17 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] part tant du gibier appartenant au Roi que des lapins, qu’ils supplient Sa Majesté de faire détruire, surtout dans les bois de Rochebourg, appartenant au seigneur de Montmagny, bornant leur territoire, où ils font annuellement un dégât considérable. Art. 4. Qu’il plaise à Sa Majesté de répartir tous les impôts, sous quelque forme qu’ils puissent être perçus, sur tous les citoyens et fidèles sujets, avec une parfaite égalité, de quelque ordieou qualité qu’ils puissent être, selon leur faculté, ainsi que la loi naturelle le demande ; sauf ensuite à Sa Majesté le droit de verser ses bienfaits, les distinctions et les honneurs sur ceux qui se distingueront à son service dans toutes les parties de son administration, suivant leur mérite ou leurs talents, afin que les dettes et charges de l’Etat étant acquittées et supportées par tous ses sujets également, ils puissent opérer un prompt soulagement dans leurs peines. Art. 5. Qu’il plaise à Sa Majesté ordonner que, dans toutes les communautés qui n’ont aucune fondation pour les écoles de charité, il sera annuellement versé quelques fonds pour encourager l’instruction publique, pour secourir les pauvres, les malades et les infirmes; et que, dans cette liste, Sa Majesté daigne ne pas oublier la paroisse de Pierrefitte. Art. 6. Qu’il plaise à Sa Majesté admettre le tiers-état de son royaume à la participation de ses droits, de ses grâces et de ses faveurs, et qu’il daigne les employer, sans avoir égard à la naissance, dans le clergé, dans le militaire sur terre et sur mer, dans toutes les parties, enfin, de l’administration de l’Etat. Qu’ayant supporté dans tous les temps la plus énorme partie des charges de l’Etat, ils puissent parvenir, comme dans les suites passées, aux honneurs et aux dignités de l’Eglise, de la magistrature, du service militaire, s’ils ont le bonheur de s’en rendre dignes. Art. 7. Qu’il plaise à Sa Majesté ordonner que, dans cette paroisse, les décimateurs entretiennent à leurs dépens tous les ecclésiastiques nécessaires pour l’exercice du saint ministère, selon les besoins spirituels des habitants et des étrangersque Sa Majesté y fait séjourner. Art. 8. Qu’il plaise à Sa Majesté d’ordonner que la multitude des pigeons qui s’augmente sensiblement, aux environs de la capitale, chez les seigneurs et laboureurs indistinctement, et surtout dans cette paroisse où se trouvent quatre fiefs différents et buitehâteaux environnants, ayant co-lombier à peu de distance, soit diminuée, afin que les cultivateurs n’aient plus la douleur de voir leurs semailles de toute espèce dévastées par ces fléaux, et que ceux auquels les pigeons profitent soient obligés de les nourrira leurs frais. Art. 9. Qu’il plaise à Sa Majesté de faire ouvrir la seule source d’eau potable qui se trouve dans le territoire et à portée du village de Pierrette, dont une seule maison opulente s’est emparée, et après avoir fermé la conduite par des canaux dans son enclos de 25 arpents qui en est inondé et où elle se perd, pendant que la communauté est obligée d’aller chercher cet aliment indispensable à près d’une demi-lieue, dans un territoire étranger, où elle est souvent refusée dans les sécheresses ; qu’il soit permis à tout le village de supprimer l’ouverture où elle a été ouverte pour l’ouvrir dans l’emplacementoù cette eau a sa source, qui est à portée du village et où elle a été très-longtemps; de puiser de l’eau à cette source, qui pourrait fournir suffisamment à quatre paroisses comme celle de Pierrefitte ; que même en allant lre Série, T. Y. chercher l’eau à cette fontaine on y commet des délits sur le territoire dont chaque propriétaire souffre beaucoup, parce qu’il n’y a pas de chemin ouvert qui y conduise. Art. 10. Les malades de la paroisse de Pierrefitte n’ont aucune ressource ; autrefois il y avait dans cette même paroisse une maladrerie à laquelle était attaché, entre autres objets, un revenu annuel que le grand aumônier payait ; que depuis nombre d’années cette fondation a disparu. Que l’on ne peut sans doute en attribuer la cause au malheur du temps ; mais comme le terrain sur lequel était construite la maladrerie est actuellement réuni aux propriétés que l’abbaye de Saint-Denis adans cette paroisse, les habitants demandent que leurs malades soient reçus à l’Hôtel-Dieu de Saint-Denis, parce qu’il est richement fondé en partie par cette abbaye même. Arrêté en l’assemblée générale tenue cejourd’hui 15 avril 1789. Signé Beaugrand; Emery ; Ressy ; Jean Ducerf; Thomas Cousin-Lemaire ; Cheval ; Jean Heude ; Jean-Jacques Ducerf ; Jean-François Pérard ; Protais de LaMarre; Carpentier ; Pleesville; Ridou ; Louis-Baptiste Emery ; Pierre Divary ; Château ; La Caillette ; Jean-Pierre Duval. Paraphé ne varietur, fait ce 15 avril 1789, au désir de notre procès-verbal de nomination de député, cejourd’hui. Signé Maillet. CAHIER Des pleintes , doléances et remontrances de Jean-Baptiste Lardier, écuyer, vétéran de la maison militaire du Roi , seigneur haut justicier territorial du fief Saint-Gervais de Pierrefitte, près Saint-Denis en France (1). Au Roi et à Nosseigneurs des Etat» généraux représentant la nation. Je croyais bien être appelé à cette auguste assemblée et j’étais dans la plus grande sérénité, parce que, fidèle sujet et bon patriote, je me reposais entièrement sur les bontés du Roi, sur la sagesse de ses ministres et sur les lumières de la nation rassemblée en Etats généraux. Je ne voyais que des secours attendus de tous les fidèles sujets du Roi, mes compatriotes, qui n’ont jamais été conduits que par l’honneur et qui, en toute occasion, se sont distingués des sujets des autres puissances par leur fidélité et leur amour pour le Roi et pour la patrie ; mais il faut des moyens pour opérer ces secours. Or, que n’ai-je pas lieu d’espérer? Dans un moment où l’honnèur de la nation paraîtrait compromis aux yeux des autres nations par les écrits dangereux qui se sont répandus et par des propos hasardés qui n'inspirent que la crainte et la défiance, un Français peut-il se livrer à des idées sinistres? Oh ! mes chers compatriotes, rappelez vos sens, souvenez-vous que vous êtes Français et surtout que vous avez un Roi qui vous aime, que vous aimez, que vous devez adorer comme une divinité, et qu’on pourrait, à juste titre, nommer Phomme Roi, comme Jésus-Christ fut nommé l’homme Dieu. Rendez, comme moi, grâces à son amour et à ses bontés ; il veut nos conseils et nos avis et ne veut agir que par nos lumières. Puisse-t-il vivre éternellement ! J’ai vu la lettre de Sa Majeété, du (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives dé l’Empire. 2 18 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs. 24 janvier 1789, insérée dans l’ordonnance de M. le prévôt de Paris, du 4 avril suivant. Je n’y ai vu qu’un père qui invite ses enfants à l'aider de leurs avis et de leurs conseils; c’est d’après cette invitation que j’ai osé présenter mes idées. Puissent-elles, ou du moins partie d’icelles, être de quelque utilité ! C’est le seul but que je me suis proposé en couchant mes observations par écrit, afin de prévenir les questions qu’on pourrait me faire à l’assemblée générale à laquelle je suis mandé. Art. 1er. Comme Sa Majesté, en montant sur le trône, s’est chargé des dettes de ses prédécesseurs même de celles non nationales dont Sa Majesté n’était pas tenue, et que sa bonté pour ses peuples a porté Sa Majesté à leur faire remise du droit de joyeux avènement, Sa Majesté, se persuadant que les finances de son royaume étaient en balance par la recette et la dépense, mais que, depuis les comptes rendus, Sa Majesté a aperçu avec douleur un déficit considérable dans les finances, il est nécessaire d’v remédier. L’honneur inséparable du Français" lui en suggérera les moyens, et l’on se persuade qu’un impôt territorial, supporté proportionnellement par tous et un chacun, sans privilège ni exception, levé en argent, réparera le déficit; car si on le perçoit en nature, il faudrait des fermiers qui ne manqueraient pas d’emmagasiner et priveraient chaque village, non-seulement des choses de première nécessité, mais encore des pailles qui font la fumure, laquelle accroît les productions; il y a lieu même de désirer, comme en Bourgogne, la suppression des aides, notamment le trop bu, et rendre le sel et le tabac commerçables. Art. 2. Il est à désirer que Sa Majesté et la nation pourvoient à la diminution des blés, farines et pain qui ruinent notamment les habitants des pauvres villages, puisque cette denrée de première nécessité leur coûte plus du double qu’il y a six mois, et que la marchandise inférieure de cette espèce ne peut que produire des maladies et la perte des sujets. Art. 3. 11 est également à désirer que toutes les cures des campagnes soient fixées à 15 ou 1,800 livres par année, non compris la cire et les legs qu’on pourrait faire aux curés, pourvu qu’ils n’excèdent pas 100 livres, afin de donner une aisance aux curés, à la charge par eux de ne recevoir aucuns droits pour raison des baptêmes, mariages et sépultures, comme aussi de fixer le prix des messes dans tout le royaume, de façon qu’un si grand sacrifice, comme celui de la messe, ne soit pas arrêté par les différents prix ; car il y en a à qui il faut payer 10, d’autres 12 et d’autres 15 sous; ne croirait-on pas après cela que c’est un objet de commerce? C’est une action qui fait tort à la religion, à laquelle il serait bon de remédier. Pour fournir la somme ci-dessus aux curés, on rendrait, comme en Champagne, les cures égales, car il y en a de 4, 5 et 6,000 livres de revenu, qui souvent ont moitié moins de charges que les cures à portions congrues; on pourrait aussi ordonner que les curés rendissent les honneurs funèbres sans faste, mais avec une décence honnête, aux plus indigents, pour prévenir les tracasseries et éviter ce qui est arrivé, il y a trois mois, à Saint-Denis , où un curé a refusé la sépulture à une femme dont le mari, chargé d’enfants, n’avait pas le sou, Art. 4. Il n’y a pas de vicaire à Pierrefitte; jamais village n’en fut plus susceptible ; il est nécessaire d’en ordonner un, à la charge des gros décimateurs, attendu que la paroisse contient cinq cents communiants; on dit même qu’il y a un règlement à ce sujet. H y a. un logement pour un vicaire à Pierrefitte où il y en avait un jadis. Il paraîtrait convenable d’accorder à chaque vicaire 600 livres, pour pouvoir, avec ses messes, vivre honorablement. Art. 5. Attendu qu’il manque d’eau dans la paroisse de Pierrefitte, et qu’un propriétaire opulent jouit d’un clos de 25 arpents, et d’une source jadis commune aux habitants qui sont souvent noyés dans leurs caves par la filtration des eaux de ladite source, qui n’a aucun versoir, et que leurs facultés ne leur permettent pas de suivre aucun procès à cet égard, il esta désirer qu’il soit ordonné que l’eau soit par lui fournie audit village, dans le lieu le plus commode dont on conviendra, par le moyen d’un tuyau ou d’une soupape, afin d’en avoir de jour et de nuit, et que l’excédant des eaux, qui, par les terres, passe dans presque toutes les caves des habitants qui cesseraient d’être inondées, puisse -se perdre et aille tomber dans la rivière de Seine. Art. 6. Il paraîtrait convenable, lorsqu’un bénéficier décède, d’attribuer aux juges des lieux de leurs bénéfices l’apposition des scellés, et de faire l’inventaire de leurs effets, ainsi que d’ordonner les visites des bâtiments et églises de leurs bénéfices, afin d’éviter les frais ruineux de transport d’un notaire, de deux ou trois procureurs, d’un huissier-priseur, d’un élève de notaire et d’un agent des économats, qui se transportent souvent en poste à deux cents lieues, frais exorbitants qui se prélèvent avant tout sur la vente, laquelle est insuffisante. Art. 7. Il paraîtrait aussi nécessaire que, sur chaque bénéfice, il fut prélevé et mis en caisse d’épargne, chaque année, aux économats, une somme pour subvenir aux réparations même les plus urgentes que les bénéficiers négligent et qui viennent la plupart hors d’état de les remplir, ce qui donne lieu à des transports, visites d’expert et greffier et à des procès-verbaux, le tout dispendieux et à la charge des économats. Art. 8. Soit eu égard aux vingtièmes ou autres impositions, soit pour connaître au juste le revenu des bénéficiers, il paraîtrait convenable qu’une loi déclarât que les baux faits par les bénéficiers, pour neuf ans seulement, seraient entretenus pour les nouveaux titulaires à la place du dernier décédé qui les aurait passés, jusqu’alors; le fermier ne risquerait pas sa ruine en payant au bénéficier un pot-de-vin, qui souvent égale le tiers, même la moitié du revenu qui est toujours fixé bien bas, et souvent le fermier est ruiné si le bénéficier décède dans la première année du bail ; par ce moyen la vérité serait dans le bail, il serait aisé de connaître le produit du bénéfice parce que pour gagner plus le fermier ne se mettrait pas à découvert ; cependant il faudrait laisser subsister les baux existants jusqu’à l’expiration et jusqu’après la mort des titulaires actuels, s’ils meurent pendant la durée du bail. Art. 9. Dans les commencements de la monarchie, particulièrement sous le règne de Louis le Débonnaire et de saint Louis, les dîmes furent accordées aux moines, non-seulement à cause des charges des cures qu’ils desservaient alors, mais encore pour fournir à leur subsistance et boisson, et secourir les pauvres, les veuves elles orphelins; chacun alors se confinait dans un cloître, les objets se trouvaient remplis; mais par succession de temps on est devenu égoïste, les charités ont cessé, il a été défendu aux moines [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] {Q de desservir les curés ; ce service cessant a diminué les novices et les profits, et la dîme toujours subsistante, et capable, outre tous les biens acquis ou usurpés, d’entretenir et nourrir quatre fois autant pour le moins de moines qu’il y en a aujourd’hui ; or, la cause de ces donations étant cessée, il en résulte la cessation du bénélice d’icelles : cessante causâ, cessât ipsa lex , Art. 10. Il est à désirer aussi une loi qui oblige les moines à justifier de tous leurs titres de propriété, et, faute de ti tres, réunir aux domaines des vrais propriétaires ce qui n’a pu qu’être usurpé, sinon le réunir au domaine de la couronne. Art. 11. Les moines sont si opulents qu’eux-mêmes ne pourraient nombrer leurs richesses ; ils ont une immensité de terres qui leur forment un domaine considérable; les droits de chasses y attachés sont absolument contraires aux canons de l’Eglise qui défend expressément la chasse aux ecclésiastiques. Ne pourrait-on pas distraire cet objet de propriété en les indemnisant, et réunir cette chasse aux domaines des anciens propriétaires ou à celui de la couronne, ou la vendre à des particuliers, ou la détruire? Art. 12. Un objet bien plus important est ce qui se pratique par les moines lorsqu’à la justice est attaché unnotaireou un tabellion. Ala mort de cesderniers, on porte les minutes aux archives des moines, et elles ne se retrouvent jamais, si elles leur sont contraires. Ne serait-il pas possible, en leur conservant ce droit, de leur enjoindre par une loi ad hoc , sous peine de très-forte amende, de déposer tous les ans au greffe royal le plus prochain un registre signé de leur notaire ou tabellion, qui contiendrait en entier tous les actes par lui passés dans le cours de l’année , comme cela se pratique pour les registres baptistaires et mortuaires de chaque paroisse ? Il paraît même nécessaire, pour plus grande sanction, que ledit registre fût coté, paraphé, légalisé et signé, mais gratis, par le chef de la justice, dont le notaire ou le tabellion ressortit; par ce moyen, il y aurait, même en cas d’incendie, un moyen assuré de ne perdre aucun acte. On objectera qu’on n’a rien à craindre. parce que tous ces actes sont contrôlés; mais comme ils ne sont qu’en extraits pour recevoir le droit, la date du contrôle ne produirait qu’un effet bien léger. Art. 13. Ne serait-il pas à désirer aussi que le dépôt susdit, et dans la même forme, fût pratiqué par tous les notaires et tabellions de toutes les justices seigneuriales et non royales, sinon que ce registre fût déposé, chaque année, aux archives des seigneurs, afin de conserver les duplicata de plusieurs actes, et assurer la tranquillité des familles ? Art. 14. Nuis secours pour les malades ou blessés de Pierrefitte et étrangers, où les accidents se multiplient parla continuité des voitures. Lorsque le procureur fiscal envoie un blessé à l’flôtel-Dieu de Paris, faute de pansement il meurt, comme cela est arrivé avant d’entrer dans Paris ; cependant il est constant que Messieurs de Saint-Denis, dont le prieur se dit premier administrateur de ladite ville, possèdent au village de Pierrefitte le tiers du sol du territoire, et comme il y a audit lieu une maladrerie, dotée par fondation royale de 80 livres de revenu, prix très-haut pour le temps, payable par le grand aumônier, n’est-il pas à désirer que l’Hôtel -Dieu de Saint-Denis soit tenu de recevoir les malades et blessés du village de Pierrefitte, résidants comme étrangers ? Art. 15. Personne n’ignore que les minutes des actes des notaires de Paris appartiennent à l’Etat ; que plus les actes sont anciens, plus ils les apprécient à volonté et font payer la recherche, quoiqu’on leur présente la date et l’année. Les mêmes notaires ont fixé la finance de leur charge à 40,000 livres, pour frustrer les centimes, deniers et autres droits ; leurs minutes, qui sont à l’Etat, sont pour eüx un objet si considérable, que leurs charges se vendent 200, 250, 300,000 livres à leur mort. Ne pëut-on pas, comme il est arrivé, en soustraire, surtout s’il y a faillite? Ne serait-il pas à désirer qu’il fût établi un dépôt public de toutes les minutes des notaires de Paris, dont les gardes-minutes� à créer, seraient autorisés à en délivrer les expéditions, suivant la taxe qui en serait faite ? On pourrait y joindre aussi les minutes des notaires et tabellions de campagne, au lieu de les déposer au greffe royal, pour former un dépôt général pour chaque généralité. La nation trouverait dans ce dépôt la conservation de ses titres ; les notaires pourraient s’y transporter pour expédier des actes au prix fixé; les minutes anciennes y seraient portées, sitôt l’établissement du dépôt public, et les nouvelles minutes, à la mort de chaque notaire, lesquelles seraient comparées au répertoire qu’ils doivent avoir ; sinon leur faire payer un supplément de finance proportionné à la vente de leurs charges, et dans ce cas, pour la conservation des actes, ordonner qu’un registre contenant les actes par eux passés par année, seraient par eux déposés au greffe du châtelet, comme les registres des baptêmes, mariages et sépultures. On se persuade que cet objet mérite attention. Art. 16. Il y a quatre fiefs à Pierrefitte, dont un seul a haute justice et seul a droit d’avoir un colombier à pied, aux termes de la coutume, mais il n’en a pas; il n’y a que la moyenne justice deBuhors qui ait un colombier à pied, rond, rempli de boulyas, les autre n’ont que des volets en petite fuye. On ne dira rien à leur égard, parce que les colombiers sont fermés bien avant la moisson et ne s’ouvrent qu’ après les grains rentrés; or, les grains répandus sur la terre seraient absolument perdus si les pigeons ne les ramassaient. D’ailleurs, cet animal étant très-chaud, est souvent ordonné «n médicaments, ce qui doit les faire conserver. Si, comme il est fait à Mauhième, on ordonnait que chaque village serait tenu de fournir morts, chaque année, une quantité déterminée de moineaux francs, à peine d’amende, cela paraîtrait préférable, puisque personne n’ignore que chaque moineau franc mange au moins, par année, un boisseau de blé, ce qui, par l’immensité qu’il y a France, consomme une quantité de grains inappréciable. GeS oiseaux sont d’autant plus dangereux que leur légèreté leur permet de se reposer sur les épis pour en extirper tout le grain, et qu’en se réunissant ainsi qulls font d’ordinaire, ils tombent comme une nuée sur les pièces de blé qu’ils jugent les plus mûres, et que leur nombre en fait tomber une grande partie à terre. Art. 17. Une race d’animaux plus destructive que les moineaux est celle des lapins de garennes non closes. Non-seulement ils mangent les blés et les denrées, mais ils grugent, notamment dans les neiges et les gelées, les écorces des arbres, arbrisseaux et taillis; ils occasionnent encore des excavations où ils font leurs terriers. Ils soulèvent les racines des arbres, des vignes et des plantes de toute nature, et par leurs ram-bouillières, attirent, même de loin, des animaux voraces de toute espèce, et parviennent à miner les plus hautes montagnes où ils séjournent ordi- 20 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. * [Paris hors les murs.] nairement ; ils rendent les avenues où chassent les rois dangereuses ; témoin ce qui arriva à Louis XV le Bien-Aimé, dans la forêt de Saint-Germain. Or, il serait très-utile de détruire, le plus tôt possible et le plus qu’on pourra, cette espèce d’animaux qui peuvent produire les plus grands maux, tels qu’une famine, ainsi que, suivant l’histoire, il arriva dans 11 le de Lero ou Lipara, en Sicile, où un jeune homme en apporta quelques couples qui s’accrurent au point qu'ils minèrent l’île et mangèrent absolument tous les blés jusqu’à la racine, ce qui causa la famine dans l’île. Pour à quoi remédier, les magistrats ordonnèrent de les exterminer. Près et au-dessus de Pierrefite, le bois appelé de Richebourg, appartenant en usufruit à madame de La Rochefoucaut et en propriété à M. Chevadou, son fils, officier de cavalerie, en est plein. 11 serait nécessaire de les détruire, même entièrement, à moins que le propriétaire ne préférât de faire clore totalement le bois par un mur de8à9pieds, dontilyen aurait 4 pieds au moins en fondations, car ils ruinent les blés, les vignes et toutes les denrées de Pierrefitte et Mournaguv. Art. 18. Les querelles journalières qui surviennent tous les jours au sujet des pièces de 2 sous donnent lieu à désirer qu’on les promulgue toutes à 1 sou 6 deniers, comme les anciennes pièces. C’est le vœu général. Art. 19. A la décharge du peuple, et pour opérer plus rapidement le rétablissement des finances, on croit qu’on pourrait joindre, en en limitant la durée, un droit sur chaque domestique, sur chaque cabriolet et sur chaque croisée ordinaire, ayant vue sur la rue, tant des villes et bourgs que villages, exceptant celles qui n’ont pas 5 pieds de haut. Ces droits ne seraient perçus que sur les gens opulents et les propriétaires. La classe du peuple la plus indigente n’en souffrirait pas, et la recette s’en ferait par le syndic ou les collecteurs des lieux, à peu de frais, et serait remise au trésor royal, directement sans frais. Art. 20. La bravoure tenant à tous les individus, il n’est pas étonnant de voir des officiers de fortune parvenir à obtenir la croix de Saint-Louis. C’est un véhicule pour encourager leurs camarades mais sans fortune. Ose-t-on montrer cette marque d’honneur? On la cache dans une boîte comme fit un certain porteur d’eau de Paris chez lequel on en trouva uue dans une boîte avec ses brevets de service, et un autre qui s’engagea dans les gardes françaises. Pourquoi if est à désirer d’appliquer une pension à chaque croix de Saint-Louis, ainsi qu’à chaque officier que les blessures, les infirmités ou la vieillesse nécessitent à quitter le service. Art. 21. Il est à désirer que le soldat ait une certaine considération dans la patrie pour laquelle, à tout moment, il expose sa vie, et qu’après vingt-cinq ans de service il porte une marque distinctive quelconque et jouisse d’une pension à lui faire en proportion des enfants qu’il aura, s’il est marié, et notamment eu égard aux années de service bien constatées; on pourrait même, à la mort du mari dans les troupes, accorder à sa veuve une portion de la pension de son mari pour l’aider à élever ses enfants; par ce moyen, le soldat sera encore plus attaché au service par l’espérance certaine d’une récompense, et ne sera jamais réduit a mendier sur ses vieux jours ; comme aussi que les pensions non méritées et surprises soient supprimées, et que celles qui seront accordées à l’avenir ne le soient que pour services effectifs en tous genres rendus à la patrie par toutes personnes de tout état. Art. 22. Il est à désirer qu’ilsoit construit des magasins de blé dans toutes les villes et bourgs du royaume pour les garnir de blé pour quatre ans, afin de rendre le surplus commerçable et exportable, sans craindre la cherté ni l’intempérie des saisons, avec faculté de remplacer par les blés du marché qui paraîtraient dans les magasins pressés comme cela a été établi à Lille en Flandre, où ils magasinent aussi des eaux-de-vie afin, qu’elles aient un même prix, à cause des légers accidents produits par la bière; il en est de même des blés, parce que, quand l’un et l’autre de ces comestibles augmente au marché, on publie l'ouverture des magasins, ce qui oblige les marchands à se mettre au cours du taux. La nation ne peut se refuser à un tel établissement qui lui serait le plus avantageux. Art. 23. La noblesse s’étant toujours distinguée par l’honneur et la bravoure, on ne peut que lui déférer des égards; mais encore faut -il que sans interruption les enfants marchent sur les traces de leurs ancêtres ; c’est pourquoi il est à désirer que la noblesse d’armes ne soit conservée et confirmée qu’à ceux qui la méritent par un service suivi et non interrompu de père en fils, et que la noblesse ne puisse être accordée par charge, sinon pour la vie des titulaires, non transmissible, n’y ayant que des gens riches, âgés et chargés d’enfants qui acquièrent les charges qui donnent la noblesse. Art. 24. Il serait à désirer aussi que les charges ne soient pas vénales, mais qu’elles ne soient accordées qu’à la capacité et au mérite, à l’effet de quoi il serait nécessaire que les admis subissent un examen public et que les auditeurs puissent leur proposer des questions pour s’assurer de leurs talents, information, de leurs mœurs et probité préalablement faite. Art. 25. Il est également à désirer que la nation nomme des défenseurs pour les indigents qui souvent restent tels parce qu’ils n’ont pas de quoi payer un défenseur. Art. 26. Il est à désirer que les criminels aient aussi un défenseur; qu’ils soieut traités avec plus d’humanité et que leurs jugements soient décidés promptement; que la peine de mort ne soit encourue que par les meurtriers, et que les autres soient enchaînés et livrés à tous les travaux publics, notamment aux grands travaux de la nation et à l’ouverture de toutes les montagnes, pour savoir ce qu’elles renferment dans leur sein. Et l’on se persuade que par ces fouilles on découvrirait des métaux, des minéraux et des pierres, charbons de terre et houille de toute espèce, car la France ne sait pas les trésors qu’elle possède. Art. 27. La sûreté des villes et des voyageurs est la chose la plus urgente et la plus nécessaire; aussi Sa Majesté a-t-elle augmenté les maréchaussées ; mais la maréchaussée ne peut être partout; les grands chemins la compétent plus que les villages, bourgs, hameaux et écarts ; et comme la cavalerie n’est que pour soutenir l’infanterie, n’est-il pas à désirer qu’il soit établi, comme à Versailles, Saint-Germain, Saint-Cloud, Meudon, etc., en chacun des lieux du royaume, en proportion du nombre des habitants, une brigade plus ou moins forte, mais qui sera toujours légère en proportion des autres soudoyés d’infanterie, prise dans le corps des invalides ou de la milice avec une augmentation de solde, et injonction en cas de besoin aux habitants de lui prêter main-forte, si l’on ne préfère de nommer pour chaque lieu une garde prise dans les habitants? Mais il y a un inconvénient, c’est que les ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] 21 [États gén. 1789. Cahiers.] habitants étant presque tous parents ou alliés, ne feraient bien ce service que vis-à-vis les étrangers. On doit sentir que, par cette précaution, loin d’augmenter les maréchaussées, on en diminuerait le nombre en décharge pour l’Etat, parce que l’Etat doit protection à ceux qui Font bien servi, et que la solde d’un cavalier de maréchaussée, eu égard à son équipement et à son cheval, est très-coûteuse ; et par ce qui est proposé, l’ordre serait établi, les vieux serviteurs récompensés et en état de vivre, et les invalides, comme le guet de Paris, conduiraient les délinquants chez le procureur fiscal qui en ordonnerait la prison ou la liberté, ainsi que font les commissaires de Paris, lesquels, comme les procureurs fiscaux de toutes justices, sont responsables de leurs décisions à M. le procureur général. En outre, les invalides pourraient être établis à la garde des récoltes du territoire, à la décharge des cultivateurs, sauf à augmenter leur nombre pendant le temps des moissons, ce qui produirait le plusgrandbien dans la paroisse, et ils porteraient les délits et les délinquants chez le procureur fiscal, ce que ne peuvent par nature faire ceux qui en sont ordinairement chargés, ne pouvant ou n’osant constater la contravention de leurs parents les plus proches et de leurs alliés ; l’aperçu des objets ci-dessus fait connaître assez et une récompense et une épargne considérables. On voit même qu’il faudrait bien peu de maréchaussée à l’avenir dans le royaume; en outre, on présume aisément ce que coûtent les officiers de ce corps dont on n’a pas parlé. Art. 28. Lorsqu’il plaît à Sa Majesté d’accorder aux criminels graciables des lettres de grâce, elles sont accordées gratuitement. Pourquoi la justice n’agirait-elle pas de même? 11 est donc à désirer que soient scellées et entérinées les lettres de grâce, gratis, tant par les juges que leurs greffiers et procureurs, parce que les sceaux et entérinement coûtent beaucoup aux impétrants et les ruinent s’ils n’ont un peu de fortune. Art. 29. Il serait à désirer aussi qu’une loi astreignît MM. les avocats, notaires et procureurs, de donner à chaque citoyen un récépissé des litres qu’ils leur confient pour leurs défenses, parce qu’à défaut de récépissé, il leur est presque indifférent de les adhirer et que souvent il en résulte la perte des meilleures causes et Ja ruine des citoyens. Art. 30. Quoique le commerce soit une branche honorable et avantageuse à la nation, le préjugé à empêché la noblesse de s’v livrer. Ainsi il serait à désirer une loi qui levât ce préjugé, pour que la noblesse puisse embrasser cette partie sans aucunement déroger. Les milords et les lords anglais s’y livrent bien; la nation ne pourrait que considérablement y gagner. Art. 31. Il est aussi à désirer la réforme des abus dans la procédure, d’en restreindre les longueurs et qu’il ne puisse être donné au plus que trois avenirs avant chaque sentence ou arrêt; de supprimer les épices et de fixer un temps pour la durée des procès. Art. 32. Il serait également à désirer que, dans les lieux où il y a plusieurs justices, qu’elles fussent toutes réunies à la haute justice s’ily en a, et les basses justices réunies à la moyenne, si, dans le lieu, il n’y en a pas de hautes, et laisser subsister les basses justices quand il n’v en aura que de cette espèce, afin de ne pas distraire les habitants de leur domicile, parce que rarement il y a des appels des premiers juges et que la justice locale est très-nécessaire. CAHIER Des doléances , plaintes et remontrances des habitants de Pierrelez (Pierre Laye), qu’ils osent très-respectueusement représenter sous les yeux de Sa Majesté et des Etats généraux (1). Art. 1er. Nous supplions de vouloir bien nous accorder une modération des impositions, attendu la très-grande modicité du terrain et qui se trouve encore dévasté par les lapins et autres gibiers. Art. 2. Que toutes les impositions soient payées chacune dans sa paroisse, attendu la grande difficulté que cela cause aux collecteurs. Art. 3. Une liberté de pouvoir nettoyer les mauvaises herbes qui se trouvent dans nos grains, comme aussi de pouvoir pâturer nos bestiaux dans les biens à nous appartenant et en commun, vu que le terrain ne peut produire aucune pâture a cause de sa modicité. Art. 4. La destruction des lapins ainsi que des pigeons, qui dévastent les semences. Art. 5. De pouvoir arracher de mauvais bois qui se trouvent dans le terroir pour pouvoir remettre le terrain en culture. Art. 6. La diminution sur le prix du pain. Art. 7. La diminution sur le prix du sel. Art. 8. La diminution sur les droits du vin et autres boissons. Art. 9. Que toutes les impositions soient payées par tous les propriétaires de fonds sans exception. Ce fut fait le mardi 14 avril 1789, en présence de toute l’assemblée, et ont signé : Denis Leveau, ancien marguillier ; Duvivier; Louis-Alexandre Mael; Courteville; Jean-Louis Legrand ; Jean-Louis Leveau , marguillier en charge; Louis Jacquin; Vaillant-Courteville; Bernard ; Dumeny, ancien marguillier ; Du Bucquoi ; Jean-Pierre Rougeaux; Jean -Baptiste Leveau; Jean-Louis Galle ; Pierre Cousin; Cousin, syndic; Danjeau, greffier; Cousin Fleuret, député. CAHIER Des doléances , plaintes et réclamations de messire Carré, propriétaire des fiefs de Tabary-les-Obous et hôtel de la Pierre , au principal manoir des susdits fiefs situés au village du Pin (2). Sera le seigneur Roi très-humblement supplié de jeter un regard favorable aux précises ci après exprimées. Art. 1er* Demande Ja suppression du droit de franc-fief que l’on fait payer à présent aux roturiers qui sont propriétaires de fiefs et de terres nobles. H faut considérer que lesdits propriétaires payent au Roi la taille, la capitation, le quartier d’hiver imposé à la marge du rôle pour les entretiens des troupes du Roi, et il paye aussi les vingtièmes deniers et les charges des corvées et des paroisses; toutes ces impositions royales, sans comprendre le droit de franc-fief, se montent à la moitié delà production desdits fiefs. Vous voyez qu’il est de toute nécessité d’ôter les droits de franc-fief de sur lesdits fiefs, comme n’étant pas payés dans l’ancien temps ; le tout, réparti ensemble, fait que lesdits propriétaires desdits fiefs payant (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. (2) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire.