420 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |13 août 1791. j les corps administratifs ; je sais que je ne suis grand que par eux, et qu’eux seuls peuvent me communiquer le pouvoir dont je suis revêtu, et dont je ne suis jaloux que pour servir utilement et ma patrie et mes concitoyens. « Parlerai-je des sacrifices énormes que j’ai faits? Je le dois, puisque c’est pour moi l’occasion d'avouer que je serais prêt à renouveler encore l’abandon généreux de ma santé, de ma fortune et de mon repos, pour éloigner à jamais les troubles et les divisions dont M. Gaultier a tenté d’infecter sa patrie. Lâche calomniateur ! je serai plus généreux que vous; couvrez-vous de votre inviolabilité, je préfère encore de renoncer à développer toute mon innocence plutôt que de montrer toute votre noirceur. « Si je liens la garde nationale tout entière dans ma main, je suis fort de son obéissance, je suis fort de son respect pour la loi, et de son zèle à la maintenir. « Lorsque j'ai signé la pétition qui vous a été adressée, le 19 juillet dernier, par la société des amis de la Constitution dont je m’honore d’êlre membre, j’ai suivi l’impulsion pressante d’une âme sensible, d’un cœur tout dévoué, et qui ne respire que pour sa patrie; la franchise et la loyauté m’arrachent l’aveu que j’ai vu et que je vois encore dans la protestation de 290 membres de l’Assemblée nationale, dans le décret suspensif des assemblées électorales, le germe développé des troubles qui déchirent le sein de ma patrie. « Quel est mon crime? Quoi! parce qu’en homme libre j’aurai énoncé mon opinion, parce que je l’aurai consacrée dans une pétition que vos décrets me donnent droit de vous faire, je serai honteusement qualifié de rebelle à la loi, d'intrigant , de factieux ! La liberté ne serait-elle donc qu’une propriété éphémère, un être de saison, une ombre mensongère? Non, Messieurs, le peuple français sait apprécier les bienfaits d’une Constitution qui le rappelle à sa dignité et le rétablit dans ses droits. « Pourquoi donc, M. Gaultier, non content de prétendre commander mon opinion, me présente-t-il comme un factieux ? Pourquoi me dénonce-t-il à votre comité des recherches? Pourquoi s’acharne-t-il à flétrir ma réputation aux yeux de la nation entière? Et quand, par une pitié insultante, par une générosité dégoûtante, cet homme qui m’opprime a l’audace d’annoncer qu’il n’entend donner aucune suite à sa dénonciation, n’est-ce pas accréditer les calomnies qu’il ne cesse de répandre contre moi? L’air de confiance qui les accompagne leur donne sans doute plus de poids, et leur sert de recommandation auprès de la crédule et indiscrète malignité. « Mais, j’en fais l’aveu, il est pénible à mon cœur; je me reproche d’avoir justifié son impudence par le silence généreux que j’ai gardé jusqu’à présent, en me dispensant d’entrer dans des détails que je n’ai jamais provoqués, et que j’avais ensevelis dans un profond oubli. « Fier de ma vertu, fort de mon innocence, je vous demande, Messieurs, une réparation aussi publique que l’outrage que j’ai reçu. Chargé par les corps administratifs de l’exécution de la loi, responsable de tous les excès qui lui deviendraient funestes, vous me devez, à ce titre, la justice la plus éclatante: j’invoque toute sa rigueur, déployez-en toute la sévérité dans le décret que je sollicite, et faites connaître à la France entière, lequel, du calomniateur ou du calomnié, a plus de droit à l’estime et à la confiance publique. « Je le répète, Messieurs, fidèle à ma patrie, prêt à verser mon sang pour elle, l’honneur fut toujours mon guide dans la carrière que j’ai fournie, je le suivrai constamment pendant tout le temps qui me reste à vivre ; et s’il n’était plus pour moi d’autre bien dans la vie, lui seul, du moins, m’accompagnerait jusqu’au tombeau. « Je suis a\ec respect, Messieurs, votre très humble et très obéissant serviteur, « Signé : Chàzot. » M. Gaultîer-Bianzat. L’Assemblée nationale écoute toujours avec indulgence les explications qui tendent à excuse ou à justification. Si ce que disent les nouvelles pétitions est vrai, ce qui avait l’apparence de menace dans la pétition du 19 juillet, ne provient que d’un vice d’expression ; mais en supposant qu’il y eût quelque intention blâmable dans cette pétition du 19 juillet, les explications nouvelles doivent être considérées comme excuse et rétractation ; en conséquence je demande Je rapport du décret qui a renvoyé cette pétition au comité des recherches, et qu’il soit passé à l’ordre du jour, tant sur la pétition qui avait occasionné le décret que sur celle dont il est actuellement question. (La motion de M. Gaultier-Biauzat est mise aux voix et adoptée.) M. le Président. Voici, Messieurs, une lettre de M. Beaupoil-Sainte-Aulaire , ci-devant évêque de Poitiers, qui observe, que dans la' liste des présents et des absents des membres de l’Assemblée nationale, au 14 juillet, il n’a pas été fait mention du congé que l’Assemblée lui avait donné pour aller aux eaux du Mont-d’Or, où il est retenu par sa mauvaise santé. « Au Mont-d’Or, ce 6 août 1791. « Monsieur le Président, « Je viens de voir, par la liste des députés absents, qu’on m’a mis dans ce nombre, sans faire mention des raisons qui m’ont obligé de m’absenter. L’Assemblée a sans doute oublié, Monsieur le Président, qu’elle m’a accordé un congé pour venir prendre les eaux du Mont-d’Or, où je suis encore retenu par le mauvais état de ma santé. Je vous prie, Monsieur le Président, de vouloir bien lui en faire l’observation, afin qu’elle se rappelle la cause de mon absence, et qu’elle n’impute point à négligence si je ne me trouve point à ses séances. Aussitôt que ma santé me le permettra, je ne manquerai pas de me rendre à mon devoir. « Je suis, avec respect, etc. « Signé : M. L., évêque de Poitiers. » (L’Assemblée décrète que cette lettre sera insérée dans le procès-verbal.) Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une adresse des volontaires de la ville d’Issoire , chef-lieu de_ district , département du Puy-de-Dôme , qui se plaignent de n’avoir point été compris, comme beaucoup d’autres départements, dans le nombre de la levée des 97,000 gardes nationaux pour la défense des frontières. (L’Assemblée décrète qu’il sera fait mention honorable de cette adresse dans le procès-verbal et en ordonne le renvoi au comité militaire.) M. le Président fait donner lecture d’une lettre des membres du tribunal de district de Carcassonne contenant copie de l’arrêté qu’ils ont pris