[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 juiUet 1790.] 17K nombre de curés de Bretagne, des environs de Nantes, signent en ce moment une pétition à l’Assemblée nationale pour protester contre la nouvelle organisation civile du clergé et demander en même temps la réunion d’un concile national. Quoique cette adresse ne soit pas de celles que vous aimez à recevoir, je compte sur la justice de l’Assemblée pour l’examiner avec impartialité. (Voyez cette adressé annexée à la séance de ce jour, p. 179.) M. Regnaud (de Saint-Jean-d’Angely) poursuit la lecture des adresses : les communes de Crache, Mauriens de Btauvesy et celles de Saint-Agnan, Puzeaux et Corbeny ajoutent le don patriotique de la contribution de ci-devant privilégiés pour les six derniers mois de 1789. D’autres enfin, comme la commune de Corbeny, de Langeais, de Lesterps, de Moissac, et la municipalité de Courcosme présentent des soumissions pour acquérir des biens nationaux dans leurs territoires respectifs. Le même secrétaire rend compte d’une lettre de M. de Burry, ancien capitoul de Toulouse, par laquelle, indépendamment de sa contribution patriotique, ce citoyen fait offre à la nation d’un contrat sur l’Etat, et de rentes arriérées, montant, le tout, à une somme de, 2,000 livres; suit l’annonce d’autres dons patriotiques : d’une Cafetière d’argent, de sept paires de boucles d’argent, de deux paires de boucles de jarretières, de quatre boucles de col, d’une paire de boucles d’argent à bracelets, d’une paire de boucles d’oreilles d’or, d’un cachet d’or, d’un cœur de Jeannette d’or, d’une petite croix d’or, de deux dés d’or, d’une bonbonnière montée en or, et d’une somme de 36 livres en écus. Ces derniers dons sont offerts par Marguerite Balen, domestique-, par un frotteur; par une demoiselle qui n'a voulu se désigner que par la lettre initiale G ; par le nommé Mauleveau, marbrier; par le sieur Joux, sculpteur du roi; par M. Francoville, peintre; par M11* de Grasse; par Mme Corue-de-Cerf; par M. Boite; enfin, par Mme Boîte son épouse, la même citoyenne de Paris, qui, le 7 septembre 1789, à la tête de dix autres citoyennes de la capitale, vint à Versailles donner à l’Assemblée nationale et à la France le premier exemple d’offrande faite à la patrie, de tous ses bijoux d’or et d’argent et de ceux de ses compagnes. Le même secrétaire rend compte encore d’une pétition d’uii grand nombre d’ecclésiastiques et curés pour l’ abolition du célibat des prêtres , d’une pétition de plusieurs détenus pour dettes civiles, qui réclament leur élargissement en l’honneur de la cérémonie fédérative ; enfin, d’une pétition de plusieurs prisonniers du Châtelet, qui dénoncent des abus dont quelques-uns se plaignent de ce que, sans décret et sans accusation, on les tient privés de leur liberté. Adresse du sieur Du Lac, lieutenant en second au régiment de Strasbourg artillerie, qui dénonce une lettre de cachet décernée contre lui, par le ministre de la guerre (Ce mot de lettre de cachet excite V indignation d’une grande partie de V Assemblée). M. de Cazalès. C’est vraisemblablement un ordre militaire et non une lettre de cachet ; l’Assemblée se couvrirait de ridicule si elle s’en mêlait. Cependant je demande le renvoi au comité des lettres de cachet, pour examiner si c’est réellement une lettré de cachet, car alors le miuistre serait réellement coupable. M. l’abbé Gouttes. Voici le fait en deux mots. M. de Puységur, colonel du régiment, m’a rapporté que M. Du Lac était venu chez lui et lui avait dit, le chapeau sur la tête : « Je suis surpris, monsieur, que vous veniez pour nous commander. Vous n’êtes pas fait pour cela. Nous ne voulons obéir désormais qu’à ceux que nous choisirons nous-mêmes. » C’est cette insubordination qu’il s’agit de punir à moins qu’on ne veuille anéantir tout à fait la discipline militaire. (De toute part on demande l’ordre du jour qui est prononcé.) L’Assemblée admet ensuite à la barre les députations de la garde nationale, de la maréchaussée de la ville de Laon, et du régiment de dragons, en garnison dans la même ville, fédérés le 6 juin dernier dans le chef-lieu du département de l’Aisne ; Du département de la Loire-Inférieure ; Du département de la Vienne; Du département de la Saône; De la fédération des gardes nationaux de Versailles et des légions nationales voisines; De la commune de la ville de Goulé ; Des administrateurs du district d’Aubarge au département de l’Ardèche ; Des prêtres de la doctrine chrétienne ; Enfin, des écoliers du collège de Dôle, département du Jura. M.Ie Président répond successivement aux discours que les orateurs de ces diverses députations à l’Assemblée nationale; discours tous remplis de témoignages de respect, de reconnaissance et de soumission pour les décrets de l’Assemblée nationale. M. le Président offre à tous ces députés les honneurs de la séance. A l’expression de ces sentiments patriotiques, les écoliers du collège de Dôle joignent le don patriotique de dix-huit marcs cinq onces d’argenterie dont on leur a permis de disposer, et d’une somme de 409 livres en argent, fruit de leurs épargnes sur l’argent destinéà leurs plaisirs. Eux-mêmes, en uniforme militaire et en armes, ont, du Mont-Jura jusqu’à Paris, escorté à pied la caisse qui renferme ce don patriotique pour s’assurer mieux la douce satisfaction de l’offrir personnellement à la Patrie. Les officiers municipaux de Schelestadt , mandés à la barre, sont introduits , M. le Président lit le décret qui les a mandés pour rendre compte de leur conduite. Le maire, portant la parole , fait plusieurs observations sur les diverses parties du décret, et termiue en disant : « Tous les citoyens de Schelestadt ont rendu justice aux anciens officiers municipaux; les élections viennent d’être recommencées en présence des commissaires du roi, en exécution de votre décret, et ceux même que l’excès de leur zèle soumet en ce moment à votre censure sont choisis, quoique absents, pour monter aux mêmes places dont ils étaient descendus. «Qu’il soit permis à ces officiers de s'honorer* auprès de l’Assemblée, de cette nouvelle marque de confiance, et de solliciter quelque intérêt, en paraissant devant elle investis de l’opinion favorable de leurs concitoyens. m {Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (17 juillet 1790.1 « Ceux-là ont rendu quelques services à leur patrie, qui, absents et occupés à remplir une mission qui aurait pu les flétrir, si leurs intentions n’eussent pas été pures, recueillent le prix le plus précieux de l’estime publique. « Mais une nouvelle difficulté s’élève; elle doit être soumise à votre décision par les commissaires qui ont présidé à l’élection. « M. Herremberger, qui quittait les fonctions de maire, vient d’être élu de nouveau. « Les commissaires ont vérifié quelle était sa part de contribution directe; il était porté sur le rôle pour 3 livres de capitation; mais il est propriétaire, par indivis avec sa mère et ses sœurs, de biens restés en commun, et pour lesquels il paye, et au delà, les 10 livres de contribution exigées pour être éligible aux places de la municipalité. « La mère de M. Herremberger en a fait sa déclaration. « Les commissaires n’ont pas cru devoir prendre sur eux de prononcer sur cette élection, et l’ont soumise à l’Assemblée nationale. « Sansdoute, les commissaires du roi ont ignoré que le comité de Constitution, consulté plusieurs fois sur cette question, a répondu : « Que les frères communiés et les fils de famile à qui le père a donné une propriété, dont il s’est néanmoins réservé l’usufruit, sont censés payer une partie de l’imposition directe portée sur les rôles, sous le nom du père, de l’aîné des usufruitiers ou du chef de la communion ou communauté. » « Les commissaires ont encore ignoré que cet avis du comité de Constitution était maintenant une loi, puisqu’un décret du 29 mai s’explique en ces termes : « Pour déterminer la qualité de citoyen actif, il faut avoir égard, non seulement à la capitation et aux impositions territoriales, mais encore aux taxes pour la milice et l’industrie , et aux impositions affectées sur les biens communaux, lesquelles doivent être considérées comme des impôts directs. » « Comment est-il possible qu’après une décision aussi précise, et lorsqu’il était prouvé que le maire nouvellement élu payait, et au delà, la taxe exigée sur les biens qui sont communs entre sa mère, ses sœurs et lui, les commissaires aient hésité à proclamer l’élection? « Les officiers municipaux, collègues de M. Herremberger, dans sa disgrâce et dans l'épreuve qu’il fait de nouveau de la confiance de ses concitoyens, ne se permettront pas d’en dire davantage en faveur de son élection. M. Herremberger n’entreprendra pas davantage de la défendre; il attendra dans le silence la justice que l'Assemblée daignera lui rendre : quel que soit le jugement qui prononcera sur cette élection, ses collègues et lui se féliciteront d’avoir paru dignes à leurs concitoyens de leur confiance, lors même qu’ils paraissaient devoir être oubliés, et d’avoir à présenter à l’Assemblée nationale une nouvelle preuve que leurs intentions ont toujours été dirigées vers le bien public. « Je ne dois pas omettre de parler de l’aristocratie du commandant de la garde nationale; il nous a toujours empêchés de porter la cocarde : nous avons tout au plus cent aristocrates dans la ville. Pour moi, je me suis toujours montré un des plus zélés partisans de la Révolution. » M. le Président. L’Assemblée nationale prendra en considération les motifs que vous venez de lui exposer; vous pouvez vous retirer. M. 'Vieillard, rapporteur. Tout ce qui vient d’être dit dans l’affaire de Schelestadt ne détruit pas le compte rendu. S'il était nécessaire de rentrer dans la discussion, je prouverais facilement que le maire s’est toujours mis à côté des faits. Le comité est informé que tous ses officiers municipaux viennent d’être nommés de nouveau, à l’exception de celui qui, pour avoir soutenu la cause des prisonniers, a été excepté do se rendre à la barre. (L’Assemblée ordonne le renvoi du mémoire de la municipalité de Schelestadt au comité des rapports.) M. le Président annonce que le résultat du scrutin pour la nomination d'un nouveau président, a donné 221 voix à M. Treilhard, 140 à M. Richier, et 120 à M. de Mirabeau l’aîné. Les nouveaux secrétaires sont MM. Rewbell, Boutteville-Dumetz et l’abbé Goster. Sur une adresse qui lui est présentée l’Assemblée rend ensuite le décret suivant : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu la lecture de l’adresse des commuues de Retters-hoffey, Oberbetschdorf, Oberbausberg, Hirteis-heim, Sirdenheim, Mittehausberg, Quatzenheim, Psulgriesey, Mandolsheim, Schiltigheim, Akbols-heim, Wolfisheim, a vivement applaudi au patriotisme qu’elle exprime, ainsi qu'à la soumission qu’elle contient d’acquérir les biens nationaux situés dans leurs territoires. L’Assemblée a ordonné qu’il serait fait une mention honorable de cette adresse dans le procès-verbal, et que le nom de ces communautés y serait inscrit. » M. le Président. L'ordre du jour est maintenant la discussion de l'affaire d' Orange. M. deBroglie. Avant de vous rappeler le point auquel vous avez laissé hier l’affaire d’OraDge, je dois vous annoncer que le vœu du comité est de vous engager à prendre le même parti que vous avez pris pour les colonies, c’est-à-dire à nommer, parmi les membres de l’Assemblée, un comité de six membres, pour s’occuper exclusivement de cette affaire. — Il nous a été fait lecture hier de la lettre du maire d’Orange, par laquelle il nous apprend que le service devient de jour en jour plus pénible à Avignon, que la misère y est à son comble et qu’il est même à craindre que les malheurs de cette ville ne réagissent sur Orange; je vais vous donner une seconde lecture du projet de décret que je vous ai présenté hier au nom du comité des rapports. « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le compte qui lui a été rendu par son comité des rapports, des lettres et procès-verbaux en date du 7 juillet, adressés par M. le maire et MM. les officiers municipaux d’Orangè, a décrété et décrète que son Président, se retirera par-devers le roi, à l’effet de supplier Sa Majesté de donner les ordres les plus prompts pour qu’il soit envoyé à Orange le nombre de troupes de ligne qui sera jugé nécessaire pour veiller au maintien de la tranquillité publique et à la sûreté de cette ville. M. Bouche. La cause des troubles d’Avignon est connue et je pense qu’elle vous honore; c’est le désir de vivre sous votre Constitution . qui cause son agitation passagère. Le comtat Yenaissin