254 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j inove’rXe 1793 ' le 31 du mois dernier, déclarez -le déchu de cette place. « Délibéré à Tartas, le 17 octobre 1793, l’an II de la République française une et indivisible. « Poymiro, président ; Lafitte, secrétaire ; Baffoigne, secrétaire. » On admet à la barre une députation de la sec¬ tion des Arcis; un citoyen de cette section pré¬ sente une pétition tendant à changer dans la République le nom des communes, des rues, places, etc., en adoptant un système de nomen¬ clature d’après toutes les vertus nécessaires au soutien de la République. Le pétitionnaire offre une esquisse de ce système pour quelques quar¬ tiers de Paris. Mention honorable et insertion au « Bulletin » de la pétition et de la réponse du Président (1). Compte rendu du Bulletin de la Convention (2). Un pétitionnaire admis à la barre a prononcé le discours suivant : Représentants du peuple français, il est une maxime connue de tous les législateurs : « Point de mœurs, point de République. » Le citoyen P. Chamouland, de la section des Arcis, jaloux d’asseoir les vraies bases de la République fran¬ çaise, a médité sur les moyens d’y parvenir. Le résultat de ces réflexions est qu’en familia¬ risant le peuple avec la vertu, on atteindra cer¬ tainement au but désiré. Une inscription multipliée des noms de toutes les vertus, qui s’offrira sans cesse aux yeux du peuple; le langage de la vertu qu’il sera forcé d’avoir à chaque instant sur les lèvres, fera passer aisément dans son âme le goût d’une morale pure, et, par suite, l’heureuse habitude pour sa pratique; mais il faut que ce langage soit clair, simple, s’explique de lui-même; il faut enfin que ce langage soit vraiment popu¬ laire. Toutes ces conditions se trouvent rem¬ plies dans une idée qu’il a présentée au con¬ seil général de la commune pour la régénération des mœurs dans Paris, idée qui renferme un but moral et physique. L’auteur a cru devoir le généraliser pour le plus grand bien de sa patrie. En voici l’exposé exprimé d’une manière brève. La France sera regardée comme une espèce de livre moral ouvert; les communes, petites et grandes, seront divisées en arrondissements particuliers, dont chaque place publique sera le centre. Toute place publique représentera un chapitre de ce livre de morale, qui portera pour titre le nom d’une vertu principale, qu’on choisira analogue, soit à quelque époque remar¬ quable qui s’y sera passée dans notre Révolu¬ tion, soit à des établissements publics qu’elle renfermera dans son enceinte. Chaque rue, affectée à l’arrondissement de cette place, sera comme une section de chapitre de ce même livre de morale, et sera distinguée par le nom (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 311. (2) Supplément au Bulletin de-la Convention du 4e jour de la 2e décade du 2e mois de l’an II (lundi 4 novembre 1793). d’une vertu, sœur de la vertu principale-, l’ad¬ jectif républicain accompagnera les noms des divers ponts, postes, barrières et routes de tous ces endroits, les rues exceptées, afin que ce mot rappelle sans cesse au peuple que le vrai répu¬ blicain doit posséder telle ou telle vertu. Quoique cette idée soit très simple, l’auteur va la rendre encore plus sensible par quelques exemples particuliers pris dans Paris. Le Palais national s’appellera, par exemple, Temple ou Centre du républicanisme; qu’on ne se serve plus de ces mots : palais ou hôtel ; ils ne conviennent point à la simplicité républicaine. La place du Parvis-Notre-Dame se nommera place de l’Humanité; l’Hôtel-Dieu, Temple de l’ Humanité républicaine; la place du Palais, place de la Justice; la Halle, place de la Fru¬ galité républicaine, etc... En passant maintenant aux rues d’arron¬ dissement, par exemple à celles de la place de la Justice, on y rencontrera la rue de la Sévérité, de l’Impartialité, de l’Équité, etc.; enfin, de toutes les vertus qui auront un rapport direct avec la justice. De même, pour la place de la Frugalité républicaine, il y aura, à chaque ins¬ tant, le mot d’une vertu dans la bouche, et bientôt la morale dans le cœur. Rappelez-vous, législateurs, cette belle maxime de Condillac : Nous ne pensons qu’avec le secours des mots. Le but physique de cette idée est aisé à sentir. Un citoyen ne connaîtra pas Paris ou toute autre commune. Il aura besoin, par exemple, dans la rue de la Tempérance; il saura que cette rue ne peut être que dans l’arrondisse¬ ment de la place de la Frugalité, parce que la Tempérance est sœur de la Frugalité. Il ne lui sera pas alors difficile de se diriger vers le point où. ses affaires l’appelleront. Béponse du Président. Vous avez conçu une idée grande et qui honore tout à la fois votre âme et votre génie. C’est surtout dans ce moment, où la raison s’occupe d’effacer les caractères de la supers¬ tition et de l’erreur, qu’il importe d’imprimer partout ceux de la vertu. Citoyen, vous avez dit une vérité éternelle : sans mœurs, point de félicité publique, point de liberté. La Conven¬ tion nationale applaudit à votre civisme et à votre patriotisme, et vous accorde les honneurs de la séance. Compte rendu du Moniteur universel (1). Une députation de la section des Arcis est admise à la barre. E. Chamouleau, orateur de la députation (2). Il est une maxime incontestable, connue de tous les législateurs : point de mœurs, point de République. En familiarisant le peuple avec la vertu, on fera passer aisément dans son âme le goût d’une morale pure, et par suite l’heu¬ reuse habitude pour sa pratique. Pour arriver à ce but, il propose de faire faire au peuple un (1) Moniteur universel [n° 46 du 16 brumaire an II (mercredi 6 novembre 1793), p. 186, col. 2]. (2) Auteur du Plan d'un établissement national d'humanité, etc. (Note du Moniteur.) [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j f novembre 17931 255 cours de morale muet, en appliquant aux places, rues, etc., de toutes les communes de la Répu¬ blique, les noms de toutes les vertus. Voici l’extrait de mon plan : Les communes, grandes et petites de la France, seront divisées en arrondissements par¬ ticuliers, dont chaque place publique sera le centre; toute place publique portera le nom d’une vertu principale. Les rues affectées à l’ arrondissement de cette place seront dési¬ gnées par les noms des vertus qui auront un rapport direct avec cette vertu principale. Lorsqu’il n’y aura pas assez de noms de vertus, on se servira de ceux de quelques grands hommes; mais on les rangera dans l’arrondisse¬ ment de leur vertu principale. A Paris, par exemple, le Palais National s’appellera Temple, ou Centre du républica¬ nisme; la place du Parvis-Notre-Dame, place de l’Humanité républicaine; F Hôtel-Dieu, Tem¬ ple de l’Humanité républicaine; la Halle, place de la Frugalité républicaine. Les rues adja¬ centes, pour la première, seront les rues de la Générosité, de la Sensibilité, etc.; et, pour la seconde, celles de la Tempérance, de la Sobriété, etc. Il s’ensuivra de là, continue l’orateur, que le peuple aura à chaque instant le mot d’une vertu dans la bouche, et bientôt la morale dans le cœur. Il termine par demander que ce plan soit exé¬ cuté dans tous les départements. L’Assemblée applaudit au pétitionnaire et à la réponse du Président, ordonne l’impression des deux discours et le renvoi au comité d’ins¬ truction publique, pour en être fait un rapport dans la huitaine. André Dumont rend compte des mesures ré¬ volutionnaires qu’il a prises dans les départe¬ ments de la Somme, du Pas-de-Calais et de l’Oise. Le citoyen Jacques Petit, membre de la Com¬ mission révolutionnaire du département de la Somme, lit à la barre la liste suivante des sommes et effets d’or et d’argent qu’il a trouvés à Hesdin et dans le district d’Abbeville, sous l’autorisation d’André Dumont. « Législateurs, braves Montagnards, « J’ai été chargé, par Dumont, votre collègue, de me transporter à Hesdin pour remplir une mission dont voici le résultat : « Argent trouvé chez le ci-devant marquis de Sapervick : « En or ................ 11,856 liv. « En argent ............ 9,145 « Total ........ 21,001 liv. « En vaisselle plate et autres objets, 217 marcs; une tabatière d’or et quelques autres effets en or et en argent. « A Hesdin, provenant des ex-moines de Dom-Martin : « En or ................ 8,900 üv. « En argent.. . ........ 5,977 « Total ........ 14,877 liv. « Dans la même maison : « En or ................ 13,296 liv. « En argent .......... . . 205 « Total ........ 13,501 liv. « Des couverts en argent, un caisson chargé de livres, et des effets pour charger trois autres voitures. « District d’Abbeville. Cette Administration m’a remis, sur l’autorisation de Dumont, votre collègue : en argent, 11,904 livres, une grande malle et un panier remplis de 300 ou 400 saints et saintes d’argent. « Ces malles sont accompagnées d’une autre grande malle remplie d’ornements d’église, dont le tout peut être évalué à 700 ou 800 marcs. » Après avoir entendu les pétitions de plusieurs citoyens du département de la Somme, et sur la proposition d’André Dumont, la Convention na¬ tionale rend le décret suivant : « La Convention nationale, sur le compte qui lui a été rendu par André Dumont, représentant du peuple dans les départements de la Somme, du Pas-de-Calais et de l’Oise, de la conduite vrai¬ ment républicaine des�eitoyens Raquenel, Prévôt et Favres, officiers municipaux d’Hesdin, admi¬ nistrateurs de la Commission révolutionnaire du département de la Somme; Taillefer, adjudant général; Gontraud, colonel du 20e régiment de dragons, et des administrateurs du district d’Ab¬ beville, en décrète la mention honorable et l’in¬ sertion au « Bulletin » (1). Compte rendu du Moniteur universel (2). Des sacs et des malles remplis d’or et d’ar¬ gent sont introduits dans la salle. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 311 à 313. (2) Moniteur universel [n° 45 du 15 brumaire an II (mardi 5 novembre 1793), p. 184, col. 3]. D’autre part, le Journal des Débals et des Décrets (brumaire an II, n° 412, p. 193), Y Auditeur national [n° 409 du 15 brumaire an II (mardi 5 no¬ vembre 1793), p. 2] et le Mercure universel [15 bru¬ maire an II (mardi 5 novembre 1793), p. 77, col. 1] rendent compte du discours d’André Dumont dans les termes suivants : I. Compte rendu du Journal des Débats et des Décrets. On introduit plusieurs sacs et plusieurs, malles pleines d’or et d’argent. André Dumont, qui les a recueillis dans le dépar¬ tement de la Somme, rend un compte sommaire de