328 |Conv*ntion nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES j ir Les citoyens de la commune de Piscop, dis¬ trict de Gonesse, font passer à la Convention na¬ tionale deux arrêtés qu’ils ont pris, le premier tendant à échanger les ustensiles de leur église contre des assignats,* le second enjoint au mi¬ nistre du culte d’expliquer, les jours de décade, la Constitution républicaine et les Droits de homme. L’insertion au « Bulletin » est décrétée (1). Suit un extrait du registre des délibérations de la commune de Piscop (2). Extrait du registre des délibérations de la com¬ mune de Piscop, département de Seine-et-Oise, district de Gonesse, municipalité de Piscop. Les citoyens de la commune de Piscop ont l’honneur de représenter à la Convention l’arrêté ci-dessous : Aujourd’hui, deuxième jour de la troisième décade du mois de brumaire, l’an second de la République française, une et indivisible. Nous maire, officiers municipaux, procureur et con¬ seil général de la commune de Piscop, assemblés en la maison commune, avons arrêté que ladite commune demande à être autorisée à échanger son seul calice avec sa patène, son seul soleil, deux burettes et un plat d’argent, contre des assignats républicains pour ladite valeur être employée à la réparation urgente des chemins ruraux et des fontaines et autres qui sont à la charge de ladite commune qui ne possède aucun bien communal pour subvenir à ses nécessités. Fait et arrêté à Piscop, les jour, mois et an ci-dessus et avons signé.: Pinard, maire; Cointereau et Lavigne, officiers municipaux, Michon, procureur de la commune; Pierre Rémond, Lunel, Cochet, Hébert, François Vaché, Gou-GET, AüFFRAY. Pour le secrétaire, Recureux. A la même séance, avons arrêté que, confor¬ mément à la loi qui ordonne la nouvelle division de l’année en douze mois égaux, et les mois de trois décades, il serait à l’avenir célébré pour tout jour de repos chaque décade fixée par la loi. Qu’en conséquence le ministre de notre culte se réunirait avec nous pour y satisfaire et que, dans cette réunion, il se charge de nous expliquer les droits de l’homme et nous faire sentir les avantages de la Constitution républicaine que les représentants du peuple français viennent de lui donner. Fait et arrêté en la maison commune de Piscop, les jour, mois et an ci-dessus, et avoïis signé. Collationné conforme au registre, par moi (I) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 214. (2) Archives nationales, carton C 285, dossier 830. soussigné sècrétaire-greffier de la municipalité de Piscop, les jour, mois et an que dessus. Recureux, secrétaire-greffer. Les membres du comité révolutionnaire de la commune de Meaux font passer à la Convention nationale un arrêté par lequel ils renoncent à tous cultes religieux, auxquels ils ont substitué celui de la raison et de la philosophie; ils remer¬ cient la sainte Montagne de ses grandes et vigou¬ reuses mesures, et la conjurent à rester ferme à son poste jusqu’à ce qu’elle ait terrassé et anéanti les traîtres, les brigands, les aristocrates. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre d'envoi (2). Les membres composant le comité révolutionnaire de la commune de Meaux, au citoyen Président de la Convention nationale. « Salut et fraternité. « Meaux, 1er frimaire, l’an II de la Répu¬ blique française, une et indivisible. « Citoyen Président, « Nous te faisons passer copie de l’arrêté que nous avons pris hier, contenant notre abdication de tous cultes religieux et notre adoption de celui de la raison et de la philosophie. Nous te prions de vouloir bien communiquer cet arrêté à la Sainte Montagne, et de l’assurer que nous ne cesserons de faire la guerre et de donner la chasse aux traîtres et aux aristocrates qui nous environnent encore, que lorsque nous n’en con¬ naîtrons plus. Nous te prions aussi, citoyen Président, de dire à la Sainte Montagne que nous la remercions de ses grandes et vigoureuses mesures et que nous la conjurons de rester ferme à son poste jusqu’à ce qu’elle ait terrassé et anéanti les traîtres et les brigands, les aris¬ tocrates, etc. « Nous sommes, citoyen Président, tes con¬ citoyens. « C. Méchin; D archet G-ouest; Pelletier; Dumet; Pouville; Royer; Jacquemin. » Arrêté (3). Extrait du registre des délibérations du comité révolutionnaire de la commune de Meaux. Séance du trente brumaire, l’an second de la République française, une et indivisible. Le comité, considérant que les cultes religieux sont intolérants, nuisibles aux hommes en ce qu’üs les tiennent dans l’erreur, dans l’esclavage (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 214. (2) Archives nationales, car. G 285, dossier 830. (3) Ibid. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. { 9 fnmaire an il 329 des prêtres et des despote? et qu’ils ne peuvent être pratiqués que par des fourbes ou des ignorants ; Considérant que le peuple français, devenu libre et républicain par l’énergie de son courage, ne tarderait pas à retomber dans ses anciens fers s’il n’avait la sagesse d’abdiquer ces cultes et d’oublier leurs vaines et ridicules cérémonies, Arrête, à l’unanimité, qu’il renonce à toutes espèces de cultes religieux auxquels il subs¬ titue celui de la raison et de la philosophie qu’il suivra désormais. Arrête en outre que copies du présent arrêté seront envoyées au district, à la municipalité et aux Sociétés populaires dé cette commune, même à la Convention nationale. Et ont les membres, signé. Pour copie conforme au registre : C. Méchin, pour l’absence du secrétaire. Carrier, représentant du peuple près l’armée de l’Ouest, écrit de Nantes qu’on y a célébré la fête de la dernière décade de brumaire, avec cette simplicité touchante, mais avec cet enthou¬ siasme ravissant qu’inspire l’amour de la liberté; que les bustes de Marat et Lepeletier y ont été portés, qu’un autodafé des dépouilles de la supers¬ tition, et des paperasses de l’ancien régime, y a été allumé par un vieillard; que les cris de : Vive la République ! vive la Montagne! se sont fait entendre avec force; il ajoute que partout le peuple aime la liberté; qu’elle est gravée dans son cœur par la main de la nature : il ne faut que savoir en développer l’élan pour l’élever à la hauteur de la Révolution. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre de Carrier (2). Carrier, représentant du peuple français, près l’armée de l'Ouest, à la Convention nationale. « Nantes, le 1er jour de brumaire (sic) (3), l’an II de la République, une, indivisible et impérissable. « Citoyens mes collègues, « Enfin la raison triomphe et les préjugés disparaissent. On a célébré à Nantes la dernière décade de brumaire avec cette simplicité tou¬ chante, mais avec cet enthousiasme ravissant qu’inspire l’amour de la liberté. « Des vétérans ont ouvert launarche, portant un faisceau de piques, ils étaient suivis d'un groupe de femmes, de vieillards et d’enfants. « Suivait la déclaration des droits de l’homme portée par des sans-culottes, suivis d’une mu¬ sique guerrière et nationale. « Plusieurs femmes, portant des cornes d’abon-(1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 215. (2) Archives nationales, carton C 283, dossier 798. Aulard : Recueil des actes et de la correspondance du comité de Salut public, t. 8, p. 598. (3) Il faut évidemment lire : « 1er frimaire.., » dance, entourées d’enfants qui semblaient rece¬ voir leurs dons, offraient un spectacle simple mais intéressant. « Une charrue contenait un vieillard tenant dans ses mains une gerbe de blé, ayant à ses côtés des petits sans-culottes et foulant à ses pieds tous les livres des anciens mensonges, des titres de noblesse, de fanatisme et d’aristocratie. « D’autres enfants portaient, autour de la charrue, les instruments de l’agriculture; le vieillard tenait en main le bout d’un grand ruban tricolore qui entrelaçait également les présidents de toutes les administrations et celui de la Société populaire de Vincent -la-Mon-tagne; le consul d’un peuple allié, un de nos frères anglo -américains, portait l’autre bout du ruban. Cette réunion suivait et entourait la charrue. « Le buste de Marat, porté par un municipal des campagnes, accompagné du peuple mar¬ chant sans distinction, suivait immédiatement. Le buste de Le Peletier était porté ensuite dans les mêmes dispositions. « Un groupe représentant la destruction du fanatisme paraissait immédiatement; des sans-culottes y portaient des évêques, des madones, des saints de toutes les couleurs renversés du haut en bas; des citoyens portaient des torches pour allumer le feu patriotique qui allait les consumer. « Un membre de chaque administration, un sans-culotte officier et un sans-culotte soldat, se tenant par le bras, marchaient sans distinc¬ tion de rang. « Ce rassemblement était partagé par de petits groupes de saints renversés et entourés de tambours. La marche était terminée par le peuple en masse. Arrivé à la colonne de la liberté, elle a été entourée par les sans-culottes et l’on a entonné l’hymne de la liberté, au son de la musique nationale. « Arrivé à la place du département où un bûcher était préparé, le vieillard est descendu de sa charrue, entouré des petits enfants, a allumé cet autodafé nouveau qui recevait les saints, les évêques, les madones et toutes les paperasses de l’ancien régime que les sans-culottes y jetaient à l’envi. « Au moment où le feu consumait ces ves¬ tiges de la tyrannie et du fanatisme, le peuple a entouré une montagne élevée vis-à-vis le bûcher. Au pied de cette montagne était un marais fangeux qui a été foulé par les pieds des républicains. Sur cette montagne ont été déposés tous les signes de la Révolution portés dans la fête. Le peuple surtout a fixé ses regards sur le tableau de l’assassinat de Marat qui était à l’un des côtés de la montagne et sur le tableau de l’assassinat de Le Peletier, qui était à l’autre côté. Des discours à la mémoire de Marat ont été prononcés par le président de la Société populaire et celui du département, l’air a re¬ tenti des cris mille et mille fois répétés de i Vive la République ! vive la Montagne ! Une carmagnole générale a fini la fête du matin. « La Société Vincent-la-Montagne avait pro¬ mis aux sans-culottes que le jour de la der¬ nière décade du mois de brumaire serait un jour de fête; on avait vu pendant trop de siècles les artistes vendre leurs talents à l’oisi¬ veté des rois, à l’impudeur des courtisanes, il fallait enfin que les théâtres ouverts trop long¬ temps, de par le roi, le fussent enfin, de par le peuple; ses ennemis n’avaient pas manqué