[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 juin 1790.] (Il s’élève de nouveaux murmures dans la partie droite) ; il faut donc qu’on ne sache ni pour quelle cause, ni pour quelle somme les évêques en France ont demandé et obtenu la faculté de donner des approbations ; et quand on se permet de tels murmures, on ne prévoit pas jusqu’où l’on peut être poussé. Pendant quinze siècles, il n’a point été question de l’approbation ; ce n’est qu’au seizième siècle qu’on a voulu soumettre les prêtres à des épreuves. En imposant les mains, l’évêque ordonne au prêtre de remplir ses devoirs : ces devoirs consistent à prêcher, à confesser, et on lui retient les pouvoirs nécessaires pour les remplir. Des moines mendiants avaient des privilèges pour faire toutes les fonctions du saint ministère au préjudice des légitimes pasteurs : il n’v avait d’autre moyen, pour réformer cet abus, que de rendre ces privilèges commus à tous les prêtres ; on ne le prit pas au concile de Trente. On imagina les approbations ; le texte du concile porte ces mots : Sacerdotes etiam regulares ; mais on dit qu’il y a des textes où le mot etiam ne se trouve pas. Ainsi, d’après ce concile même, les approbations ne porteraient, que sur les prêtres réguliers. En effet, c’étaient des moines qui avaient donné lieu à la disposition du concile. Ce n’est point ainsi que cette disposition a été interprétée. Le Concile de Trente n’est point en usage en France ; mais on a trouvé cette discipline commode, et l’on a voulu l’introduire dans le royaume. Quelques événements arrivés à Agen ont été le premier prétexte qu’on ait saisi pour y parvenir. Le conseil du roi décida que les ecclésiastiques ne pourraient prêcher dans un diocèse sans le consentement de l’évêque. Un autre arrêt du conseil étendit ensuite un peu cette disposition : enfin, en 1695, un édit défendit à tous les prêtres séculiers et réguliers de prêcher sans le consentement de leur évêque, auquel cette loi donnait la faculté de limiter les pouvoirs, soit pour tel lieu, soit pour tel temps et de les suspendre à volonté, sans être obligé de dire les causes de son refus, sauf l’appel comme d’abus. On voit assez combien cet édit est absurde dans ses principes et dans ses détails. Comment l’a-t-on obtenu? Il est dit, dans le procès-verbal de l’assemblée du clergé de 1695, qu’il fut accordé un subside considérable. On ne dit pas, à la vérité, que ce fut pour obtenir l’édit, mais les circonstances peuvent le faire présumer. Cet édit fut d’abord envoyé au parlement de Paris, et contre l’usage, qui était que ces envois se fissent à tous les parlements par le garde des sceaux, le procès-verbal porte que le clergé fera faire les expéditions, et qu’après l’apposition du sceau, il se chargera de faire parvenir l’édit aux parlements. Il était naturel qu’une loi ainsi achetée produisît de mauvais effets : je ne les rappellerai pas, parce qu’ils ne sont que trop connus. Elle doit être anéantie, cette loi si absurde, si contraire à la religion : il faut donc parler dans l’article proposé des prêtres incorporés dans le diocèse, et ne passe servir du mot approbation. M. l’abbé Colson. Il est incontestable que, par l’ordination, le prêtre reçoit le droit d’exercer les fonctions sacrées, mais elle ne désigne pas les sujets sur lesquels il exercera ses pouvoirs. Autrefois, l’ordination n’était donnée que pour remplir tel emploi, le prêtre avait en même temps une juridiction. En admettant l’article, il y aurait autant d’évêques que de curés : on détruirait la lr« Série. T. XVI. m hiérarchie ecclésiastique, que nous ne pouvons anéantir sans cesser d’être catholiques. M. l’abbé Grégoire. Un prêtre est ordonné ; il reçoit, par l’ordination, le pouvoir radical. Il lui faut une juridiction ; c’est le curé qui la lui donne. M. l’abbé Dlllon. Il y aurait un grand inconvénient à ce que le curé pût renvoyer son vicaire, ou le vicaire quitter son curé sans cause légitime. Je demande qu’on fasse à ce sujet un article additionnel. (Après une légère discussion, l’Assemblée décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur cette proposition.) M. l’abbé Mougms de Roquefort. Il paraîtrait nécessaire de faire un article sur les permutations, ou que du moins il fût statué sur les conditions auxquelles un curé pourrait quitter sa cure, si des raisons de santé ou des circonstances particulières la rendaient inhabitable. (Cette observation est renvoyée au comité ecclésiastique.) M. le Président met aux voix les articles 43 et 44, présentés par le comité. Us sont adoptés. M. Sacher de La Pallières, député de Cou-tances, demande et obtient un congé de quinze jours. M. le garde des sceaux envoie à l’Assemblée une note de l’acceptation ou de la sanction du roi sur les décrets de l’Assemblée. Le roi a accepté ou sanctionné : 1° Le décret de l’Assemblée nationale, du 28 mai, portant que la levée des matelots sera faite provisoirement comme par le passé; 2° Le décret du 8 de ce mois, portant que les anciens officiers municipaux de la ville de Saint-Jean-de-Luz convoqueront l’assemblée des citoyens actifs de cette ville pour la nomination d’une nouvelle municipalité ; et que les armes enlevées de l’hôtel de ville y seront incessamment restituées ; 3° Le décret du même jour, portant que per-sonpe ne pourra avoir un commandement de gardes nationales dans plus d’un département ; 4° Le décret du même jour, relatif aux piastres et sommes d’or et d’argent arrêtées à Châtillon, le 8 mars dernier; 5° Le décret du même jour, qui déclare nulle l’élection de la municipalité de Schelestadt, faite le 27 janvier et jours suivants ; ordonne qu’il sera procédé à la formation d’une nouvelle municipalité, et déclare l’emprisonnement des sieurs Ambruster et Flichs illégal et vexatoire ; 6° Le décret, des 8 et 9 de ce mois, sur la fédération générale du royaume ; 7° Et enfin Sa Majesté a donné des ordres pour l’excution du décret du 9, relatif à la conduite des grenadiers et fusiliers des régiments de Beauce, Normandie, et des canonniers-matelots du corps de la marine ; à l’exécution provisoire des anciennes ordonnances de police et militaires, et au maintien de l’harmonie et de l’union entre les différents corps qui composent la garnison de Brest. M. le garde de sceaux a fait faire dans ces trois derniers décrets les changements et addi-15