(Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (9 février 1790.] 531 1* Que chaque législature, dans les premières séances de la première session, devra, sur la présentation du ministre du roi, décréter les sommes affectées au service de l’arméq, et l’emploi de ces sommes ; 2° Que la force de l’armée, arrêtée par un décret de l’Assemblée, ne pourra être, d’une législature à l’autre, modifiée par le pouvoir exécutif au delà de la latitude que lui laissera ce même décret ; 3° Qu’il ne sera jamais introduit dans le royaume aucun corps de troupes étrangères, sans un décret de l’Assemblée nationale, qui devra prononcer sur les conditions de leur admission ; 4° Que les troupes ne pourront être employées dans l’intérieur du [royaume que d’après le mode et les formes ordonnées par la constitution ; 5° Que le ministre de la guerre et tous les agents du pouvoir militaire, seront et demeureront responsables de toute violation des droits du citoyen, de tout acte ou ordre attentatoire aux lois constitutionnelles et autres du royaume, de toute infidélité ou négligence en gestion d’argent, en marchés, en entreprises, qui ne pourront pas, sans un décret de l'Assemblée, s’étendre au deià du terme de la législature oü ils auront été faits, le tout conformément aux lois qui seront promulguées à cet effet ; 6° Que le défaut de discipline dans l’armée est un délit contraire aux vœux et à l’intérêt national. L’Assemblée décrète, en outre, qu’à l’avenir et à commencer du premier janvier dernier, la solde du soldat, cavalier, dragon, hussard, sera augmentée de trente-deux deniers, et portés à dix sois. L’Assemblée charge son comité militaire et son comité de constitution réunis de lui présenter incessammeqt des projets de lois : 1° Sur les moyens de porter promptement l’armée à la force que les circonstances pourront rendre nécessaire* 2? Sur l’organisation des tribunaux militaires et sur la forme des jugements ; 3� Sur le rapport des gardes nationales et de l’armée. Enfin, l’Assemblée décrète que, quand elle aura, sur la demande du roi, fixé la somme affectée au département de la guerre, et le nombre d’hommes dont l’armée doit être composée, le soin de la formation et organisation de l’armée dans tous ses détails sera remis au pouvoir exécutif, qui devra prendre, pour hases des ordonnances et des règlements qui la constitueront, les principes suivants : 1° Que les engagements soient préservés de toutes les fraudes, surprises et violences dont l’expérience a fait reconnaître le vice ; 2° Qu’il soit fait une augmentation dans le traitement des officiers, et particulièrement des grades inférieurs ; 3° Que d’après les principes universellement reconnus d’admissibilité pour toutes les classes des citoyens aux places militaires comme à toutes autres, les règles d’admission soient posées de manière à ce que la faveur ne puisse plus en disposer ; 4° Que les règles d’avancement satisfassent aux droits de l’ancienneté, en ménageant les ressorts de l’émulation, sans laquelle une armée perdrait promptement de son activité et de ses ressources ; 5° Qu’une proportion quelconque dans les places de l’officier soit assignée à la classe des bas-officiers, pour, par cette perspective, prévenir en eux le découragement, et entretenir l’amour de leur état ; 6° Qu’up Gode pénal soit établi, qui, préservant les coupables de l’arbitraire, leur donne les moyens possibles de justification, et aux juges les moyens surs et faciles d’appliquer la loi ; 7° Qu’il soit pourvu à la retraite des officiers et soldats, de manière à remplir à la fois les intentions, de les attacher plus constamment au service, de les préserver de l’arbitraire des supérieurs, et enfin de diminuer les charges du Trésor puhlic. Il me semble que çe] ordre de travail nous promet, dans un court délai, les résultats qu’il est si instant d’opérer. Divers membres demandent l’impression du discours de M. le duc de Liancourt. Cette proposition est mise aux voix et adoptée, M. le Président annoqce que la séance du soir s’ouvrira à 6 heures. La séance est levée, ASSEMBLÉE NATIONALE, PRÉSIDENCE DE M. BUREAUX DE PUSY. Séance du mardi 9 février 1790, au soir (1), M. le baron de Marguerites, l'un de MM. les secrétaires, donne lecture des adresses ainsi qu’il suit : Adresse de félicitation, adhésion et dévouement des habitants de la commune de Gensac, près de Gannat en Bourbonnais : après avoir formé leur nouvelle municipalité, ils ont tous juré de mourir, s’il le fallait, pour le maintien de la constitution et la défense de notre bon roi. Adresse du comité permanent et de la garde nationale de Périgueux ; ils portent plainte contre la prévôté de cette ville. Adresse de la nouvelle municipalité de Bour-goin en Dauphiné, et de celle de Chef-Boutonne en Poitou ; elles sollicitent avec instance l’établissement d’une assemblée de district, et d’un siège royal. Adresse du président et des commissaires du district de Porte-Froc de la ville de Lyon, nouvellement constitué. Lettres de M. du Petit-Bois, commandant le régiment de dragons d’Orléans, en garnison à Rennes ; de M. de Bardon, commandant le régiment de Bassigny, en garnison à Lorient, et de M. La-roque, commandant le régiment d’infànterie de Bourgogne, en garnison à Arles, par lesquels ils annoncent que c’est avec la plus grande satisfaction que ces régiments ont entendu la lecture de la lettre qui leur a été adressée par l’Assemblée nationale, et qu’ils lui présentent l’assurance de la soumission la plus entière à ses décrets sanctionnés par le roi. Adresse de félicitation, adhésion et dévouement de la communauté de Contigny en Bourbonnais ; « elle supplie l’Assemblée nationale de décréter que provisoirement la ville de Saint-Pourçain sera chef-iieu de district, sauf à la seconde législature de décider s’il doit être conservé. » (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. 532 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 février 1790.] Adresse des volontaires nationaux de la ville de Caudebec, qui déclarent que, ne voulant jamais séparer leurs intérêts de ceux des gardes nationales, ils désirent qu’une organisation commune leur prescrive bientôt un régime uniforme ; qu’il leur tarde de connaître les limites de leurs devoirs et s'unissent à tous les enfants de la liberté qu’ils ne cesseront d’être les frères, les camarades et les amis de tous ceux qui aimeront mieux mourir que de la perdre. Ils expriment en même temps les plus vifs sentiments d’amour pour la personne sacrée du roi. Adresse de remerciement, adhésion et dévouement de la communauté de Beaumont-Monteux en Dauphiné; elle demande de dépendre du district de la ville de Romans. Adresse des gentilshommes résidant en la ville de Pont-de-Vaux en Bresse, au nombre de onze, qui déclarent adhérer formellement, d’esprit et de cœur, à toutes les opérations, actes et décrets rendus et à rendre par l’Assemblée nationale, à laquelle ils vouent respect, soumission et fidélité, et jurent de sacrifier leurs biens et leur vie pour soutenir et défendre la constitution, qui, en régénérant le plus florissant empire de l’univers, assure à jamais son bonheur et sa gloire. Adresse de la nouvelle municipalité de la ville de Belesme, qui expose que la plus grande partie des membres qui la composent, les plus faits pour inspirer et mériter sa confiance, languissent dans les liens d'un décret ; elle supplie l’Assemblée de vouloir bien les en délivrer. Délibérations des communautés de Saint-Victor-sur-Loire, de Saint-Cyprien en Forez, et de celle de Fontenay en Puisaye, contenant l’offre patriotique du produit de la contribution sur les ci-devant privilégiés. Adresse de la garde nationale de la ville d’Angers, qui exprime avec énergie les sentiments d’admiration, de reconnaissance et de dévouement dont elle est pénétrée pour l’Assemblée nationale; elle sollicite un tribunal supérieur pour cette ville. Adresse des villes et pays de Bléré en Touraine ; elle demande l’établissement dans cette ville d’une juridiction de première instance, d’une maréchaussée, et d’un centre de district ou de canton. Adresses des nouvelles municipalités de la ville d’Iwy-Carignan, du bourg de Gondé-sur-Iton, de la ville de Péronne, de la ville de Mer, de la communauté de Gandelu en Brie, de celle de Fresne, élection de Château-Thierry, des villes de Pontar-lier et de Beaume-les-Dames en Franche-Comté, de Mont-sur-Courville en Champagne, de celle d’Epineuil en Bourbonnais, de la ville de la Flèche, de la ville de Lorient, de celles de la Rochelle et de Rochefort, de la communauté des cantons des Mouilliers, de celle de Grand-Pré, de celle de Lo7 ches, de celle de Bucy-le-Roi en Orléanais, de celle de Saint-Apollinaire, près de Dijon, de celle de Saint-Clémentin en Poitou, de celle d’Houpline sur la Lys, de celle des Essarts en Normandie, de la ville de Cognac en Auvergne et de la ville d’Etampes. Toutes ces municipalités consacrent les premiers moments de leur existence à présenter à l’Assemblée nationale l’hommage d’une adhésion absolue à ses décrets, et d’un dévouement sans bornes pour leur exécution; de concert avec tous les citoyens, elles ont juré solennellement d’être à jamais fidèles à la nation, à la loi et au roi, et de défendre la constitution au péril de leurs fortunes et de leurs vies. Délibération de la ville de Josselin en Bretagne, de laquelle il résulte que douze gentilshommes et chevaliers de Saint-Louis, résidant dans cette ville, se sont rendus avec empressement à l’Hôtel-d3- Ville, pour prêter le serment civique. Adresse d’adhésion de la communauté de Gous-sargues, près de Bagnols en Languedoc ; elle fait le don patriotique au produit de la contribution sur les ci-devant privilégiés. Délibération des habitants de Ghâteau-du-Loir, convoqués par le conseil général de la commune, d’après la nouvelle organisation, par laquelle ils ont nommé MM. Mauboussin et Rousseau le jeune, pour réclamer la juridiction pour la ville et Châ-teau-du-Loir, et les ont chargés d’assurer l’Assemblée nationale de leur adhésion respectueuse à ses sages décrets. Adresse du district des Jacobins-Saint-Honoré, contenant le procès-verbal de prestation du serment civique de l’assemblée générale de ce district. Adresse des habitants de la paroisse de Ché villé au Maine, qui, pénétrés d’admiration, de respect et de dévouement pour tout ce qui émane de l’Assemblée nationale, désirant, malgré leur misère, prouver leur attachement à la cause nationale, et au roi, offrent à la patrie 2 marcs 7 onces pesant d’argenterie, et en outre le produit de la contribution sur les ci-devant privilégiés ; ils demandent la permission de faire pour 1790 un rôle particulier de la cote personnelle, dont ils feraient également l’hommage. Adresse de remerciement et adhésion des habitants de la ville de Condrieux en Forez; ils font le don patriotique du moins imposé au profit des anciens taillables. Adresse de félicitation, remerciement et adhésion de la communauté de la Féline et du Theil en Poitou ; elle demande que la ville de Saint-Pourçain soit chef lieu du district. Adresse de félicitation des officiers des justices seigneuriales de Martes, de Yaire et autres communautés en Auvergne ; ils demandent que les seigneurs soient obligés de leur restituer le prix de leur place. Adresse de la ville de Massenbé en Gascogne ; elle adhère notamment au décret concernant la contribution patriotique, et sollicite un chef-lieu de district. Adresse de la ville de Pontrieux en Bretagne; elle fait le don patriotique de ses boucles et autres effets, consistant en 8 marcs 1 once d’argent et 5 onces d’or ; elle demande une justice royale. Adresse de madame la baronne de Vassé, qui, anglaise d’origine, a adopté la France pour sa patrie; elle fait hommage à l’Assemblée d’un ouvrage qui présente le parallèle des grands hommes de la France et de l’Angleterre, et le tableau des constitutions des empires et des républiques de l’Europe. Adresse des habitants d’Ostabarets en basse-Navarre, assemblés en cour générale, contenant le tribut d’hommage, d’admiration et de reconnaissance pour l’Assemblée nationale ; ils y déclarent que les Navarrois, unis désormais aux Français par la conformité de leurs sentiments et de leurs intérêts, verseront jusqu’à la dernière goutte de leur sang pour défendre la cause commune. Adresse de la communauté des maîtres chapeliers et bonnetiers de la ville de Chaumont en Bassigny,qui fait le don patriotique de la somme de 40 livres, d’une image de Sainte-Barbe, deux vases, un chandelier, la garniture d’un bâton en argent, le tout du poids de 5 marcs 6 onces. Adresse de la municipalité de la ville de Pon- [9 février 1790.] [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 533 toise, qui annonce que c’est avec le plus grand attendrissement que tous les citoyens ont appris l’arrivée de notre monarque chéri au milieu des représentants de son peuple, dans la séance du 4 de ce mois, et le discours vraiment paternel qu’il a prononcé. Assemblés extraordinairement dans la principale église, ils ont souvent interrompu la lecture de ce discours par les cris redoublés de Vivent le roi et l’Assemblée nationale ; le maire, après avoir prêté le serment civique décrété par l’Assemblée, a reçu celui des citoyens actifs présents, a prévenu que pendant huit jours il recevrait à I’Hôtel-de-Ville le serment des citoyens actifs absents, et que, passé ce délai, tous ceux qui ne l’auraient pas piété seraient rayés de la liste des citoyens actifs. Ce maire demande l’approbation de l’Assemblée. Adresse de la municipalité de la ville d’Estagel en Roussillon, qui renouvelle son hommage auprès de l’Assemblée nationale, et déclare faire remise en don patriotique d’une rente dont elle est créancière sur l’Etat, de la somme de 2, 160 livres en capital, aujourd’hui réduite à 864 livres, ainsi que des arrérages, moutant à 453 livres. Adresse des bas-officiers du régiment royal Champagne, en garnison à Hesdin, qui, jaloux de donner à la patrie des preuves d’un zèle infatigable, renouvellent leur serment de fidélité qu’ils îrotestent de maintenir jusqu’à la mort; ils sup-)lient l’Assemblée de s’occuper sans relâche de a constitution militaire , l’armée s’affaiblissant de jour en jour. Adresse d’adhésion de la ville de Ribérac en Périgord; elle demande d’être chef-lieu de district, et que le lieu de la Tour-Blanche, enclave de l’Angoumois,en dépende, conformément à son vœu. Adresse de félicitation, adhésion et dévouement jde la ville de Saint-Yrieix en Limousin ; elle demande d’être chef-lieu de district. Adresse de la garde nationale de la ville d ’O-range, qui exprime, de la manière la plus patriotique et la plus énergique, les sentiments de la liberté et ceux de dévouement à l’Assemblée nationale. Adresses de quarante municipalités; savoir : Baye. Champaubert. Congy. Toulon. Vert. Montmort. Leménil-les-Lacaure. Lacaure. Loizy. Givry. Soches. Corribert. Le Bezil. Beaunoy. Fabriange. E toges. Aunizeul. Coizard. Courjonnel. Villevenard. Oyes. Reuve. Broussy-Ie-Grand. Broussy-le-Petit. Chaltrait. Villers-aux-Bois. Etrechy. Bannes. Lintelle. Lucy. Brugny. Saint-Martin d'Ablois. Soulière. Gionge. Coligny. Aulnay. Ecurie-le-Repos. Bergère. Pierre-Morains. Morains. contenant félicitation, remerciements et adhésion à tous les décrets rendus et à rendre par l’Assemblée nationale. Adresse de la communauté des procureurs du bailliage d’Epernav en Champagne, portant adhésion aux décrets" de l’Assemblée, et offre d’un contrat sur le roi au principal de 1,200 livres, et de deux années de rentes échues. Adresse de la compagnie des notaires de la ville de Reims en Champagne, avec offre d’une somme de 600 livres pour leur don patriotique. Adresse du comité électif de la ville de Ber-nay, qui rend compte de son empressement et de ses soins pour faire exécuter les décrets de l’Assemblée nationale, et pour maintenir dans cette ville la paix qu’on a craint de voir troublée par des mouvements provoqués par les ennemis du bien public, et çar l’imprudence et la négligence des préposés à la régie : il demande la suppression du droit de treizième et des banalités, sans indemnité ; il exprime des vœux pour que l’Assemblée nationale achève l’ouvrage qui doit l’immortaliser ; qu’il s’élève au plus tôt des corps d’administration dans les provinces, et qu’à côté de ces corps l’on voye bientôt 3iéger des juges choisis par la nation. Cette adresse est ainsi conçue : « Nosseigneurs, le comité électif de la ville de Bernay a l’honneur de vous représenter que les habitants de la ville et des campagnes sont alarmés d’entendre encore parler de la banalité. Les partisans du régime féodal publient que l’on ne conviendra jamais du prix et du mode de ce rachat; que la conversion de cette servitude en une prestation pécuniaire ne sera qu’un surcroît de charges pour le peuple , et que la banalité ne sera jamais supprimée. « Vous avez détruit entièrement, Nosseigneurs, le régime féoda ; vous avez décrété que dans les droits, tant féodaux que censuels, ceux qui tiennent à la mainmorte réelle ou personnelle, et à la servitude personnelle, et ceux qui les représentent, sont abolis sans indemnité. La banalité est une servitude personnelle. « Lorsque les rois jouissaient seuls de l’intégrité des droits, ils avaient seuls des moulins, des fours, des pressoirs publics. Tout propriétaire pouvait en avoir chez lui pour son usage ; mais nul autre que le prince n’en pouvait avoir de publics ou communs, parce que cette publicité se confondait avec la police: c’était un acte de jouissance publique qui appartenait au prince. es ministres profitèrent de es pour s’emparer de la puissance publique. Les administrateurs des justices et des recettes royales imitèrent leur exemple. Tout seigneur envisagea comme une propriété et un patrimoine cette portion de la puissance publique, dont la situation du gouvernement lui avait permis de se saisir. « Les pressoirs, les fours et les moulins publics appartinrent, par cette raison, à ces nouveaux dépositaires de la puissance publique. Ces lieux n’a-« Les gouverneurs, la faiblesse des peup