54 [Étals gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] blement sur les habitants de la campagne, nous demandons qu’elle soit supprimée. Art. 10. Tout impôt devant être supporté également par tous les ordres de citoyens, nous demandons que la corvée soit à jamais abolie, et que l’exécution et la disposition de l’impôt en argent qui la remplacera soient remises à la sagesse des pays d’Etats. Art. 11. Lés Etats généraux sont priés d’aviser au moyen de remplacer insensiblement et d’une manière plus juste et moins onéreuse plusieurs impôts tels que la taille, l’industrie et ses accessoires, second brevet et autres, la gabelle, les aides, la capitation, impôts oui, par leur nature, pèsent particulièrement sur la classe indigente. Art. 12. Nous demandons que dans aucun cas on ne puisse employer la garnison pour prélever les impôts, laissant à la sagesse des Etats d’y suppléer d’une manière moins onéreuse. Art. 13. La propriété de tout citoyen sera inviolable, et il ne pourra en être privé, même en raison de l’intérêt public, qu’il n’en soit dédommagé sans délai et au plus haut prix. Art. 14. Nous demandons que, dans aucun cas, on ne puisse s’emparer des communes dont jouissent les paroisses. Art 15. Les Etats généraux sont priés de pourvoir aux moyens de venir au secours du laboureur qui aurait éprouvé des malheurs soit par l’intempérie des saisons, soit par d’autres cas imprévus. Art. 16. Nous demandons que toutes les capitaineries qui ne sont pas employées au plaisir de Sa Majesté soient entièrement abolies et que jamais elles ne puissent être recréées. Art. 17. Que les grandes bêtes des grandes chasses soient renfermées dans des parcs clos de murs ou de palis. Art. 18. Que les dégâts causés par toute espèce de gibier soient évalués par des experts, et que les jugements ou condamnations soient exécutés sur-le-champ, par provision, contre toutes personnes quelconques. Art. 19. Nous demandons que le lapin soit entièrement détruit et que la loi en soit publiée pendant la tenue même des Etats généraux. Art. 20. Nous demandons enfin qu’il soit fait un nouveau code sur les chasses pour arrêter l’abus de l’immense quantité de gibier qu’on répand dans nos campagnes; qu’un garde ne soit plus cru en justice sur sa simple parole; que nous ne soyons plus forcés d’épiner nos champs; que nous puissions dans tous les temps de l’année y entrer pour ôter les mauvaises herbes; que nous ne soyions pas tenus de demander, avant la Saint-Jean, la permission de faucher nos prés; enfin que nous puissions jouir librement de nos propriétés. Art. 21. Les Etats généraux sont priés d’aviser aux moyens de faire terminer les difficultés qui s’élèvent journellement entre les laboureurs, par des voies plus courtes et moins dispendieuses. Art. 22. Les Etats généraux voudront bien s’occuper d’améliorer le sort des curés qui ne sont pas suffisamment dotés. Art. 23. Nous demandons que toutes les dîmes ecclésiastiques, qui ne sont pas employées suivant l’esprit des fondateurs, soient supprimées comme un impôt infiniment à charge aux campagnes et impolitique par les discussions qui en résultent entre les pasteurs et les paroissiens. Art. 24. Nous prions les Etats généraux de s’occuper des moyens d’établir dansles campagnes des chirurgiens habiles et des sages-femmes instruites. Art. 25. Les Etats généraux voudront bien s’occuper des moyens de détruire la mendicité et d’aviser aux moyens de faire diminuer les grains, surtout les blés, qui sont à un trop haut prix. Art. 26. Nous demandons que la maréchaussée soit augmentée et qu’elle ne puisse être employée qu’aux fonctions relatives à la sûreté publique. Art. 27. Les Etats généraux aviseront à la réformation des lois prohibitives et exclusives qui gênent le commerce. Art. 28. Les Etats généraux s’occuperont très-incessamment de la réformation générale, tant des lois civiles que criminelles. Art. 29. Nous demandons que le prieuré de Notre-Dame-de-Cornuée, avec toutes ses dépendance, soit -réunis à la paroisse dudit Roissy en Brie, pour pouvoir s’y procurer un vicaire, et que cela soit fait aussitôt après la mort de M. l’abbé Jardin, qui demeure et fait sa résidence à Saint-Louis-du-Louvre. Art. 30. Nous demandons que toutes les routes, que l’on a établies pour la facilité de la chasse et qui morcellent et abîment les pièces de terre des laboureurs et les prés des cultivateurs, soient supprimées. CAHIER Des plaintes, doléances et remontrances des habitants composant le tiers-état de la paroisse de Romainville (1). Nous, habitants de]la paroisse de Romainville, assemblés cejourd’hui pour conférer sur les remontrances et doléances que nous aurions à former et ensuite les représenter à la nation assemblée aux Etats généraux, avons arrêté d’une voix unanime les représentations suivantes : Art. 1er. Nous demandons que les impôts qui seront consentis par les Etats généraux soient supportés également par la noblesse, le clergé et le tiers-état proportionnellement à leur fortune, sans distinction d’aucune espèce de biens et sans aucune exception ni restriction en faveur de qui que ce soit, nonobstant tout affranchissement et abonnement. Art. 2. Qu’il soit établi dans la province de l’Ile de France des Etats provinciaux dont la forme, l’organisation et les opérations seront ordonnées par les Etats généraux. Art. 3. Que le sort de MM. les curés et de MM. les vicaires soit amélioré, et que l’on défende expressément la pluralité des offices et bénéfices, et qu’on oblige les ecclésiastiques à la résidence. Art. 4. Que dans chaque paroisse de deux cents feux et au-dessous il soit établi un hospice déservi par une ou deux Sœurs de la Charité qui, par leurs soins et leur piété, rendraient à ces paroissiens de bons ouvriers, qui périssent victimes de l’ignorance et du défaut de soins, qui d’ailleurs élèveraient les jeunes filles dans les sentiments de religion, de travail et d’instruction capables de les rendre un jour utiles à leur paroisse; l’administration de cet hospice serait confiée aux curés, seigneurs et syndics des paroisses, et les dépenses en seraient prises sur les biens ecclésiastiques ou ainsi qu’il sera ordonné par les Etats généraux. Art. 5. Que la régie des aides et droits y réunis, surtout le gros manquant, la gabelle et l’impôt sur le tabac, soient supprimés. (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. 55 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] Art. 6. Que la taille de propriété, d’exploitation et d’industrie, les impositions accessoires, la capitation, le vingtième, tant sur les biens-fonds que d’industrie, soient supprimés, Jet que ces suppressions soient remplacées par quelque impôt général supporté en commun et. ordonné par les les Etats généraux. Art. 7. Qu’il soit accordé une exemption d’impôt personnel en faveur des pères et mères qui ont dix enfants vivants. Art. 8. Que la milice forcée soit abolie et remplacée par une milice provinciale et volontaire à laquelle tout le monde contribuera suivant les ordres des Etats généraux. Art. 9. Qu’il soit pourvu aux abus qui naissent de l’exportation des grains, et qu’on prenne les moyens d’empêcher la disette ou au moins la cherté des grains de première nécessité dont la France est menacée en ce moment. Art. 10. Que, vu les dommages considérables que le gibier, et surtout les lièvres, lapins et perdrix, causent aux fruits de la campagne, les capitaineries soient supprimées ainsi que la chasse des seigneurs particuliers, sous telle modification qui sera jugée par les Etats généraux. Art. 11. Que tous ceux qui ont droit de colombier soient tenus de tenir leurs pigeons renfermés dans les temps où leur liberté peut devenir nuisible. Art. 12. Qu’il ne sera imposé aucune charge locale sans le consentement des habitants payant au moins les deux tiers des impositions. Art. 13. Qu’il sera formé un vœu pour que l’on prenne les moyens les plus efficaces pour détruire la mendicité. Art. 14. Qu’il soit ordonné, surtout dans les campagnes, qu’on ne pourra intenter un procès sans s’être présenté d’abord devant des juges de paix qui termineraient à l’amiable les contestations ou qui donneraient leurs avis pour être portés devant le juge. Que de procès par ce moyen seraient étouffés dès leur naissance! Art. 15. Comme la plantation des bois dans les terres de culture porte beaucoup de préjudice aux habitants de Romainville en particulier, ils supplient les Etats généraux d’ordonner qu’on ne pourra planter des bois sans les environner d’un fossé large de 4 pieds et profond de trois, pour préserver les habitants du tort qu’ils leur causent. Signé Dargent ; Lecouteux; Eve; Jean-Claude Trotin; Alexis Eve; Brevëur ; Jacques Volant; Louis-François Lecouteux ; Pierre Aubin ; Louis-Henri Lecouteux; Nicolas-Jean Lecouteux; De-mercy d’Arcq; Trotin, syndic; Feine. CAHIER Des plaintes , doléances et représentations des habitants de la paroisse de Rosny -sous-les-bois-de-Vincennes , arrêté en l'assemblée générale desdits habitants , mercredi 15 avril 1789 (1). PRÉLIMINAIRES. Les habitants recommandent à leurs députés de rejeter la proposition qui pourrait être faite de procéder en commun, par les trois ordres, à la rédaction d’un seul cahier, à moins que les deux ordres du clergé et de la noblesse ne renoncent (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. à leurs exemptions, privilèges et à leurs droits sur les personnes et les propriétés des habitants et cultivateurs, ou au moins en consentent le rachat. CHAPITRE PREMIER. Etats généraux. Art. 1er. Il sera arrêté qu’en toutes délibérations la pluralité des voix individuelles représentées formera la décision. Si les Etats généraux n’accordent pas cet article, il sera arrêté, mais provisoirement seulement et jusqu’à la prochaine assemblée des Etats, que les délibérations passeront à la pluralité des voix par tête et non par ordre. Art. 2. Que les Etats généraux examineront s’ils sont suffisamment constitués pour former le corps législateur. Nous pensons que, pour former ce corps législateur, il est essentiel qu’il y ait la plus grande liberté dans les élections, lesquelles seront toujours faites au scrutin ; en second lieu, la plus parfaite représentation de toutes les parties de la nation, à raison de leurs forces respectives, du nombre des citoyens domiciliés et sans égard à leurs privilèges, sans distinction d’ordres, corporations ni à leurs professions, soit à la ville, soit à la campagne, et sans différence d’influence sur la formation de la loi. Art. 3. L’ordre du tiers, si les deux ordres ne se réunissent pas à lui, sera toujours présidé par un des membres du tiers qui sera élu au scrutin, ainsi que le secrétaire dudit ordre. Art. 4. Il sera expressément et formellement arrêté que les pouvoirs constitutifs et législatifs appartiennent à la nation assemblée et présidée par le Roi ; que la nation est censée assemblée dans les Etats généraux régulièrement composés et organisés ; que les membres composant l’assemblée seront personnes libres et inviolables, et qu’ils ne sont responsables de ce qu’ils disent et font dans l’assemblée, qu’à l’assemblée même et à leurs commettants ; que ces membres qui forment l’assemblée graduelle et élémentaire ont les mêmes droits. Que les Etats généraux donneront aux assemblées particulières les pouvoirs suffisants pour les convocations des assemblées qui auront lieu, à l’avenir, périodiquement. Les Etats généraux déclareront abolis les impôts actuels, les rétabliront néanmoins provisoirement, et seulement pour la tenue des Etats. CHAPITRE II. Constitution . Art. 1er. Les Etats généraux fixeront leur première assemblée à deux ans, depuis la dissolution de la prochaine, et ensuite à douze ans celles qui suivront. Art. 2. Il y aura une assemblée extraordinaire, en cas de guerre déclarée contre l’Etat; si les Français sont agresseurs, il ne| pourra être fait aucune déclaration de guerre contre aucune puissance sans le consentement de la nation, et encore en cas de changement de règne et de régence ; dans tous ces cas l’assemblée générale sera convoquée dans le délai de six semaines. Art. 3. A la dissolution de l’assemblée générale et dans l’intervalle jusqu’à la suivante, il sera formé une commission intermédiaire et permanente, laquelle sera composée de membres amovibles et autres que les membres de Rassemblée générale; l’utflité de cette commission serait inappréciable.