[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j SS”re“Æ 297 Extrait du registre des délibérations de la com¬ mune de Saint-For get (1). L’an deuxième républicaine une et indivisible, le quatre frimaire, dix heures du matin, Le conseil général de la commune assemblé et tous les citoyens et citoyennes convoqués par les magistrats du peuple réunis dans l’église, à l’effet de statuer sur la démission offerte par le citoyen Brochier de son titre curial et sur son abdication à toutes fonctions de ministre du culte catholique. La séance s’est ouverte par un discours dans lequel le citoyen Gadiffert, après avoir rappelé la sublime déclaration des droits de l’homme relative à la liberté des opinions, les sages lois de la Convention pour assurer l’exer¬ cice de ce droit sacré, la propagation des effets sublimes de la raison et de la vérité, a démontré l’inutilité du culte catholique, présenté l’exis¬ tence de ses:] ministres comme nuisible à la so¬ ciété, onéreuse au Trésor public, attentatoire à la liberté des opinions et en tout contraire à l’affermissement de la liberté et de l’égalité et subversive des principes fondamentaux de notre République. Ce discours était à peine fini que tous les citoyens et citoyennes formant la presque tota¬ lité de cette commune et qui composaient l’as¬ semblée, ont déclaré à l’unanimité : 1° qu’ils ne voulaient plus de curé; 2° qu’ils renonçaient à l’exercice du culte catholique; 3° que conformé¬ ment à la loi, leur église, le presbytère et dépen¬ dances étaient mis à la disposition de la nation, pour être employés de la manière la plus conve¬ nable en établissements plus utiles d’école pri¬ maire et d’hospice de charité. Cette déclaration, mise aux voix par les citoyens maire et officiers municipaux à plusieurs reprises, et dans l’ordre sus-énoncé, est acceptée sans aucune réclamation et suivie de la demande faite d’une députation à la Société populaire de Chevreuse, chef -heu de canton, pour lui faire part de la régénération à la raison de la commune de Saint-Forget, et l’inviter à l’imiter. Cette nouvelle proposition étant mise aux voix et adoptée, est faite celle d’une fête à la raison, à la liberté et à l’égalité, qui serait célébrée le décadi suivant et qui est aussi unanimement acceptée. Ensuite se présente le citoyen Brochier, âgé de soixante -cinq ans, lequel, conformément au vœu qu’il m’a manifesté hier, dépose sur le bureau ses provisions de curé et autres titres collatifs de bénéfices auxquels il a déclaré re¬ noncer ainsi qu’à l’exercice des fonctions de ministre du, culte catholique, qu’il a toujours rempli avec bonne foi et qu’il abandonne de même, la volonté du peuple et le salut de la patrie étant la suprême loi et la seule qu’il veut dorénavant avoir dans l’esprit et dans le cœur, déclarant qu’il ne peut nous remettre ses lettres de prêtrise parce qu’il ne les a pas, que ses lettres expédiées au secrétariat du ci-devant diocèse de Gap y sont restées, et a signé, Bro¬ chier. L’âge avancé du citoyen Brochier, sa bonne conduite dans la commune et sa renonciation à l’exercice de ses fonctions librement émise, lui mérite la reconnaissance des citoyens, et ras¬ semblée arrête que ce citoyen dénué de res-(1) Archives nationales, carton F 18 874, dossier Brochier. sources par sa démission est recommandé à la générosité nationale et qu’en attendant que la Convention en dispose il continuera d’occuper le ci-devant presbytère et ses dépendances; arrête en outre qu’extrait de ce que dessus sera délivré au oitoyen Brochier et le présent porté à la Convention nationale avec un calice d’argent et sa patène, ciboire, soleil, deur crémiers, une custode, une croix, le tout en argent pesant 14 marcs, plus un paquet d’étoffes et galons d’or et d’argent provenant de chapes, chasubles, étoles, pesant neuf marcs. Tous effets servant au ci-devant culte catholique dans cette commune pour servir à combattre, à pulvériser la tyran¬ nie et le fanatisme par les citoyens Roux, maire et Bouvet, procureur de la commune. Certifié conforme à l’original ce dix-sept fri¬ maire, l’an deuxième de la République, une et indivisible. III. Pétition des Sociétés populaires du dépar¬ tement de la Côte-d’Or, réunies a Dijon, POUR DEMANDER LA CRÉATION D’UN ÉTABLIS¬ SEMENT DE MUSIQUE DANS CHAQUE DÉPAR¬ TEMENT (1). Suit le texte de cette pétition, d’après V original qui existe aux Archives nationales (2). Les Sociétés populaires du département de la Côte-d'Or, réunies à Dijon, à la Convention nationale. « Citoyens représentants, « Dans un siècle à jamais mémorable, où la raison mère des lois est reconnue la divinité des hommes ; dans une République où les mœurs s’épurant sans cesse vont frayer à nos neveux la route de la félicité suprême, la mu¬ sique est non seulement nécessaire, mais in¬ dispensable. Platon a dit : point de musique, point de République. « La musique est l’art le plus sublime, elle donne des formes à la pensée, l’étend et la resserre à son gré; elle s’approprie toutes les modifications de la nature; elle peint le bruit et le silence, le calme et l’orage, l’espérance et la crainte, les douces jouissances et les angoisses déchirantes; elle est l’accent du sentiment; elle grave en caractères de feu les actes et les passions héroïques; elle nous mène à la gloire et nous ramène triomphants. Sa puissance magique embellit l’horreur des com¬ bats et par elle le Français, le Français libre, marche d’un pas sûr à l’immortalité. C’est par des hymnes patriotiques, c’est par les hauts faits qu’ils inspirent, que la liberté va désormais répandre ses douceurs d’un pôle à l’autre, et graver le bonheur dans les deux hémisphères. « Mandataires philosophes, pesez dans votre sagesse l’importanee d’un établissement de musique dans chaque département; en rendant (1) La pétition des Sociétés populaires du dépar¬ tement de la Côte-d’Or n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 20 frimaire an II; mais en marge de l’original qui existe aux Archives nationales, on lit l’indication suivante : « Renvoyé au comité d’instruction publique, le 20 frimaire an II. (2) Archives nationales, carton F10 10081, dos¬ sier 1303.