078 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [26 juillet 1791.] de faire des sacrifices, et sans lequel on ne peut jouir des heureux effets d’un tarif unique perçu également à toutes les frontières. Je dois donc conclure à l’abolition du privilège de Bayonne; et pour me servir de l’expression que me fournissent les mémoires des Bayonnais eux -mêmes, je dois dire anathème à la franchise de Bayonne. En conséquence, je demande la révocation de la franchise et la réunion de tout le pays basque à l'intérieur, en portant de ce côté les barrières aux frontières du royaume. Cependant je croirais juste et utile, après avoir posé les principes de l’uniformité, de faire une espèce d’exception en faveur du pays de Labour: elle consisterait à reconnaître comme poisson ae pêche nationale, les sardines pressées à Bayonne et à Saint-Jean de-Luz. Ces sardines sont à la vérité pêchées en grande partie par les Espagnols sur les côtes de Galice ; mais : 1° la presse est une véritable main-d’œuvre ; 2° le bas prix de cette denrée l’a rendue de première nécessité dans un pays où le peuple a peu de ressource. Cette exception ne pourrait tirer à conséquence pour nos pêches, parce qu’elle doit être bornée à la consommation du pays, en établissant que ces sardines ne pourraient être réexportées par mer comme poisson de pêche française. D’après ces considérations, j’ai l’honneur de proposer à l’Assemblée nationale, au nom du comité d’agriculture et de commerce, le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité d’agriculture et de commerce sur la franchise actuelle de Bayonne et du ci-devant pays de Labour, décrète ce qui suit: « Art. 1er. A compter du 1er octobre prochain, la perception des droits de traites, portée aux frontières du royaume, et les lois rendues pour assurer cette perception, seront exécutées dans toute l’étendue des départements des Hautes et Basses-Pyrénées, sans aucune exception. <« Art. 2. Les sardines, quelle que soit leur origine, importées en vert à Bayonne et à Saint-Jean-de-Luz, sur bateaux et avec équipage français, seront réputées nationales; cependant elles ne pourront être expédiées par mer desdits ports, comme sardines nationales, pour d’autres ports du royaume où elles y seraient traitées comme étrangères. « Art. 3. Le roi sera prié de donner les ordres les plus prompts pour assurer l’exécution du présent décret, et notamment pour empêcher l’introduction en fraude dans le royaume, des marchandises étrangères qui existent en ce moment à Bayonne et dans le ci-devant pays de Labour.» ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DEFERMON. Séance du mardi 26 juillet 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures du soir. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance du samedi 23 juillet au soir, qui est adopté. M. le Président fait donner lecture des adresses suivantes : Adresse de la garde nationale de Valenciennes , qui s’élève avec force contre les factieux qui essayent de troubler les séances de l’Assemblée, et déclare qu’elle veut vivre ou mourir sous le régime libre et monarchique que les décrets de l’Assemblée ont donné à la France, et qu’elle jure de soutenir et défendre, jusqu’à la dernière goutte de son sang, tant contre les ennemis du dehors que contre ceux du dedans. Lettre des administrateurs composant le directoire du département du Calvados, qui expriment leur attachement aux principes de la monarchie solennellement consacrés par le décret du 15 de ce mois. Lettre des membres du conseil général de la commune de Caen. « Bientôt, disent-ils, vous verrez tous les Français se réunir dans le sanctuaire des lois ue vos mains ont élevé et la postérité à l’abri e tous les préjugés, de toutes les passions qui nous agitent aujourd’hui, répétera vos noms avec reconnaissance. » Lettre de la Société des amis de la Constitution de Caen. « Les législateurs eux-mêmes, disent-ils, ne pouvaient pas donner l’exemple de l’infraction à la loi. Si malheureusement vous aviez cédé aux clameurs, c’en était fait de la Constitution. La plus désastreuse anarchie était substituée au despotisme, et plus redoutable mille fois que ce dernier, elle eût anéanti le fruit de 2 ans d’un travail infatigable. Nous avons reçu le décret avec reconnaissance. Le calme règne dans nos murs, les factieux n’osent plus élever la voix. « Vous avez évité le piège que des hommes, couverts du masque du patriotisme, vous tendaient. Vos devoirs sont remplis. Hâtez-vous d’achever votre ouvrage ; laissez murmurer les passions. La postérité vous jugera, vous avez donné une grande leçon de modération aux rois. » Lettre des amis de la Constitution de Tiennes. « Avant l’émission de la loi, disent-ils, tout Français doit concourir à sa perfection ; les discussions sont et permises et nécessaires ; quand la loi a parlé, il n’existe plus de volontés particulières. Si, dans l’ordre social, chaque citoyen donnait pour règle de décision son opinion personnelle, à la place du gouvernement, on ne verrait plus qu’une funeste anarchie. « Vous avez su vous défendre de l’exaltation qui, dans ses spéculations trompeuses, prend ses désirs pour l’ordre facile à réaliser, et de la faiblesse qui, prosternée aux pieds de l’idole qu’elle-même a construite, n’oserait envisager ni punir les crimes qui compromettent le salut de l’Empire. « Achevez promptement la Constitution de la France. Que l 'acte constitutionnel soit entre les peuples et les ennemis. Les ennemis ne sont pas seulement ceux qui donnent des larmes perverses au régime oppresseur. Les factieux sont plus dangereux encore ; ils respirent une subversion totale, et l’anarchie ramène au des-(1) Cette séance est incomplète au Moniteur.