274 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMEÎS 1 AIRES, seront? Quelle sera la durée de leurs fonctions? Ces points peuvent présenter une longue diversité d’upinions. Il me semble que le choix doit être fait par les corps élec oraux des départements ; il est évident que l'Assemblée nationale ne peut se charger de le faire. Mai tenant chaque corps électoral, après avoir nommé les nm mines de la législature, pourrait élire un membte du conseil d’exécutb n ; mais comme le nombre de 83 serait trop considérable pour composer le conseil, ces m mbres pourraient choisir entre eux le nombre dé. idé nécessaire, ou bien sans passer à cetie nouvelle élection, on pi urrail procéder à une ré ludion, et le sort déciderait des sujets, qui seraient du conseil. On pourrait faire usage d’une autre méthode, qui a été employée pour le choix des membres du tribunal de cassation. Après avoir déterminé le nombre d’individus qui uoit former le conseil, on mettrait les noms de tous les départements dans une urne; et les premiers qui sortiraient seraient ceux à qui ou attribuerait le droit d’élire ; les autres seraient ainsi, par la voie du sort, successivement appelés à nommer. Ce dernier procédé est celui auquel je m’arrête, attendu qu’il a déjà été accueilli par l’Assemblée. Le nombre des membres pourrait ê re fixé à 10, et l’exercice de leurs fonctions être limité à 2 années. Chaque corps électmal serait libre de les choisir dans toute l’étendue du royaume. Comme les membres du Corps législatif, ils seraient inviolables, et ne pourraient être recherchés pour aucun des objets relatifs à leurs fonctions. Voilà en abrégé le plan de l’organisation d’un conseil d’exécution électif. 11 est susceptible de plus grands développements ; mais je pense en avoir dit assez pour en faire sentir l’importance, les avantages, j’ajouterai l’indispensable nécessité daus les circonstances actuelles. J’ai l’honneur de vous proposer le projet de décret suivant : « Art. 1er. Le conseil d’exécution sera composé de 10 membres qui seront nommés par les corps électoraux des départements. « Art. 2. Les corps ébetoraux ne seront pas tenus de circonscrite leurs choix dans les limites de leurs départements , iis pourront les étendre sur tous les citoyens de l’Empire. « An. 3. L’Assemblée nationale tirera au sort les 10 dépar ements qui choisiront les premiers, et les autres seront successivement appelés par la mè ne voie à élire lorsqu’il sera question de faire de nouveaux choix. « Art. 4. Les membres nommés seront en place pour 2 années, sans pouvoir être prorogés sous aucun prétexte. « Ari. 5. Les membres de ce conseil seront inviolables, et ne pourront être recherchés pour les opérations relatives à l’exercice de leurs fonctions. « Art. 6. Le roi sera le chef de ce conseil. « Art. 7. Aucune uécis on ne sera pose dans le cons il qu’à la majorité des voix, et il devra être composé d’an motus 7 membres. « Art. 8. Les ministres y seront admis avec voix consultative. » 114 juillet 1791. j DEUXIÈME ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU JEUDI 14 JUILLET 1791, AU MATIN. Opinion de M. Malouet sur cette question : LE KOI PEUT-IL ÊTRE MIS EN JUGEMENT? (1) M<’s Meurs, l’avis énoncé par vos comités et les dispositions de l’Assemblée suffiraient pour nous pr server du danger des nouvelles opinions sur la s tuation du roi et le caractère essentiel do la royauté, si ce n’était déjà un malheur d’avoir à les combattre. Ce n’e.-t pas assez maimenant d’attaquer, il faudrait, pour la tranquillité de l’Empire, éteindre tout à fait ce nouveau fanatisme, plus dangeieux, plus dévastateur que celui de ia superstition. Mais vous □'abandonnerez point les destinées de cet Empire aux systèmes de ces hommes hardis, qui, dédaignant la sagesse et l’expérience des Mècles, ne trouvent de sagesse que dans leur frésomp-tion et leur audace; qui oseraient reconstruire sur de nouveaux fondements l’édifice social, et ne craignent point de nous offrir leur parole et leurs systèmes, comme le gage assuré du repos et du bonheur de 25 millions d’hommes. Entourons-nous, Messieurs, de pl is solides appuis : la liberté appartient aux hommes sages et courageux qui savent s’en saisir, mais elle n’habiia jamais le pays des chimères et des exagérations coupables : or, ce sont là les bases du système que je combats. L’àMs plus sage de vos comités présente cependant quelques principes que je n’admets point dans toute leur latitude, ni dans leur réticence; mais je m’unis à leur intention, qui est de conserver la liberté, la m< narcliie. Eh ! pourquoi faut-il, Messieurs, que, dans nos dissentiments, vous ne comptiez pas pour amis tous ceux qui veulent aussi la liberté, ia mo-narch e? Avons-nous d’autres ennemis que ceux qui veulent attaquer l’une ou l’autre? Vous voulez conserver la monarchie I Ne laissez donc pas prendre poste à ses ennemis ; ne souffrez pas le renversement des principes conservateurs de la monarchie; car ils sont aussi, pour une grande nation, les principes conservateurs de la liberté! Pourquoi permettriez-vous que, dans la circonstance où nous sommes, on posât de nouveaux principes contradictoires à ceux que vous avez consacres vous-mêmes, et auxquels nous avons tous juré d’être tidéles? Par quel abus de raisonnement se permet-on d’appeler principes toute proposition nouvelle qui détruit les maximes fondamentales de votre Constitution ! Ne cherchez pas davantage clans ia théorie des conventions internationales, qui nous est peu connue, ni dans l’histoire des révolutions des Empires, des exemples ou des règles de conduite applicables au cas où nous sommes; celte circonstance est unique daus les annales du monde : Louis XVI est le premier roi qui, environné dès son berceau du prestige du trône et du pouvoir absolu, en ait volontairement abjuré l’investiture. Avant vous, pourriez-vous l’oublier! il a reconnu, tans provocation, le droit du peuple (1) Voy. ci-dessus, même séance, la discussion sur cet objet. [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 juillet 1791. J à une Constitution libre. Avant vous, il a solennellement déclaré les bases essentr lies de toute Constitution libre. Qu’on cherche? maintenant parmi les princes oppresseurs, qui ont excité la juste in lignation des peuples, qu'on cherche celui qu’on pourrait, avec quelque pudeur, comparer à Louis XVI : et c’est là le monarque qu’on nous propose d’accuser et déjuger, parce qu’il a quitte Paris avec sa famille le 21 juin! La fuite du roi, vous dit-on, a mis en péril le salut public, et nous exposait à la guerre civile. Mais s’il voulait la prévenir; si, en pourvoyant à sa sûreté, il voulait empêcher les malheurs que présageait sa captivité et les outrages qu’il avait essuyée ; si telle était la pureté de son cœur et la droiture de ses intentions, qu’il soit plus facile de les justifier avec évidence, que de les inculper avec quelque vraisemblance, qui peut oser et de quel délit ose-t-on accuser le roi? Vos comités ont avec raison séparé le fait matériel légitime ne peut cesser d'ê're son image vivante qu’au moment où il se déclare l’ennemi de tous, et où ions se déclarent ses ennemis. Si ces observations sont justes, et je les crois conformes à la plus saine politique, à la doctrine des publicistes les plus célèbres, à quelle distance sommes-nous de la vérité et de la justice ? Vous avez un décret relatif à la sortie du roi hors du royaume: vous y êtes-vous conformés? Et quel motif peut justiiier la violation, par vous-mêmes, de vos propres décrets, lorsqu’ils sont même tellement rigoureux à l’égard du monarque, qu’aucun peuple libre n’a encore cru de telles mesures nécessaires au maintien de la liberté ? Le roi supposé sur un territoire étranger doit être invité à rentrer dans le royaume, ava t que le Corps législatif soit autorisé à faire aucunes dispositions nouvelles pour le gouvernement. Le roi a été arrêté sur le territoire français, et non seulement il n’e-t point prouvé qu'il eût Tentention de passer en pavs étranger, mais, outre la déclaration de Sa Majesté, il y a des preuves positives que le roi voulait se retirer à Montmédy; qu’il a défendu d’employer la force pour fa?oriser sa retraite; qu’il a contremandé le détachement qui arrivait, à Varennes, à son secours; et cependant ce. monarque est encore captif dans son palais. C’est le premier roi des Français prisonnier dans ses Etats... 11 est prisonnier : il est suspendu de l’exercice de l’autorité royale, et l’on délibère en ce moment pour savoir s’il sera accusé et jugél [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLE31ENTAIRES. [14 juillet 1791.] 276 Quel serait donc le pouvoir qui prononcerait ’ ainsi sur un autre pouvoir suprême? C’est, dit-on, le pouvoir constituant, qui a droit de tout détruire, de tout suspendre, pour tout réédifier. Messieurs, c’est la latitude effrayante qu’il vous a plu de donner à ce que vous appelez le pouvoir constituant, qui a produit les terribles conséquences auxquelles la majorité de cette Assemblée croit devoir aujourd’hui résister. Daignez donc examiner, dans le secret de vos consciences, la nature et les limites des pouvoirs que vous avez reçus; c’est sans doute celui de faire une Constitution ; ruais ce pouvoir communiqué ne peut être exercé de la même manière, avec toutes les conditions, restrictions ou ampliations qui y ont été mises. Je dis que ce pouvoir n’est rien, s’il n’est autre chose que ce qui a été transmis par les constituants , et que, dès qu’ils ont exprimé leur vœu, c’est dans l’expression de ce vœu qu’il faut chercher la nature et les limites du pouvoir transmis. Je réponds que, lorsque vous avez annulé les mandats impératifs, vous n’avez pu vous appuyer que sur le seul principe, qu’une portion des commettants, la minorité, ne pouvaient autoriser les mandataires à résister au vœu de la majorité; mais vous n’avez pas pu supposer cet autre principe, qui serait absurde, que la majorité des mandataires peut exercer des pouvoirs qu’elle n’a pas reçus de ses commettants. Or, certes, vous n’avez pas reçu celui d’effacer, d’annuler, de suspendre l’autorité royale; et lorsqu’on nous a chargés d’en arrêter les abus, c’est en nous ordonnant expressément d’en arrêter les bases. Tel est le vœu de tous les mandats nationaux; tel est l’esprit de tous les décrets que vous avez rendus jusqu’à cette époque. Une idée fausse, une grande erreur en a occasionné beaucoup d’autres. On paraît croire qu’il était réservé à ce temps-ci d’avoir des idées justes sur la royauté. On veut persuader au peuple que la royauté est un abus né des excès de plusieurs autres abus. C’est ainsi qu’on égare les hommes grossiers, et même ceux qui ne connaissent pas parfaitement les monuments historiques. Toutes les sociétés ont commencé par les institutions simples, qui convenaient aux mœurs antiques, et dont on veut si cruellement abuser aujourd’hui. L’histoire nous atteste que, chez la plupart des peuples connus, le premier mode de gouvernement fut républicain. A mesure que les cités s’agrandirent et que les hommes se multiplièrent sur un plus vaste territoire, ils reconnurent l’avantage et la nécessité de se soumettre au gouvernement d’un seul, en en déterminant les formes et les conditions. La royauté fut alors instituée dans toute sa pureté. Le plus ancien des historiens et des poètes philosophes nous la présente telle que la philosophie moderne n’atteindra jamais à la sublimité de son pinceau. Dans les temps les plus rapprochés de nous, le règne de Charlemagne nous offre un plus vaste tableau des droits des peuples, conciliés avec l’autorité des rois. Enfin, de nos jours, tous les éléments de la liberté et de la prospérité publique ont été si bien combinés avec ceux de la royauté par les Anglais, que leur Constitution les élève à un degré de splendeur et de puissance auquel les Grecs et les Romains ne sont jamais parvenus. Ainsi le3 hommes qui prétendent à quelque célébrité n’y parviendront pas en nous apprenant aujourd’hui que les rois n’ont point été constitués les propriétaires et les despotes, mais les chefs et les gouverneurs du peuple. Lorsque leur pouvoir est devenu arbitraire et illimité, et qu’ils ont voulu le maintenir sans égard aux droits des peuples, ceux-ci ont pu secouer un joug plus onéreux que celui qu’ils s’étaient volontairement imposés; et alors, ou ils ont chassé les oppresseurs et se sont soumis à d’autres princes à de meilleures conditions, ou ils se sont constitués en République. C’est là proprement ce qu’on appelle une Révolution. Mais quelle était la situation et la volonté générale du peuple français à l’époque où il vous a nommés ses représentants? A cette époque, le mooarque prévenait les vœux du peuple, et reconnaissait ses droits; il abjurait le pouvoir absolu que lui avaient transmis ses prédécesseurs, et posait lui-même les fondements d’une Constitution libre. C’est au milieu de ces mouvements si touchants de la justice du prince et de la reconnaissance du peuple, que nous avons été envoyés pour arrêter les articles du nouveau pacte, et pour reconnaître l’autorité royale dans sa pureté 1 rimitive ; mais non pour l’instituer, et encore moins pour la suspendre. Le peuple n’entendait donc rien disputer au prince, de toule l’autorité qui lui était nécessaire pour le salut public; et le prince n’entendait rien usurper sur le peuple, de tout ce qui lui élait utile pour le maintien de sa liberté, dont il se déclarait le restaurateur. Ainsi il n’existait point de division entre la nation et son chef; ils s’approchaient l’un de l’autre avec une confiance mutuelle, on était d’accord sur les droits respectifs, il ne s’agissait plus, des deux parts, que de poser les limites. Tels sont les auspices sous lesquels nous nous sommes réunis; et malgré tous les changements qui se sont opérés, nous ne pouvons pas changer le point duquel nous sommes partis. Tout ce qui a pu être fait sans porter atteinte à l’indépendance du trône, sans altérer l’essence du gouvernement monarchique, peut être implicitement ou explicitement dans nos pouvoirs : tout ce qui y serait contraire est évidemment hors de nos pouvoirs. Il n’y a point d’adresse, de clubs ou de municipalités qui puissent changer cet état primitif, et quelle que soit aujourd’hui la volonté des uns et la terreur des autres, l’expression du vœu national n’existe encore légalement, pour nous, que dans nos mandats; c’est là qu’il faut chercher le pouvoir constituant que vous avez droit d’exercer, et nous en trouverons les limites. Assurément, Messieurs, nous les avons dépassées dans les mesures qui ont été adoptées relativement au départ du roi ; et nous les dépasserions encore, si nous nous bornions à déclarer qu’il n’y a pas lieu à accusation contre le roi. Pour assurer la tranquillité de l’Empire, il faut ici déclarer netlement le principe fondamental de la monarchie, le principe sans lequel elle ne peut exister : c’est que le roi, dans aucun cas, ne peut être mis en jugement. Le roi et le Corps législatif sont la souveraineté en action: hors de là, elle n’existe qu’en abstraction, et si vous l’accumulez dans une cir- [Assemblée nationale.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [lf juillet 1791.] constance quelconque sur l’une des deux parties qui Ja constituent, vous aurez alternativement un gouvernement républicain ou despotique, et vous n’aurez point de Constitution. A ce principe, il n’est point d’exception qui ne mette en péril la société tout entière; car, si vous admettez une seule exception, l’indépendance du trône, la sûreté du monarque se trouvent à la merci de chaque faction dominanle ; tous les argumentateurs, tous les clubs, tous les sophistes du royaume seront sans cesse en mouvement pour prouver que le cas de l’exception est ou n’est pas arrivé; et ce qui se passe dans ce moment-ci se répétera à chaque règne, et peut-être plusieurs fois à chaque règne. Ce que nous voyons dans ce moment-ci est un exemple bien effrayant du despotisme des erreurs, lorsqu’elles obtiennent la faveur et l’appui déjà multitude. Écoutez-moi, Messieurs, sans préventions, sans murmures, si vous voulez que l’on croie que nous sommes libres, si c’est la liberté que vous voulez. Un cri d’indignation s’est fait entendre sur le départ du roi, et cette action a été qualifiée de la manière la plus odieuse. Cependant je suppose qu’en vous écartant des règles ordinaires de la justice, vous ne veuillez pas considérer le fait isolément, mais aussi l’intention: je vous demande si c’est au prince qui a le premier offert au peuple la liberté, que vous devez supposer l’intention de la lui ravir. Je vous demande si le caractère et les moeurs de Louis XVI vous permettent de lui supposer, contre la nation, des projets d’oppression. Et lorsqu’il se présente des inductions plus favorables, plus analogues aux principes, au caractère connu du monarque, n’y aurait-il pas autant d’injustice que de déraison, à les rejeter, pour s’attacher aux conjectures les plus odieuses, quoiqu’elles soient dénuées de preuves? Mais la protestation du roi, comment la justifier? Ici, Messieurs, je dirai franchement mon opinion sur la conduite du roi ; mon respect profond pour sa personne et sa position ne me feront point trahir la vérité. Depuis l’ouverture des états généraux, il est peu de mesures prises par le conseil du roi, que j’aie approuvées; la conduite des ministres a presque toujours été faible et incertaine; vous les avez tellement accablés du poids de votre puissance, qu’ils ne savaient ni résister, ni céder, et qu’ils ont fait plus d'une fois partager au roi l’embarras de leur contenance. Du moment où vous avez exigé que les lettres particulières et les observations du roi ne vous parvinssent que sous le contreseing et la responsabilité d’un ministre, le monarque n’a plus eu, dans ses communications avec vous, de volonté qui lui fût propre; et s’il en avait eu une que les ministres eussent supposée vous être désagréable, ils auraient craint de vous la transmettre. Ainsi l’extension que vous avez donnée à la responsabilité en l’appliquant aux communications intérieures, aux explications du monarque avec le Corps législatif, a été un premier voile interposé par vous-mêmes entre les opinions personnelles du roi et celles de son conseil. Je suis loin d’approuver que le roi ait adhéré sans réclamation à une pareille mesure ; il s’est privé par là des moyens d’être franc avec vous ; et il était important qu’il se conservât le droit de 277 vous parler librement, sans craindre de compromettre ses ministres. Je suppose maintenant que le roi ait j ugé mauvais quelques-uns de vos décrets; et vous n’ignorez pas que des gens sages et éclairés dans tous les partis n’approuvent pas tout ce qui est décrété; je suppose que le roi ait vu, dansl’ensemble du nouveau régime, des difficultés, des entraves, des obstacles au maintien de l’ordre; si c’était là son opinion intime, pouvait-il vous la transmettre par l’intermède des ministres devenus responsables de son improbation, et craignaotsi fort de s’exposer à la vôtre? Lorsqu’un de ses ministres a oséappeler les soldats dans les clubs, et achever ainsi de détruire la discipline, le roi pouvait-il sans inconvénient renvoyer ce ministre? Je ne vous citerai point d’autre exemple; mais c’en est assez pour que vous ne doutiez pas que la volonté personnelle du roi, l’opinion libre de Sa Majesté n’a pu arriver jusqu’à vous dans tous les détails de ses relations législatives et administratives. Il n’en est pas ainsi des sentiments d'honneur et de devoir qui lient le monarque, comme tous les citoyens au salut public et à la liberté. Ainsi ce n’est pas le serment de protéger l’un et l’autre, contre lequel le roi a protesté; obligé de maintenir la Constitution consentie par la nation, le roi ne peut et ne veut sûrement pas se défendre de cette obligation. Mais il est fondé à croire que son acceptation doit être libre; qu’aucune espèce de contrainte ne doit environner son intervention dans le pacte solennel. Et osera-t-on soutenir que, depuis le mois d’octobre 1789, le roi a élé véritablement libre! Je ne rappellerai point ici les violences, les outrages faits au roi et à la famille royale; mais je dirai que leur impunité préparait les malheurs qui l’ont suivi. Je dirai que les instigateurs, les hommes vraiment coupables de la fuite du roi, sont les écrivains infâmes qui l’accablent journellement d’insultes et de menaces, qui essayent ainsi de désaccoutumer le peuple, du respect et de l’amour qu’il avait toujours eu pour son roi : cependant, quelque triste et forcée que fût la position de ce prince, je n’ai pas conçu, je l’avoue, qu’il ait signé, qu’il ait autorisé la publication de la lettre écrite en son nom aux ministres étrangers. Ce contraste frappant, entre la position effective du roi et ce qu’on lui fait dire, entre ses sentiments et ses paroles, est aujourd’hui un objet de reproches; mais que ces reproches s’arrèent sur ceux qui rendirent de telles mesures nécessaires à sa sûreté, qui violaient même la conscience du prince, et ne laissaient aucune issue, aucun asile à ses chagrins. Quoi qu’il en soit, je ne crains pas de le dire : j’eusse désiré qu'à travers les obstacles et les dangers, le roi ne prenant conseil que de sa dignité et de l’élévation de son â ne, vous eût fait connaître beaucoup plus tôt ses griefs, et fût venu réclamer au milieu de vous les droits sacrés qu’il avait à cette liberté si souvent proclamée et si souvent violée. Mais ici je crains d’avoir mal entendu l’indication d’une bien étrange opinion de vos comités ou de leur organe. — « Il ne serait peut-être pas déraisonnable, a dit, si je ne me trompe, M. le rapporteur, de soutenir que le roi n’a pas dû être libre jusqu'à l’achèvement de la Constitution. » S’il étau possibleque ce commencement d’opinion acquît quelque consistance à l’époque où nous sommes parvenus, je demande si, après une 278 [Assemblée nationale.] révolution qui tondait à sa fin, on veut en com-m nrer une autre, et à quel terme on prétend s'arrêter? Je demande à connaître le nouveau cercle d’idées, de doctrine et de principes que nous sonim-s destinés à parcourir? Et qu lie est donc cette invisible autorité qui s’ét bltt ainsi au milieu de nous, pour renverser, quand bon lui semble, toutes les maximes politiques et morales, jusqu’à présent consacr.es, et pour y substituer des oracles. Quoi! le monarque qui nous a convoqués, à la voix duquel nous nous sommes réunis, qui nous a ofn rt la liberté, recevrait ce nous-mêmes, pour prix de sa confiance, l’aveu q t’il n’est pas libre, qu’il ne doit pas l’être an milieu de < ous ! Ah ! mon cœur se soulève à cette pensée : mais quand la position de Louis XVI serait celle du prince d’Orange, appelé par les Anglais pour recevoir d’eux une couronne et un ■ Constitution à laquelle il était etrang r, au muins devrai'-il être traité comme le roi Guillaume. Et qo’auraitditle prince, si le parlement, à son arrivée, lui avait signifié qu’il n’était pas libre jusqu’à ce qu’il tût juré la Cha te constitution nelle? Je m’arr ête ici, Messieurs, etje n me permets ni l’inquiétude, ni le langage de la douleur; il m’est plus deux, il m’est nécessaire de me reposer avec, confiance sur votre sollicitude pour le repos de la France; il dépend encore de vous de faire cesser nos longues et cruelles agitations. Voulez-vous, malgré les orages qui nous environnent, arriver paisiblement à la fin de nos travaux ; voub z-vous la libmté et la paix, aecordez-là à tout le monde; qu’il n’y ait plus qu'une seule ciass-d’hommes ennemis de la chose | ubl que : ceux qui ne veulent ni la libeité, ni la i aix : que ceux qui provoquent la dé-organisation de la monarchiesoient misau nu ius sur la même ligne que ceux qui provoquent le retour de l’ancien régim ■. Mais l’espace qui se trouve entre ces deux exti êmes n’est-il pas occupé par des hommes lib es, quelles que soient leur.-, opin ons? Pourquoi donc seraient-ils ennemi-? He bien! ch st dans cet intervalle que vous trouverez le roi placé par ses principes, par son caractère et par tonte sa conduite anterieure. App'oclions-nous donc les uns des auires, et tous ensemble unissons-nous au roi : souvenez-vous que nous en sommes insépa ablos; vous l’ .vez décrété et on a mis des barrières entre vous et lui! Vous l’avez déclaré le restaurateur delà liberté , et il est pinvé de la-sienne ! Vous l’avez déc laré sacré et inviolable , et on dnlibère enc.oie sur le principe ! Je conclus à l’exécution de vus décrets. Signé : Malouet. P. S. — Tel est le discours que je me proposais de prononcer en réponseàcelui de M.Pélion. J’arrivai le jeudi avant l’ouvertuie de la séance, etje me lis inscrire le premier pour la paiole; elle me fut absolument refusée, par les considérations les plus graves, et auxquelles je me crus obligé de céder. Les patriotes les plus accrédités s’éta*ent chargés de défen ne le roi et la royauté; il ne convt naît pointa des proscrits comme nous, de répandre leur défaveur sur cette cause sacrée. Ou ada jusqu’à me rendre ri sponsubie des malheurs qui pouvaient en arriver. Je ne suis pas encore bien convaincu que le parti républicain lût tiès redoutable, je ne sais ce qu’il faut croire de tous ces mouvements si faciles à réprimer quand on le voudra sérieusement. Il m’est bieu démontré que le peuple s’échauffe et [14 juillet 1791. J se calme d’après les stimulants ou les calmants qu’on emploie. Quoi qu’il en soit, j’ai cédé très volontiers aux célèbres orateurs de la Constitution l’honneur de défend e en cette circonstance les principes mo-narchiques, et nous en avons obtenu au moins cet avantage, qu’ils ont solennellement reconnu la nécessiié de terminer la Révolution et les désordres qui en ont été la suite. Mais, en applaudissant au bien qu’ils veulent faire maintenant, je ne trouve pas le mal suffisamment réparé; je ne trouve pas que les vrais principes aient obtenu en celte circonstance les hommages qui leur sont dus et c’est ce qui me détermine à publier mon opinion. Signé : MàLOUET. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. TRONCIIET, EX-PRÉSIDENT. Séance du jeudi 14 juillet 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures du soir. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance du mardi 12 juillet au soir, qui est adopté. M. le Président fait donner lecture des pièces suivantes ; Lettre du sieur Georges , premier adjudant au vingt-troisième régiment de cavalerie , ci-devant Royal-Guyenne, où ce brave militaire exprime sa fidelité enveis la naion, son zèle pour V< xécu-tion des décrets; il promet de v< rser, s’il le faut, jusqu’à Ja dernière goutte de son sang pour le maintien de la üonsiiiution. Il a joint à sa lettre un assignat de 60 livres, qui est le dix ème de sa solde, pour concourir à la dépense extraordinaire que va occasionner la défense des frontières. Adresse du département du Gard. Il annonce que les imposiii ms de 1790 ont été payées avec exactitude, et il prie l’Assemblée de décréter qu’en attendant que o Iles de 1791 puissent être établies, il soit auto.'isé à percevoir provisoirement, dès le mois d’août, les deux tiers des impositions qui ont été payées en 1790. (Cette adresse est renvoyée au comité d’imposition.) Adresse des gardes nationales de Pont-à-Mous-son, où elles réitèrent le serment de verser, s’il le faut, tout leur sang pour le maintien de la Constitution. Lettre et arrêté du directoire du département des Hautes-Pyrénées , qui man Testent le zè e, le civisme et l’activité des admini-trateurs qui le composent, et les sages précautions qu’ils ont prises, soit pour maintenir la tranquillité publique et l’exécution des lois, soit pour déconcerter les entreprises des ennemis du de tans et du dehors. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur.