m cette police est nécessaire; et il suffit de dire qu’il est indispensable qu’elle soit expressément constituée. Mais sur quels principes doit-elle l’être? Nous en avons adopté deux, qui nous ont paru être des conséquences nécessaires de la Constitution même: le premier est que la police soit très expéditive, tiès énergique, et même sévère; le second est quelle forme une institution très distincte de la justice, et qu’elle soit exercée par des fonctionnaires particuliers. J’observe, à l’appui de notre premier principe, que plus un pays est libre, plus il est dans l’esprit et dans la nécessité de sa Constitution que la police y ait uue grande et puissante activité. La garantie de la liberté est le respect pour les lois; son respect en effet est la plus grande sûreté légale des droits individuels. Celui qui, dans un pays libre, viole les lois émanées de la volonté générale, est bien autrement coupable que celui qui, dans une terre asservie, désobéit aux édits d’un despote. Celui qui, dans un pays libre, attente àla sûreté et à la propriété de ses concitoyens, détruit à leur égard tout l’avantage qui leur était. garanti par la constitution du pays; il forfait à la Constitution même. G est donc pour maintenir au prolit de tous la libe' té et la sûreté, qui sont les premiers biens d’une Constitution libre, que cette Constitution commande une répression très active contre ceux qui, par leurs délits, violent les droits particuliers et alarment la tranquillité générale. C’est donc une grande vérité, dont il nous importe fort de nous bien pénétrer en cet instant, que celle exposée à la page 21 du rapport, qu’avec une police inactive et sans pouvoir, les méchants seuls sont Libres , et les bons seuls sont opprimés . Si dans quelque circonstance la liberté individuelle se trouve gênée par cette activité de la police, par celte nécessité de déférer à ses mandats, la piainte serait dérisoire dans la bouche de l’homme criminel : et à l’égard de l'honnête citoyen, faussement inculpé, peut-il lui en coûter de marquer son respect pour la loi? Son obéissance est un sacrifice passager qu’il doit à l'intérêt social, et à la volonté générale dont la sienue fait partie. N’a-t-il pas en retour Ja protection constante et efficace qui lui est assurée à ce prix vis-à-vis de tous ses concitoyens soumis réciproquement pour son avantage personnel, à l’action de la même autorité? Quant à la séparation de la police et de là justice, les avantages en sont évidents, tant parce que l’institution de la justice a des principes et un esprit tout différents, que parce qm les pouvoirs qui s’exercent immédiatement sur la personne du citoyen, sont ceux qu’il faut tenir divisés avec le plus grand soin, pour éviter qu’ils n’acquièrent, par leur réunion dans ies mêmes mains, une intensité dangereuse et qui pourrait devenir oppressive. Je demande que M. le président mette aux voix cette proposition, uniquement destinée à régler l’ordre du travail, que L'Assemblée va s'occuper immédiatement de l'organisation de la police: et comme il n’est pas présumable qu’il v ait sur cela le moindre dissentiment, les articles relatifs à cette organisation seront de suite proposés à la discussion. Quand nous serons arrivés à la partie de la justice, l’Assemblée decié-tera avec plus de sûreté et plus de facilité ies bases du juré, parce que chacun aura eu davantage le temps de les méditer. fl /a proposition de M. Thouret est adoptée). [28 décembre 1790.] Un membre demande l’impression du discours de M. Thouret. Cette impression est ordonnée par l’Assemblée. M. üuport, rapporteur, fait lecture des deux premiers articles du litre premier de l’in-titution des of liciers de police; ils sont ainsi conçus : Art. 1er. « La police de sûreté sera exercée par les officiers qui vont être indiqués concurremment entre eux, sauf les attributions particulières qui 'pour-ru et être faites à chacun d’eux. Art. 2. « Lejoge de paix de chaque canton sera chargé des fonctions de la police de sûreté; il y aura dans chaque département un certain nombre d'officiers de ia gendarmerie nationale chargés d’exercer, concurremment avec les juges de paix, les fonctions de la police. » M. Kobespierre. La première question est de savoir si, comme vous le propose le comité de Constitution dans le second article de son projet de décret, les oiliciers de maréchaussée dotvent exercer les fonctions de la police concurremment avec le juge de paix. C’est sur cette proposition que je demande la question préalable. M. Frètes* u. Je demande que l’Assemblée ait égard a l’article 12 du titre 1er de l’ordonnance de 1670, qui défend aux officiers de maréchaussée d’arrêter les citoyens dans Ja ville de leur domi-ci'e. Cette formalité nécessaire est une subdivision de la question soumise à votre délibération. M. ©iiporl, rapporteur. Le principe qui a déterminé vos comités d’attribuer aux officiers de maréchaussée des fonctions de police est la nécessité pour les officiers de police d’une concurrence qui excite leur émulation. Si l’officier de police n’est pas impartial, s’il n’est pas étranger aux ressentiments particuliers, il est important que les citoyens puissent s’adresser à un autre fonctionnaire public chargé des mêmes fonctions. Je pense donc que, pour prévenir les suite s de la partialité ou de la négligence, des fonctions aussi délicates et aussi importantes que celles delà police doivent être exercées concurremment pat-deux officiers. Je pense aussi que les officiers de ia maréchaussée n’ont aucun caractère de réprobation, que l’attribution que nous vous proposons de leur donner ne saurait être dangereuse, puisque l’arrestation provisoire des citoyens ne sera que de vingt-quatre heures. Il n’est pas nécessaire de vous rappeler que les hommes s’ennoblissent par les fondions qu’on leur confie. Si l’établi-sernent que nous vous présentons a des inconvénients, les législatures suivantes qui en seront les témoins pourront réduire les fonctions des officiers de la gendarmerie nationale à l’exécution des mandats des juges de paix. Je pense donc que dans ce moment ce serait risquer beaucoup que la police manquât dans plusieurs parties du royaume que ne Ja confier à des juges de paix, dont plusieurs ont été nommés sans avoir les connaissances nécessaires à l’administration de la police. M. Pclioa. L’argument par lequel le préopi-uant vient de terminer son discours me paraît spécieux; mais il ne suffit pas pour déterminer l’Assemblée. La concurrença qu’on vous propose d’établir comme moyen d’émulation serait plutôt [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [28 décembre 1790.{ @�3 lin objet ne rivalité et de haine entre des oi liciers dont les fonctions sont naturellement incompatibles. Un militaire chargé d’exécuter la loi, habitué à agir sur-le-champ et sans examiner pourquoi, n’est pas l’homme à qui on peut confier les fonctions difficiles de la police. (On applaudit.) Quand la loi est obligée de confier à un ûffi'-ier public l’exercice arbitraire d’un pouvoir redoutable, elle doit choisir l’officier qui a la confiance de ses concitoyens, qui a été élu p tr eux. Je ne vois, au contraire, dans l’oflicier de man chaussée nm-un caractère qui inspire la confiance. 11 est nommé par le roi, il est amovible; enfin il a cet esprit militaire si incompatible avec les fonctions de la justice de paix. Je crois donc que, s’il était nécessaire de faire concourir deux officiers à l’exercice de la police, il faudrait plutôt nommer un second commissaire par canton que d’employer les officiers de la maréchaussée. M. IP rieur. Il est impossible que vous pourvoyiez à la police des campagnes si vous 11e donnez aux juges de paix uu surveillant qui puisse les remplacer en cas de négligence. Ne croyez 'pas que je veuille faire douter du civisme de ces juges; mais je vous assure que dans les campagnes toutes les familles se tiennent. Il n’est pas dans la nature qu’un officier public fasse arrêter son parent, son ami. Cette rigidité de principe n’est pas présumable, et la loi doit venir au secours de l’humanité même. Je propose donc que l’un des juges du district soit chargé de concourir avec l’officier de police. •J. Itohespsyrrft . L’Assemblée me paraîtcon-vaiocm; q-rd est impossible d’a* tri huer à des officiers de* maréchaussée le droit de donner et d'exécuter en même temps les mandats d’arrêter les citoyens, de dresser les procès-verbaux, de faire les premiersactes de la procédure. Personne n’ignore combien cetle cumulation de pouvoirs serait nuisible à la liberté. S’il faut aux juges de paix des surveillants, je vous rappellerai que les municipalités étaient autrefois chargées de la police, faites concourir avec le juge de canton le maire ou le procureur de la commune où s’est commis le délit. M. de Beaiimeiz. L’arrestation n’est qu’un acte par lequel, en vertu de la loi, la personne inculpée est mise en sûreté, afin que la société puisse avoir son recours sur lui s’il e-t coupabf . On a donc tort de voir dans l’arrestation un commencement de preuve contre la persunne arrêtée. M. Fréteau. Toutes les lois réservent soigneusement la police des forêts, des grandes routes et des lieux d’étape aux 0 1 liciers de maréchaussée. Quelle que soit la vigilance d’un procureur syndic, jamais i! ne pourra établir la sûreté publique dans une forêt de deux mille arpents. Je demande donc qu’il soit ajouté à la tin de l’article ces mots : « Sans préjudice de ce qui sera statué pour la sùrelé des forêts, des grandes routes et des lieux d’etape. » M. Déuiennier. On peut décréter seulement la première disposTion de l’article et renvoyer la seconde au comité, pour nous présenter ses idées sur la concurrence. M. Defcrinon. Je voudrais que l’on définît d’abord ce qu’on entend par la police de sûreté, et que nous ne délibérions pas qu’il y aura des officiers sans savoir ce qu’ils auront à faire. M. Prieur. J’appuie cette proposition. D’après cela on pourra déléguer la police des villes aux juges de paix, et celle des grandes routes ou des forêts aux officiers de la maréchaussée. (L’Assemblée ordonne le renvoi du titreler à ses comités de Constitution et de jurisprudence criminelle.,) L’ajournement prononcé du titre premier paraissant entraîner nécessairement l’ajournement du titre II, l’Assemblée passe à la discussion du titre III : des fonctions particulières de l’officier de police. M. Duport, rapporteur. Vous avez paru désirer que vos comités vous présentassent le tableau des fonctions qui seraient attribuées aux juges de police ; elles sont renfermées dans le titre III. La suite des articles vous les mettra successivement sous les yeux. M. Duport, rapporteur , fait lecture de l’article lcp du litre 111. M. Fréteau. 11 me semble qu’il faudrait ici poser un principe générai. Ce ne sont pas seulement les meurtres qui peuvent troubler la société. Je demande donc qu’il soit ajouté à l’article, après ces mots : « dont la cause est inconnue et suspecte, ceux-ci : « et de tout acte qui pourrait troubler la tranquillité publique. »> L’article 1er est décrété dans la forme suivante : Art. 1er. « Tous ceux qui auront connaissance d’un meurtre ou d’une mort, dont la cause est inconnue et suspecte, seront tenus d’eu donner avis sur-le-champ à la police, dans la personne de l’officier de police du lien, ou, à son défaut, du plus voisin, lequel se rendra incontinent sur les lieux. » M. le rapporteur donne lecture de l’article 2 : « Dans les cas énoncés dans l’article précédent, l’inhumation du mort ne pourra être faite qu’après que l’officier de police se sera rendu sur les lieux et aura dressé un procès-verbal détaillé de l’état du cadavre et de toutes les circonstances, en présence des personnes qui seront indiquées ci-après. » M. Thévenot. Je demande qu’après ces mots : « ne pourra être faite, » on ajoute ceux-ci : « sans une ordonnance de justice. » M. Boussion. Il me paraît convenable d’a-jouier que le juge se rendra sur les lieux « avec les experts décrétés par la loi ». M. le rapporteur. J’adopte ce dernier amendement rédige ainsi : «avec un médecin ou un chirurgien. > Je réponds à M. Thévenot que l’ordonnance du juge n’est pas nécessaire, et que la présence de l’oflicier de police suffit pour prévenir les inhumations précipitées. Je demande donc la question préalable sur son amendement. M. Fréteau. Je m’oppose à la question préalable. Toutes les lois exigent que l’inhumation soit ordonnée par le juge. M. de ISeaumctz. Il y a ici une inversion d’idées. L’objet de f Assemblée est de donner à