96 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j g 17 93 frère à ses frères et un défenseur à la liberté. « Tel est le court exposé que je porte sous vos yeux; tel est l’objet de ma démarche auprès de vous et que je soumets à la Convention nationale entière pour y faire droit. Puissé-je un moment fixer toute son attention et obte¬ nir, avant de vaincre ou de mourir pour elle, l’accomplissement de mes vœux les plus chers. « P. -J. -A. Thierrt. » La section de Mncius Scévola demande que, provisoirement, il soit pris sur l’impôt forcé que les sans-culottes de la section établissent sur les riches, en vertu de la loi, une somme de 6,000 li¬ vres qui sera employée par le comité de bienfai¬ sance à secourir les citoyens les plus infortunés. Renvoyé au comité des secours publics (1). Un pétitionnaire, admis à la barre, présente le plan d’une tontine avantageuse à la société, sur des bases solides, et utile à l’homme avancé en âge dans l’impuissance de travailler. Renvoyé au comité des finances (2). Le citoyen Joseph Lecruex, par sa lettre à la Convention nationale, demande la révision de l’arrêt du Parlement rendu contre lui le 22 jan¬ vier 1788, qui le condamne à neuf ans de galères Renvoyé au comité de législation (3). Le citoyen François Gourmond, âgé de 35 ans, sergent au 2e bataillon de Seine-et-Marne, sorti de l’hôtel des Invalides pour continuer le ser¬ vice, demande à rentrer dans le même corps et obtenir le même grade qu’il avait, ne l’ayant pas démérité, son absence de ce bataillon résultant de ses blessures. Renvoyé au ministre de la guerre (4). Lettre d’Hermann (Ehrmann), représentant du peuple près l’armée de la Moselle. Il expose à la Convention nationale que quel que soit son dé¬ vouement à la République, il lui est impossible de remplir la mission qui lui est confiée, étant alité depuis plusieurs jours et se trouvant seul, n’entendant pas non plus le langage des habi¬ tants de ces frontières qui ne parlent que l’alle¬ mand. Renvoyée au comité de Salut public (5). Suit la lettre d' Elirmann (6). Ehrmann, représentant du peuple près l’armée de la Moselle, à la Convention nationale. « Au quartier général, à Sarrebruck, le 18 brumaire, l’an II de la République française, une et indivisible. « J’apprends à l’instant, par le Bulletin du 13 brumaire, ma nomination à la nouvelle com-(1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 182. (2) Ibid. (3) Ibid. (4) Ibid. (5) Ibid. (6) Archives nationales, carton AFn 242, pla¬ quette 2074, pièce 47. Aulard s Recueil des actes et de la correspondance du comité de Salut public, t. 8, p. 301. mission de la Convention, près les armées du Rhin et de la Moselle, et le rappel de mes col¬ lègues Soubrany et Richaud. « Le comité de Salut public n’avait pas encore reçu, sans doute, la lettre de mes collègues, dans laquelle ils l’informaient qu’une fièvre bilieuse m’alite depuis plusieurs jours; Bile est la même, et absolument à l’époque où, l’année dernière, je fus très malade et où une longue et pénible convalescence me permettait à peine d’assister, quelques heures du jour à la Convention. Une extrême faiblesse me rendait presque impossible tout travail suivi. Je ne puis délibérer avec mes collègues, heureusement cela n’a pas re¬ tardé les opérations de votre commission près cette armée, Soubrany s’étant trouvé rétabli au moment où j’ai été atteint de maladie. « Quelque entier que soit mon dévouement à la République (et il est connu à la Monta¬ gne) je suis physiquement au-dessous de la mission que vous me confiez, surtout comme seul de l’ancienne commission près cette armée et dont le travail m’est d’autant plus fatigant que les habitants de ces frontières, qui ne par¬ lent que l’allemand, s’adressent à moi. « Il est du grand intérêt de la République que parmi les représentants à cette armée, un au moins y connaisse et les hommes, et les choses, et les localités. J’invite la Convention, au nom du Salut public, de laisser un de mes collègues Soubrany ou Richaud à l’armée de la Moselle ou de me rappeler. « Je signe de mon lit. « Ehrmann. » Lettre des représentants du peuple près les côtes de Brest et de Lorient. Ils adressent à la Convention nationale l’arrêté qu’ils ont pris, et qui a pour objet d’unir les matelots aux novices dans leur instruction commune, de les rendre utiles les uns aux autres, et tous à la République. Renvoyée au comité de la marine (1). Suit la lettre de Jean-Bon-Saint-André et Bréard, représentants du peuple près l’armée des Côtes de Brest et de Lorient (2). Les représentants du peuple près les ports de Brest et de Lorient, à leurs collègues, membres du comité de Salut public de la Convention nationale. « Brest, le 14e jour du 2e mois de l’an II de la République, une et indivisible. a La frégate la Concorde, citoyens collègues, a été bientôt suivie par le vaisseau YEole et la frégate la Précieuse. Ces deux derniers bâti¬ ments sont entrés avant-hier amenant avec eux un corsaire de Liverpool de 18 canons. L ’Eole est en mauvais état, quatre pompes suffisaient à peine pour étancher son eau, nous avons donné l’ordre de le faire entrer dans le bassin. Les frégates ont aussi besoin de quelques ré¬ parations. « Le contre-amiral Sercey nous a remis les copies certifiées par lui que nous vous envoyons (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 183. (2) Archives nationales, registre BB3, Marine 38, n° 410. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. I 22 brumaire an 11 Çf] ‘ ) 12 novembre 1793 ci-joint. Vous y verrez, avec autant de surprise que d’indignation, le développement de ce que nous avions dit dans notre précédente lettre sur la conduite de Genet. Le convoi a été aban¬ donné, et l’on avait des forces suffisantes pour lui composer une escorte. Ces forces consis¬ taient en deux vaisseaux de ligne, deux frégates et trois corvettes ou avisos. On a préféré de tenter une expédition romanesque, qui ne pou¬ vait avoir aucun succès, ou dont au moins les succès ne pouvaient pas être durables. On l’a tentée avec des vaisseaux qui faisaient eau, sans troupes de débarquement, à l’entrée d’une sai¬ son dure et dans des mers orageuses. Il est im¬ possible de ne pas voir dans ce plan absurde par lui-même, une perfidie profondément com¬ binée. Le résultat ne peut pas être autre que d’exciter les murmures de la part du commerce, de forcer la vente des denrées dont le convoi est chargé dans les États-Unis de l’Amérique et de priver la France de cette ressource deve¬ nue nécessaire par les circonstances. C’est du moins sous ce point de vue que nous voyons la chose, et la conduite de Genet nous paraît si coupable que nous vous engageons à l’ap¬ profondir. Les réflexions de Bompard, capitaine du Jupiter, nous ont paru très sensées. Il est fâcheux que cet officier ait à se reprocher d’a¬ voir brusquement désobéi au chef de l’escadre; mais il sera nécessaire de l’entendre, et comme nous présumons qu’il sera entré à Rocliefort, nos collègues pourront vous donner les lumières nécessaires pour asseoir votre jugement après avoir entendu les rapports contradictoires. « Nous croyons qu’il sera convenable d’en¬ gager le contre-amiral Sercey à se rendre au¬ près de vous, aussitôt qu’il aura pris quelque repos. Il vous donnera de vive voix des ren¬ seignements dont vous pourrez faire usage, soit relativement aux colonies, soit relativement à notre situation politique par rapport aux États-Unis. D’après nos conférences avec cet officier et les autres officiers de sa division, nous croyons pouvoir conclure que Genet a apporté en Amé¬ rique l’esprit tracassier et remuant de son pa¬ tron Brissot. Le peuple de ce pays est favora¬ blement disposé pour nous, mais le gouverne¬ ment l’est moins. Il eût été facile peut-être de nous l’attacher en cimentant les liens d’une exacte neutralité, bien plus utile pour nous, surtout à cause du besoin de subsistances et de munitions navales, que ne le serait une rup¬ ture avec l’Angleterre, qui compliquerait nos embarras et prolongerait la guerre au lieu d’en accélérer le terme. L’envoyé de la République a adopté un autre système, et nous ignorons d’après quelles instructions. Ce sera à vous à juger ce qu’exige en pareil cas l’intérêt public, mais il est pressant peut-être de remplacer un pareil agent par un homme dont les principes soient plus sûrs. « Sur le vaisseau VEole est arrivé un Acadien commissionné par Genet, qui était chargé d’al¬ ler répandre dans le Canada ses chansons pa¬ triotiques; nous lui donnons ordre de se rendre auprès de vous. « On nous a appris aussi qu’un secrétaire du même Genet est passé en France, probablement sur la Surveillante. Nous ignorons s’il se sera présenté à vous, dans ce cas vous aurez déjà connaissance de la plupart des faits que con¬ tient cette lettre. « Les temps continuent d’être toujours très mauvais, au point que les travaux mêmes de lre SÉRIE. T. LXXIX. la rade en sont interrompus. Nous les poussons cependant avec toute l’activité qui dépend de nous, et nous profitons de tous les intervalles pour mettre la flotte en état de partir. Des fré¬ gates auraient déjà appareillé pour aller obser¬ ver dans la Manche, et jusqu’à Torbay, les mouvements de l’ennemi, mais les vents con¬ traires les retiennent. « Nous vous remettons copie de quelques ar¬ rêtés qui font suite aux destitutions et aux remplacements que nous avons cru devoir faire ; nous vous prions de les remettre au ministre de la marine. « Vous en trouverez un autre dont l’objet est d’exciter l’émulation parmi les matelots et les novices, de manière à les intéresser à leur ins¬ truction réciproque. Il vous paraîtra sans doute utile, de le faire convertir en décret afin qu’il devienne général à toute la marine; nous en attendons de bons effets, puisqu’il tend à éta¬ blir la discipline par l’attrait du devoir et des récompenses, et non par la crainte des puni¬ tions. « Il est nécessaire que nous vous rappelions que les canons vont manquer très incessamment dans le port de Brest. Déjà il n’y a plus de pièces de quatre, et si vous ne vous hâtez de prendre des mesures pour donner à l’atelier d’Indret une très grande activité, il est à crain¬ dre que le printemps prochain vous ne soyez embarrassés pour armer tous vos vaisseaux, si même la pénurie ne se fait ressentir avant cette époque. Nous avons demandé des renseigne¬ ments sur une forge qui existe auprès de Belle-Isle-en-Terre. Nous entrevoyons qu’elle pour¬ rait nous fournir des boulets. S’il est besoin pour cela d’encouragements, nous espérons que vous nous autoriserez à en accorder, ou que vous approuverez ceux que nous aurons accor¬ dés. « Encore un mot, citoyens collègues, sur les frégates, car c’est un des premiers objets de notre sollicitude. Nous ajoutons à tout ce que nous vous avons dit à cet égard, qu’il serait convenable de profiter de l’oisiveté où sont en ce moment les chantiers et les constructeurs du commerce, pour en augmenter le nombre. On pourrait en donner à faire à l’entreprise, et nous sommes persuadés qu’un constructeur marchand s’obligerait à vous en faire une en trois mois. Il ne faut pas en ce moment chercher à mettre le luxe de la perfection dans ces bâtiments, pourvu qu’ils soient bien liés, de bon bois, ca¬ pables de porter leur artillerie, cela doit nous suffire : il faut se battre, et non briller. Mais demandez des frégates de 36 à 40 canons de 12; quant à celles de 18, dont nous vous avons parlé, si vous vous décidez à en ordonner la construction, elles exigent plus d’art, et c’est à des artistes dont les talents sont parfaitement connus, qu’il faut les remettre. Nous ne sau¬ rions trop insister pour que vous ayez égard à notre demande. « Le courrier de Paris, que nous devions re¬ cevoir hier, n’est pas encore arrivé; on fait courir ici le bruit de la prise de Rennes par les rebelles. Nous avons dépêché un courrier extraordinaire pour savoir à quoi nous en tenir. « Salut et fraternité. « Jean-Bon-Saixt-André; Bréarp. » 7