56 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 11 Le représentant du peuple Boisset annonce à la Convention nationale que son Adresse au peuple français a été reçue dans les départemens de Saône-et-Loire et de l’Ain, avec les sentimens de la plus vive reconnoissance et que partout le peuple s’écrioit : vive la Convention nationale! elle a sauvé le peuple. Insertion au bulletin (25). [Boisset, représentant du peuple envoyé dans les départements de l’Ain et Saône-et-Loire, à la Convention nationale, Autun, le 26 vendémiaire an III ] (26) Citoyens collègues L’ame douce et vertueuse pourra désormais respirer sous l’ombrage des principes, votre sublime adresse a fait naître dans tous les coeurs l’espoir d’un avenir heureux. Les citoyens paisibles ont vu disparaître les jours de sang; le fleuve désorganisateur qui roula dans ses ondes les forfaits et les vices, a remonté jusqu’à sa source, et s’est perdu dans de vastes abymes ; la liberté a déchiré le voile dont elle étoit couverte ; elle a paru rayonnante de gloire, belle dans sa simplicité, et telle qu’elle descendit sur la terre pour habiter parmi les premiers hommes. Vous avez fait un grand pas vers l’immortalité, vous avez acquis la reconnaissance des générations futures; votre énergie, vos vertus ont rattaché les palmes civiques que quelques instans de faiblesse avaient enlevées au faisceau qui doit couronner vos ouvrages. Le bon citoyen livré à ses occupations, à son travail va jouir au sein de la famille, il pourra dire en paix : « mes enfans, si je vis, si mes mains caressent votre front innocent, si je cultive les dons que la nature vous a fait, si mon industrie vous donne l’existence et accroit votre force, c’est que la Convention nationale qui a proclamé la République en punissant les rois, a aussi frappé les conspirateurs, a puni un triumvirat odieux et ses complices, a écrasé Robespierre et l’hydre tyrannique qui vouloit lui succéder! c’est que la Convention a tendu une main secourable aux infortunés qui, plongés dans les cachots, mouraient victimes des vengeances particulières, c’est qu’enfin la Convention nationale digne du grand peuple qu’elle représente, a commandé la victoire, chassé l’ennemi au delà du Rhin et anéanti les anarchistes fripons qui voulaient reporter dans l’intérieur la désolation et l’effroi! Déjà l’agriculteur sourit à vos vues, à vos projets ; il pousse avec plus de courage la charrue; ses cheveux blanchis par le travail et les (25) P.-V., XL VIII, 42-43. (26) C 323, pl. 1376, p. 17. Bull., 5 brum., dans cette gazette la formule de salutation est : « Courage, union, fraternité. »; J. Fr., 760. ans, se jouent sur son front couvert de rides, et la gaité s’imprime dans tous ses traits! Vous dirai-je comment elle a été reçue, votre adresse, par le département de Saône-et-Loire et de l’Ain? Rendre les touchantes expressions de la reconnaissance des citoyens, peindre les sentiments divers qui agitaient toutes les âmes, vous tracer les élans de la joie et de la sensibilité, sont au-dessus des forces humaines : il est impossible de bien rendre ce que le coeur sent, ce qu’il éprouve. J’ai vu les larmes des citoyens s’échapper en torrent de leurs paupières brûlantes ; j’ai vu tous les patriotes se jetter dans les bras l’un de l’autre ; j’ai vu partout le peuple, en sanglottant de plaisir, crier d’une voix éteinte par la surprise du sentiment : Vive la Convention! elle a sauvé le peuple! Citoyens collègues, vous la deviez à un peuple libre et si digne de l’être, votre éloquente et simple adresse ; tout le monde l’entend, chaque citoyen la dévore ; elle s’imprime en traits de feu dans toutes les âmes; elle prend place dans toutes les communes, sociétés populaires, sous la chaumière du laboureur, dans l’azile du commerçant, à côté de la déclaration des droits de l’homme. Votre adresse est aujourd’hui le palladium du gouvernement révolutionnaire et de la liberté ; tout le peuple ici périra plutôt que d’y laisser porter atteinte. Je continue à organiser les autorités constituées, à rendre la liberté aux patriotes et aux infortunés. Continuez à soutenir les droits du peuple : vous avez la confiance entière, et vous en êtes dignes. Courage, union, fermeté; tout à vous. Boisset. 12 Les citoyens Bertrand et Yoanne, anciens militaires, chargés par la Convention nationale de porter à l’armée du Rhin le drapeau qu’elle lui avoit décerné, annoncent qu’il a été reçu par tous les républicains de cette armée avec le plus vif enthousiasme aux cris répétés de vive la République! vive la Convention! vivent les Français ! aux sons de la musique et au bruit du canon. Us ajoutent que les tableaux de la déclaration des droits de l’homme et de l’acte constitutionnel, ont aussi été reçus avec le même enthousiasme. Mention honorable, insertion au bulletin (27). (27) P.-V., XL VIII, 43. SÉANCE DU 4 BRUMAIRE AN III (25 OCTOBRE 1794) - N° 13 57 [Les citoyens Bertrand et Yoanne, anciens militaires, à la barre de la Convention nationale, le 4 brumaire an III] (28) Pères de la Patrie, Vous voyez à votre barre deux de vos enfants qui pour le soutien des droits du peuple, dési-reroient n’y pas être afin d’être utiles aux frontières à repousser les satellites des tyrans couronnés. Les combats que nous avons essuyés nous privent d’une partie de nos membres, mais n’a rien diminué en nous pour le courage; et s’il étoit encore besoin de courir venger la Représentation nationale, nous ne serions pas les derniers. Le sort à la maison nationale des invalides où est notre résidence a fait choix de nous pour vous présenter nos hommages le 5e jour de la sans-culotide et d’assister aux honneurs que vous avez rendus à l’Ami du peuple, et nous a procuré l’avantage de voir nos généraux sous les ordres desquels nous avons acquis nos blessures. Chargés par la Convention nationale de porter le drapeau quelle a décernée à l’armée du Rhin, nous ne pouvons pas lui dire l’enthousiasme avec lequel tous les républicains de cette armée l’a reçûe, ainsi que les tableaux de la Déclaration des Droits de l’homme et l’acte constitutionel. Tous les cris de vive la République, vive la Convention, vive les Français, ont retentit au milieu de deux cent mille soldats, au bruit du canon et de la musique, en face des armées des despotes. Après l’inauguration, la voiture sur laquelle nous étions placés a été entourée de dix mille défenseurs. Nous soutenions la Déclaration et l’acte constitutionelle et le drapeau de la nation française au milieu de ce cortège y a resté tout le tems de notre séjour. Trois attaques ont été faites devant nous, les 13, 17, et 20 vendémiaire, nous avons vus avec égal courage les Représentans du peuple, les généraux et les soldats, tous charger l’ennemi avec la même valeur. Nous avons vus ces esclaves mordrent la poussière, nous avons suivis les représentants Féraud, Neveu et le général Michaud, qui ont fait flotter le drapeau que nous avons porté au milieu de la plus grande victoire. L’ennemi a été repoussé de trente quatre lieues, nous avons vus arrêter leurs convois, dix sept voitures chargées de vivres, le courrier portant les correspondances de Worms et Malène. Il y a eut six cents de ces coquins en bas, trois cents faits prisonniers et cinq cents chevaux de pris avec leurs hussards. Nous n’avons rien autre à vous dire que de vous remercier des honneurs que nous avons (28) C 325, pl. 1403, p. 31. Bull., 4 brum.; J. Mont, n° 13; Débats, n° 762, 504; Moniteur, XXII, 354; J. Fr., n° 760; M. U., XLV, 76; F. de la Républ., n° 35. reçus, nous sommes chargés de vous remettre un paquet de la part du général en chef. Yoanne, Bertrand. [{On applaudit.)] (29) 13 On fait lecture d’une lettre du général en chef Michaud, commandant l’armée du Rhin. Elle renferme les expressions de la plus vive reconnoissance pour le don du drapeau fait par la Convention nationale à cette armée ; elle annonce qu’elle est déjà sous les armes, impatiente d’en faire sentir tout le prix à l’ennemi. Mention honorable, insertion au bulletin (30). Un secrétaire fait lecture de la lettre suivante, renfermée dans le paquet (31). [Michaud, commandant l’armée du Rhin à la Convention nationale, au quartier général à Neustadt, le 20 vendémiaire an III] (32) Citoyens Représentants, A la vue du drapeau que la Convention a - envoyé à l’armée et des héros mutilés qui en le portant, ajoutaient à sa majesté, les soldats de cette armée ont éclaté par des acclamations unanimes, qui prouvent combien ils sont sensibles au souvenir et aux regards de la patrie, et combien ils sont empressés de décerner à leur tour à la Convention les honneurs du triomphe pour ses travaux et ses succès. L’enthousiasme républicain, un frémissement guerrier se sont mêlés aux sentiments et aux expressions de notre reconnaissance. Nous n’avons pas renouvellé le serment de vaincre; mais nous sommes déjà tous sous les armes, impatiens de faire sentir à l’ennemi le prix de vos dons. Portées dans les combats, ces couleurs nationales feront baisser devant elles les orgueilleuses enseignes des despotes. Flottantes sans cesse à nos yeux, elles nous rappelleront qu’elles se flétriraient si elles n’étaient pas ombragées par des lauriers. L’armée a reçu avec la même satisfaction un autre drapeau, auquel tous les enfants de la patrie se sont ralliés depuis longtemps, les Droits de l’homme et l’Acte constitutionnel; celui-là a déjà vaincu; il a fait le tour du globe, porté l’épouvante et la terreur dans les palais, et secoué la mort chez les tyrans. Ah ! combien, en lisant le livre de notre constitution, cette horde de despotes, partout battus, partout (29) Débats, n° 762, 504. (30) P.-V., XL VIII, 43. (31) Moniteur, XXII, 354. (32) C 323, pl. 1376, p. 16. Bull., 4 brum.; Moniteur, XXII, 354-355; Rép., n° 35; J. Perlet, n° 762; M.U., XLV, 100; F. de la Républ., n° 35; J. Mont., n° 13.