JUGE II IE DE RIVIÈRE-VERDUN. CAHIER Des doléances , remontrances et instructions du clergé des pays et jugerie de Rivière-Verdun, comté de Gaure, baronnie de Léonac et Mares-taing (1). PREMIÈRE PARTIE. Intérêts concernant la religion. Le clergé des pays et jugerie de Rivière-Verdun comté de Gaure, baronnie de Léonac et Mares-taing, demande : 1° La tenue périodique des conciles nationaux et provinciaux pour rétablir et maintenir la discipline ecclésiastique et religieuse, selon la disposition des saints canons ; 2° Qu’on remette en vigueur toutes les ordonnances, édits et déclarations concernant le respect dû aux églises, la solennité du service divin, la sanctification des dimanches et l'êtes et l’abstinence prescrite par l’Eglise; 3° Qu’en renouvelant les susdites ordonnances, les pasteurs catholiques soient autorisés à refuser l’exercice public de leur ministère à tout non catholique reconnu, à l’exception du sacrement de baptême, dont l’administration exclusive leur doit être conservée ; le clergé de Rivière-Verdun se référant pour cet objet aux remontrances faites au Roi par la dernière assemblée du clergé de France; 4° D’interdire aux non catholiques l’exercice public de leur religion, qu’ils se sont déjà permis contre l’esprit et la lettre de la loi du mois de novembre 1786 ; 5° De solliciter une loi qui défende, sous les peines les plus sévères, l’impression et le débit de tout ouvrage contraire à la foi, aux bonnes mœurs et au gouvernement ; 6° Qu’il soit rendu une loi qui interdise les monitoires, pour tout autre délit que pour le meurtre et le crime de lèse-majesté divine ou humaine, et que hors de ce cas le juge laïque ne puisse prendre à partie l’official, quand il refusera le monitoire ; 7° Qu’il soit pris des moyens pour perfectionner l’éducation publique dans les vues de la religion et des mœurs; 8° Que les maîtres et maîtresses d’école établis ou à établir ne puissent exercer leurs fonctions que -sous l’inspection des curés et avec l’approbation de l’ordonnance ; qu’ils, soient révocables à volonté, et que leurs honoraires ne soient payés ue sur le certificat de bonne vie et mœurs, signé e leurs curés. SECONDE PARTIE. Intérêts généraux de l'Etat. Le clergé des pays et jugerie de Rivière-Verdun, (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des A rchives de l’Empire. comté de Gaure, baronnie de Léonac et Mares-taing, demande : 1° Que les Etats généraux soient convoqués chaque cihq ans ; que les Etats généraux prochains déterminent irrévocablement la forme et tenue desdits Etats, et que les formes une fois déterminées soient déclarées constitutionnelles ; 2° Qu’il soit déclaré dans la forme la plus solennelle par un acte authentique, que la nation seule a le droit de s’imposer, c’est-à-dire d’accorder ou de refuser les subsides, d’en régler l’étendue, l’emploi, la répartition, la durée, d’ouvrir des emprunts, etc., et que toute autre manière d’imposer ou d’emprunter soit déclarée illégale, inconstitutionnelle et de nul effet ; 3° Qu’il ne soit consenti aucun impôt, qu’après que le royaume aura sanctionné les différentes demandes de la nation ; 4° Que les Etats généraux ne négligent rien pour connaître les causes et l’étendue du déficit ; qu’ils prennent les moyens les plus sûrs pour préserver, à l’avenir, la nation d’un pareil malheur ; 5° Que la dette nationale une fois reconnue, il ne soit établi qu’un impôt général, simple, unique et fixe, proportionnellement réparti sur tous les sujets de Sa Majesté, sans distinction d’Etat ou de privilège quelconque, même de l’ordre de Malte, en supprimant tous les autres impôts directs ou indirects ; 6° Qu’on prenne les moyens les plus sûrs pour soumettre à l’impôt qui sera établi les capitalistes, qui doivent partager avec les autres citoyens les charges de l’Etat, en exceptant néanmoins les hôpitaux et autres établissements de charité ; 7° Que la gabelle soit supprimée et les douanes reculées jusqu’aux frontières ; 8° Qu’on supprime les édits, arrêts du conseil et règlements concernant les contrôles, pour y substituer un nouveau tarif net et précis, et qui ne donne aucune prise à l’arbitraire ; 9° Que toute contestation sur cet objet soit portée au parlement, et qu’on obtienne des dépens personnels contre les agents du fisc et leurs commettants, lorsqu’ils auront succombé dans leurs demandes ; 10° Qu’on opine par ordre aux Etats généraux sans que deux ordres puissent lier le troisième, à moins que des circonstances passagères ne déterminent les trois ordres à consentir unanimement l’opinion par tête ; 11° Quoique le Roi ait seul le droit de faire des lois, la nation soit maintenue dans celui qu’elle a de les consentir, et qu’à l’avenir toute loi qui intéresse le bien général du royaume, la vie, l’honneur et les propriétés des citoyens, ne puisse être mise en exécution, si elle n’est consentie par la nation ; 12° Que les lois portées par le Roi et consenties par la nation soient enregistrées par les cours souveraines, qui les feront exécuter, sans que lesdites lois puissent en souffrir de retardement ni des modifications ; 13° Que les officiers municipaux des villes et communautés puissent juger sans frais et en der- f>82 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Jugerie de Rivière-Verdun.' nier ressort toutes les causes personnelles qui n’excèderont pas la somme de 18 livres dans les villes et celle de 12 livres dans les campagnes; 14° Que la milice soit supprimée, comme contraire à la liberté, nuisible à l’agriculture, et à charge aux communautés ; 15° Qu’il soit établi un bureau de charité dans chaque paroisse, sous la présidence des curés des lieux, laissant à la sagesse de la nation d’aviser aux moyens de pourvoir aux fonds nécessaires auxdits établissements ; 16° Qu’il soit formé dés Etats provinciaux dans tout le royaume; que les provinces, les villes, surtout les capitales et notamment le pays, ville et jugerie de Rivière-Verdun, soient rétablies et maintenues dans leurs anciens et particuliers privilèges ; 17° Que les offices de notaires ne puissent être occupés que par des personnes graduées en droit après le cours ordinaire d’étude, et non par bénéfice d’âge, et déclarer l’office de juge incompatible avec celui de notaire; 18° Qu’il soit fait un tarif des droits que lesdits notaires pourront percevoir pour leurs actes, et que l’on prenne les précautions nécessaires pour la conservation desdits actes; 19° Qu’on avise aux moyens de donner aux habitants des campagnes : dés médecins, des chirurgiens et sages-femmes, dont la capacité et la sagesse puissent prévenir les malheurs qui résultent tous les jours de l’ignorance, et que les sages-femmes ne puissent exercer leur ministère qu’après avoir été approuvées du corps de chirurgie, confirmées par l’ordinaire et avouées par les curés des lieux; 20° Que le Roi soit supplié de faire travailler incessamment à la réforme du code civil et criminel; 21° Que le Roi soit également supplié de corriger l’abus et la multiplicité des lettres de cachet; 22° Que l’on supprime les arrêts d’évocation et d’attribution à d’autres juges qu’aux juges locaux dans les affaires particulières ; 23° Que la juridiction des juges royaux et ban-nerets soit augmentée, sous la condition pour ces derniers de ne connaître d’aucune affaire qui intéresse personnellement les seigneurs, ou ceux qui leur sont attachés par quelque emploi ou charge; 24° Que les ordonnances qui obligent les seigneurs à poursuivre les délits commis dans leurs terres soient renouvelées et exécutées dans toute leur force ; 25° Que toute banalité soit rachetable ; 26° La partie du clergé des susdits, qui possède des seigneuries ou fiefs, demande la révocation de l’arrêt du cbnseil du 17 mai 1786, qui casse l’arrêt du parlement de Toulouse du 19 mai 1781, concernant les échanges ; et que les seigneurs soient rétablis dans l’intégrité de leurs droits. TROISIÈME PARTIE. Intérêts généraux et particuliers du clergé. Le clergé des pays et jugerie de Rivière-Verdun, comté de Gaure, baronnie de Léonac et Marestaing, demande: 1° Que , conformément aux lois canoniques, tous les bénéfices à charge d’âmes , et tous les ecclésiastiques attachés par leurs fonctions à des églises, même les dignitaires des chapitres, soient tenus à la résidence; 2° Qu’en exécution des mêmes lois la pluralité des bénéfices soit de nouveau défendue; 3° Que le Roi soit supplié de ne donner les bénéfices consistoriaux qu’aux ecclésiastiques séculiers et réguliers, dont la conduite et les services auront mérité cette récompense , sans distinction de naissance et de qualité, et que, suivant la disposition du Concordat, ledit seigneur Roi ne prolonge pas la vacance desdits bénéfices au delà de six mois ; 4° Que la cour de Rome ne puisse plus prévenir les collateurs des bénéfices-cures, qu’après le délai d’un mois; 5° Qu’on ne puisse conférer les bénéfices-cures vacants par mort ou par démission, qu’à des sujets qui auront servi dans Je diocèse pendant un espace de temps que la sagesse du législateur déterminera ; 6° Que tous les patrons ecclésiastiques séculiers ou réguliers soient obligés à ne nommer aux bénéfices-cures, que des prêtres du diocèse où seront situés ces bénéfices; 7° Que la nation veuille bien déterminer l’augmentation de la portion congrue nécessaire pour améliorer le sort des curés congruistes et vicaires, celle fixée par les dernières lois étant manifestement au-dessous de leurs besoins; 8° Que, pour faciliter ladite augmentation des portions congrues, il y soit pourvu par la réunion canonique des bénéfices moins utiles, même des bénéfices consistoriaux; 9° Que les curés de l’ordre de Malte soient déclarés inamovibles, indépendants des chapitres dudit ordre, et assimilés en tout aux autres curés congruistes; 10° Que la portion congrue, quelle qu’elle puisse être, et tout bénéfice de valeur inférieure, ne puissent remplir le grade ; 11° Qu’il sera pourvu, par union de bénéfices ou autrement, au sort des curés seuls décima-teurs, qui n’auraient pas l’équivalent de la portion congrue; 12° MM. les curés demandent qu’il leur soit permis défaire corps dans chaque diocèse, et d’agir par le ministère de leurs susdits , librement élus par eux, n’entendant pas pour cela se soustraire à l’obéissance qu’ils doivent à leurs évêques; 13° MM. les curés demandent que les chambres ecclésiastiques , soit souveraines , sojt diocésaines, soient formées par un choix libre des membres, pris en nombre proportionné et suffisant dans et par chacune des classes contribuables ; 14° Que les députés du second ordre à rassemblée générale du clergé soient élus à la pluralité des voix dans les assemblées de chaque province ecclésiastique, formées comme il est requis dans l’article précédent; 15° Que chaque classe de bénéficiers ait un représentant librement choisi par elle aux assiettes du diocèse; 16° Que dans les Etats provinciaux ou assemblées provinciales, le clergé ait une représentation égale à celle de la noblesse, et que chacune des classes du second ordre forme un nombre égal à celle du premier; 17° Ils demandent encore la suppression des titres et droits des curés primitifs, et de laisser aux seuls curés, qui ont tout le poids de l’exercice de leurs titres, les droits honorifiques dus au rang qu’ils tiennent dans la hiérarchie; 18° Que tous les décimateurs contribuent à toutes les charges des cures et paroisses où leurs dîmes sont situées, notamment à la charge des vicaires et autres prêtres desservants, en raison des fruits qu’ils perçoivent; ' [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Jugerie de Rivière-Verdun.] 583 19° Que MM. les curés congruistes et décima-teurs soient rétablis, selon le vœu des peuples, dans le droit de percevoir seuls les novales, meme des nouveaux défrichements, comme iis en jouissaient avant l’édit de 1768 ; étant prouvé démonstrativement que les seuls gros décima-teurs depuis cette époque v ont considérablement gagné dans un grand nombre de diocèses ; 20° Le clergé desdits pays ci-dessus nommés demande qu’il soit formé dans tous les diocèses des fonds suffisants pour pensionner les prêtres infirmes ou hors d’état de continuer leurs fonctions, en accordant la préférence à ceux qui auront exercé ledit ministère; 21° MM. les curés deLombez demandent comme une suite de l’article précédent que les fruits décimaux dépendants des religieux bénédictins de Saramon et autres offices du monastère, situés dans le diocèse de Lombez et dans les paroisses de Samatan, Labastide, Savès et autres lieux , soient employés à payer lesdites pensions, ainsi que les biens dépendants du prieuré du monastère de Toujet, après la mort des titulaires ; 22° Le clergé des susdits pays demande qu’il soit pris des moyens d’utiliser dans les paroisses les obituaires et concensistes de la manière qui paraîtra la plus convenable à nosseigneurs les évêques; 23° Que nosdits seigneurs évêques emploient, suivant leur prudence, les prébendiers et autres bénéficiers inférieurs des églises cathédrales et collégiales, aux besoins des paroisses, en réservant auxdits bénéficiers le droit de présence dans leur chapitre; 24° Que le législateur soit supplié de prendre des moyens efficaces pour prévenir les procès toujours ruineux et scandaleux sur le fait des dîmes, auxquelles il est prié de soumettre par une loi particulière tous les biens-fonds des corps et communautés, soit séculières, soit régulières, même de l’ordre de Malte, qui s’en sont rendus exempts; 25° MM. les curés du diocèse de Comminges et autres, en tant que de besoin, demandent que l’arrêt du conseil du 13 décembre 1786 qui autorise les gros décimateurs des bureaux des décimes à retenir les décimes correspondants à l’augmentation des curés congruistes et vicaires, qui a eu lieu au commencement de l’année 1787 , soit révoqué, d’autant qu’il n’était que provisoire; 26u Le clergé desdits pays et jugerie de Rivière-Verdun, comté de Gaure, baronnie de Léonac et Marestaing, demande que tous les petits chapitres et corps ecclésiastiques dont les membres ne jouiront point individuellement de 1,000 livres de revenus, soient réduits jusqu’à ce que lesdits membres parviennent à obtenir ladite somme; 27° La suppression ou du moins la modération des droits d’amortissement, pour les fondations qui ont pour objet l’éducation et autres établissements publics et utiles, ainsi que les constructions et améliorations à faire sur les terrains appartehant aux gens de mainmorte ; 28° De simplifier les formes pour les réparations à faire par la succession des bénéficiers, selon le vœu et le plan des deux dernières assemblées du clergé ; 29° Que les causes purement spirituelles soient attribuées aux seuls juges ecclésiastiques , avec défense à tous ' officiers, même des cours souveraines, d’en connaître, soit directement, soit indirectement, suivant les anciennes ordonnances ; 30° Que les religieux de l’un et de l’autre sexe soient conservés et rendus véritablement utiles, et qu’on remette l’époque de l’émission des vœux: à l’âge de dix-huit ans; 31° Les religieux de l’un et de l’autre sexe demandent que la jurisprudence du grand conseil, qui réserve aux abbés commendataires les deux tiers des revenus, à condition qu’ils payeront toutes les charges de la mense commune et” qu’ils feront les réparations, soit réformée ; ils dèman-dent aussi l’abolition pour toujours de la commission des prétendues réformations des réguliers; 32° L’assemblée demande que les dispenses de parenté pour les mariages, les démissaires pour les ordinations, soient accordés gratis, et que les ecclésiastiques, obligés de sortir de leurs diocèses, seront défrayés par leur évêque des frais du voyage; 33° La dotation des fabriques, et leur établissement où il n’y en a pas; 34° Demander que l’ordre suivant leqiîel est réglée la répartition actuelle, soit conservé dans le nouvel état des choses, et que les classes utiles, qui perdent leur degré de faveur, en soient amplement dédommagées; 35° Demander que les tribunaux à établir relativement à la partie contentieuse des finances, soit tri-partie du clergé, de la noblesse et du tiers-état, de manière que chaque ordre ait des places uniquement affectées à ses membres exclusivement à tous les ordres; 36° Le même clergé demande que les bénéficiers payent les décimes dans tous les diocèses où ils' perçoivent des fruits; 37° Que le Roi sera suyoplié de vouloir bien suspendre le droit de patronage pour la nomination des bénéfiees+cures et autres vis-à-vis des collateurs non catholiques, jusqu’à ce qu’ils soient revenus à la religion, et que provisoirement le droit de collation soit exercé par les ordinaires des lieux; 38° Le clergé demande la suppression totale du casuel forcé, comme odieux au peuple et tendant à détruire la confiance envers les ministres; A l’article 7 de la troisième partie, le clergé demande que la nation veuille bien déterminer l’augmentation dont il est question dans ledit article, relativement à la population, aux lieux et aux circonstances; 39° Le clergé des. pays et jugerie de Rivière-Verdun, comté de Gaure, baronnie de Léonac et Marestaing, donne à son député tous les pouvoirs nécessaires pour proposer, remontrer, aviser et consentir tout ce qu’il jugera convenir au bien général et particulier du royaume. Fait et arrêté en assemblée, le 23 du mois d’avril 1789. Signé L’abbé de Vicques, président. Delport, curé de Drudas, secrétaire de Rassemblée du clergé de la jugerie de Rivière-Verdun . CAHIER • Des pouvoirs et instructions donnés par la noblesse des pays et jugerie de Rivière-Verdun, Gaure , baronnie de Léonac et Marestaing (1). La noblesse des pays et jugerie de Rivière-Verdun, Gaure, baronnie de Léonac et Marestaing, décidée à maintenir avec la fermeté et le courage (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire.