports.) Adresse du corps des prud’hommes-pêcheurs de Cannes, qui expriment de la manière la plus énergique leur dévouement à la Constitution, et supplient l’Assemblée nationale de leur conserver le droit, dont l’origine remonte aux temps les plus reculés, et qui se rapporte à l’institution bienfaisante des juges de paix, décrétée pour tout le royaume et pour toutes les classes de citoyens, de faire juger en dernier ressort, et par des juges choisis chaque année dans leur sein, tous les différends et toutes les contestations sur les faits relatifs à la pêche, et de les faire jouir ainsi des mêmes avantages accordés aux pêcheurs de Marseille et de Toulon. (L’Assemblée nationale applaudit aux sentiments exprimés dans cette adresse, et renvoie l’examen de la pétition qu’elle contient à son comité de Constitution.) Adresse des électeurs du district de Montfort, département de l’ Ille-et-Vilaine, réunis les 13 et 14 de ce mois pour l’élection des juges de ce district, par laquelle iis expriment de nouveau à l’Assemblée leur dévouement et leur inébranlable fidélité à la Constitution , et lui transmettent leurs vœux ardents pour la conservation de leur district, conformes à ceux précédemment émis par presque toutes les municipalités de son territoire, formées pour cet effet en conseils généraux de commune, ainsi que les principaux motifs qui doivent déterminer à y avoir égard. (L’Assemblée ordonne le renvoi de cette adresse à sou comité de Constitution.) Le sieur Bleuet, fils, libraire, admis à la barre, a remis à l’Assemblée, pour être déposée sur son bureau , la première livraison d’un ouvrage , ayant pour titre : Mémoires historiques , critiques et politiques de la Révolution de France, avec toutes les opérations de l’Assemblée nationale, par le Sr. Hugon, ci-devant de Bassville, membre de plusieurs académies, consistant en 2 vol. in -8°. On fait également hommage à l’Assemblée, au nom de la dame Anel, veuve du Sr. Le Rebours, contrôleur provincial des postes, du projet d’une nouvelle édition d’un ouvrage intitulé : Avis aux mères qui veulent nourrir leurs enfants; et il eu a été remis sur le bureau un exemplaire, contenant toutes les corrections qui doivent perfectionner cette édition. Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une adresse de l’université de Strasbourg, qui contient le développement et l’éloge de tous les principes de la Constitution. On demande l’insertion de celte adresse dans le procès-verbal imprimé. Cette proposition est adoptée. Suit le texte de l’adresse : « Messieurs , l’université de la ville de Strasbourg a l’honneur de vous offrir l’hommage profond de l’admiration et de la reconnaissance dont la pénètrent vos augustes travaux. « La première monarchie de la terre penchait vers sa ruine ; le trône, entouré d’une vaine pompe, était miné sourdement par les prétentions des grands ; une distance infranchissable séparait le prince de ses peuples ; une classe privilégiée absorbait les revenus de l’Etat, sans y contribuer dans une juste proportion ; et plus le meilleur des rois était bienfaisant, plus le peuple était malheureux ; les abus gothiques du pouvoir féodal étendaient tous les jours davantage leurs rameaux parasites, et pour comble de maux, ils menaçaient de redevenir constitutionnels ; l’autorité du monarque était moins absolue que despotique : aucun corps politique, légitimement investi de ce droit, ne contenait le pouvoir souverain dans son orbite ; l’opinion publique était sans force et sans énergie ; les parlements, ces prétendus tuteurs de nos rois, s’arrogeaient la triste prérogative de contrarier les opérations du gouvernement, et ils en usaient en usurpateurs, ils ne songeaient qu’à leurs propres intérêts; Louis XVI enfin, cet héritier des vertus de Henri IV, et du pouvoir de Louis XIV, pouvait tout, hors la seule chose qu’il désirait, le bien. « Quinze années de règne furent employées inutilement à recouvrer ce droit, le seul qu’ambitionnât Louis XVI. 11 crut l’acheter par des sacrifices, et ces sacrifices furent autant de victoires, furent autant de triomphes pour les ennemis du peuple. Le peuple, écrasé sous le poids des maux qui l’accablaient, gémissait, et Louis XVI gémissait avec lui. « Il n’y avait qu’une union entre ce bon prince et son peuple, qui pût les délivrer l’un et l'autre des entraves de l’aristocratie. Louis XVI sentit enfin cette vérité de tous les temps, mais qui malheureusement trouve rarement accueil chez les rois : que l’autorité la plus respectable est la plus légitime; qu’il n’y a d’autorité légitime que celle qui résulte du vœu du peuple, et que le seul moyen d’avoir de bonnes lois, et surtout de les faire observer par le peuple, c’est de rendre le peuple lui-même son propre législateur; Louis XVI convoqua les Etats généraux. « Vous arrivâtes, Messieurs, et la France ressuscita. La nation, ensevelie, depuis une longue suite de siècles, sous les décombres menaçants de la barbarie du moyen âge, fut rappelée à la vie; l’opinion publique reprit ses droits. Bientôt constitués en Assemblée nationale, votre zèle, et surtout votre courage triomphèrent de tous les obstacles que l’intérêt personnel, ce Protée destructeur de toutes les vertus publiques, opposa à la marche glorieuse de vos travaux. L’homme, rendu à sa dignité, apprit ses devoirs dans le code même de ses droits : vous portâtes le coup de la mort à l’hydre de la féodalité; vous abolîtes jusqu’aux dernières traces du servage; vous reconnûtes, Messieurs, que la base de tout bon gouvernement est la justice; et en détruisant le préjugé homicide, que le crime d'un seul dégrade des générations entières, vous ne pûtes faire grâce à cet autre préjugé qui perpétuait dans l'Etat des distinctions héréditaires. Les idées sublimes d’égalité que la philosophie humaine, et la religion, cette philosophie épurée au creuset de la révélation divine, recommandent de concert, devinrent les fondements inébranlables de l’édifice majestueux de la Constitution; et le titre majestueux de citoyen, devenu le plus beau, dédommagea amplement ceux des Français à qui d’anciens préjugés en avaient transmis* de plus fastueux. « Tout pouvoir émane essentiellement de la nation; toute institution nationale ne doit avoir 3 [Assemblée nationale.) ARCHIVÉS PARLEMENTAIRES, pour objet que Putilité de la nation : tels sont, Messieurs, les principes d’où vous dérivâtes cette organisation de pouvoirs, qui, en garantissant à la nation les droits imprescriptibles de la souveraineté, la fait jouir de tous les avantages du gouvernement représentatif et de tous ceux de la mouarchie tempérée. A ces anciens tribunaux qui faisaient de la justice un droit vénal et héréditaire, VOUS eti avez substitué d’autres, qui, composés par le vœu du peuple, ne verront dans leurs fonctions qu’un devoir. A ces administra-■ teurs provinciaux, à tous ces tyrans subalternes, dont l’intérêt individuel était toujours en opposition avec celui des administrés, vous avez substitué Üfef, administrations populaires, qui, animées d’un seul et même intérêt, n'aüront d’autre but (jüe lé bien et l’utilité générale. Représentants du peüple vous avez réservé à ses délégués électifs le droit de faire des lois, et vous avez maintenu le roi dans là possession dü pouvoir éminent de lés faire exécuter : pénétrés, ainsi que la France entière, dü rèSpect le pluâ profond pour p personne ... sacrée, vous avez investi son trône de toute l'inviolabilité de la majesté héréditaire, et vous avez rempli le vœu personnel du restaurateur de la liberté, en empêchant, par une responsabilité rigoureuse, qu’abusant de son nom et de son autorité, les organes de ses volontés ne lui fissent vouloir le mal. « Remontant au but primitif de toute association politique, vous avez reconnu, Messieurs, que l’entretien de la force publique, destiuée à garantir les droits et les propriétés du citoyen, ne doit pas porter atteinte à ces mêmes droits et à ces propriétés. Vous avez banni du code de notre droit public cette maximé, digne des siècles peu éclairés qui la virent naître : Si veut le roi , si veut la loi; et vous avez rendu aux représentants du peuple le droit de consentir librement la contribution publique. Appelés pour remettre l’ordre dans les finances, il n’a fallu rien moins que votre courage et vos lumières pour ne pas désespérer de la chose publique : interprètes de la volonté d’une nation loyale et généreuse, vous avez pris sous sa sauvegarde immédiate les créanciers de l’Etat, et vous avez conçu, vous avez fait plus, vous avez exécuté l’idée hardie d’amortir une dette immense, tout en soulageant les contribuables. Vous avez attaqué les abus jusques dans leurs racines les plus profondes : semblables à un lierre flexible, il n’y avait pas une seule branche de l’administration qu’ils n’eussent enveloppée de leurs tiges tortueuses, et ils n’avaient pas même respecté le patrimoine sacré des autels et des pauvres ; vous avez coupé toutes leurs boutures immondes. « La liberté, cette propriété la plus auguste de l’homme, puisqu’elle est le gage caractéristique de sa raison et de son intelligence, la liberté méritait, Messieurs, d’être vengée par vous des outrages du despotisme. « Vous avez condamné à jamais ces ordres arbitraires qui, rarement excusables, étaient toujours odieux : vous avez consacré ce principe qui, pour l’honneur de l’humanité, n’aurait jamais dû être méconnu : que nul ne doit être inquiété pour ses opinions. Forts de la pureté de vos intentions, vous n’avez pas craint que vos opérations fussent éclairées du flambeau de la critique, et vous avez affranchi le génie des fers de la censure. Amis de l’ordre, vous n’avez pas voulu cependant que la libre communication des pensées devînt une source de troubles; et vous avez condamné la licence. Ah ! puisse ce monstre [23 octobre 1790.J sanguinaire disparaître à jamais d’un état où vous avez tixé la justice! puisse une ligue générale se former entre tous les bons citoyens, pour le bannir de la patrie de la concorde et des mœurs ! puissent tous les Français s’empresser d’entrer dans cette ligue du bien public , et, oubliant les sacrifices personnels, rendre hommage eniin à vos bienfaits, et vous en témoigner leur reconnaissance, en concourant de toutes leurs forces à réaliser ce vœu de vos cœurs, cet objet chéri j de vos veilles : qu’il n'y ait sous l’empire de Louis XVI qu'un peuple de frères. « L’université de Strasbourg, digne par ses sentiments d’entrer dans cette alliance sainte, jure, Messieurs, d’en observer toutes les lois : elle y apportera toute l’énergie de la reconnaissance publique alliée à toute celle de la reconnaissance particulière dont l’a pénétrée yotre décret du 17 août dernier. Fidèle à la nation, à la loi et au roi, elle demeurera à jamais dévouée à la Constitution qui fera la gloire et le bonheur de la France, et elle attachera son propre bonheur et sa propre gloire à former de bons citoyens, et à répandre au loin, par la voie de l’instruction, les principes philanthropiques qui ont allumé dans les cœurs des régénérateurs de la nation française, l’espoir de réaliser la paix universelle qu’avait conçue Henri IV. « Nous sommes avec un profond respect, Messieurs, vos très humbles et très obéissants serviteurs, « Le recteur , les doyens et les professeurs de l’Université de Strasbourg . « Signé : HèrMann, recteur. « A Strasbourg, le 16 octobre 1790. » M. de Vaudrcuïl, membre du comité de la marine , met sous les yeux de l’Assemblée une lettre et une délibération de la municipalité de Bayonne, adressées à ce comité, et qui constatent les soins que cette municipalité s’est donnés sur les demandes successives du commissaire des classes de la même ville, et de M. Couture, commissaire supérieur, pour assurer le départ des marins nécessaires au service de la nation, en échangeant une première fois une somme de 16,000 livres, et depuis, celle de 3,000 livres en numéraire métallique contre des assignats; au moyen de quoi, le départ des marins commandés n’a éprouvé aucun retard. (L’Assemblée applaudit à la conduite patriotiaue de la municipalité de Bayonne; elle décrète qu’il en sera fait une mention honorable dans son procès-verbal, et que sou président sera chargé de lui témoigner la satisfaction de l’Assemblée.) M. l’abbé Gibert, membre du comité des finances ■, rend compte de quelques difficultés survenues relativement à la capitation des ci-devant privilégiés de Bourgogne, et à la comptabilité de l’ancien receveur de cette imposition ; il propose un projet de décret qui est adopté dans ces termes : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de sou comité des finances sur les plaintes à elle adressées par les administrateurs des départements de l’Yonne, Saône-et-Loire et de la Côte-d’Or, décrète que l’ancien receveur de la capitation de la ei-devant noblesse de Bourgogne, sera tenu, conformément aux articles 1, 2 et 3 du décret du 13 juillet dernier, sanctionné par le roi le 22 du même mois, de représenter auxdits administrateurs l’état de la situation de sa caisse en re-