577 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [5 avril 1791.] torilé paternelle qu’elles révèrent, si vous leur ôtiez la faculté de tester, dont elles sont si jalouses, situées aux extrémités de l’Empire, assises entre les Alpes et les Pyrénées, défendues par le Rhône, et les montagnes d’Auvergne; l’Océan et la Méditerranée baignent leurs côte-, et le canal de Languedoc, ouvrage du génie de l’immortel Riquet, en réunit la navigation dans leur sein. Elles ont fait, avec le soleil du Midi, une éternelle alliance, et cette alliance fait croître, sur leur sol privilégié, les huiles de Provence, les Tins de Bordeaux, les eaux-de-vie de Languedoc, c’est-à-dire toutes les denrées qui déterminent en notre faveur la balance du commerce de l’Europe; plus de 200 millions de leur numéraire viennent chaque année grossir les trésors de la capitale et augmenter les richesses des provinces du Nord. Si elles avaient la coupable pensée de s’isoler du reste du royaume, ce jour-là même serait le dernier jour ne la gloire et de la prospérité de l’Empire français. ' Quelle honte pour nous ! Combien nous serions coupables si celte Révolution tant vantée n’abou-tissat t qu’au morcellement du royaume, qu’à la division du plus beau rassemblement d’hommes dont l’histoire du monde nous ait conservé le souvenir ! 25 millions d’hommes parlant la même langue, ayant les mêmes mœurs, la même religion, les mêmes habitudes, habitant presque sous le même climat. • Luin de nou3 une si coupable pensée ! Notre patriotisme, notre amour pour le nom français, surtout votre justice, saura nous en garantir. Vous ne détruin z pas en un jour des lois auxquelles les habitants du Midi sont soumis depuis 2000 ans. Vous n’ôterez pas à ces provinces des coutumes qu’elles aiment avec idolâtrie et que les peuples barbares qui les ont conquises ont été forcés de respecter. Un membre : Ce sont les provinces elles-mêmes qui le demandent. M. de Cazalès. Je conclus.. > Voix à gauche : Ah ! ahl M. de Cazalès. Je passerais ces interruptions dans les questions d’un intérêt de parti; mais ceci regarde l’intérêt commun. Il est 20 personnes hors d’état d’avoir aucune conception, qui m’interrompent sans cesse; il n’y a rien de si bête que cette manière. (Murmures.) Je conclus à ce que l’Assemblée nationale étende à tout le royaume le bienfait de la loi romaine; tous les proprié aires, tous les pères de famille applaudiront à votre décret ; jamais vous n’aurez porté, jamais vous ne porterez une loi plus favorable à la vertu, à la prospérité publique. • M. le Président annonce l’ordre du jour de la séance de ce soir. La séance est levée à quatre heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. TREILHARD, EX-PRÉSIDENT. Séance du mardi h avril 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures et demie du soir. Un de MM. les secrétaires donne communication des adresses suivantes : 1° Des gardes nationales du canton de Vézénobres, qui, après les expres>ions de félicitation, de dévouement et d’adhé-don, supplient l’Assemblée de leur procurer des arums. 2° De la commune de Hinx, district de Dax , à laquelle est joint le procès-verbal de la cérémonie qui y a eu lieu, lorsqu’on y a appris que M. Saurine avait accepté l’évêché du département des Landes, auquel il a été élu. 3° Des perruquiers de Châtellerault, qui supplient l’Assemblée d’ordonner le remboursement de leurs maîtrises suivant leur valeur réelle. 4° Du sieur Picq , maître de pension et d'école , à Chaunay, à laquelle sont jointes diverses attestations de son zèle à insiruire ses élèves suivant les principes de la Constitution. 5° Des amis de la Constitution de la ville d'Aix , qui sollicitent un décret portant injonction aux émigrants de rentrer dans le royaume dans le délai d’un mois, sous peine de confiscation de leurs biens. 6° Des administrateurs composant le département de la Haute-Garonne, qui annoncent que sur le refus de M. de Luménie, évêque de Sens, d’accepter le siège de la métropole du sud, le corps électoral y a nommé M. Hyacinthe Sermet, prédicateur. 7° Des administrateurs composant le directoire du département de l'Hérault, qui annoncent que d’après leur délibération, un Te Deum solennel a été chanté dans toutes les paroisses du département à l’occasion de la convalescence du roi. 8° Des administrateurs composant le directoire du district de la Tour-du-Pin, qui instruisent l’Assemblée que de 136 curés et 40 vicaires attachés aux paroisses de leur territoire, tous ont prêté le serment, à l'exception d’un seul curé et de deux vicaires, qui, ayant persisté à ne vouloir le prêter qu’avec restrietioa, n’y ont pas été admis. 9° Des administrateurs composant le directoire du département du Haut-Rhin, qui font part de la promotion de M. Arbogart-Martin, sous-prin-cipal du collège de Colmar, au siège épiscopal du département, resté vacant par l’empêchement de M. l’évêque de Lydda. 10° De l’assemblée électorale du département de la Lozère , qui annonce que M. Nogaret, curé de la Canourgue, a été élu à l’évêché du département, à la place de M. l’évêque d* Mende, déchu de son siège pour n’avoir pas prêté le serment. 11° De l’assemblée électorale du département du Nord, h laquelle est joint le procès-verbal de la nomination de M. Primat, prêtre de l’Oratoire, et curé de la paroisse Saint-Jacques de Douai, à l’évêché du département. 12° De l'assemblée électorale du département de la Gironde, à laquelle est joint le procès-verbal contenant l’élection .de M. Pacareau, ci-devant ir<5 Série. T. XXIV. (1) Cette séance est incomplète an Moniteur. 37 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [5 avril 1791.1 578 [Assemblée nationale.} chanoine de Saint-André, pour évêque métropolitain du Sud-Ouest, du membre de la cour de cassation, et de ceux du tribunal criminel. 13° De l'assemblée électorale du département des Hautes-Pyrénées, à laquelle est joint le procès-verbal de nomination de l’évêque, et du membre du tribunal de cassation de ce département : il résulte de ce procès-verbal, que le père Moulinier, prêtre de la doctrine chrétienne, a été élu à l’épiscopat, et M. Barrère, membre de l’Assemblée nationale, à la piace de membre du tribunal de cassation. L’assemblée électorale adresse aussi en même temps à l’Assemblée une lettre de M. de Gain, ci-devant évêque de Tarbes, aux électeurs de ce département. (L’Assemblée nationale renvoie l’examen de cette letire à ses comités des rapports et des recherchas, réunis.) 14° Enfin, d’une lettre des commissaires civils envoyés par le roi dans les départements du Gard et de l'Ardèche, à laquelle sont joints : 1° un récit des troubles survenus dans ces deux départements, et de la conduite qu’ils ont tenue pour en arrêter les suites; 2° une copie de la dénonciation qu’ils en ont faite aux tribunaux. (L’Assemblée a renvoyé ces pièces aux cmités des rappo Is et des recherches, réunis, et les charge de lui en rendre compte incessamment.) Un de MM. les secrétaires fai1 lecture du décret rendu à la séance du soir du 2 de ce mois, concernant les président et commis-aires des soi-disant catholiques de Nîmes et d’Uzès. Un membre fait la motion de retrancher comme inutiles les qualités de ci-devant barons et chevaliers sous lesquelles sont désignés quelques-uns des individus nommés dans le décret. (Gette motion est décrétée.) Un membre du comité ecclésiastique présente un projet de décret pour la circonscription des paroisses de la ville d'Evreux. Ce projet de décret est ainsi conçu : « L’Assemblée nationale, sur le compte qui lui a été rendu par son comiié ecclésiastique d’un arrêté du directoire du département de l’Eure, du 4 du courant, sur l’avis de l’évêque du môme département, et du directoiredu district d’Evreux, relativement à la formation et circonscription de la paroisse cathédrale de la ville d’Evreux, décrète ce qui suit : Art. 1 er. « Il n’y aura dans la ville d'Evreux que la seule paroisse cathédrale, dont l’arrondissement sera formé 'du territoire des neuf paroisses, de Saint-Germain, Saint-Aquilin, la Ronde, Saint-Denis. Saint-Nicolas, Saint-Gilles, Saint-Thomas, Saint-Pierre et Saint-Léger, lesquelles sont et demeurent supprimées. Art. 2. « Le territoire de la paroisse d’Evreux sera borné au nord, par le terriioire des paroisses et municipalités d’Aviron et de Gravigny; au sud, par celui de la paroisse et municipalité d’Auger-ville-la-campagne; à l’ouest, par celui des paroisses et municipalités de Sarville et d’Armières et à l’est, par le territoire des paroisses et mu-cipalités de Fauville et du Coudrai. Art. 3. < Les églises de Saint-Germain et de Saint-Léger seront conservées comme succursales de la paroisse épicopale. Art. 4. « Seront également conservées, mais seulement comme oratoires, les deux églises de Saint-Taurin et des Capucins. » (Ce décret est adopté.) M. Pierre Fixier, compagnon joaillier-bijoutier, est introduit à la barre et s’exprime ainsi : Les abus ne peuvent germer sur la terre de la liberté, et vous avez préparé le sol qui produira tous les faits heureux de la félicité publique. Nous venons, Messieurs, vous faire hommage d’un plan que nous a suggéré notre reconnaissance pour un monarque qui a été constamment voire collaborateur. Nous prévoyons, Messieurs, que, lorsque le terme de vos travaux sera arrivé, vous les couronnerez par le témoignage de votre reconnaissance envers ce roi citoyen; et je ne pense pas qu’au milieu de l’éclat qui l’environne vous puissiez lui déférer un honneur plus grand, plus digne de lui, que de lui présenter une couronne civique dont voici le modèle qui peut s’exécuter en émaux. Le diadème sera aux trois couleurs, portant pour légende : Donné par un peuple libre au roi de sa Constitution , au roi qu'il chérit. Ce diadème sera s rmontéde 83 cœurs en fleurons, emblème assez jusie des 83 départements. Les fleurons vaudront sans doute les diadèmes les plus précieux. Les cintres de la couronne seront des branches de chêne, et c’est là ce qui constitue la couronne civique. Enlin, la racine sera un globe, et sur ce globe, aux armes de la France, sera le coq vigilant, emblème de la France, qui a conquis la liberté. Tel est, Messieurs, le plan de couronne civique que nous avons conçu. Nous vous offrons à l’exécuter. Puis-e le zèle, le patriotisme qui nous amène devant vous, trouver au sein de cette Assemblée autant d’approbateurs qu’il y a d’ardents amis de la liberté et du roi que nous chérissons tous. M. le Président. L’Assemblée nationale reçoit votre offrande avec satisfaction. Il est bien juste que les arts, enfauts de la liberté, soient surtout employés à célébrer le roi d’un peuple libre. Le trône ne fut jamais plus vénéré, plus majestueux et plus inébranlable que lorsque les racines en ont été posées dans la Constitution. Vous pouvez assister à la séance. M. le Président. Messieurs, je viens de recevoir une lettre des députés extraordinaires de la province du nord de Saint-Domingue; ils demandent que cetie lettre soit lue dans ce moment-ci, parce qu’ils y combattent les inculpations portées contre eux par le défenseur des membres de la ci-devant assemblée coloniale de la partie française de Saint-Domingue, que vous avez entendu dans la séance du 31 mars dernier à la barre. ( Marques d’assentiment.) Un de MM. les secrétaires donne lecture de cette lettre, qui est ainsi conçue : « Paris, 5 avril 1791. « Monsieur Je Président, « Nous avons appris que l’Assemblée nationale s’était déterminée à entendre la justification des membres de la ci-devaût assemblée coloniale de