[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [24 juin 1791.] corps électoraux ne prennent pas trop de consistance en ce moment. Le projet du comité, Messieurs, n’a pas pour but de suspendre les assemblées primaires, ni la nomination des électeurs, mais simplement d’empêcher que les électeurs se réunissent pour nommer des députés à la législature. Je demande s’il y a quelqu’un ici qui ose garantir que, dans les circonstances actuelles, les corps électoraux une fois assemblés ne s’occuperont que de nominations. Et s’il arrivait qu’ils s’occcupent d’autre chose, je vous soutiens que la monarchie est perdue. ( Applaudissements .) M. Le Chapelier, rapporteur. Ceux qui ont désapprouvé le projet se sont abandonnésà un seul sentiment; ils ont pensé combien il serait désavantageux et pénible pour nous de prolonger les séances dont nous avions presque in liqué le terme; ils ont craint qu’on ne nous accusât de vouloir nous perpétuer. Le comité a pesé pendant 2 jours ces considérations, et il a senti qu’elles ne balançaient pas le devoir qui nous est imposé de prendre sur notre responsabilité les dangers actuels, de donner à notre plan un système suivi, et de prouver à la France que 26 mois de travaux pénibles n’ont ni ralenti notre zèle, ni abattu notre courage. Il est vrai qu’on a accusé l’Assemblée de prolonger ses travaux ; mais cette calomnie cessera quand on verra tout ce que nous faisons pour le salut de l’Etat. Si vous voulez éviter le trouble et l’anarchie, adoptez les mesures que nous vous proposons : elles se bornent à suspendre pendant quelques instants les opérations des électeurs qui sont déjà, ou qui seront nommés par les assemblées primaires et à ordonner que ces électeurs surseoiront aux nominations auxquelles il devait être procédé d’après la loi du 29 mai dernier jusqu’au jour qui sera déterminé par vous. M. Gombert. La question préalable! Il y a déjà des députés nommés. Plusieurs membres : Qu’est-ce que cela fait? M. Le Chapelier, rapporteur. Nous ne demeurerons pas ici d’après ce décret; mais le travail nous commande. Nous prouverons que nous n’avons pas perdu de vue les moyens par lesquels nous voulons assurer la Constitution et le bonheur public. Nous ne devons pas laisser dans l’esprit des citoyens l’idée que nous puissions abandonner notre poste sans avoir assuré la liberté. J’ajoute aux observations de M. Rewbell, qui a parfaitement saisi les motifs du comité, que sans la mesure qui vous est proposée, dans la situation où nous sommes, dans un moment où vous sentez que tous les partis s’agitent, parce que les plus grandes passions des hommes sont mises en mouvement, vous courez le risque d’avoir dans le royaume 2 assemblées nationales existantes et 83 corps délibérants. Plusieurs membres : Aux voix le décret ! M. Babey. Nous altérons la confiance en laissant des soupçons sur l’étendue de notre durée. Je demande la question préalable sur le projet du comité. M. Emiuery. Aux voix le salut de la patrie ! 487 M. Le Chapelier, rapporteur. Je relis notre projet de décret : « L’Assemblée nationale, mesurant toute l’étendue de ses obligations, et trouvant dans la confiance de la nation le droit et le devoir de prendre sur elle les dangers dont on a menacé la liberté française ; « Considérant que la tranquillité du royaume, l’achèvement de la Constitution dépendent de l’ensemble des moyens que l’Assemblée nationale vient d’employer, et de la suite qu’elle doit y apporter ; « Certaine que le courage et la modération du peuple français abrégeront les travaux de ses représentants; mais ne pouvant, dans le nouvel ordre d’événements où elle se trouve placée, marquer, sans compromettre la chose publique, l’époque précise de sa séparation, quelque zèle qu’elle mette à la rapprocher, et ne voulant laisser aucun doute sur la résolution où elle est de remplir le serment qu’elle a fait de remettre à la première législature le dépôt complet de la liberté publique et de la Constitution, croit donner à la nation une preuve nécessaire de son dévouement en suspendant pour quelques instants les opérations des électeurs qui sont déjà ou qui seront nommés par les assemblées primaires. « En conséquence, elle ordonne que les électeurs qui ont été ou qui seront nommés par les assemblées primaires ne se réuniront pas, et surseoiront aux nominations auxquelles il devait être procédé d’après la loi au 29 mai, jusqu’au jour qui sera déterminé par un décret de l’Assemblée nationale. » (Ce décret est mis au voix et adopté.) M. le Président. Voici une lettre du tribunal du district de Versailles : « Versailles, le 24 juin 1791. « Monsieur le Président, « Les corps administratifs du district de Versailles réunis ont dénoncé au tribunal du district de Versailles la dame d’Ossun, dame d’atour de la reine, comme prévenue d’avoir eu connaissance du départ dé la reine et de s’être échappée précipitamment de Paris pour aller la rejoindre. Elle était aussi prévenue d’avoir fait prendre de l’argent chez elle, et d’avoir donné ordre de brûler les lettres qui se trouveraient dans son écritoire. Ces faits, qui au premier abord ont eu un caractère important, se sont trouvés ainsi indifférents. C’est pourquoi le tribunal ne s’est pas cru autorisé à s’assurer de ladite dame d’Ossun qui, au surplus, est restée depuis à Versailles. « La dame d’Ossun a produit une lettre datée du lundi 20au soir, qu’elle a déclaré avoir reçue le lendemain 21 juin, et qu’elle a affirmé être de la reine, par laquelle on voit que la dite dame d’Ossun, bien loin d’être instruite du départ, ne l’a appris que depuis par cette lettre, le tribunal croit devoir adresser une expédition de cette lettre à l’Assemblée nationale, de laquelle il attend les ordres pour lui faire passer, si elle le juge à propos, l’original de ladite lettre, ét l’expédition de la procédure qu’a subie la dame d’Ossun et un de ses domestiques par la voie duquel on a découvert les faits ci-devant énoncés. » « Signé : Les administrateurs du district de Versailles. »