1 Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES [8 juin 1790.] 145 M. l’abbé Grégoire. Ces établissements sont dotés des biens de l’Eglise : il n’en faut pas moins les supprimer. M. Dnquesnoy. Il serait inconcevable de laisser subsister des corps qui n’existent que sur des biens ecclésiastiques, quand ces biens appartiennent à la nation. (On ferme la discussion.) M. Duval d’Eprémesnil. Je demande que l’Assemblée décrète qu’avant de statuer sur cet article, il lui sera rendu compte des adresses envoyées par les villes sur les établissements ecclésiastiques. Je demande que mon amendement soit rejeté de bonne foi par un décret, pour que l’on sache que l’Assemblée n’a pa3 voulu connaître le vœu des peuples. (L’Assemblée décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur cette observation.) L’amendement de M. Duquesnoy est adopté et l’article se trouve rédigé en ces termes : * Art. 19 (ancien art. 31). Tous titres et offices autres que ceux mentionnés en la présente constitution, les chapitres, les dignités, canonicats, prébendes, demi-prébendes, chapelles, chapellenies, tant des églises cathédrales ou collégiales, que de tous autres chapitres réguliers ou séculiers de l’un et l’autre sexe, les abbayes et prieurés en règle ou en commende aussi de l’un et de l’autre sexe, et tous autres bénéfices ou presti-monies généralement quelconques, de quelque nature et sous quelque dénomination que ce soit, sont, à compter du jour de la publication du présent décret, éteints et supprimés, sans qu’il puisse jamais en être établi de semblables à l’avenir. » M. Martineau. Il est essentiel d’ajouter un article additionnel, par lequel l’Assemblée se réservera de statuer sur le sort des différents titulaires dont il est question dans cet article. M. Charles de Cameth. Il faut décréter sur-le-champ cette proposition, sauf rédaction, pour ne pas laisser d’inquiétude aux titulaires. L’Assemblée décrète ce qui suit : « Art. 20. Il sera statué par un décret particulier, sur les bénéfices simples ou prestimonies qui sont en patronage laïc ou à collation laï-cale. » M. Ce Chapelier. La commune de Paris vient d’écrire à M. le président et au comité de constitution, pour renouveler la demande qu’elle avait déjà faite, que, lors de la fédération, les départements députent aussi des officiers civils. ' M. Le Chapelier rappelle les motifs qui ont ce malin déterminé à rejeter cette proposition. L’Assemblée persiste dans le décret qu’elle a rendu à ce sujet. La séance est levée à 3 heures et renvoyée à ce soir 6 heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. L’ABBÉ GOUTTES, EX-PRÉSIDENT. Séance du mardi 8 juin 1790, au soir (1). La séance est ouverte à 6 heures du soir. M. l’abbé Gouttes, ex-président , occupe le fauteuil par suite de l’absence de M. Sieyès, président. M. de Pardieu, secrétaire , fait lecture de l’extrait des adresses suivantes : Adresse de la garde nationale de la ville de Reims, portant l’expression de son respect et de sa reconnaissance; elle renouvelle le serment civique, et déclare traîtres à la patrie tous ceux qui, par des voies ouvertes ou des moyens détournés, chercheraient à nuire aux progrès de la Révolution si heureusement opérée pour le bonheur de la France. Adresses de félicitation, adhésion et dévouement des nouvelles municipalités, des communautés de Samte-Cülombe-de-Roequefourtès,dans le département de l’Aude, de Bousquet, district de Quillan, dans les Pyrénées, et de Villars, près Pons, en Saintonge. Adresse des officiers municipaux, notables, et de la milice nationale de Yitrey, district de Jussex, département de la Haute-Saône; ils supplient l’Assemblée de ne pas oublier les habitants des campagnes dans la prochaine organisation des milices nationales: « car, disent-ils, leur étabiis-« sement provisoire a ramené l’ordre et la tran-« quillité dans ces contrées, et nous nous croirions « privés du beau droit de citoyens français, si « nous n’avions l’honneur de défendre et assurer « notre mémorable Constitution, qui, d’esclaves « que nous étions, nous a rendus des hommes « libres ». Adresses des gardes nationales de la ville de Bourges, de celles de Sainte-Sezanne, de Poligny, département du Jura, et de celle de Besançon; elles s’élèvent avec force contre la déclaration d’une partie de l’Assemblée nationale. Adresse des officiers municipaux de la commune de Selongey; on y lit ces paroles remarquables: « Nous déclarons qu’également amis de l’ordre, « et ennemis de l’oppression, de quelque part « qu’elle vienne, nous accorderons à tous les « citoyens sur le sort desquels les organes de la « loi n’auront pas prononcé, l’appui et les secours & que toute âme honnête doit à l’innocence en « butte à des violences illégales ». Adresse de la communauté de Lorlange, département de la Haute-Saône; elle se soumet d’acquérir des biens nationaux pour la somme de 1,200 livres. Adressede lacommunauté d’Auzay , département de la Vendée ; elle fait une soumission pour le même objet, de la somme de 200,000 livi es. Adresse de la ville de Dol en Bretagne ; elle dénonce la protestation de l’évêque et du chapitre de cette ville contre le décret du 13 avril dernier concernant la religion. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. 10 lre SÉRIE. T. XVI. 146 [Assemblée nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 juin 1790.] Adresse de Ja ville de Bayeux, contenant une dénonciation semblable contre son évêque. Adresse de la ville de Provins, qui adhère avec une admiration respectueuse au notamment décret concernant de faire la paix et la guerre. Adresse de la ville d’Auxerre, qui rend compte de la fédération de la garde nationale du département de l’Yonne, qui a eu lieu dans cette ville le 31 mai dernier'; elle annonce que tout s’y est passé dans Je plus bel ordre, avec des démonstrations de la plus grande cordialité et d’un dévouement absolu pour l’exécution de tous les décrets de l’Assemblée nationale. Adresse des six municipalités composant l’annexe de Vers ; elles demandent que cette annexe soit érigée en cure. Adresse des brigadiers et dragons du régiment de la reine, en garnison à Laon, qui expriment le plus vif désir de cimenter, par un pacte fédératif, l’union de leurs forces à celles de la garde nationale, pour le maintien de la nouvelle Constitution, et l’entière exécution des décrets de l’Assemblée nationale sanctionnés par le roi. Adresse de la garde nationale de Lorris, en Gàtinais. Adresse de la commune de Moissac, et de celle de Bonnevaux, en Franche-Comté. Adresse de la municipalité de Ceaux, département de la Vienne, portant soumission d’acquérir pour 40,000 livres de biens nationaux. Adresses des religieux carmes et cordeliersdela ville de Tarbes; ils offrent à l’Assemblée le premier hommage de la liberté qu’elle leur a rendue, en prêtant entre ses mains le serment civique. Adresses des assemblées primaires des cantons deSaint-Simon, districtde Saint-Quentin; Chaource, département de l’Aube; Chaunay, département de la Vienne; de Nérac, département de Lot-et-Garonne; de Monségur, département de la Gironde ; de Seissan ; de la ville de Montpellier; de Chesley, département de l’Aube; de la ville de Dunkerque; de Nevian, département de l'Aude; de Marolles, département de la Sarthe ; de Pellegrue en Albret ; de la ville de Condom; de Villefranche; d’Albi-geois; de Gradignan près Bordeaux; de la ville de Niort et des environs, département de Saône-et-Loire; des districts de Neuville, département du Loiret, et de Ghâteauneuf-en-Thimerais. Adresses des assemblées électorales du département de la Marne, de celui de la Haute-Marne, de celui de Saône-et-Loire, et, enlin, de celui de la Meurthe : toutes ces assemblées consacrent les premiers moments de leurexistence pour présenter à l’Assemblée l’hommage d’une adhésion respectueuse à tous ses décrets, et d’un dévouement sans bornes pour en maintenir l’exécution. La plupart improuvent expressément la déclaration d’une partie de l’Assemblée, ainsi que tous les écrits qui tendent à affaiblir le respect et la confiance dus à ses décrets; elles supplient l’Assemblée de ne pas se séparer avant d’avoir consommé le grand ouvrage de la Constitution. Adresse des électeurs du district de Gien, portant adhésion aux décrets de l’Assemblée natio-tale acceptés ou sanctionnés par le roi ; elle improuve une protestation qui paraît revêtue de la signature de plusieurs membres de l’Assemblée nationale, et désavoue hautement ceux des députés chargés de la représentation des différents pays compris dans ce district, qui ont pu, par erreur, participer à cet acte. Délibération des habitants de Saint-Cyr, dans le district de Châtillon-lès-Dombes, département de l’Ain, portant adhésion et soumission respectueuse aux décrets de l’Assemblée nationale, plus, abandon, au profit de la nation, de l’imposition des ci-devant privilégiés pour les six derniers mois de 1789. A la suite est une déclaration du sieur Berthet, curé et maire du même lieu, portant qu’il n’a pas voulu prendre possession ni résigner un canoni-cat auquel il a été nommé dans le chapitre de Châtillon, depuis un an, pour éviter à la nation le paiement d’une pension. Délibération des habitants de la Perouze, dans le département de l'Ain, portant adhésion aux décrets de l’Assemblée nationale, et abandon de Pim position des privilégiés des six derniers mois de 1789. Adresse de la ville de Chalençon , en Vivarais, qui improuve la délibération des citoyens catholiques de Nîmes. M. l’abbé Latyl fait lecture d’une adresse des écoliers des prêtres de l’Oratoire, de Nantes, qui font don d’une somme de 410 livres. L’Assemblée autorise ce membre à leur écrire une lettre de satisfaction. M. de Pardieu, secrétaire , reprend la lecture des adresses ainsi qu’il suit : Autre adresse de la municipalité de Montpellier, qui prie PAssemblée de recevoir sa soumission pour l’acquisition de biens nationaux à sa convenance, jusqu’à la concurrence de quatre millions, avec prière de lui permettre d’augmenter son offre, lorsque les commissaires qu’elle aura nommés auront découvert d’autres biens nationaux à sa convenance. Délibération de la commune de Carcassonne, contenant sa soumission pour achat de biens nationaux, jusqu’à concurrence de quatre millions. M. J aillant annonce qu’il a remis au comité ecclésiastique une soumission de la ville de Sens, pour acquérir pour douze millions de biens nationaux, indépendamment de sa première soumission, montant à huit millions. M. de Pardieu, secrétaire , continue l’énoncé des adresses et délibérations : Délibéra tion de la commune générale de Vannes, portant soumission de deux millions quatre cent mille livres , pour l’acquisition de biens nationaux. Adresse des commissaires du roi du département du Morbihan, par laquelle ils annoncent les transports d’allégresse qu’a excités dans l’Assemblée générale du département la proclamation du roi. Adresse de la municipalité de Toulon, portant adhésion aux décrets de l’Assemblée nationale; envoi d’un pacte de confédération des. troupes nationales dans différents corps de cette ville, et des troupes réglées qui y sont en garnison; enfin, une dénonciation de M. l’évêque de Toulon, sur le refus qu’il fait de prêter le serment civique, et sur une lettre pastorale et un mandement par lui adressés aux religieux et religieuses de son diocèse, et contenant des principes opposés à ceux de la Constitution. A celte adresse est jointe une lettre de M. l’évêque de Toulon à la municipalité de cette ville, en date du 14 mai 1790. L’Assemblée nationale, après avoir entendu la lecture de l’adresse et de la lettre, en ordonne le renvoi au comité des rapports. [Assemblée nationale.] «ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 juin 1730.] Adresse de la municipalité de Beaumont-lès-Lo-magne, qui fait à la nation le don patriotique des iiapositions des ci-devant privilégiés, pour les six derniers mois de 1789. Autre adresse d’adhésion, de félicitation de la ville de Boulogne, enGomminges, qui offre d'acheter l'abbaye de Nifort, avec toutes ses dépendances. Adresse des maîtres écrivains de la ville < de Bordeaux, qui font don à la nation de deux contrats au principal de 1,920 livres, formant, avec tes intérêts échus, la somme de 2,136 livres. M. Hernoux propose d’ajourner à samedi soir, au premier ordre du jour, la discussion du rapport des comités d’agriculture et de commerce, sur la compagnie des Indes. Cette motion est adoptée. M. ISoulIé, membre du comité des 'rapports, fait le 'résumé de l’affaire de Samt-Jean-de-Luz, dont il a rendu compte dans la séance de samedi soir, 5 juin. Des jeunes gens de la ville ont offert de payer une contribution égale à trois journées de travail en demandant à être admis à l’assemblée de la ville. Ayant été refusés, ils se sont rendus chez un notaire et ont fait constater le refus qu’ils ont éprouvé. Us sont ensuite revenus à l’assemblée électorale où leur présence a répandu le trouble ; une partie des citoyens actifs s’est retirée alors à l’hôtel de ville et y a formé une municipalité. De leur côté, les dissidents ont constitué d’autres municipaux, ont organisé une nouvelle garde nationale ; puis vingt hommes armés ont pris chez eux les membres de l’ancienne municipalité, les ont conduits à l’hôtel de ville et les ont forcés à consentir aux nominations qui avaient été faites. Le rapporteur termine en proposant un projet de décret, pour valider les premières élections et annuler les secondes. M. de JMaeaye rend un compte détaillé de toute cette affaire et dit que les deux partis en présence dans la ville ont eu des torts réciproques. Il combat le projet de décret du comité et en présente un autre. On demande la priorité pour le projet de M. de Macaye. Cette priorité est accordée et le décret est rendu, sauf rédaction, dans les termes suivants : «L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports, instruite que, malgré les dispositions formelles de son décret du’ 18 avril dernier, rendu pour la ville de Saint-Jean-de-Luz en particulier, de nouvelles difficultés, de nouveaux obstacles et de nouveaux troubles suspendent encore, dans cette ville, l’exécution des décrets constitutionnels pour la formation des municipalités ; que même, en contravention à ces décrets, et malgré les oppositions des anciens officiers municipaux, il s’y est tenu des assemblées, et qu’on a vu y procéder à des élections , déclare nulles et inconstitutionnelles toutes élections déjà faites ou qui pourraient l’être contre la teneur de ces décrets, depuis le premier janvier dernier. , « Décrète que, conformément à leur disposition, et particulièrement en exécution de celui du 18 avril dernier, les anciens officiers municipaux convoqueront l’assemblée des citoyens actifs de cette ville, pour la nomination de la nouvelle municipalité, après que les commissaires du département des Basses-Pyrénées, dans lequel se trouve comprise la ville de Samt-Jean-de-Luz, auront formé la liste des citoyensactifsde Saint-147 Jean-de-Luz, d’après les rôles des impositions directes de la capitation et des vingtièmes de ladite ville, après avoir préalablement vérifié si la totalité ou une partie des revenus publics et communaux de Saint-Jean-de-Luz est -appliquée au payement desdites impositions; et dans te cas où la totalité ou uneipartiede ces revenus serait employée à payer lesdites impositions directes de la capitation «et des vingtièmes; cette totalité ou cette partie des revenus publics sera répartie entre les contribuables auxdites impositions au marc la livre, et ajoutée à leur quote-part d’impositions pour les aider à atteindre le tribut exigé pour être citoyen actif; que la journée de travail demeurera fixée dans cette ville au taux qui avait été déterminé par les officiers municipaux. « Déclare qu’aux termes de ses précédents décrets, et notamment de celui du 7 janvier dernier, et de l’article 4 de celui du 23 février suivant, les anciens officiers municipaux de Saint-Jean-de-Luz sont autorisés à requérir le secours de la municipalité de Bayonne, ou de toute iautre municipalité voisine, ainsique des gardes nationales et des troupes de ligne qui se trouvent dans leur territoire, pour se mettre en état d’assurer l’exécution des décrets acceptés ou sanctionnés par le roi, et opérer en conséquence dans la ville de Saint-Jean-de-Luz le rétablissement de l’ordre, du calme et de la subordination. « Décrète que les armes enlevées de l’hôtel de ville y seront incessamment restituées pour être remises, d’après les ordres et sous la surveillance des officiers municipaux, aux citoyens enrôlés dans l’ancienne milice du Pays de Labour, lesquels, jusqu’à la nouvelle organisation des gardes nationales, formeront celles de Samt-Jean-de-Luz avec les autres citoyens de la môme ville qui pourront y être admis. «Décrète que son président se retirera, sans délai, par devers le roi pour lui demander la sanction du présent décret, et le supplier en même temps de donner les ordres nécessaires, soit à ses commissaires, soit aux chefs de ses troupes ou à tous autres, pour assurer aux anciens officiers municipaux de Saint-Jean-de-Luz, tous les secours qu’ils pourront être forcés de requérir dans l’exercice des fonctions qui leur sont confiées. » L’ordre du jour appelle ensuite un rapport du comité des recherches, sur une arrestation d'argent faite à Nantua . M. Voïdel, rapporteur. L’affaire dont j’ai à vous entretenir s’est trouvée portée au comité des recherches, quoique sous aucun point de vue elle ne puisse le concerner. Je suis cependant chargé de vous en faire le rapport. Le 8 mai dernier, les officiers municipaux dès villes de Nantua et de Châtillon ont arrêté de l’argent expédié pour Genève: les barils contenaient 11,611 piastres, et 600 louis en or. La feuille du conducteur de la messagerie n’était pas chargée de cette dernière somme. Le comité des recherches pense que les piastres doivent être remises à ceux qui les ont expédiées; que les 600 louis doivent être restitués aux négociants qui les avaient envoyés, sauf le recours contre eux en faveur des négociants qui devaient les recevoir; que désormais aucune somme d’argent monnayé ne pourra être expédiée pour le pays étranger, sans une permission contresignée dû-principal ministre de3 finances. M. de Hontlosier. Je prendsoccasion de cette affaire pour dénoncer à l’Assemblée nationale les vexations de toüte sorte ‘qu’éprouvent sur les fron-