550 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE bien connoître par lui-même les points par lesquels on pourroit attaquer, se dépouilla de l’uniforme de général, prit celui de soldat, et feignit d’être en sentinelle perdue [(avec un fusil de munition au bras)] (90). L’ennemi tira sur lui plusieurs coups de carabine, mais ne s’attachant point à sa personne avec autant d’acharnement que s’il eût cru fusiller un chef, le général Vincent eut le temps de bien recon-noître, et la position du fort et celle où l’on pourroit établir des batteries. Il profita de la nuit pour faire tous les ouvrages nécessaires à l’attaque de cette place. Son artillerie de position, augmentée de quatre obusiers et de quatre pièces de douze, fut amenée devant la citadelle, contre laquelle avoit aussi marché la division du général Lebrun. Vainement l’ennemi voulut-il faire usage des batteries, tant du fort que de celles placées sur la rive droite, où il avoit un nombre considérable de pièces de gros calibre; les moyens développés par le général Vincent lui parurent si décisifs, que les troupes qui com-posoient la garnison du fort, se sont précipitées sur la rive droite; et cette place, où il paroît par tout ce qu’on y a laissé, qu’on avoit l’intention de la défendre longtems, est tombée de cette manière au pouvoir de la République. Nous y avons trouvé 39 bouches à feu, dont la majeure partie en bronze et de gros calibre, des mortiers, des fusils, 250 tentes presque toutes d’officiers, des munitions de guerre et de bouche de toutes espèces et en très grande quantité, particulièrement en poudre, et en outre un château dont tous les appartemens, meublés d’une manière distinguée, donnent à penser que l’ennemi ne s’attendoit pas à en être sitôt délogé. Il croyoit bien, en nous abandonnant cette place, qu’il nous alloit faire regretter de nous en être approchés; il y avoit préparé tous les moyens de la faire sauter aussitôt que nous y serions entrés. On a trouvé dans un des souterrains une mèche allumée, qui devoit communiquer le feu au magasin à poudre, et à plusieurs bombes dont l’explosion alloit avoir lieu, quand le génie tutélaire qui veille sur tous les républicains, nous l’a fait appercevoir assez tôt pour l’empêcher. Les magistrats de Giwerbs que le fort de Reinfelds défend, sont venus nous apporter les clefs de la ville : je vous les envoie avec celles de Coblentz qui n’avoient pas été remises aussitôt l’entrée de nos troupes dans cette place, dont les habitans paroissent ne pas s’habituer facilement à nos figures, et moins encore à nos moeurs républicaines. Salut et fraternité. Signé, Bourbotte (91). (90) Moniteur, XXII, 458. (91) Bull., 18 brum. Débats, n° 776, 686-687; Moniteur, XXII, 458; C. Eg., n° 812; Ann. Patr., n° 677; Mess. Soir, n° 813; Ann. R. F., n° 47 et 48; J. Fr., n° 774; J. Perlet, n° 776; M. U., XLV, 307-308; J. Univ., n° 1808; Gazette Fr., n° 1041; J. Paris, n° 49; Rép., n° 49; J. Mont., n° 26; F. de la Républ., n° 49. Sur la proposition [de RICHARD, au nom] du comité de Salut public, la Convention nationale décrète que l’armée de la Moselle ne cesse de bien mériter de la patrie. Sur celle d’un membre, elle décrète qu’il sera fait mention honorable et insertion au bulletin de l’action héroïque du général Vincent (92). Ces propositions sont décrétées au milieu de la joie générale qui se manifeste de la manière la plus éclatante et se prolonge longtemps (93). 32 RICHARD : Le comité de Salut public est occupé en ce moment d’une opération importante, sur laquelle l’intérêt public lui commande de garder le secret; il a besoin ici d’un grand témoignage de confiance de la Convention : il est important, indispensable qu’il envoie deux représentans pour cette opération. Il demande que vous l’autorisiez à les envoyer, et même les désigner particulièrement. Décrété. RICHARD : Le comité demande à être autorisé à les choisir, même parmi ceux qui ne seraient pas revenus de mission depuis trois mois. Décrété (94). Un membre [RICHARD], au nom du comité de Salut public, propose le décret suivant, qui est adopté. La Convention nationale, sur la demande de son comité de Salut public, l’autorise à envoyer en mission, pour une opération secrète, deux représentans du peuple à son choix. Ils pourront être pris même parmi ceux qui sont de retour de mission depuis moins de trois mois (95). 33 RICHARD : Le comité vous a fait distribuer, il y a quelques jours, un projet de décret pour les nominations aux emplois vacans dans l’armée. Nos braves frères d’armes servent trop bien la patrie, pour que vous ne vous empressiez pas de vous occuper d’eux. (On applaudit.) (96). (92) P.-V., XLIX, 55-56. Débats, n° 776, 687 ; Moniteur, XXII, 458 ; Bull., 18 brum. (93) Débats, n° 776, 687 ; Moniteur, XXII, 458. (94) Débats, n° 776, 687-688; Moniteur, XXII, 458; C. Eg., n° 812; Ann. Patr., n° 677; Mess. Soir, n° 813; Ann. R. F., n° 47; J. Fr., n° 774; J. Perlet, n° 776; M. U., XLV, 299; F. de la Républ. n° 50 ; Gazette Fr., n° 1042 ; J. Paris, n° 49 ; Rép., n° 49; J. Mont., n° 26. (95) P.-V., XLIX, 56. C 322, pl. 1368, p. 38, minute de la main de Richard; rapporteur anonyme selon C* II 21, p. 24. Bull., 18 brum. ; Débats, n° 776, 687-688; Moniteur, XXII, 458. (96) Débats, n° 776, 688.